(Géographie moderne) ville capitale de la république de même nom, dans la Dalmatie proche la mer, à 26 lieues au nord-ouest de Scutari, avec un port défendu par un fort appelé S. Nicolas. Elle fut presqu'entièrement détruite par un tremblement de terre en 1667. On l'a rebâtie depuis, plus belle et plus grande qu'auparavant ; elle est ornée de beaux édifices, fortifiée de bons ouvrages, et munie d'une forteresse qui met son port en sûreté contre les entreprises de ses ennemis. L'évêché qui était à Epidaure (aujourd'hui Raguse la vieille), fut transféré à Raguse dans le septième siècle et érigé en archevêché dans le dixième. Long. de cette ville, 36. lat. 42. 48.

Raguse a été autrefois connue sous les noms d'Hybla minima, d'Hera, ou d'Heraea, d'où l'on a lieu de conjecturer que les monts Hérées de Diodore de Sicîle et de Vibius Sequester, sont ceux qu'on trouve près de Raguse. Fazellus et Cluvier se sont persuadés par enthousiasme, que c'étaient les Monti-Sori.

Tout le monde sçait que Raguse est une très-petite république, située sur les côtes de la mer Adriatique ; sa faiblesse l'oblige de ménager toutes les puissances, et même d'acheter du sultan des Turcs, par une espèce de tribut, une protection qui la met à couvert des courses des Dulcignotes : ce sont des pirates qui désolent les côtes du golfe adriatique, comme les corsaires de Barbarie désolent celles de la Méditerranée.

Les habitants de Raguse sont riches, parce qu'ils font tous le commerce ; ils se gouvernent à-peu-près comme à Venise, mais conformément à leur petit état. Le grand conseil est composé des nobles qu'on y reçoit à l'âge de vingt-quatre ans ; un noble ne saurait découcher sans en avoir donné avis au sénat. Les étrangers qui se trouvent dans la ville, y sont enfermés à clef durant la nuit : les portes se ferment au coucher du soleil et s'ouvrent à son lever.

Le chef de la république de Raguse qu'on nomme recteur, change tous les mois ; les autres officiers toutes les semaines ; le gouverneur du château tous les jours. Cette forme d'administration ne peut être excusée que dans une petite république environnée de puissances formidables, qui corrompraient aisément de petits magistrats : car, comme le dit M. de Montesquieu, quoiqu'il soit vrai que dans toute magistrature il faille compenser la grandeur de la puissance par la briéveté de sa durée, cependant il ne faut pas si fort diminuer cette briéveté, qu'elle en devienne une cause de corruption. Qui est-ce qui voudrait gouverner ainsi ses affaires domestiques ?

Banduri (D. Anselme) bénédictin, a fait honneur à Raguse sa patrie. On lui doit une espèce de corps complet des antiquités de Constantinople ; il en composa deux volumes in-folio, qui parurent à Paris en 1711, sous le titre d'Imperium orientale. Il y ajouta, outre divers plans topographiques, deux cartes relatives à l'état de l'empire de Constantinople, sous Constantin Porphyrogenète, dressées toutes les deux par Guillaume Delisle, et le bas relief de la colonne historiée de Théodose, gravé d'après les desseins originaux de Gentîle Bellini, qui sont conservés dans le cabinet de l'académie de peinture et de sculpture.

On doit encore à D. Anselme une collection de toutes les médailles des empereurs romains, depuis Trajan Dece jusqu'au dernier Paléologue, c'est-à-dire jusqu'à la prise de Constantinople. L'ouvrage parut à Paris en 1718 ; il est dédié à M. le Duc d'Orléans, et forme deux volumes in-fol. L'auteur a mis à la tête de ce recueil, sous le titre de Bibliotheca nummaria, un catalogue ample, raisonné et très-bien fait, de tous les ouvrages qui ont quelque rapport à la connaissance des médailles.

D. Anselme avait été nommé en 1715 de l'académie des inscriptions. Il mourut à Paris en 1743, âgé de 72 ou 73 ans.

Hodierna (Jean-Baptiste) naquit aussi à Raguse en 1597, et mourut à Palerme en 1660, à 63 ans. Il était versé dans l'astronomie, comme il parait par quelques ouvrages qu'il a publiés en ce genre. (D.J.)