(LA) (Géographie) lieu charmant des Provinces-Unies dans la province d'Hollande, autrefois résidence des comtes de Hollande, d'où lui vient son nom flamand de S'Gravenhagen, que l'on exprime en latin par Haga Comitum.

C'est aujourd'hui le centre du gouvernement de la république, la demeure des membres des Etats-généraux, des ambassadeurs et ministres étrangers. Quoique la Haie n'ait point encore de rang marqué parmi les villes de la Hollande, elle a par son étendue, par le nombre et la beauté de ses palais, par la dignité de ses habitants, par les prérogatives de ses magistrats, et par la magnificence de ses promenades, de quoi tenir rang entre les plus belles villes de l'Europe.

C'est d'une petite maison de chasse dans un bois où les comtes de Hollande venaient quelquefois, que s'est formé ce beau lieu ; mais l'éclat où nous le voyons aujourd'hui n'existait pas encore au treizième siècle ; il arriva seulement qu'alors Guillaume II. comte de Hollande, élu et couronné empereur en 1248, transporta de temps en temps son séjour à la Haie, où il commença le palais qui est aujourd'hui la cour. En 1291 la Haie devint le chef-lieu d'un bailliage ; avec le temps il prit le nom de village, et même en 1557, il ne passait point encore pour être une ville. Voyez Altingius et Boxhornius sur tous les autres détails.

La Haie est située à une petite lieue de la mer, à environ autant de Delft, au N. O. à trois lieues S. O. de Leyde, quatre N. O. de Rotterdam, et douze S. O. d'Amsterdam. Long. 21. 45. lat. 52. 4. 10.

Puisque la Hollande est si féconde en gens de lettres du premier ordre, il ne faut pas s'étonner que la Haie participe à cette gloire ; mais entre un grand nombre de savants dont elle est la patrie, je me contenterai de citer ici Golius,, Huygens, Meursius, Ruysch, Sallengre, et Second.

Golius, (Jacques) fut un des plus habiles hommes de son siècle dans les langues orientales ; nous lui devons deux excellents dictionnaires, l'un arabe et l'autre persan ; l'histoire des Sarrasins par Elmacin, et les éléments astronomiques d'Alsergan avec des commentaires : il voyagea tant en Asie qu'en Afrique, et mourut à Leyde en 1667 à l'âge de 71 ans.

Huygens (Chrétien), en latin Hugenius, se montra l'un des plus grands mathématiciens et des meilleurs astronomes du dix-septième siècle. Il aperçut le premier un anneau et un troisième satellite dans Saturne ; il trouva le secret de donner de la justesse aux horloges, en y appliquant un pendule, et en rendant toutes les vibrations égales par la cycloïde ; il perfectionna les télescopes, et fit un grand nombre de découvertes utiles. Il mourut dans sa patrie en 1695 à 66 ans : on peut voir son éloge dans le journal de M. de Beauval, Aout 1695 ; mais il faut le lire dans l'hist. de l'Acad. des Sciences, dont il était associé étranger. Ses ouvrages ont été recueillis, et forment trois volumes in-4 °.

Meursius (Jean) l'un des plus érudits et des plus laborieux écrivains du siècle passé, méritait bien son emploi de professeur en histoire et en langue grecque à Leyde. Il a tellement développé l'état de l'ancienne Grèce par ses divers ouvrages, insérés ensuite dans le trésor de Graevius, qu'il n'a rien laissé à glaner après lui ; voyez-en la liste étonnante dans Morery, ou dans le P. Niceron, tome XII. page 181. Il mourut de la pierre à Sora en 1639, à 60 ans ; son fils Jean (car il se nommait comme son pere) qui marchait sur ses traces, mourut à la fleur de son âge, ayant déjà publié quelques écrits très-estimés.

