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Catégorie : Art militaire
S. f. (Art militaire) arme offensive que portaient les anciens cavaliers, en forme d'une demi-pique.

La lance est composée de trois parties, qui sont la flèche ou le manche, les ailes, et le dard ou la pointe. Pline attribue l'invention des lances aux Etésiens. Varron et Aulugelle disent que le mot de lance est espagnol, d'où quelques auteurs concluent que les Italiens s'étaient servis de cette arme à l'imitation des Espagnols.

Diodore de Sicîle fait dériver ce mot du gaulois, et Festus du grec , qui a la même signification.

La lance fut longtemps l'arme propre des chevaliers et des gendarmes. Il n'était permis qu'aux personnes de condition libre de la porter dans les armées ; elle est appelée dans le latin lancea ; mais elle est aussi très-souvent signifiée par le mot hasta. C'est dans cette signification que Guillaume le Breton la prend en parlant des armes propres des gentilshommes,

Ut famuli quorum est gladio pugnare et hastis.

On les faisait d'ordinaire de bois de frêne, parce qu'il est roide et moins cassant. Les piques de notre temps étaient de même bois par la même raison. Dans l'énumération des armes qu'on donne à Géoffroi, duc de Normandie, que j'ai tirée de Jean, moine de Marmoutiers ; il est dit qu'entr'autres armes, on lui mit en main une lance de bois de frêne, armée d'un fer de Poitou, et Guillaume le Breton, en parlant du combat de Guillaume des Barres contre Richard d'Angleterre auprès de Mantes, dit en style poétique, que leurs boucliers furent percés par le frêne, c'est-à-dire par leurs lances de bois de frêne :

Utraque per clipeos ad corpora fraxinus ibat.

Le passage d'un autre auteur nous apprend la même chose, et en même temps que ces lances étaient fort longues. " Les lances des Français, dit-il, étaient de bois de frêne, avaient un fer fort aigu, et étaient comme de longues perches ", Hastae fraxineae in manibus eorum ferro acutissimo praefixae sunt, quasi grandes perticae. Mais depuis on les fit plus grosses et plus courtes, et je crois que ce changement se fit un peu avant Philippe de Valais, que la mode vint que les chevaliers et la gendarmerie combatissent à pied, même dans les batailles et les combats réglés.

Dans ces occasions-là même, lorsqu'ils se mettaient à pied, ils accourcissaient encore leurs lances, en les coupant par le bout du manche. Cela s'appelait retailler les lances. C'est ce que témoigne Fraissard en divers endroits de son histoire. Voici ce que dit sur cela le président Fauchet en peu de mots.

" La lance qui aussi s'appelait bois, je crois par excellence et encore glaive, et puis quand elles furent grosses, bourdons et bourdonnasses ; quand elles furent creuses, se dit Philippes de Comines, en parlant de la bataille de Fournoue, mais le même Comines témoigne qu'elles étaient creuses. Quant à la lance, elle a toujours été arme de cavalier, plus longue toutefois que celles d'aujourd'hui, comme celles des Polonais, laquelle encore que les chevaliers n'eussent point d'arrêt ferme, à cause que leurs hauberts étaient de mailles, on n'eut su où les clouer (ces arrêts) sur les mailles, les chevaliers ne laissaient pas de clouer sur l'arson de la selle de leurs chevaux, je crois bandée à l'anglaise ; mais il ne me souvient point d'avoir Ve peintes des lances qui eussent des poignées comme aujourd'hui, avant l'an 1300, ains toutes unies depuis le fer jusqu'à l'autre bout, comme javelines, lesquelles, même du temps de Fraissard, les chevaliers étant descendus à pied, rognaient pour mieux s'en aider au poussis. En ce temps-là, les chevaliers croyaient que les meilleurs fers de lances venaient de Bourdeaux.... Après l'envahie, eslais ou course du temps de Fraissard, il fallait mettre pied à terre, rogner son glaive, c'est-à-dire sa lance, et d'icelui pousser tant qu'on eut renversé son ennemi ; cependant choisissant la faute de son harnais pour le blesser et tuer. Et lors ceux qui étaient plus adroits et avaient meilleure haleine pour durer à ce poussis de lance, étaient estimés les plus experts hommes d'armes, c'est-à-dire dextres, et rusés, et experts ".

On ornait les lances d'une banderole auprès du fer, et cet ornement avait bonne grâce ; c'était une coutume très-ancienne, et dès le temps des croisades.

D'ordinaire, dans ces rudes chocs, les lances se fracassaient et sautaient en éclats. C'est pourquoi dans les tournois pour dire faire un assaut de lances, on disait rompre une lance ; ainsi le combat de cheval, quand il se faisait à la lance, ne durait qu'un moment. On la jetait après le premier choc, et on en venait à l'épée. Guillaume Guiart, en racontant la descente de S. Louis à Damiette, dit :

Après le froissis des lances,

Qui j à sont par terre semées,

Portent mains à blanches épées,

Desquelles ils s'entre-envahissent

Hiaumes, et bacinets tentissent,

Et plusieurs autres ferrures,

Coutiaux très-perçans armures.

