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Catégorie parente: Histoire
Catégorie : Fortification
S. m. (Fortification) est une grande masse de terre ordinairement revêtue de maçonnerie ou de gason, qu'on construit sur les angles de la figure que l'on fortifie, et même quelquefois sur les côtés lorsqu'ils sont fort longs. Sa figure est à-peu-près celle d'un pentagone ; il est composé de deux faces qui forment un angle saillant vers la campagne, et de deux flancs qui joignent les faces à l'enceinte. Voyez FACE et FLANC. Son ouverture vers la place se nomme sa gorge. Voyez GORGE et DEMI-GORGE.

Voyez Planche première de Fortification, fig. prem. le bastion F G H I L, dont G H et H I sont les faces ; G F et I L les flancs, et F K I la gorge. Voyez GORGE.

L'angle G H I formé par les faces G H et H I, est appelé l'angle flanqué du bastion ; l'angle H G F formé d'une face et d'un flanc, se nomme l'angle de l'épaule, et G F E formé d'un flanc et de la partie E F de l'enceinte, se nomme l'angle du flanc ; sa partie E F qui joint ensemble deux bastions, est appelée courtine : ainsi l'angle du flanc est formé du flanc et de la courtine.

Les parties F K et L K du prolongement des courtines E F et L M, sont appelées les demi-gorges du bastion : et l'angle F K L qu'elles font entr'elles, l'angle du centre du bastion ; la ligne K H comprise entre l'angle flanqué H, et l'angle du centre K, se nomme la capitale du bastion.

Les bastions n'ont guère commencé à être en usage que dans le temps de François premier et Charles-Quint, c'est-à-dire vers l'an 1500 ou 1520. On leur a d'abord donné le nom de boulevards, et on les a fait très-petits.

Ce qui a donné lieu à la figure du bastion, est cette maxime essentielle de la Fortification, qu'il ne doit y avoir aucune partie de l'enceinte d'une place qui ne soit vue et défendue de quelqu'autre.

Les anciens pour flanquer ou défendre toutes les parties de l'enceinte des villes, élevaient de distance en distance des tours rondes ou carrées P, P, B, B, (Planche prem. de Fortific. fig. 2.) telles qu'on en trouve encore dans les vieilles fortifications. Les parties H G, I C, de ces tours flanquaient ou défendaient les parties de l'enceinte comprises entr'elles. Il n'y avait que la partie extérieure F G des tours carrées qui n'était pas exactement défendue des flancs des tours opposées, (c'est le nom qu'on avait donné aux côtés H G et D F des tours) mais on y remédiait en faisant saillir la partie supérieure de la muraille sur celle du pied ; entre cette partie saillante ou supérieure et l'inférieure, on pratiquait des ouvertures par où le soldat découvrait le pied du mur. Ces sortes d'ouvertures en saillie se nommaient machicoulis ou massecoulis : on en trouve encore aujourd'hui dans les vieilles fortifications, et dans la plupart des anciens châteaux. Voyez REDOUTES A MACHICOULIS.

Après l'invention de la poudre, et lorsqu'on eut trouvé la manière de s'en servir pour l'attaque des places, il fallut, pour s'opposer à la violence du canon, donner plus d'épaisseur aux murs des tours et des autres parties de la fortification. Les saillies en machicoulis ne purent se conserver contre la violence de cette machine ; et par-là le côté extérieur des tours demeurait sans défense. Il restait du moins une espèce de petit triangle au pied de ce côté, moindre à la vérité dans les tours rondes que dans les carrées, mais toujours plus que suffisant pour y attacher le mineur, par où l'ennemi pouvait, sans grand obstacle de la part de l'assiégé, se procurer l'entrée de la place. C'est ce qui engagea les ingénieurs à chercher quelqu'expédient pour remédier à ce défaut. Le plus simple fut de terminer le côté extérieur des tours par deux lignes, qui formant un angle saillant vers la campagne, renfermeraient l'espace qui n'était point Ve des flancs. Cette correction est la véritable origine de la figure de nos bastions, qui, comme on le voit, n'est point arbitraire, mais fondée sur les maximes de la fortification ; et il en résulte la défense de toutes les parties de l'enceinte : car les flancs défendent les faces et la courtine, et ils se défendent aussi réciproquement.

La grandeur des angles et de toutes les parties du bastion a souffert différentes variations, suivant le temps et les idées particulières des ingénieurs, ainsi qu'on peut le voir dans le précis des instructions ou systèmes qui sont à la suite du mot FORTIFICATION. On ne peut guère fixer d'une manière absolue la valeur de toutes ces parties, parce qu'elles changent suivant les différents polygones : mais pour en donner une idée, on peut établir.

1°. Que le flanc doit avoir au moins 20 taises, et qu'il peut aller jusqu'à 30.

2°. Que la demi-gorge doit être égale aux flancs, et qu'ainsi elle peut avoir depuis 20 jusqu'à 30 taises.

3°. Que les faces doivent avoir au moins 40 taises, et au plus 60.

