(Géographie moderne) bourg d'Angleterre, dans Berkshire, sur la Tamise, à vingt - cinq milles de Londres. Ce bourg nommé anciennement Windleshore, a droit de marché, députe au parlement, et est remarquable par la maison de plaisance des rois de la grande - Bretagne, dont nous parlerons dans l'article suivant. (D.J.)

WINDSOR, (Géographie moderne) maison de plaisance des rois de la grande-Bretagne, en Berkshire, sur la Tamise. Elle prend son nom du bourg de Windsor, où elle est située, et où les rois d'Angleterre ont toujours eu leur château depuis Guillaume le conquerant.

Edouard III. voulant ériger un superbe monument de ses victoires sur Jean, roi de France, et David, roi d'Ecosse, fit démolir l'ancien palais de Windsor, pour en élever un nouveau plus superbe. Wickam (Guillaume) profondément versé dans l'architecture, ayant été chargé de ce soin, s'en acquitta glorieusement, et n'y employa que trois années ; il mit sur ce palais l'inscription suivante : this made Wickam ; comme les paroles de cette inscription sont équivoques, et qu'elles signifient également Wickam a fait ceci, ou ceci a fait Wickam, ses ennemis donnèrent un tour malin à l'inscription, et firent entendre à Edouard, que l'intendant de cet édifice s'en attribuait insolemment toute la gloire. Le roi irrité reprocha cette audace à Wickam, qui lui répondit d'un air gai, que ses délateurs étaient bien odieux, ou bien ignorants dans la langue anglaise, puisque le vrai sens de l'inscription qu'il avait mise exprès à la gloire de son roi, voulait dire ceci, ce palais m'a procuré les bontés de mon prince, et m'a fait ce que je suis. Edouard se mit à rire, et la délation des envieux de Wickam ne servit qu'à l'augmentation de son crédit. Edouard le fit son premier secrétaire, garde du sceau privé, évêque de Winchester, et grand chancelier du royaume.

La reine Elisabeth et Charles II. ont embelli le château de Windsor, qui passe aujourd'hui pour la plus belle maison royale qu'il y ait en Angleterre ; cependant ce château n'a ni jardins, ni fontaines, ni avenues, et son unique ornement extérieur se réduit à un grand parc rempli de bêtes fauves ; mais on jouit dans ce château d'une vue ravissante, qui s'étend de tous côtés sur une belle campagne, où l'oeil découvre à perte de vue le cours de la Tamise, des champs couverts d'épics, des prairies émaillées de fleurs, et des collines ombragées de forêts ; de sorte que ce palais est un des plus beaux séjours qu'on puisse trouver. Pavillon dit qu'il a été bâti et embelli par les Fées, pour la demeure ordinaire des Graces, et la retraite des plus tendres Amours ; plus beau sans comparaison que la gloire de Niquée ; que quant aux dehors ils sont faits, comme il plait à Dieu, qui en sait bien plus que M. le Nostre ; il ajoute :

La nature, en ce lieu, de mille attraits pourvue,

Pour se faire admirer,

Semble tout exprès se parer

En s'exposant à notre vue.

Incessamment le ciel y rit,

Et la terre qu'il embellit

D'un verd qui peint ses prés, ses coteaux, ses bocages,

Tout vous enchante ; et l'art humain,

Respectant de si beaux ouvrages,

N'ose pas y mettre la main.

