(Géographie) ancienne et fameuse ville d'Asie, capitale du petit royaume d'Israèl, après que David l'eut conquis sur les Jébuséens. Depuis ce temps-là Jérusalem éprouva bien des événements, et son histoire devint celle de la nation des Juifs ; voici les principales époques des vicissitudes de cette ville, cent fois prise, détruite, et rebâtie.

David et Salomon l'embellirent ; Sesac roi d'Egypte, Hazaèl roi de Syrie, Amasias roi d'Israèl, enlevèrent consécutivement les trésors du temple ; mais Nabuchodonosor ayant pris la ville même pour la quatrième fais, la réduisit en cendre, et emmena les Juifs captifs à Babylone. Après cette captivité, Jérusalem fut reconstruite et repeuplée de nouveau. Antiochus le Grand, ayant conquis la Célé-Syrie et la Judée, assiégea et ruina Jérusalem. Ensuite Simon Macchabée vainquit Nicanor, rétablit la ville et les sacrifices ; elle jouit d'une assez grande paix jusqu'aux démêlés d'Hircan et d'Aristobule. Pompée s'étant déclaré pour Hircan, s'empara de Jérusalem 63 ans avant J. C. et démolit ses murailles, dont Jules César permit le rétablissement 20 ans après.

A peine la Judée fut réduite en province sous l'obéissance du gouverneur de Syrie, que les Juifs se révoltèrent, et passèrent au fil de l'épée la garnison romaine ; Alors, l'empereur Titus vint en personne dans le pays, assiégea Jérusalem, l'emporta, la brula, et la réduisit en solitude, l'an 70 de l'ère chrétienne ; mais comme dit quelque part M. de Voltaire,

Jérusalem conquise, et ses murs abattus,

N'ont point éternisé le grand nom de Titus ;

Il fut aimé, voilà sa grandeur véritable.

Adrien fit bâtir une nouvelle ville de Jérusalem, près des ruines de l'ancienne, et la fit appeler Aelia Capitolina ; cependant elle reprit son ancien nom sous Constantin, et son évêque obtint le second rang des évêques de la Palestine, l'an 614 de J. C. La ville de Jérusalem fut brulée par les Perses, et son patriarche Zacharie fut emmené prisonnier avec beaucoup d'autres.

Bientôt après, les Arabes soumirent l'Asie mineure, la Perse, et la Syrie. Omar successeur de Mahomet, s'étant emparé de la contrée de la Palestine, entra victorieux dans Jérusalem, l'an 638 de J. C. Comme cette ville est une ville sainte pour les Mahométans, il l'enrichit d'une magnifique mosquée de marbre, couverte de plomb, ornée dans l'intérieur d'un nombre prodigieux de lampes d'argent, parmi lesquelles il y en avait beaucoup d'or pur. Quand ensuite, dit M. de Voltaire, les Turcs déjà Mahométans, s'emparèrent du pays, vers l'an 1055, ils respectèrent la mosquée, et la ville resta toujours peuplée de huit mille âmes : c'était tout ce que son enceinte pouvait contenir, et ce que le terroir d'alentour pouvait nourrir. Elle n'avait d'autres fonds de subsistance, que le pélérinage des Chrétiens et des Musulmants ; les uns allaient visiter la mosquée, les autres le saint-sépulchre. Tous payaient un léger tribut à l'émir turc qui résidait dans la ville, et à quelques imants, qui vivaient de la curiosité des pélerins.

Dans ces conjonctures, on vit se répandre en Europe cette opinion religieuse ou fanatique, que les lieux de la naissance et de la mort de J. C. étant prophanés par les infidèles, le seul moyen d'effacer les péchés des chrétiens, était d'exterminer ces misérables. L'Europe se trouvait pleine de gens qui aimaient la guerre, qui avaient beaucoup de crimes à expier, et qu'on leur proposait d'expier en suivant leur passion dominante : ils prirent la croix et les armes. Voyez CROISADES.

Les églises et les cloitres achetèrent à vil prix plusieurs terres des seigneurs, qui crurent n'avoir besoin que de leur courage, et d'un peu d'argent pour aller conquérir des royaumes en Asie ; Godefroy de Bouillon, par exemple, duc de Brabant, vendit sa terre de Bouillon au chapitre de Liège, et Stenay à l'évêque de Verdun. Les moindres seigneurs châtelains partirent à leurs frais, les pauvres gentils-hommes servirent d'écuyers aux autres. Cette foule de croisés se donna rendez-vous à Constantinople : moines, femmes, marchands, vivandiers, ouvriers partirent aussi, comptant ne trouver sur la route que des chrétiens, qui gagneraient des indulgences en les nourrissant.

La première expédition fut d'égorger et de piller les habitants d'une ville chrétienne en Hongrie. On s'empara de Nicée en 1097, Jérusalem fut emportée en 1099, et tout ce qui n'était pas chrétien fut massacré. Après ce carnage, les croisés dégouttants de sang, allèrent à l'endroit qu'on leur dit être le sépulchre de J. C. et y fondirent en larmes. Godefroy de Bouillon fut élu duc de Jérusalem ; mais, comme un légat nommé d'Anberto, prétendit le royaume pour lui-même, il fallut que le duc de Bouillon cédât la ville à cet évêque, et se contentât du port de Joppé.

