S. m. (Architecture hydraulique) trou profond, fouillé au-dessous de la surface de l'eau, et revêtu de maçonnerie. Ce trou est ordinairement circulaire ; mais quand il sert à deux propriétaires dans un mur mitoyen, il est ovale, avec une languette de pierre dure, qui en fait la séparation, jusqu'à quelques pieds au-dessous de la hauteur de son appui. On le construit de pierre, ou de moilon piqué en-dedans, et en-dehors de moilon émillé, et maçonné de mortier de chaux et de sable : voici comment cette construction se fait. Lorsqu'en creusant on est parvenu à l'eau, et qu'on en a cinq à six pieds, on place dans le fond un rouet de bois de chêne de quatre pieds de diamètre, dans œuvre, et de quatre à douze pouces de grosseur. Sur ce rouet on pose cinq ou six assises de pierre de taille, maçonnées avec mortier de ciment, et bien cramponées, par des crampons de fer coulés en plomb. On élève le reste de la hauteur du puits, avec de la maçonnerie de briques ou de moilons, jusqu'à trois pouces au-dessous du rez-de-chaussée ; enfin trois assises de pierre de taille, faisant ensemble deux pieds et demi, maçonnées en mortier de ciment, et cramponées comme celles du fond, achevent le puits qu'on équipe ensuite de tout ce qui est nécessaire pour en tirer de l'eau.

Le puits dans une maison, doit être éloigné des retraits, des étables, des fumiers, et des autres lieux qui peuvent communiquer à l'eau un goût désagréable. Sa meilleure situation est dans la cour du maître du logis. Il doit être là à découvert, quelque inconvénient qu'il y ait qu'il y soit de cette façon parce que l'eau en est meilleure, les vapeurs qui montent s'évaporant plus facilement, et l'air qui y circule librement la purifiant mieux.

Puits commun, c'est un puits plus large qu'un puits particulier, et qui est situé dans une rue, ou dans une place, pour l'usage du public.

Puits de carrière, ouverture ronde de douze à quinze pieds de diamètre, creusée à plomb, par où l'on tire les pierres d'une carrière avec une roue, et dans laquelle on descend par un escalier ou rancher.

Puit décoré, puits dont le profil de l'appui est en forme de balustre ou de cuve, et qui a deux ou trois colonnes, termes ou consoles, pour porter la traverse où la poulie est attachée. Il y a un puits de cette façon du dessein de Michel Ange, dans la cour de saint Pierre, in vincoli, aux liens, à Rome.

Puits forés, c'est un puits où l'eau monte d'elle-même jusques à une certaine hauteur, de sorte qu'on n'a la peine que de puiser l'eau dans un bassin où elle se rend, sans qu'on soit obligé de la tirer ; cela est fort commode, mais on ne peut pas malheureusement faire de ces puits quand on veut. On en Ve juger par leur construction. On creuse d'abord un bassin dont le fond doit être plus bas que le niveau, auquel l'eau peut monter d'elle-même afin qu'elle s'y épanche. On perce ensuite avec des tarières un trou de trois pouces de diamètre, dans lequel on met un pilot garni de fer par les deux bouts. On enfonce ce pilot avec le mouton autant qu'il est possible, et on le perce avec une tarière de trois pouces de diamètre, et environ un pied de gouge ; c'est par ce canal que doit venir l'eau, si l'on a enfoncé le pilot dans un bon endroit ; on la conduit de-là dans le bassin avec un tuyau de plomb.

On fait ainsi des puits forés en Flandre, en Allemagne, et en Italie ; M. Bélidor, dans sa science des Ingénieurs, dit en avoir Ve un au monastère de Saint-André, à une demi-lieue d'Aire en Artais, où l'eau est si abondante qu'elle donne plus de cent tonneaux par heure. Cette eau s'élève à dix ou douze pieds au-dessus du rez-de-chaussée, et retombe dans un grand bassin par plusieurs fontaines qui font un bel effet.

En plusieurs endroits du territoire de Bologne en Italie il y a aussi des puits forés, mais on les construit différemment. On creuse jusqu'à l'eau, après quoi on fait un double revêtement dont on remplit l'entre-deux d'un corroi de glaise bien pétrie ; on continue de creuser plus avant, et de revêtir, comme dans la première opération, jusqu'à ce qu'on trouve des sources qui viennent en abondance ; alors on perce le fond avec une longue tarière, et le trou étant achevé, l'eau monte et remplit non-seulement le puits, mais se répand encore sur toute la campagne, qu'elle arrose continuellement.

Puits perdu, puits dont le fond est d'un sable si mouvant, qu'il ne retient pas son eau, et n'en a pas deux pieds en été, qui est la moindre hauteur qu'il puisse y avoir pour puiser. Daviler. (D.J.)

PUITS, dans la guerre des sièges et dans l'Artillerie, sont les enfoncements que les mineurs font en forme de puits, pour s'enterrer, autant qu'il est nécessaire, afin de chercher les galeries ou les mines de l'ennemi, pour les éventer ou pour construire des mines qui fassent fauter ses ouvrages, ses batteries, etc.