Edouard III. naquit dans ce beau château, en 1312. Sa vie et ses exploits sont connus de tout le monde ; on sait que c'est l'un des plus grands et des plus célèbres rois d'Angleterre. Il fut modeste dans ses victoires, et ferme dans ses traverses. Etroitement uni avec son parlement, il donna d'excellents statuts pour le bonheur de sa nation ; enfin la gloire du prince de Galles son fils concourut à jeter un nouveau lustre sur la sienne ; c'est dommage qu'il ait terni ce lustre en rompant par pure ambition la glorieuse paix qu'il avait faite avec le roi d'Ecosse. Je ne lui reproche point la passion qu'il prit sur ses vieux jours pour la belle Alix Pierce ; n'ayant pas connu l'amour dans sa jeunesse, il n'eut pas assez de force pour s'en défendre dans un âge avancé. Il mourut en 1377, à 65 ans, après avoir joui d'un si grand bonheur jusqu'à l'an 1369, qu'à peine dans l'histoire trouverait - on des exemples d'un règne si fortuné. Mais depuis ce temps - là, le sort se lassa de le favoriser, et le dépouilla de ses illustres conquêtes ; cependant l'Angleterre se dédommagea sous son règne, avec usure, des trésors que lui coutèrent les entreprises de son monarque : elle vendit ses laines, étendit son commerce, et forma des manufactures qu'elle ne connaissait point auparavant.

Un autre roi d'Angleterre né à Windsor, est Henri VI. appelé communément Henri de Windsor. Il ne ressembla point à son illustre père Henri V. auquel il succéda, en 1422. On trouve dans sa vie une inaction naturelle au bien comme au mal ; aussi fut - il le jouet perpétuel de la fortune. Au bout d'un règne de 38 ans, Edouard IV. le déposséda du trône, et neuf ans après, le comte de Warwick, que l'on appelait le faiseur de rais, en débusqua celui-ci pour y rétablir Henri VI. Enfin sept mois étaient à peine écoulés, qu'Edouard rentra triomphant dans Londres, remonta sur le trône, et renferma Henri dans la tour, où il fut égorgé par le duc de Glocester, en 1471, à 52 ans.

Il y a deux chapelles à Windsor, l'une neuve, au bout de la galerie du château, et l'autre vieille, beaucoup plus belle, où les rois tiennent le chapitre de l'ordre de la jarretière. Cette vieille chapelle est encore mémorable, pour avoir servi de sépulture à Edouard IV. à Henri VIII. et à Charles I.

Edouard IV. fils de Richard duc d'Yorck, disputa la couronne au malheureux Henri VI. qui était de la maison de Lancastre, remonta sur le trône, et le garda jusqu'à la mort. Ce qu'il y a de plus étonnant dans la vie de ce prince, c'est son bonheur, qui semble tenir du prodige ; il fut élevé sur le trône après deux batailles perdues, l'une par le duc d'Yorck son père, l'autre par le comte de Warwick. La tête du père était encore sanglante sur la muraille d'Yorck, lorsqu'on proclamait le fils à Londres. Il échappa, comme par miracle, de la prison de Médelham. Il fut reçu dans la capitale à bras ouverts à son retour de Hollande, avant que d'avoir vaincu, et pendant que son sort dépendait de celui d'un combat que le comte de Warwick allait lui livrer. Enfin après avoir été victorieux dans toutes les batailles où il se trouva, il mourut en 1483, âgé de 42 ans.

Lorsque ce prince gagna la couronne, c'était un des hommes des mieux faits de l'Europe. Philippe de Comines assure, qu'il fut redevable du trône à l'inclination que les principales dames de Londres avaient pour lui ; mais ç'aurait été peu de chose s'il n'eut pas eu en même temps l'affection de leurs maris, et en général celle de la plupart des Anglais ; cependant on a raison de lui reprocher son libertinage, et ce qui est bien pis, sa cruauté et ses parjures. Il fit périr sur l'échafaud plusieurs grands seigneurs qu'il avait pris dans des batailles. Il est coupable de la mort du duc de Clarence son propre frère, de celle d'Henri VI. et du prince de Galles ; enfin la mauvaise foi de ce roi parut dans l'injuste supplice du comte de Wells qu'il tira de son asîle par un sauf-conduit, et dans celui du bâtard de Falconbridge, après lui avoir pardonné son crime.