A l'égard des angles du bastion, l'angle flanqué peut être aigu ou obtus, pourvu que dans le premier cas il n'ait pas moins de 60 ou 70 degrés, et dans le second pas plus de 150. Sa grandeur dépend au reste de l'angle de la circonférence du polygone que l'on fortifie : lorsqu'il est un peu obtus, il donne lieu d'augmenter la gorge du bastion ; et une grande gorge est plus avantageuse qu'une petite, non-seulement parce qu'elle donne plus d'espace au bastion, mais parce qu'alors on peut y construire un retranchement plus grand et plus solide, pour disputer pied à pied à l'ennemi le terrain du bastion.

L'angle de l'épaule est celui qui mérite le moins de considération dans le bastion, parce qu'il se trouve déterminé par l'angle flanqué et celui du flanc.

Ce dernier angle exige une attention toute particulière. S'il est aigu, comme dans le système d'Errard, le flanc ne peut défendre la face du bastion opposé : s'il est droit, il la défend trop obliquement : il doit donc être un peu obtus, pour que le soldat découvre devant lui la face et le fossé du bastion qu'il doit défendre. Voyez DEFENSE.

L'angle du flanc ne doit pourtant pas être trop obtus, parce qu'alors le flanc pourrait être battu du bord du fossé opposé, et de la partie du fossé vis-à-vis l'épaule du bastion.

Il y a des bastions de plusieurs espèces ; savoir, de simples, à flancs concaves et à orillons, de vides, de pleins, de plats, etc.

Le bastion simple est celui dont les flancs sont en ligne droite.

Le bastion à flancs concaves et à orillons, est celui dont les flancs couverts sont disposés en ligne courbe, et dont l'épaule est arrondie. Voyez les constructions de M. de Vauban, à la suite du mot FORTIFICATION.

Les bastions vides sont ceux dont le rempart est mené parallèlement aux flancs et aux faces, de manière qu'il reste un vide dans le milieu du bastion : c'est dans ce vide qu'on place ordinairement les magasins à poudre. Voyez MAGASIN.

Les bastions pleins sont ceux dont toute la capacité se trouve remplie par les terres du rempart. C'est sur les bastions pleins qu'on élève des cavaliers. Voyez CAVALIER.

Les bastions pleins sont bien plus favorables que les vides pour se retrancher : le principal avantage de ces derniers est de donner plus de facilité pour aller au-devant du mineur ennemi : mais les retranchements qu'on y construit ne peuvent être excellents ; car le peu de largeur du rempart ne permet pas de les faire assez grands pour être bien soutenus ; et si on les place à la gorge, ils se trouvent commandés des logements que l'assiégeant pratique sur le rempart.

Le bastion plat est un bastion construit sur une ligne droite, et dont par conséquent les deux demi-gorges ne font point d'angle. On n'emploie ces sortes de bastions que lorsque les côtés des places se trouvent trop longs pour que les bastions des extrémités puissent se flanquer réciproquement. Ces bastions ont plusieurs inconvénients : il est difficîle de leur donner la même étendue qu'aux autres bastions ; et d'ailleurs l'ennemi peut enfiler leurs courtines d'une même batterie.

Outre les bastions dont on vient de parler, il y a encore les bastions détachés, les coupés, les réguliers, et les irréguliers, etc.

Le bastion détaché est un bastion qui est isolé à l'égard de l'enceinte : telles sont les contregardes des tours bastionnées de Landau et du Neuf-Brissac. L'avantage de ces bastions est de pouvoir être soutenus jusqu'à la dernière extrémité, parce que leur prise ne donne point d'entrée dans la place : mais ils ont aussi, comme les autres dehors, le désavantage d'avoir avec la place des communications difficiles, et par lesquelles on ne peut que défiler.

Le bastion coupé est celui dont la pointe est retranchée, et qui au lieu de cette pointe a un ou deux angles rentrants : il n'est d'usage que lorsque l'angle flanqué du bastion se trouve trop aigu, c'est-à-dire, au-dessous de 60 degrés ; ou lorsque quelqu'obstacle qu'on trouve dans le terrain ne permet pas de le terminer à l'ordinaire.

Le bastion régulier est celui qui a ses faces égales, ses flancs de même, et ses angles de l'épaule et du flanc égaux entr'eux : c'est celui qui se trouve dans les fortifications régulières.

Le bastion irrégulier a de l'inégalité dans ses faces, ses flancs, ou ses demi-gorges, de même que dans ses angles du flanc et de l'épaule : c'est ce bastion qui est le plus ordinaire, parce qu'il s'emploie dans les fortifications irrégulières, qui sont bien plus communes que les régulières. (Q)

* BASTION, se dit, en Médecine, des parties qui servent d'enveloppe et comme de rempart à d'autres : tel est le thorax, par rapport au cœur et aux poumons, et le crane, qui semble fait pour défendre le cerveau.

* BASTION DE FRANCE, (Géographie) place d'Afrique sur la côte de Barbarie, au royaume d'Alger, au nord-est de Bonne.




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