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Catégorie parente: Histoire
Catégorie : Antiquité romaine
FETES DE, ou FÊTES MITRIAQUES, (Antiquité romaine) nom d'une fête des Romains en l'honneur de Mithra, ou du soleil. Plutarque prétend que ce furent les Pirates vaincus et dissipés par Pompée, qui firent connaître aux Romains le culte de Mithra ; mais comme ces pirates étaient des Pisidiens, des Ciliciens, des Cypriens, nations chez qui le culte de Mithra n'était point reçu, il en résulte que l'idée de Plutarque n'est qu'une vaine conjecture avancée au hasard.

Le plus ancien exemple de cette Mithra chez les Romains, se trouve sur une inscription datée du troisième consulat de Trajan, ou de l'an 101 de l'Ere chrétienne. C'est la dédicace d'un autel au Soleil sous le nom de Mithra, deo Soli Mithrae. Sur une autre inscription sans date, Mithra est l'assesseur ou le compagnon du soleil : Deo Mithra, et Soli socio. Le culte de Mithra, quoiqu'établi à Rome dès l'an 101, n'était pas encore connu en Egypte et en Syrie au temps d'Origène, mort l'an 263 de J. C. Cependant le culte de cette divinité et de ses mystères était commun à Rome depuis plus d'un siècle. On voit dans les collections de Gruter et de Reinesius plusieurs dédicaces faites à Mithra, comme Sol invictus Mithra, ou nomen invictum Mithra, etc. Et Lampride dans la vie de Commode, fait mention des mystères de Mithra, sacra Mithriaca. Commode a regné depuis l'an 180, jusqu'à l'an 192.

Ces mystères devaient même avoir déjà une certaine célébrité dans l'Occident, au temps de S. Justin, qui, dans sa seconde apologie, et dans son dialogue avec Tryphon, parle de l'antre sacré de Mithra, de ses mystères, et d'une espèce de communion que recevaient les initiés. La seconde apologie de S. Justin, fut présentée à l'empereur Antonin, l'an 142 de J. C. Tertullien qui a fleuri peu après, l'an 200 de J. C. s'étend aussi sur les mystères de Mithra, parle d'une espèce de baptème qui lavait les initiés de toutes les souillures que leur âme avait contractées jusqu'alors. Il parle encore d'une marque qu'on leur imprimait, d'une offrande de pain, et d'un embleme de la résurrection, qu'il n'explique pas en détail. Dans cette offrande, qui était accompagnée d'une certaine formule de prières, on offrait un vase d'eau avec le pain. Ailleurs Tertullien dit, qu'on présentait aux initiés une couronne soutenue sur une épée ; mais qu'on leur apprenait à la refuser en disant : c'est Mithra qui est ma couronne.

On lit sur une inscription trouvée en Carinthie, dans les ruines de Solva, aujourd'hui Solfeld, près de Clagenfurt, que le 8e des calendes de Juillet, sous le consulat de Gordien et d'Aviola, l'an 239 de J. C. on répara un ancien temple de Mithra, ruiné par le temps, vetustate colapsum. Une autre inscription, rapportée dans Gruter, fait mention d'une dédicace au même dieu, Pro salute Commodi Antonini. Commode ayant reçu de Marc-Aurele le titre de César, dans l'année 166, l'inscription qui ne lui donne pas ce titre doit être d'un temps antérieur.

Porphyre, qui vint à Rome en 263, nous apprend d'autres particularités des mystères de Mithra. Il dit que dans ces mystères, on donnait aux hommes le nom de lions, et aux femmes celui de hyenes, espèce de loup ou de renard, commun dans l'Orient. Les ministres inférieurs portaient les noms d'aigle, d'éperviers, de corbeaux, etc. et ceux d'un ordre supérieur, avaient celui de pères.

Les initiés étaient obligés de subir un grand nombre d'épreuves pénibles et douloureuses, avant que d'être mis au rang des adeptes, Nonus, Elias de Crète, et l'évêque Nicetas, détaillent ces épreuves dans les scholies sur les discours de S. Gregoire de Nazianze. Ils parlent d'un jeune très austère de 50 jours, d'une retraite de plusieurs jours dans un lieu obscur, d'un temps considérable qu'il fallait passer dans la neige et dans l'eau froide, et de quinze fustigations, dont chacune durait deux jours entiers, et qui étaient, sans doute, séparées par des intervalles nécessaires aux initiés, pour reprendre de nouvelles forces. Dès le temps de Commode, les mystères de Mithra étaient accompagnés d'épreuves, mais dont il semble que l'objet était uniquement d'éprouver le courage et la patience des initiés. Cet empereur qui aimait le sang, changea en des meurtres réels, ce qui n'était qu'un danger apparent ; sacra Mithriaca homicidio vero polluit, cùm illic aliquid ad speciem timoris vel dici vel fingi soleat, dit Lampride.

