S. f. (Belles Lettres) sorte de poésie dont les vers sont disposés de manière que chacun commence par une des lettres du nom d'une personne, d'une devise, ou tout autre mot arbitraire. Voyez POEME, POESIE. Ce mot vient du Grec ἄκρος, summus, extremus, qui est à une des extrémités, et στίχος, vers.

Nos premiers Poètes François avaient tellement pris goût pour les acrostiches, qu'ils avaient tenté tous les moyens imaginables d'en multiplier les difficultés. On en trouve dont les vers non-seulement commencent, mais encore finissent par la lettre donnée ; d'autres où l'acrostiche est marquée au commencement des vers, et à l'hémistiche. Quelques-uns vont à rebours, commençant par la première lettre du dernier vers, et remontant ainsi de suite jusqu'au premier. On a même eu des sonnets pentacrostiches, c'est-à-dire, où le même acrostiche répeté jusqu'à cinq fois formait comme cinq différentes colonnes. Voyez PENTACROSTICHE.

ACROSTICHE, est aussi le nom que donnent quelques auteurs à deux épigrammes de l'Anthologie, dont l'une est en l'honneur de Bacchus, et l'autre en l'honneur d'Apollon : chacune consiste en vingt-cinq vers, dont le premier est le précis de toute la pièce ; et les vingt-quatre autres sont remplis d'épithetes commençant toutes dans chaque vers par la même lettre de l'alphabet, c'est-à-dire par A dans le second vers, par B dans le troisième, et ainsi de suite jusqu'à ; ce qui fait pour chaque dieu quatre-vingt-seize épithetes. Voyez ANTHOLOGIE.

Il y a beaucoup d'apparence qu'à la renaissance des lettres sous François I. nos poètes, qui se piquaient beaucoup d'imiter les Grecs, prirent de cette forme de poésie le dessein des acrostiches, qu'on trouve si répandus dans leurs écrits, et dans ceux des rimeurs qui les ont suivis jusqu'au règne de Louis XIV. C'était affecter d'imposer de nouvelles entraves à l'imagination déjà suffisamment resserrée par la contrainte du vers, et chercher un mérite imaginaire dans des difficultés qu'on regarde aujourd'hui, et avec raison, comme puériles.

On se servait aussi dans la cabale des lettres d'un mot pour en faire les initiales d'autant de mots différents ; et saint Jérome dit que David employa contre Semeï, un terme dont chaque lettre signifiait un nouveau terme injurieux, ce qui revient à nos acrostiches. Mém. de l'Acad. tom. IX. (G)

ACROSTICHE, s. f. en Droit, s'est dit pour cens. Voyez CENS.