(Géographie) petite rivière de France en Orléanais, nommée par Grégoire de Tours Ligeretus, par d'autres Ligericinus, et par plusieurs modernes Ligerulus.

Elle tire sa naissance au-dessus d'Olivet, du milieu des jardins du château de la Source (que le lord Bollingbrocke, et depuis M. Boutin receveur général des finances, ont rendu la plus charmante maison de campagne qui soit aux environs d'Orléans), et coule jusqu'au-delà du pont de Saint Mesmin, où elle se jette dans la Loire, après un cours d'environ deux lieues.

Il s'en faut beaucoup que le Loiret soit une rivière dès son origine ; elle ne mérite même le nom de rivière qu'un peu au-dessus du pont de Saint Mesmin, jusqu'à son embouchure dans la Loire, c'est-à-dire dans l'étendue seulement d'une petite demi-lieue. En effet, le bassin du Loiret dans cet espace ne contient communément d'eau courante que 500 pieds cubiques, trois fois moins qu'il n'en passe sous le pont royal à Paris, où il s'en écoule à chaque instant 2000 pieds cubiques, selon la supputation de Mariotte.

Cependant presque tous les auteurs ont parlé du Loiret, comme d'un prodige. Papyre Masson, Coulon, Léon, Tripaut, François le Maire, Guion, Daviti, Symphorien, Corneille, Peluche, et tant d'autres, nous représentent le Loiret aussi gros à sa naissance qu'à son embouchure, par tout navigable, et capable de porter bateau à sa source même.

Je n'ai rien Ve de tout cela sur les lieux, mais ce n'est pas mon témoignage que je dois donner. Il faut lire, pour s'assurer de l'exacte vérité des faits, les réflexions de M. l'abbé de Fontenu sur le Loiret, insérées dans le recueil historique de l'académie des Inscriptions, tome VI. où l'on trouvera de plus la carte détaillée du cours de cette petite rivière.

L'objet principal de l'académicien de Paris a été de rectifier et de ramener à leur juste valeur les exagérations des auteurs qui ont parlé de cette rivière, laquelle ne parait considérable que parce que ses eaux sont retenues par des digues qui les font refluer dans son bassin.

Cependant M. de Fontenu, après avoir dissipé les fausses préventions dans lesquelles on est dans tout l'Orléanais au sujet du Loiret, convient que cette petite rivière est digne des regards des amateurs de l'histoire Naturelle.

Premièrement, l'abondance des deux sources dont le Loiret tire son origine, est curieuse. On voit sortir du sein de la terre par ces deux sources, seize à dixhuit pieds cubiques d'eau, qui rendent le Loiret capable dès-lors de former un ruisseau assez considérable. La grande source du Loiret prend de si loin son essor de dessous la terre, que l'antre d'où elle s'élève est un abîme dont il n'a pas été possible jusqu'à-présent de trouver le fond, en en faisant sonder la profondeur avec 300 brasses de cordes attachées à un boulet de canon.

Cette expérience a été faite en 1583 par M. d'Entragues, gouverneur d'Orléans, au rapport de François le Maire ; et milord Bollingbrocke répéta la même tentative, je crois, en 1732, avec aussi peu de succès. Toutefais cette manière de sonder ne prouve pas absolument ici une profondeur aussi considérable qu'on l'imagine, parce que le boulet de canon peut être entrainé obliquement par l'extrême rapidité de quelque torrent qui se précipite au loin par des pentes souterraines.

Non-seulement la petite source du Loiret ne se peut pas mieux sonder, mais elle a cette singularité, que dans les grands débordements de la Loire, son eau s'élance avec un bourdonnement qu'on entend de deux ou trois cent pas : la cause vient apparemment de ce que se trouvant alors trop resserrée entre les rochers à-travers desquels elle a son cours sous terre, elle fait de grands efforts pour s'y ouvrir un passage.

Ces deux sources du Loiret annoncent dans le pays, par leurs crues inopinées, le débordement de la Loire vingt ou vingt-quatre heures avant qu'on aperçoive à Orléans aucune augmentation de cette rivière. Ces crues inopinées prouvent que les sources du Loiret tirent de fort loin leur origine de la Loire, et qu'elles ne sont qu'un dégorgement des eaux de cette rivière, qui s'étant creusé un canal très-profond, viennent en droiture se faire jour dans les jardins du château de la Source. Ces crues arrivent ici beaucoup plus tôt que la crue de la Loire devant Orléans, parce qu'elles ont plus de pente sous terre, qu'elles sont plus resserrées dans leur canal, et qu'elles viennent plus en droiture que les eaux qui coulent dans le lit de la Loire.

On vante beaucoup dans le pays les paturages des prairies du Loiret, les laitages, et les vins de ses coteaux. L'eau de cette rivière est légère, elle ne gele, dit-on, jamais, du-moins ce doit être très-rarement, parce que c'est une eau souterraine et de sources vives.

Les vapeurs épaisses qui s'élèvent du Loiret venant à se répandre sur les terres voisines, les préservent aussi de la gelée, leur servent d'engrais, et conservent la verdure des prairies d'alentour.

Enfin les eaux du Loiret sont d'un verd foncé à la vue, et celles de la Loire blanchâtres. La raison de ce phénomène procede de la différence du fond, dont l'un a beaucoup d'herbes, et l'autre n'est que du sable qu'elle charrie sans cesse dans son cours. (D.J.)