En peu de temps, de nouveaux états divisés et subdivisés entre les mains des chrétiens, passèrent en beaucoup de mains différentes. Il s'éleva de petits seigneurs, des comtes de Joppé, des marquis de Galilée, de Sidon, d'Acre, de Césarée. Cependant la situation des croisés était si mal affermie, que Baudoin premier roi de Jérusalem, après la mort de Godefroy son frère, fut pris presque aux portes de la ville par un prince turc.

Les conquêtes des chrétiens allaient chaque jour en s'affoiblissant, tandis que Saladin s'élevait pour les leur ravir. En vain Guy de Lusignan couronné roi de Jérusalem, marcha contre Saladin, il devint son captif, et fut traité comme aujourd'hui les prisonniers de guerre le sont par les généraux les plus humains. Saladin étant entré dans Jérusalem, fit laver avec de l'eau rose la mosquée qui avait été changée en église, et fit graver sur la porte : " le roi Saladin serviteur de Dieu, mit cette inscription après que le tout-puissant eut pris Jérusalem par ses mains. " Il fonda des écoles musulmanes, et néanmoins rendit aux chrétiens orientaux l'église du saint-sépulchre.

Au bruit des victoires de Saladin toute l'Europe se troubla ; les rois suspendirent leurs querelles pour marcher au secours de l'Asie, et cependant leur armée saccagea Constantinople, au lieu d'aller reprendre Jérusalem. Saphadin frère du fameux Saladin mort à Damas, démolit en 1218, le reste des murailles de ce triste lieu.

En 1244, son territoire n'appartenait déjà plus à personne. Les Chorasmins, tous idolâtres, égorgèrent ce qu'ils trouvèrent dans ce bourg de musulmants, de chrétiens et de Juifs. De nouveaux turcs vinrent après eux ravager les côtes de Syrie, exterminérent le reste des chrétiens, et furent eux-mêmes exterminés par les Tartares. Enfin Sélim empereur des Turcs, ayant vaincu le soudan d'Egypte en 1517, se rendit maître du Caire, de l'Egypte, de la Syrie, et par conséquent de Jérusalem, qui est demeurée jusqu'à ce jour avec tout le pays qui l'environne, sous la domination du grand-seigneur.

Elkods est son nom moderne chez les Turcs, les Arabes, et les Mahométans de ces quartiers-là. Elle est à 45 lieues S. O. de Damas, 18 de la mer Méditerranée, 100 N. O. du grand Caire. Long. suivant de la Hire 58 deg. 29 min. 30 sec. suivant Street, 55 deg. 11 min. 30 sec. suivant Cassini, 52 deg. 51 min. 30 sec. Lat. suivant la Hire 31 deg. 38 min. 30. sec. suivant Street 32. 10. suivant Cassini 31. 50. (D.J.)

JERUSALEM, temple de, (Histoire sac. et proph.) autrement nommé temple de Salomon, parce que ce prince le fonda, l'acheva et le dédia avec de grandes solennités, plus de mille ans avant J. C.

Sa description est trop épineuse pour nous y engager, et les savants qui ont consumé leurs veilles à nous en donner le plan, ont eu le malheur de ne point s'accorder ensemble. Le lecteur peut s'en convaincre, s'il a le loisir de consulter, de confronter Villalpand dans ses commentaires sur Ezéchiel ; Louis Cappel dans son abrégé de l'histoire judaïque ; Constantin l'empereur, dans son ouvrage sur le traité du thalmud, intitulé Middotth ; Jean Lightfoot, dans le recueil de ses œuvres ; le P. Bernard Lami, prêtre de l'Oratoire ; dom Calmet et M. Prideaux ; voilà les plus illustres d'entre les modernes, qui ont épuisé cette matière sans beaucoup de succès.

Cependant le temple de Salomon n'était qu'une petite masse de bâtiment, qui n'avait que cent cinquante pieds de long et autant de large, en prenant tout le corps de l'édifice d'un bout à l'autre ; mais l'embarras de sa description consiste principalement dans ses décorations, ses ornements, ses portes, ses portiques, ses galeries et ses cours, dont nous pouvons d'autant moins nous faire d'idées justes, que les détails de l'Ecriture sainte, de Josephe, et du thalmud sont également confus.

Personne n'ignore les tristes catastrophes que ce temple éprouva dans le cours des siècles. Après avoir subsistésisté 424 ans, il fut ravagé et détruit par Nabuchodonosor. Zorobabel mit pendant vingt ans tous ses soins à le rebâtir, lors du retour de la captivité, et l'on en fit la dédicace sous le règne de Darius. Mais ce nouveau temple fut pillé, souillé, et prophané par Antiochus Epiphane. Ce prince recueillit un butin sacrilege 171 ans avant J. C. qui montait à dix-huit cent talents d'or. Le talent d'or chez les Hébreux valait 16 fois le talent d'argent.

Judas Macchabée ayant eu le bonheur de tirer sa patrie des mains d'Antiochus, purifia le temple 165 ans avant J. C. et les richesses y coulèrent avec tant d'abondance en moins d'un siècle, que le pillage qu'en fit Crassus, pendant qu'il fut gouverneur de Syrie, lui valut la somme de dix mille talents, c'est-à-dire, plus de deux millions sterlings, ou plus de quarante-deux millions de notre monnoye ; cet événement arriva 54 ans avant J. C.

Hérode néanmoins rebâtit de nouveau le temple même avec une grande magnificence, dont la splendeur fut de courte durée. Tout le monde sait qu'il subit le sort de Jérusalem, lorsque Titus assiégea cette ville, l'emporta, la brula, et la réduisit en cendres, l'an 70 de l'ère vulgaire. (D.J.)