Lorsqu'on est parvenu à la troisième parallèle ou place d'armes, les mineurs s'enfoncent ou font des puits dans cette ligne d'où ils partent pour chercher les mines que l'ennemi peut avoir construit sous le chemin couvert, et pour les éventer ou les détruire par d'autres mines, etc.

Les puits sont encore des creux ou des espèces de trous qu'on pratique quelquefois devant les lignes de circonvallation pour en empêcher l'accès à l'ennemi.

On avait fait de ces puits à la circonvallation de Philipsbourg en 1734 ; ils avaient environ huit pieds de diamètre par le haut, et à-peu près quatre par le bas ; leur profondeur était de sept ou huit pieds ; ces puits étaient placés entre l'avant-fossé de la circonvallation et celui de cette ligne ; ils étaient si près les uns des autres qu'on ne pouvait guère passer entre leurs intervalles sans faire écrouler la terre et tomber dans le puits. Les Espagnols avaient fait quelque chose de semblable à la circonvallation d'Arras en 1654. Il y a beaucoup d'apparence que les Espagnols et les François doivent à César l'idée de cette espèce de fortification, qu'il employa à la défense de ses lignes devant Alesia. Voyez ses Commentaires sur la guerre des Gaules, liv. VII. Voyez aussi la seconde édition des Eléments de la guerre des siéges. (Q)

PUITS, (Marine) c'est un espace fait exprès à fond de cale, pour puiser l'eau qui entrerait dans le vaisseau avec abondance, et qu'on ne pourrait vider avec les pompes. Voyez ARCHIPOMPE.

Puits, c'est une grande profondeur qui se trouve à la mer dans un fonds uni.

PUITS, (Jardinage) est un ornement rond dont on se sert dans les plates-bandes coupées des parterres, pour y former des passages ; on s'en sert encore dans la broderie d'un tableau, pour remplir un petit espace au-dessus d'un fleuron ou d'une coquille.

PUITS DE PLOUGASTEL, (Histoire naturelle) puits singulier en France, dans la Bretagne ; il est dans la cour du passage de Plougastel, entre Brest et Landernau. L'eau de ce puits monte quand la mer qui en est fort proche descend, et au-contraire descend quand la mer monte. Cela est si fort établi dans le pays comme un prodige, que M. Robelin, mathématicien, l'a cru digne qu'il l'examinât, et il en a envoyé à l'académie des Sciences une relation avec une explication fort simple. Le fond du puits est plus haut que le niveau de la basse-mer en quelque marée que ce soit ; de-là il arrive que l'eau du puits qui peut s'écouler s'écoule, ou que le puits descend tandis que la mer commence à monter, ce qui dure jusqu'à ce qu'elle soit arrivée au niveau du fond du puits ; après cela tant que la mer continue de monter, le puits monte avec elle. Quand la mer se retire, il y a encore un temps considérable pendant lequel un reste de l'eau de la mer qui est entré dans les terres les pénètre lentement, et tombe successivement dans le puits qui monte encore, quoique la mer descende. Cette eau se filtre si bien dans les terres, qu'elle y perd sa salure. Quand elle est épuisée, le puits commence à descendre, et la mer acheve de monter. Comme ce puits qui n'a pas été creusé jusqu'à l'eau vive, et qui n'est revêtu que d'un mur de pierre seche, reçoit aussi des eaux d'une montagne voisine quand la pluie a été abondante ; il faut avoir égard aux changements que ces eaux peuvent apporter à ce qui ne dépend que de la mer. Elles l'empêchent de tarir entièrement l'hiver quand la mer est basse. Il seche quelquefois en été faute de ce secours, et parce que toute l'eau de la mer est bue par une terre trop aride. Histoire de l'acad. année 1717. (D.J.)

PUITS, (Critique sacrée) dans l'Arabie, où l'eau est très-rare, on cachait et on cache encore soigneusement les puits, en couvrant leur bouche avec du sable, afin que les voyageurs ne les voient point, et n'en tirent point d'eau. L'ange découvrit à Agar un de ces puits dans le désert, pour désaltérer son fils Ismaèl qui mourait de soif, Genèse XVIe 14. Il ne faut donc pas s'étonner s'il y avait quelquefois pour un puits de très-grandes disputes chez les juifs de la Palestine ; l'Ecriture nous en fournit un exemple, entre les gens d'Abimélec, roi de Gérare, et ceux d'Isaac.

Comme ces puits étaient très-profonds, l'Ecriture, appelle le tombeau, le puits de la mort, et l'enfer, le puits de l'abyme. C'est par la même raison que puits se prend encore pour un grand malheur. Que le puits où l'on m'a jeté ne se ferme point sur moi, dit David, Psaumes lxviij. 16. c'est-à-dire, que je ne sois point accablé par un surcrait d'afflictions. Mais comme l'eau d'un puits était fort précieuse, ce terme se prend ailleurs pour abondance de biens ; l'épouse est comparée à une source d'eaux vivantes qui découlent du Liban, puteus aquarum viventium quae fluunt de Libano, Cantiq. iv. 15. tandis que la femme étrangère cause la perte de ceux qui la recherchent ; c'est un puits étroit dont on ne peut sortir, dit Salomon, Prov. xxiij. 27. (D.J.)