Quand, dans le combat de deux troupes de gendarmerie l'une contre l'autre, on voyait dans l'une les lances levées, c'était un signe d'une prochaine déroute. C'est ce qu'observe d'Aubigné dans la relation de la bataille de Coutras. En effet, cela marquait que les gendarmes ne pouvaient plus faire usage de leurs lances, parce qu'ils étaient serrés de trop près par les ennemis.

L'usage des lances cessa en France beaucoup avant le temps que les compagnies d'ordonnance fussent réduites à la gendarmerie d'aujourd'hui. Et le prince Maurice l'abolit entiérement dans les armées de Hollande. Il en eut une raison particulière : c'est que les pays où il soutenait la guerre contre les Espagnols sont marécageux, coupés de canaux et de rivières, fourrés et inégaux, et qu'il fallait pour les lanciers, des pays plats et unis, où ils pussent faire un assez grand front, et courir à bride abattue sur la même ligne, dès qu'ils avaient pris carrière, c'est-à-dire dès qu'ils commençaient à piquer, ce qu'ils faisaient d'ordinaire à soixante pas de l'ennemi.

Mais il eut encore d'autres raisons qui lui furent communes avec la France. Les lanciers jusques à ce temps-là étaient presque tous gentilshommes ; et même Henri III. par son ordonnance de 1575, avait déclaré que non seulement les lanciers, mais encore les archers des ordonnances devaient être de noble race. Or les guerres civiles avaient fait périr une infinité de noblesse en France, aussi-bien que dans les Pays-bas, ce qui faisait qu'on avait peine à fournir de gentilshommes les compagnies d'ordonnance.

Secondement, il fallait que les lanciers eussent de grands chevaux de bataille très-forts, de même taille, dressés avec grand soin, et très-maniables pour tous les mouvements que demandait le combat avec la lance. Il était difficîle d'en trouver un grand nombre de cette sorte, ils coutaient beaucoup d'argent, et bien des gentilshommes n'étaient pas en état de faire cette dépense ; les guerres civiles ayant ruiné et désolé la France et les Pays-bas.

Traisiemement, le combat de la lance supposait une grande habitude pour s'en bien servir, et un exercice très-fréquent où l'on élevait les jeunes gentilshommes. L'habileté à manier cette arme s'acquérait dans les tournois et dans les académies ; les guerres civiles ne permettaient plus guère depuis longtemps l'usage des tournois ; et la jeune noblesse, pour la plupart, s'engageait dans les troupes sans avoir fait d'académie, et par conséquent n'était guère habîle à se servir de la lance. Toutes ces raisons firent qu'on abandonna la lance peu à peu, et qu'on ne s'en servait plus guère sous le règne de Henri IV. Il ne parait point par notre histoire qu'il y ait eu d'ordonnance pour abolir cet usage. Mais George Basta, fameux capitaine dans les armées de Philippe II. roi d'Espagne, et celles de l'Empire, marque expressément le retranchement des lances dans les armées françaises sous Henri IV. car il écrivait du temps de ce prince ; c'est dans l'ouvrage qu'il publia sur le gouvernement de la cavalerie légère, ou voici comme il parle : " L'introduction des cuirasses, c'est-à-dire des escadrons de cuirassiers en France, avec un total bannissement des lances, a donné occasion de discourir quelle armure serait la meilleure, &c ". C'est donc en ce temps-là que les lances furent abolies en France. Les Espagnols s'en servirent encore depuis, mais ils en avaient peu dans leurs troupes. Les Espagnols seuls, dit le duc de Rohan dans son Traité de la guerre, dédié à Louis XIII, ont encore retenu quelques compagnies de lances, qu'ils conservent plutôt par gravité que par raison : car la lance ne fait effet que par la roideur de la course du cheval, et encore il n'y a qu'un rang qui s'en puisse servir, tellement que leur ordre ne doit être de combattre en haie, ce qui ne peut résister aux escadrons ; et si elles combattaient en escadrons, elles feraient plus d'embarras que de service.

On voit par ce que je viens de dire, l'époque de l'abolition des lances en France, arme que les François avaient su manier de son temps mieux qu'aucune autre nation. On ne s'en sert plus aujourd'hui que dans les courses de bagues, et quelques semblables exercices utiles autrefois par rapport à la guerre, et qui ne sont plus maintenant que de purs divertissements. Histoire de la milice française, par le P. Daniel.

LANCE, (Histoire de la Chevalerie) du temps de l'ancienne chevalerie, le combat de la lance à course de cheval était fort en usage, et passait même pour la plus noble des joutes. Un chevalier tient ce propos à son adversaire dans le roman de Florès de Grèce : " Pendant que nous sommes à cheval, et que les lances ne nous peuvent manquer, éprouvons-nous encore quelque temps, étant comme il m'est avis, le plaisir de la course à lance, trop plus beau que le combat à l'épée ". C'est pour cette raison que la lance affranchissait l'épée, et que l'épée n'affranchissait pas la lance. On ne parlait dans les récits de joutes que de lances à outrance, lances à fer émoulu, lances courtoises, lances mousses, lances frettées et mornées ; ces dernières étaient des lances non pointues, qui avaient une frette, morne ou anneau au bout.

