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Catégorie : Histoire moderne
S. m. (Histoire moderne) signifie proprement une personne qui entreprend un combat pour un autre, quoiqu'on applique aussi ce nom à celui qui combat pour sa propre cause. Voyez COMBAT.

Hottoman définit le champion, certator pro alio datus in duello, à campo dictus, qui circus erat, decertantibus definitus : de-là vient aussi le mot de champ de bataille.

Ducange observe que les champions dans la signification propre, étaient ceux qui se battaient pour d'autres ; lesquels étant obligés selon la coutume d'accepter le duel, avaient pourtant une excuse légitime pour s'en dispenser, comme de caducité, de jeunesse, ou d'infirmité : il ajoute que c'était le plus souvent des mercenaires qu'on louait à prix d'argent, et qui dès-lors passaient pour infames.

Quelquefois cependant le vassal, en vertu de son fief et des conditions de l'hommage, devenait champion de son seigneur, dès que ce seigneur le demandait.

Des auteurs soutiennent que toutes personnes étaient reçues à servir de champions, excepté les parricides et ceux qui étaient accusés de crimes très-odieux. Les clercs, les chanoines, les religieux, les femmes mêmes, étaient obligés de fournir des champions pour prouver leur innocence.

Cette coutume de décider les différends par un combat, est venue originairement du nord ; elle passa de-là en Allemagne, les Saxons la portèrent en Angleterre, et elle s'établit insensiblement dans le reste de l'Europe, surtout chez les nations militaires, et qui faisaient leur principale occupation des armes. Voyez DUEL.

Lorsqu'on avait choisi deux champions pour décider de la vérité ou de la fausseté d'une accusation, il fallait avant qu'ils en vinssent aux mains, qu'il intervint sentence pour autoriser le combat. Quand le juge l'avait prononcée, l'accusé jetait un gage (d'ordinaire c'était un gant) ; ce gage de bataille était relevé par l'accusateur : après quoi on les mettait l'un et l'autre sous une garde sure jusqu'au jour marqué pour le combat. Voyez GAGE et GANTELET.

Si dans l'intervalle l'un des deux prenait la fuite, il était déclaré infame, et convaincu d'avoir commis le crime qu'on lui imputait ; l'accusé, non plus que l'accusateur, n'obtenait la permission de s'en tenir-là, qu'en satisfaisant le seigneur pour la confiscation qu'il aurait dû avoir des effets du vaincu, si le combat avait eu lieu.

Avant que les champions entrassent dans la lice, on leur rasait la tête, et ils faisaient serment qu'ils croyaient que les personnes dont ils soutenaient la cause, avaient raison, et qu'ils les défendraient de toutes leurs forces. Leurs armes étaient une épée et un bouclier. Quelques-uns disent qu'en Angleterre c'était le bâton et le bouclier. Lorsque les combats se faisaient à cheval, on armait les combattants de toutes pièces ; les armes étaient bénites par un prêtre avec beaucoup de cérémonies ; chacun des combattants jurait qu'il n'avait point de charmes sur lui ; et pour s'animer, l'action commençait par des injures réciproques ; puis les champions en venaient aux mains au son des trompettes : après qu'ils s'étaient donnés le nombre de coups marqués dans le cartel, les juges du combat jetaient une baguette, pour avertir les champions que le combat était fini : s'il durait jusqu'à la nuit, ou qu'il finit avec un avantage égal des deux côtés, l'accusé était alors réputé vainqueur ; la peine du vaincu était celle que les lois portaient contre le crime dont il était question : si le crime méritait la mort, le vaincu était desarmé, trainé hors du champ, et exécuté aussi-tôt, ainsi que la partie dont il soutenait la cause : s'il avait combattu pour une femme, on la brulait. Voyez DUEL. (G) (a)

C'est un spectacle curieux, dit l'illustre auteur de l'esprit des lais, de voir ce monstrueux usage du combat judiciaire réduit en principes, et de trouver le corps d'une jurisprudence si singulière. Les hommes, dans le fond raisonnables, soumettaient à des règles leurs préjugés même. Rien n'était plus contraire au bon sens que le combat judiciaire ; mais ce point une fois posé, l'exécution s'en fit avec une certaine prudence. L'auteur célèbre que nous venons de citer, entre à ce sujet dans un détail très-curieux sur les règles de ces combats, qu'on pourrait appeler le code des homicides ; mais ce qui est encore plus précieux, ce sont les réflexions philosophiques qu'il fait sur ce sujet. La loi salique, dit-il, n'admettait point d'usage des preuves négatives, c'est-à-dire qu'elle obligeait également l'accusateur et l'accusé de prouver : aussi ne permettait-elle pas le combat judiciaire. Au contraire, la loi des Francs ripuaires admettant l'usage des preuves négatives, il semble qu'il ne restait d'autre ressource à un guerrier sur le point d'être confondu par une simple assertion ou négation, que d'offrir le combat à son adversaire pour vanger son honneur.

L'auteur cherche dans les mœurs des anciens Germains la raison de cet usage si bizarre, qui fait dépendre l'innocence du hasard d'un combat. Chez ces peuples indépendants, les familles se faisaient la guerre pour des meurtres, des vols, des injures, comme elles se la font encore chez les peuples libres du nouveau monde. On modifia cette coutume, en assujettissant cette guerre à des règles. Tacite dit que chez les Germains les nations mêmes vuidaient souvent leurs querelles par des combats singuliers.

Cette preuve par le combat avait quelque raison fondée sur l'expérience. Dans une nation uniquement guerrière, la poltronnerie suppose d'autres vices qui l'accompagnent ordinairement, comme la fourberie et la fraude.

La jurisprudence du combat judiciaire, et en général des épreuves, ne demandant pas beaucoup d'étude, fut une des causes de l'oubli des lois saliques, des lois romaines, et des lois capitulaires : elle est aussi l'origine du point d'honneur et de la fureur de notre nation pour les duels, de l'ancienne chevalerie, et de la galanterie. Voyez l'ouvrage que nous abrégeons, liv. XXVIII. ch. XIIIe et suiv. (O)

CHAMPION du Roi, (Histoire moderne d'Angleterre) chevalier qui, après le couronnement du roi d'Angleterre, entre à cheval, armé de toutes pièces, dans la salle de Westminster, jette le gant par terre, et présente un cartel à quiconque oserait nier que le nouveau prince soit légitime roi d'Angleterre.

C'est en 1377, dans la cérémonie du couronnement de Richard II. ce prince déposé dans la suite pour avoir voulu se mettre au-dessus des lais, que l'histoire d'Angleterre fait mention pour la première fois d'un champion qui alla se présenter, armé de toutes pièces, dans la salle de Westminster où le roi mangeait ; et qui ayant jeté son gantelet à terre, défia tous ceux qui voudraient disputer au roi ses justes droits sur la couronne.

On ignore l'origine de cette coutume, qui s'est conservée jusqu'à présent ; mais il est certain qu'elle est plus ancienne que le couronnement de Richard II. puisque le chevalier Jean Dimmock, qui fit alors l'office de champion, y fut admis en vertu d'un droit attaché à une terre qu'il possédait dans le comté de Lincoln, savoir le manoir de Scrivelby, qu'il avait du chef de sa femme. Voyez Rapin, tom. III. Walsingham, et Fraissard. Cet article est de M(D.J.)




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