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Catégorie : Musique
S. m. (Musique) en Musique s'entend en général de toute musique à deux parties ; mais aujourd'hui on a restreint le sens de ce mot à deux parties récitantes, vocales ou instrumentales, à l'exclusion des accompagnements qui ne sont comptés pour rien. Ainsi l'on appelle duo une Musique à deux voix, quoiqu'elles aient une troisième partie pour la basse continue, et d'autres pour la symphonie. En un mot pour constituer un duo, il faut deux parties principales entre lesquelles le sujet soit également distribué.

Les règles du duo, et en général de la composition à deux parties, sont les plus rigoureuses de la Musique ; on y défend plusieurs passages, plusieurs mouvements qui seraient permis à un plus grand nombre de parties ; car tel passage ou tel accord qui plait à la faveur d'un troisième ou d'un quatrième son, sans eux choquerait l'oreille. D'ailleurs on ne serait pas pardonnable de mal choisir, quand on n'a que deux sons à prendre dans chaque accord. Ces règles étaient encore bien plus sévères autrefois ; mais on s'est un peu relâché sur tout cela dans ces derniers temps, où tout le monde s'est mis à composer.

De toutes les parties de la Musique, la plus difficîle à traiter sans sortir de l'unité de mélodie, est le duo, et cet article mérite de nous arrêter un moment. L'auteur de la lettre sur Omphale a déjà remarqué que les duo sont hors de la nature ; car rien n'est moins naturel que de voir deux personnes se parler à la fois durant un certain temps, soit pour dire la même chose, soit pour se contredire, sans jamais s'écouter ni se répondre. Et quand cette supposition pourrait s'admettre en certains cas, il est bien certain que ce ne serait jamais dans la tragédie, où cette indécence n'est convenable ni à la dignité des personnages qu'on y fait parler, ni à l'éducation qu'on leur suppose. Or le meilleur moyen de sauver cette absurdité, c'est de traiter le plus qu'il est possible le duo en dialogue, et ce premier soin regarde le poète ; ce qui regarde le musicien, c'est de trouver un chant convenable au sujet, et distribué de telle sorte, que chacun des interlocuteurs parlant alternativement, toute la suite du dialogue ne forme qu'une mélodie, qui sans changer de sujet, ou du moins sans altérer le mouvement, passe dans son progrès d'une partie à l'autre, sans cesser d'être une et sans enjamber. Quand on joint ensemble les deux parties, ce qui doit se faire rarement et durer peu, il faut trouver un chant susceptible d'une marche par tierces ou par sixtes, dans lequel la seconde partie fasse son effet sans distraire l'oreille de la première. Il faut garder la dureté des dissonnances, les sons perçans et renforcés, le fortissimo de l'orchestre pour des instants de désordre et de transport, où les acteurs semblant s'oublier eux-mêmes, portent leur égarement dans l'âme de tout spectateur sensible, et lui font éprouver le pouvoir de l'harmonie sobrement ménagée. Mais ces instants doivent être rares et amenés avec art. Il faut par une musique douce et affectueuse avoir déjà disposé l'oreille et le cœur à l'émotion, pour que l'un et l'autre se prêtent à ces ébranlements violents, et il faut qu'ils passent avec la rapidité qui convient à notre faiblesse ; car quand l'agitation est trop forte, elle ne saurait durer ; et tout ce qui est au-delà de la nature ne touche plus.

En disant ce que les duo doivent être, j'ai dit précisément ce qu'ils sont dans les opéra italiens.

Mais sans insister sur les duo tragiques, genre de Musique dont on n'a pas même l'idée à Paris, je puis citer un duo comique qui y est connu de tout le monde, et je le citerai hardiment comme un modèle de chant, d'unité de mélodie, de dialogue et de gout, auquel, selon moi, rien ne manquera, quand il sera bien exécuté, s'il a des auditeurs qui sachent l'entendre, c'est celui du premier acte de la Serva Padrona, Lo conosco a quegl'occhietti, etc. Lettre sur la Musique française. (S)




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