Imprimer
Catégorie parente: Beaux-arts
Catégorie : Littérature
subst. m. (Belles Lettres) partie d'un poème dramatique, séparée d'une autre partie par un intermède.

Ce mot vient du Latin actus, qui dans son origine, veut dire la même chose que le δρᾶμα des Grecs ; ces deux mots venant des verbes ago et δράω, qui signifient faire et agir. Le mot δρᾶμα convient à toute une pièce de théâtre ; au lieu que celui d’actus en Latin, et d’acte en Français, a été restreint, et ne s’entend que d’une seule partie du Poème dramatique.

Pendant les intervalles qui se rencontrent entre les actes, le théâtre reste vacant, et il ne se passe aucune action sous les yeux des spectateurs ; mais on suppose qu'il s'en passe hors de la portée de leur vue quelqu'une relative à la pièce, et dont les actes suivants les informeront.

On prétend que cette division d'une pièce en plusieurs actes, n'a été introduite par les modernes, que pour donner à l'intrigue plus de probabilité, et la rendre plus intéressante : car le spectateur à qui dans l'acte précédent on a insinué quelque chose de ce qui est supposé se passer dans l'entr'acte, ne fait encore que s'en douter, et est agréablement surpris, lorsque dans l'acte suivant, il apprend les suites de l'action qui s'est passée, et dont il n'avait qu'un simple soupçon. Voyez PROBABILITE et VRAISEMBLANCE.

D'ailleurs les auteurs dramatiques ont trouvé parlà le moyen d'écarter de la scène, les parties de l'action les plus seches, les moins intéressantes, celles qui ne sont que préparatoires, et pourtant idéalement nécessaires, en les fondant, pour ainsi dire, dans les entre-actes, de sorte que l'imagination seule les offre au spectateur en gros, et même assez rapidement pour lui dérober ce qu'elles auraient de lâche ou de desagréable dans la représentation. Les poètes Grecs ne connaissaient point ces sortes de divisions ; il est vrai que l'action parait de temps en temps interrompue sur le théâtre, et que les acteurs occupés hors de la scène, ou gardant le silence, font place aux chants du chœur ; ce qui produit des intermèdes, mais non pas absolument des actes dans le goût des modernes, parce que les chants du chœur se trouvent liés d'intérêt à l'action principale avec laquelle ils ont toujours un rapport marqué. Si dans les nouvelles éditions leurs tragédies se trouvent divisées en cinq actes, c'est aux éditeurs et aux commentateurs qu'il faut attribuer ces divisions, et nullement aux originaux ; car de tous les anciens qui ont cité des passages de comédies ou de tragédies Grecques, aucun ne les a désignés par l'acte d'où ils sont tirés, et Aristote n'en fait nulle mention dans sa poétique. Il est vrai pourtant qu'ils considéraient leurs pièces comme consistant en plusieurs parties ou divisions, qu'ils appelaient protase, épitase, catastase, et catastrophe ; mais il n'y avait pas sur le théâtre d'interruptions réelles qui marquassent ces divisions. Voyez PROTASE, EPITASE, etc.

Ce sont les Romains qui les premiers ont introduit dans les pièces de théâtre cette division par actes. Donat, dans l'argument de l'Andrienne, remarque pourtant qu'il n'était pas facîle de l'apercevoir dans leurs premiers poètes dramatiques : mais du temps d'Horace l'usage en était établi ; il avait même passé en loi.

Neuve minor, neu sit quinto productior actu

Fabula, quae posci vult et spectata reponi.

Mais on n'est pas d'accord sur la nécessité de cette division, ni sur le nombre des actes : ceux qui les fixent à cinq, assignent à chacun la portion de l'action principale qui lui doit appartenir. Dans le premier, dit Vossius, Institut. Poèt. lib. II. on expose le sujet ou l'argument de la pièce, sans en annoncer le dénouement, pour ménager du plaisir au spectateur, et l'on annonce les principaux caractères : dans le second on développe l'intrigue par degrés : le troisième doit être rempli d'incidents qui forment le nœud : le quatrième prépare des ressources ou des voies au dénouement, auquel le cinquième doit être uniquement consacré.

Selon l'abbé d'Aubignac, cette division est fondée sur l'expérience ; car on a reconnu, 1°. que toute tragédie devait avoir une certaine longueur ; 2°. qu'elle devait être divisée en plusieurs parties ou actes. On a ensuite fixé la longueur de chaque acte ; il a été facîle après cela d'en déterminer le nombre. On a vu, par exemple, qu'une tragédie devait être environ de quinze ou seize cens vers partagés en plusieurs actes ; que chaque acte devait être environ de trois cens vers : on en a conclu que la tragédie devait avoir cinq actes, tant parce qu'il était nécessaire de laisser respirer le spectateur, et de ménager son attention, en ne la surchargeant pas par la représentation continue de l'action, et d'accorder au poète la facilité de soustraire aux yeux des spectateurs certaines circonstances, soit par bienséance, soit par nécessité ; ce qu'on appuie de l'exemple des poètes Latins, et des préceptes des meilleurs critiques.

Jusque-là la division d'une tragédie en actes parait fondée ; mais est-il absolument nécessaire qu'elle soit en cinq actes, ni plus ni moins ? M. l'abbé Vatry, de qui nous empruntons une partie de ces remarques, prétend qu'une pièce de théâtre pourrait être également bien distribuée en trois actes, et peut-être même en plus de cinq, tant par rapport à la longueur de la pièce, que par rapport à sa conduite. En effet, il n'est pas essentiel à une tragédie d'avoir quinze ou seize cens vers. On en trouve dans les anciens qui n'en ont que mille, et dans les modernes qui vont jusqu'à deux mille. Or dans le premier cas, trois intermèdes seraient suffisans ; et dans le second, cinq ne le seraient pas, selon le raisonnement de l'abbé d'Aubignac. La division en cinq actes est donc une règle arbitraire qu'on peut violer sans scrupule. Il peut se faire, conclut le même auteur, qu'il convienne en général que la tragédie soit en cinq actes, et qu'Horace ait eu raison d'en faire un précepte ; et il peut être vrai en même temps qu'un poète ferait mieux de mettre sa pièce en trois, quatre, ou six actes, que de filer des actes inutiles ou trop longs, embarrassés d'épisodes, ou surchargés d'incidents étrangers, etc. M. de Voltaire a déjà franchi l'ancien préjugé, en nous donnant la mort de César, qui n'est pas moins une belle tragédie, pour n'être qu'en trois actes.

Les actes se divisent en scènes, et Vossius remarque que dans les anciens un acte ne contient jamais plus de sept scènes. On sent bien qu'il ne faudrait pas trop les multiplier, afin de garder quelque proportion dans la longueur respective des actes ; mais il n'y a aucune règle fixe sur ce nombre. Voss. Inst. poèt. lib. II. Mém. de l'Acad. tom. VIII. pag. 188. et suiv.

Comme les entr'actes parmi nous sont marqués par une symphonie de violons, ou par des changements de décorations, ils l'étaient chez les anciens par une toîle qu'on baissait à la fin de l'acte, et qu'on relevait au commencement du suivant. Cette toile, selon Donat, se nommait siparium. Vossius, Instit. poèt. lib. II.




Affichages : 2660