Ruysch (Fréderic) parait encore un homme plus rare en son genre. Les gens de l'art savent avant moi, qu'il n'y a personne au monde à qui la fine Anatomie soit plus redevable, qu'au talent supérieur de ses injections. Ses ouvrages si curieux sont entre les mains de tous ceux qui cultivent la Médecine et l'Anatomie. Il mourut à Amsterdam en 1731, comblé de gloire pour ses admirables découvertes, âgé presque de 93 ans. Le docteur Schreiber a donné sa vie, en médecin vraiment éclairé ; M. de Fontenelle a fait son éloge dans l'hist. de l'académie des Sciences, dont il était membre.

M. de Sallengre (Albert-Henri) n'avait que 30 ans, quand la petite vérole trancha ses jours en 1723 ; cependant il avait déjà publié des ouvrages pleins d'érudition. On connait son grand recueil latin d'antiquités romaines, en 3 vol. in-fol. et ses mémoires de littérature en 2 vol. in -12.

Second, (Jean) SECUNDUS, a donné des poésies latines où règnent la fécondité et l'agrément ; ses élégies et ses pièces funèbres sont touchantes ; ses sylves sont bucoliques ; ses poésies intitulées Basia, réunissent la délicatesse et la galanterie trop licencieuse. Il les aurait condamné lui-même dans un âge mûr, mais il n'y parvint pas ; il mourut tout jeune, à 25 ans, en 1536.

Je ne sais si je dois nommer à la suite des savants qu'a produit la Haie, ce monarque célèbre du dernier siècle, qu'on appelait le stathouder des Anglais, et le roi des Hollandais. Il fut, dit M. de Voltaire, simple et modeste dans ses mœurs, méprisa toutes les superstitions humaines, ne persécuta personne pour la Religion, eut les ressources d'un général et la valeur d'un soldat, devint l'âme et le chef de la moitié de l'Europe, gouverna souverainement la Hollande sans la subjuguer, acquit un royaume contre les droits de la nature, et s'y maintint sans être aimé. Il termina sa carrière en 1702, à l'âge do 52 ans. (D.J.)

HAIE (LA) Haga, Héog. petite ville de France en Touraine sur la Creuse, aux frontières du Poitou, à deux lieues de Guierche, quatre de Châtelleraut, dix de Tours, 45 S. O. de Paris ; long. 18. 20. latit. 47. 2.

Cette petite ville peut se glorifier d'avoir donné le jour à Descartes, un des plus beaux génies du siècle passé, et le plus grand mathématicien de son temps ; il résolvait des problèmes au milieu des sièges ; car il embrassa dans sa jeunesse le parti des armes, et servit avec beaucoup d'honneur en Allemagne et en Hongrie ; mais l'envie de philosopher tranquillement en liberté, lui fit chercher le repos dont il avait besoin dans la solitude de la Hollande, et qu'il aurait dû y trouver sans mélange. Ce fut au village d'Egmont sur mer, Egmont-op-zee, qu'il ouvrit la carrière d'étudier la nature, et qu'il s'y égara ; cependant ses Méditations et son discours sur la méthode, sont toujours estimés, tandis que sa physique n'a plus de sectateurs, parce qu'elle n'est pas fondée sur l'expérience. Il passa presque toute sa vie hors du royaume ; et ce ne fut qu'après bien des sollicitations, qu'il vint à Paris en 1647. Le cardinal Mazarin lui obtint du roi une pension de trois mille livres, dont il paya le brevet sans en rien toucher ; ce qui lui fit dire en riant, que jamais parchemin ne lui avait tant couté. La reine Christine le priait avec instance depuis plusieurs années de se rendre auprès d'elle, il obéit ; mais il mourut à Stockholm peu de temps après, en 1650, âgé seulement de 54 ans. Lisez dans le discours préliminaire de l'Encyclopédie, pages 25 et 26 le jugement qu'on y porte du mérite de cet homme rare. Baillet a écrit sa vie, et M. Perrault ne pouvait pas oublier son éloge dans les hommes illustres du XVIIe siècle. (D.J.)