(Géographie) mot latin, dont les François et les Anglais ont fait leur mot province. On entend par ce mot une étendue considérable de pays, qui fait partie d'un grand état, et dans laquelle on comprend plusieurs villes, bourgs, villages, et autres lieux sous un même gouvernement. C'est ce que les Grecs, et particulièrement Ptolémée, appellent : les Allemands ont le mot landschafft, qui veut dire la même chose, et les Italiens et les Espagnols ont conservé sans aucune altération l'ancien nom provincia.
Originairement les Romains donnèrent le nom de provinces aux contrées qu'ils avaient acquises hors de l'Italie, ou par les armes, ou par droit d'hérédité, ou par quelqu'autre voie ; ce qui a fait dire à Hégésippe, que les Romains, cum in jus suum vincendo redigèrent procùl positas regiones, appelavisse provincias. Il dit procùl positas ; car d'abord aucune contrée d'Italie n'eut le nom de province. Aussi Dion Cassius, l. LIII. p. 103. en donnant la division de l'empire romain sous Auguste, ne met point l'Italie parmi les provinces de l'empire. Cependant, sous Hadrien, l'Italie parait avoir été divisée en deux parties principales, dont l'une comprenait le pays d'au-deçà et d'au-delà du Pô, qui, avec les contrées voisines, furent sous Constantin appelées du nom de province d'Italie, dont Milan était la métropole. Les autres pays d'Italie demeuraient pendant ce temps-là sous le vicaire de la ville.
Lorsque les Romains avaient gagné quelque contrée en province, ils y envoyaient ordinairement tous les ans un homme qui, s'il avait était consul, faisait prendre à cette province le nom de consulaire, et s'il avait été préteur, lui faisait prendre celui de prétorienne. La charge de cet homme consulaire ou préteur était de gouverner la province selon les lois romaines. Il établissait son tribunal dans la principale ville, où il rendait la justice aux peuples, ce qui avait quelque rapport à ce qu'on appelle présentement en France gouvernement.
Onuphre nous apprend que sous Auguste les provinces de l'empire romain furent partagées en vingt-six diocèses, dont ce prince choisit quatorze où il se réserva d'envoyer des commandants sous le nom de recteurs ou de procureurs, et il laissa les autres à la disposition du sénat.
Sous les successeurs d'Auguste, le nombre des provinces accrut, et on les divisa en différentes manières, comme on en divise encore quelques-unes de notre temps. On les distingue en grande et petite, en première, seconde et troisième. Quelques-unes, à cause des eaux médicinales, furent nommées salutaires ; d'autres furent partagées en orientale et occidentale, en majeure et mineure, et quelques-unes prirent leur nom de leur capitale.
Les Grecs ont distingué quelques provinces, composées de montagnes et de plaines, en tracheia, en latin aspera, c'est-à-dire rude et raboteuse, et coele, qui veut dire creuse ou plaine.
On a divisé encore les provinces en citérieure et ultérieure ; et cette distinction est quelquefois causée par la situation de quelque montagne qui se trouve entre deux. Le cours d'un fleuve a quelquefois le même effet. On trouve encore chez les anciens une division de provinces en intérieure et extérieure, par rapport à la situation d'une montagne, comme par rapport au cours d'un fleuve, on divise une province en province en-deçà et province au-delà. La domination met quelquefois aussi de la distinction dans une même province, comme on a dit, le Brabant espagnol et le Brabant hollandais.
Aujourd'hui la plus commune division d'une province est en haute et basse. Le cours des rivières donne quelquefois ce nom ; mais il faut prendre garde que, quoique ces deux mots soient toujours relatifs, il y a cependant des pays qui sont appelés Pays-bas, sans que l'on en trouve qui ait le nom de haut. On trouve bien, par exemple, la basse Normandie, quoique l'autre soit appelée simplement Normandie ; on dit de même la basse Bretagne. Au contraire en Auvergne il y a seulement le mot de haute Auvergne, qui est la partie montagneuse, et l'autre partie n'est point ordinairement appelée basse. (D.J.)