Henri VIII. fils et successeur d'Henri VII. en 1509, âgé de 18 ans, avait pris du goût pour l'étude dans sa première jeunesse. Il était libéral, adroit, ouvert, et brave. Il défit les François à la bataille des Eperons, en 1513, et prit Térouanne et Tournay. De retour en Angleterre, il marcha contre les Ecossais, et les vainquit à la bataille de Floden, où Jacques IV. leur roi fut tué.

Voluptueux, fougueux, capricieux, cruel, et surtout opiniâtre dans ses désirs, il ne laisse pas que d'avoir sa place entre les rois célèbres, et par la révolution qu'il fit dans les esprits de ses peuples, et par la balance que l'Angleterre apprit sous lui à tenir entre les souverains. Il prit pour devise un guerrier tendant son arc, avec ces mots, qui je défends est maître, devise que sa nation a rendu quelquefois véritable, surtout depuis son règne.

Amoureux d'Anne de Boulen, il se proposa de l'épouser, et de faire un divorce avec sa femme Catherine. Il sollicita par son argent les universités de l'Europe d'être favorables à son amour. Muni des approbations théologiques qu'il avait achetées, pressé par sa maîtresse, lassé des subterfuges du pape, soutenu de son clergé, maître de son parlement, et de plus encouragé par François I. il fit casser son mariage, en 1533, par une sentence de Cranmer, archevêque de Cantorbery.

Le pape Clément VII. enorgueilli des prérogatives du saint siege, et fortement animé par Charles-Quint, s'avisa de fulminer contre Henri VIII. une bulle, par laquelle il perdit le royaume d'Angleterre. Henri se fit déclarer par son clergé chef suprême de l'église anglaise. Le parlement lui confirma ce titre, et abolit toute l'autorité du pape, ses annates, son denier de saint Pierre, et les provisions de bénéfices. La volonté d'Henri VIII. fit toutes les lois, et Londres fut tranquille, tant ce prince terrible trouva l'art de se rendre absolu. Tyran dans le gouvernement, dans la religion, et dans sa famille, il mourut tranquillement dans son lit, en 1547, à 57 ans, après en avoir regné 37.

On vit dans sa dernière maladie, dit M. de Voltaire, un effet singulier du pouvoir qu'ont les lois en Angleterre, jusqu'à ce qu'elles soient abrogées ; et combien on s'est tenu dans tous les temps à la lettre plutôt qu'à l'esprit de ces lois. Personne n'osait avertir Henri de sa fin prochaine, parce qu'il avait fait statuer, quelques années auparavant par le parlement, que c'était un crime de haute - trahison de prédire la mort du souverain. Cette loi, aussi cruelle qu'inepte, ne pouvait être fondée sur les troubles que la succession entraînerait, puisque cette succession était réglée en faveur du prince Edouard : elle n'était que le fruit de la tyrannie de Henri VIII. de sa crainte de la mort, et de l'opinion où les peuples étaient encore, qu'il y a un art de connaître l'avenir.

La grosseur des doigts de ce prince était devenue si considérable, quelque temps avant son décès, qu'il ne put signer l'arrêt de mort contre le duc de Norsolck ; par bonheur pour ce duc, le roi mourut la nuit qui précéda le jour qu'il devait avoir la tête tranchée ; et le conseil ne jugea pas à-propos de procéder à l'exécution d'un des plus grands seigneurs du royaume.

Henri VIII. avait eu six femmes ; Catherine d'Aragon, répudiée ; Anne de Boulen, décapitée ; Jeanne Seymour, morte en couches ; Anne de Clèves, répudiée, Catherine Howard, décapitée ; et Catherine Pare, qui épousa Thomas Seymour, grand-amiral. François I. lui fit faire un service à Notre Dame, suivant l'usage, dit M. de Thou, établi par les rais, quoi qu'il fût mort séparé de l'église.

Je trouve qu'il s'est passé sous le règne d'Henri VIII. plusieurs événements qui méritaient d'entrer dans l'histoire de M. Rapin : j'en citerai quelques-uns pour exemples.