Le déguisement des ministres de Mithra, sous la forme de divers animaux féroces dont parle Porphyre, n'était pas une pratique absolument nouvelle à Rome : il se passait quelque chose d'approchant dans les mystères d'Isis. Valere Maxime et Appien disent que lors de la proscription des triumvirs, l'Edîle Volusius sachant qu'il était sur la liste de ceux dont on avait mis la tête à prix, emprunta d'un isiaque de ses amis, sa longue robe de lin, et son masque à tête de chien : on sait que les masques antiques enveloppaient la tête entière. Dans cet équipage Volusius sortit de Rome, et se rendit, par les chemins ordinaires, un sistre à la main, et demandant l'aumône sur la route : per itinera viasque publicas stipem petens, dit Valere Maxime. Si les yeux n'avaient pas été accoutumés à voir des hommes dans cet équipage, rien n'était plus propre à faire arrêter Volusius par les premiers qui l'eussent rencontré. Ce fut peut-être par le secours d'un semblable déguisement, que Mundus persuada à Pauline, qu'elle avait passé la nuit avec le dieu Sérapis.

Il semble que vers l'an 350 de J. C. c'est-à-dire, sous les enfants de Constantin, le zèle du paganisme expirant se ranima pour la célébration des fêtes Mithriaques, et de plusieurs autres inconnues dans l'ancienne religion grecque et romaine. On trouve à la vérité avant cette époque, des consécrations d'autels à Mithra marquées sur les inscriptions ; mais ce n'est qu'après Constantin qu'on commença à trouver des inscriptions qui parlent des mystères, et des fêtes Mithriaques. Le culte de Mithra fut proscrit à Rome l'an 378, et son antre sacré fut détruit cette même année, par les ordres de Gracchus, préfet du prétoire.

Nous avons dans les collections de Gruter et de M. Muratori, ainsi que dans les monumenta veteris Antii, et dans l'ouvrage de Thomas Hyde, plusieurs bas-reliefs, où l'antre sacré de Mithra est représenté. On le voit aussi sur quelques pierres gravées. Mithra en est toujours la principale figure : il est représenté sous la forme d'un jeune homme domptant un taureau, et souvent prêt à l'égorger : il est coèffé d'une tiare persienne recourbée en-devant, comme celles des rois : il tient à la main une espèce de bayonnette, que Porphyre nomme le glaive sacré d'Ariès, et qui doit être l'arme persane nommée acinacès : il est vétu d'une tunique courte avec l'anaxyride, ou la culotte persane : quelquefois il porte un petit manteau. A ses deux côtés sont deux autres figures humaines, coèffées d'une tiare semblable, mais sans manteau : ordinairement l'un tient un flambeau élevé, et l'autre un flambeau baissé. Quelquefois ces figures sont dans une attitude, que l'honnêteté ne permet pas de décrire, et par laquelle attitude il semble qu'on a voulu désigner le principe de la fécondité des êtres.

On croit communément que le culte de Mithra était chez les Romains, le même que celui du Mihz ou Mihir des Perses ; mais quand on examine de près les circonstances du culte de Mithra chez les Romains, on n'y trouve nulle ressemblance avec la doctrine et les pratiques de la religion persane. Voyez MIHIR.

Il est plus vraisemblable que les fêtes de Mithra venaient de Chaldée, et qu'elles avaient été instituées pour célebrer l'exaltation du soleil dans le signe du taureau. C'est l'opinion de M. Freret, qui a donné d'excellentes observations à ce sujet dans les mém. de littérature, tom. XIV. Ces sortes de matières sont très-curieuses ; car il est certain que les recherches savantes concernant les divers cultes du paganisme, répandent non-seulement un grand jour sur les antiquités ecclésiastiques, mais même sur la filiation de plusieurs autres cultes, qui subsistent encore dans le monde. (D.J.)




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