S. m. (Art militaire) action de lever, d'engager, de prendre des hommes, pour servir dans les troupes de terre, ou dans les armées navales.

Les Romains faisaient leurs enrôlements avec beaucoup de précautions et de formalités. Il n'était pas permis à tous les citoyens de porter les armes ; et pour être enrôlé au service de la république, il fallait avoir certaines qualités dont on ne dispensait que dans des occasions importantes, et qui demandaient des secours prompts et extraordinaires.

Les préposés aux enrôlements faisaient un examen rigoureux des personnes qui se présentaient pour être enrôlées. (Liv. II. §. 1. ff. de re militari) Ils s'informaient d'abord de la naissance de chacun ; car il n'y avait que des hommes libres à qui il fût permis de porter les armes, et les esclaves en étaient exclus. Il fallait donc prouver sa liberté par des témoignages non suspects, et de plus il fallait établir le lieu de sa naissance.

On avait aussi beaucoup d'attention à la taille ; et tous ceux à qui elle manquait, étaient rejetés de l'honneur de servir. De-là vient que lorsqu'on voulait louer un homme, on disait qu'il avait une taille militaire ; c'est ce qui n'a pas échappé à Lampride dans son éloge de l'empereur Sévère. Cette taille militaire est marquée par une loi qui est dans le code théodosien, au titre de tyronibus ; elle nous apprend qu'alors un soldat devait avoir cinq pieds sept pouces, quinque pedibus et septem unciis usualibus.

Vegece a remarqué que du temps de Marius on n'enrôlait que des gens de cinq pieds dix pouces, parce que dans le grand nombre qui se présentait, on pouvait choisir ; mais depuis ce temps-là il fallut rabattre de cette mesure, les hommes étant devenus rares par les guerres civiles, le luxe, la débauche, et le changement de gouvernement.

Cependant l'on ne connaissait point encore ce moyen nouveau, et contraire à toutes les lois de l'humanité, d'enrôler par la force, la fraude, le stratagème, et pareilles horreurs sur lesquelles, dans quelques pays, les princes et les ministres ferment les yeux en temps de guerre. " Les hommes, dit la Bruyere, sont au souverain comme une monnaie, dont il achète une place, ou une victoire. S'il fait en sorte qu'il lui en coute moins, s'il épargne les hommes, il ressemble à celui qui marchande, et qui connait mieux qu'un autre le prix de l'argent ". Aussi tout prospere sous un tel souverain, et dans une monarchie où l'on confond les intérêts de l'état avec ceux du monarque. Or j'ajoute ici que les intérêts de l'état s'opposent à la violence et à l'artifice dans les enrôlements ; non seulement parce que de telles pratiques blessent les droits de l'humanité, mais de plus parce que la peine capitale portée contre les déserteurs, devient alors une injustice qui révolte la nature. Voyez DESERTEUR. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT.