adj. (Littérature) dans la poésie française se dit d'une manière d'écrire particulière, gaie, agréable, et tout à la fois simple et naturelle. Clément Marot, valet-de-chambre du roi François I. en a donné le modéle, et c'est de lui que ce style a tiré son nom. Ce poète a eu plusieurs imitateurs, dont les plus fameux sont la Fontaine et Rousseau.

La principale différence qui se rencontre entre le style marotique et le style burlesque, c'est que le marotique fait un choix, et que le burlesque s'accommode de tout. Le premier est le plus simple, mais cette simplicité a sa noblesse, et lorsque son siècle ne lui fournit point des expressions naturelles, il les emprunte des siècles passés. Le dernier est bas et rampant, et Ve chercher dans le langage de la populace des expressions proscrites par la décence et par le bon gout. L'un se dévoue à la nature, mais il commence par examiner si les objets qu'elle lui présente sont propres à entrer dans ses tableaux, n'y en admettant aucun qui n'apporte avec soi quelque délicatesse et quelque enjouement. L'autre donne pour ainsi dire tête baissée dans la bouffonnerie, et adopte par préférence tout ce qu'il y a de plus extravagant ou de plus ridicule. Voyez BURLESQUE.

Après des caractères si disparates et si marqués il est étonnant que des auteurs celébres tels que Balzac, Voiture, le P. Vavasseur, aient confondu ces deux genres, et il ne l'est pas moins qu'on prodigue encore tous les jours le nom de style marotique à des ouvrages écrits sur un ton qui n'en a que la plus légère apparence. Des auteurs s'imaginent avoir écrit dans le goût de Marot lorsqu'ils ont fait des vers de la même mesure que les siens, c'est-à-dire, de dix syllabes, parsemés de quelques expressions gauloises, sous prétexte qu'elles se rencontrent dans le poète, dans S. Gelais, Belleau, etc. Mais ils ne font pas attention 1°. que ce langage suranné ne saurait par lui-même prêter des grâce au style, à moins qu'il ne soit plus doux, ou plus énergique, plus vif ou plus coulant que le langage ordinaire, et que souvent dans ces poésies marotiques on emploie un mot par préférence à un autre, non parce qu'il est réellement meilleur, plus expressif, plus sonore, mais parce qu'il est vieux. 2°. Que Marot écrivait et parlait très-purement pour son siècle, et qu'il n'a point ou presque point employé d'expressions vieilles relativement à son temps ; que par conséquent si ses poésies ont charmé la cour de François I. ce n'est point par ce langage prétendu gaulois, mais par leur tour aisé et naturel. 3°. Qu'un mécanisme arbitraire, une forme extérieure ne sont point ce qui caractérise un genre de poésie, et qu'elle doit être marquée par une sorte de sceau dépendant du fonds même des sujets qu'elle embrasse et de la manière dont elle les traite. De ces trois observations il résulte que l'élégance du style marotique ne dépend ni de la structure du vers, ni du vieux jargon mêlé souvent avec affectation à la langue ordinaire, mais de la naïveté, du génie et de l'art d'assortir des idées riantes avec simplicité. Ce n'est pas que le vieux style n'ait son agrément quand on sait l'employer à propos : peut-être a-t-on appauvri notre langue sous prétexte de la polir, en en bannissant certains vieux termes fort énergiques comme l'a remarqué la Bruyere, et que c'est la faire rentrer dans son domaine que de les lui rendre, parce qu'ils sont bons et non parce qu'ils sont antiques. Des idées simples sans être communes, naïves sans être basses, des tours unis sans négligence, du feu sans hardiesse, une imitation constante de la nature, et le grand art de déguiser l'art même ; voilà ce qui fait le fonds de ce genre d'écrire, et ce qui cause en même temps la difficulté d'y réussir. Principes pour la lecture des poètes, tome I. page 56 et suiv.