De cette passion qui regnait alors, de montrer à la lance sa force et son adresse, vinrent ces expressions si fréquentes dans les livres de chevalerie, faire un coup de lance, rompre des lances, briser la lance, baisser la lance. Cette dernière expression signifiait, céder la victoire, et nous le disons encore en ce sens au figuré.

Cependant tous les combats d'exercices et d'amusements à la lance, cessèrent dans ce royaume par l'accident d'un éclat de lance qu'Henri II. reçut dans l'oeil le 29 Juin 1559, en joutant contre le comte de Montgommery. On sait que ce prince en mourut onze jours après.

Enfin l'usage de la lance qui continuait à la guerre, perdit toute sa gloire à la journée de Pont-Charra, où Amédée, duc de Savoie, fut défait par Lesdiguières l'an 1591. Voyez-en les raisons dans Mezeray, tome III. p. 900. Et si vous voulez connaître les avantages et les défauts de cette ancienne arme de cavalerie, George Basta, Walhausen, et surtout Montecuculli, vous en instruiront. (D.J.)

LANCE, (Iconolog.) les anciens Sabins représentaient leur dieu Quirinus sous la forme d'une lance, parce que la lance était chez eux le symbole de la guerre. Les Romains empruntèrent de cette nation la même coutume, avant qu'ils eussent trouvé l'art de donner des figures humaines à leurs statues. Il y avait d'autres peuples, selon Justin, qui, par des raisons semblables, rendaient leur culte à une lance, et c'est de-là, dit-il, que vient l'usage de donner des lances aux statues des dieux. (D.J.)

LANCE D'EAU, (Hydraulique) voyez JET-D'EAU.

LANCE ou PIQUE, (Chirurgie) instrument de Chirurgie, pour ouvrir la tête du foetus mort et arrêté au passage. M. Mauriceau en est l'inventeur. Il est fait comme le couteau à crochet, dont nous avons parlé en son lieu, excepté que son manche n'a point de bec. Son extrémité est un fer de pique, fait en cœur, long d'un pouce et demi, fort aigu, pointu et tranchant sur les côtés. On introduit cette lance dans le vagin, à la faveur de la main gauche, et l'on perce la tête de l'enfant entre les pariétaux, s'il est possible, pour donner entrée à un autre instrument, appelé tire-tête. Voyez la fig. 2. Pl. XX. (Y)

LANCE A FEU ; (Artificier) Les lances à feu sont de gros et longs tuyaux ou canons de bois, emmanchés par le bout avec de bons bâtons bien retenus, pour soutenir la force du feu, et percés en divers endroits pour contenir les fusées ou les pétards qu'on y applique.

On s'en sert dans les feux de joie où l'on veut représenter des combats nocturnes, tant pour jeter des fusées, que pour faire une scopeterie, c'est-à-dire un bruit en l'air par plusieurs coups tirés ensemble.

Il se fait avec une feuille de grand papier à dessiner, du plus fort ; on la roule par sa largeur sur une baguette, qui est de la grosseur d'une baguette de mousquet et d'un pied et demi de long. Ce papier étant roulé, on le colle tout du long pour l'arrêter ; ensuite on fait entrer dans un des bouts de ce cartouche, environ avant d'un pouce, un morceau de bois que l'on appelle le manche, ou le pied de la lance, et qui est de son calibre, après l'avoir trempé dans la colle, afin qu'il puisse bien tenir ; l'autre bout de ce manche est plat, et percé de deux trous pour l'attacher avec des clous sur ce que l'on veut.

La composition doit être de quatre onces de salpêtre bien raffiné et mis en poudre, de deux onces de poudre et de poussier passé dans un tamis de soie bien fin, une once de soufre en fleur ; on mélange le tout ensemble, et on le passe dans un tamis de crin un peu gros après l'avoir bien remué.

On met cette composition dans une sebille de bois ; on la prend ensuite avec une carte à jouer, que l'on coupe en houlette, et l'on s'en sert pour charger la lance. A mesure que l'on charge avec cette houlette, on frappe cette charge, en y faisant entrer la baguette qui a servi à rouler le cartouche, et avec une petite palette de bois ; et lorsqu'on est au quart de la hauteur de la lance, on met de la poudre la valeur de l'amorce d'un pistolet, qu'on serre doucement avec la baguette sans frapper, et l'on continue ainsi jusqu'à quatre fois ; jusqu'à ce que la lance soit pleine jusqu'au haut ; après quoi l'on prend un peu de poudre écrasée qu'on trempe dans l'eau pour lui servir d'amorce, et on la colle ensuite avec un peu de papier. Voyez nos Pl. d'Artifice.

LANCE, (Stucateur) lance ou spatule dont se servent les sculpteurs en stuc. Voyez les Pl. du Stuc.




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