S. f. (Chasse) on se sert de ce terme pour tout ce qui sert à attraper les oiseaux, le gibier et toutes les bêtes nuisibles. Chacun en invente à sa mode. Les trapes, les traquenards, les bascules sont des pieges pour les loups et les renards ; il y a des pieges de fer qui se bandent et se lâchent pour prendre de fouines et autres animaux.

Ce mot se prend aussi au figuré. On dit le piege de la beauté ; le piege de la galanterie ; le piege du destin ; le piege de la vanité.

PIEGE, s. m. (Chasse) c'est proprement toute machine ou toute invention destinée à surprendre des animaux. Il ne se dit guère qu'au figuré, par rapport aux hommes : ce n'est pas au propre que les fripons tendent des piéges aux honnêtes gens, ni que les sots donnent dans le panneau. On verra dans les Planches relatives à la chasse, des modèles des différentes espèces de piège : on a choisi ceux que l'usage a principalement consacrés, parce que l'expérience les a fait connaître comme les meilleurs.

Il est nécessaire, pour tendre heureusement des piéges, de bien connaître l'instinct et les habitudes des animaux qu'on cherche à prendre ; cette science n'est pas fort étendue à l'égard des frugivores ; ils ne sont pas naturellement défiants, parce que les besoins ordinaires de la vie ne les forcent pas à l'exercice de l'attention. Ordinairement il suffit de bien remarquer le lieu par lequel ils passent habituellement, et d'y tendre un collet. Comme leur manière de vivre est simple, leurs habitudes sont uniformes ; ils ne soupçonnent point les embuches qu'on leur prépare, parce qu'ils ne sont jamais dans le cas d'en tendre à d'autres. Il ne faut pas non plus beaucoup d'art pour prendre les oiseaux, parce qu'ils n'ont point l'usage du nez, qui pour une partie des quadrupedes est un organe de défiance et un instrument de sûreté. On attire facilement les oiseaux frugivores avec du grain, et les carnassiers avec une proie sanglante ; on peut même sans ce secours prendre beaucoup d'oiseaux de proie, en plaçant simplement sur un poteau un petit traquenard, parce que ces oiseaux ont naturellement de l'inclination à venir se percher sur ce poteau. Mais il faut beaucoup plus d'habileté et de connaissances pour tendre avec succès des piéges aux animaux qui vivent de rapine, surtout dans les pays où l'expérience les a rendus soupçonneux, et où l'habitude de rencontrer des dangers les saisit presque continuellement d'une crainte qui Ve jusqu'à balancer leurs appétits les plus violents. Alors il est nécessaire de connaître les refuites les plus compliquées de ces animaux, de les attirer, de les affriander, et d'écarter des appâts qu'on leur présente tout soupçon de danger, ce qui souvent est assez difficile. D'abord on doit s'assurer avec beaucoup de soin des lieux qui leur servent de retraite pendant le jour, de ceux où ils vont faire leur nuit, et de l'étendue de pays qu'ils parcourent habituellement. On prend des connaissances en suivant leurs traces par le pied, et on en juge encore par leurs abattis et leurs laissées. D'après ces points donnés, on peut choisir le lieu où il convient le mieux de les attirer par quelque appât, et on doit porter jusqu'au scrupule l'attention d'examiner le vent, afin que cet appât puisse surement frapper leur nez lorsqu'ils seront sortis de leurs retraites. Le choix et la composition des appâts entrent pour quelque chose dans les connaissances d'un tendeur de piéges : il y a beaucoup de gens qui se vantent d'avoir là-dessus des secrets ; mais en général les chairs grillées, les fritures et les graisses devenues odorantes par la cuisson, font le fond et l'essentiel des appâts. Le point important est de bien connaître les ruses des animaux, et de ne manquer ni d'attention ni de vigilance. On doit bien se garder de décréditer son appât, en y joignant des piéges dès le premier jour. L'odeur du fer devient suspecte à tous les animaux expérimentés, dans les pays où le fer sert communément à leur destruction ; mais comme il est essentiel que les piéges soient couverts de terre ameublie ou de sable, afin que le sentiment en soit dérobé sans que la force du ressort en soit affoiblie, il est nécessaire de parer d'avance les places où les piéges doivent être placés. Il faut que ces places soient disposées de manière que l'animal en suivant ses allures naturelles passe dessus pour aller à l'appât qu'on lui présente ; lorsqu'il a franchi cet appareil pendant deux ou trois nuits, on peut être raisonnablement assuré qu'avec des piéges bien tendus on en sera maître. La manière dont on tend le piège doit être proportionnée à la pesanteur de l'animal qu'on cherche à prendre : pour un loup, il peut être tendu assez ferme : il faut beaucoup de légèreté pour un renard ; mais pour tous il doit être enterré de manière que l'odeur n'en perce pas, et ne puisse point distraire l'animal de l'impression que lui fait l'appât qu'il évente. On frotte les piéges pour les dégoûter, de differentes herbes aromatiques, et l'on se sert aussi de la graisse même de l'appât : tout cela est bon, mais à-peu-près inutile, lorsque d'ailleurs toutes les précautions que nous avons indiquées sont bien prises. Quelques tendeurs de piéges sont dans l'usage d'attacher leurs traquenards avec un piquet ; mais par-là on s'expose à voir l'animal au désespoir se couper le pied pour échapper à la mort. La meilleure pratique est de laisser entraîner le piège, avec lequel il ne Ve jamais fort loin ; on peut seulement l'embarrasser de quelque branche qui en retardant encore plus sa marche, ne lui fait pas perdre entièrement l'espérance de parvenir à se cacher. Voilà les principaux éléments de l'art de tendre des piéges ; mais il n'est point de préceptes en ce genre qui puissent dispenser de connaissances, qu'on n'acquiert que par l'usage et l'attention vigilante. Voyez INSTINCT, LOUP, RENARD, etc. Article de M. LEROI.