En 1527, le roi étant à la chasse de l'oiseau, et voulant sauter un fossé avec une perche, tomba sur la tête, et si un de ses valets - de - pied, nommé Edmond Moody, n'était accouru, et ne lui avait pas levé la tête qui tenait ferme dans l'argile, il y aurait étouffé.

La 24e année du règne de ce prince, on bâtit son palais de Saint-James. Dans la 25e, on institua la présidence pour le gouvernement du nord d'Angleterre. Dans la 28e, le pays de Galles, qui avait été province de la nation anglaise, devint un membre de la monarchie, et fut soumis aux mêmes lois fondamentales.

L'an 30 de ce règne, l'invention de jeter en fonte des tuyaux de plomb pour la conduite des eaux, fut trouvée par Robert Brook, un des aumôniers du roi ; Robert Cooper, orfèvre, en fit les instruments, et mit cette invention en pratique. L'an 25 du même règne, les premières pièces de fer fondu qu'on ait jamais fait en Angleterre, furent faites à Backstead, dans le comté de Sussex, par Rodolphe Paye, et Pierre Baude.

Sur la fin de ce règne, on supprima les lieux publics de débauches, qui avaient été permis par l'état. C'était un rang entier de maisons tout le long de la Tamise, au fauxbourg de Southwarck, au nombre de seize, distinguées par des enseignes. Sous le règne de Henri II. on avait fait au sujet de ces maisons divers règlements de police, qu'on peut voir dans la description de Londres par Stow. Cambden croit qu'on nommait ces maisons stews, à cause des viviers qui en étaient proche, où l'on nourrissait des brochets et des tanches.

Le corps de Henri VIII. est enseveli à Windsor, sous un tombeau magnifique de cuivre doré, mais qui n'est pas encore fini.

Charles I. (dit M. Hume, dont je vais emprunter le pinceau), était de belle figure, d'une physionomie douce, mais mélancolique. Il avait le teint beau, le corps sain, bien proportionné, et la taille de grandeur moyenne. Il était capable de supporter la fatigue, excellait à monter à cheval, et dans tous les autres exercices. On convient qu'il était mari tendre, père indulgent, maître facile, en un mot, digne d'amour et de respect. A ces qualités domestiques, il en joignait d'autres qui auraient fait honneur à tout particulier. Il avait reçu de la nature du goût pour les beaux arts, et celui de la peinture faisait sa passion favorite.

Son caractère, comme celui de la plupart des hommes, était mêlé ; mais ses vertus l'emportaient sur ses vices, ou pour mieux dire sur ses imperfections ; car parmi ses fautes, on en trouverait peu qui méritassent justement le nom de vice.

Ceux qui l'envisagent en qualité de monarque, et sous le point de vue le plus favorable, assurent que sa dignité était sans orgueil, sa douceur sans faiblesse, sa bravoure sans témérité, sa tempérance sans austérité, son économie sans avarice. Ceux qui veulent lui rendre une justice plus sévère, prétendent que plusieurs de ses bonnes qualités étaient accompagnées de quelque défaut, qui leur faisait perdre toute la force naturelle de leur influence. Son inclination bienfaisante était obscurcie par des manières peu gracieuses ; sa piété avait une bonne teinture de superstition. Il déférait trop aux personnes de médiocre capacité, et sa modération le garantissait rarement des résolutions brusques et précipitées. Il ne savait ni céder aux emportements d'une assemblée populaire, ni les réprimer à-propos ; la souplesse et l'habileté lui manquaient pour l'un, et la vigueur pour l'autre.

Malheureusement son sort le mit sur le trône dans un temps où les exemples de plusieurs règnes favorisaient le pouvoir arbitraire, et où le cours du génie de la nation tendait violemment à la liberté. Dans un autre siècle, ce monarque aurait été sur d'un règne tranquille ; mais les hautes idées de son pouvoir dans lesquelles il avait été nourri, le rendirent incapable d'une soumission prudente à cet esprit de liberté qui prévalait si fortement parmi ses sujets. Sa politique ne fut pas soutenue de la vigueur et de la prévoyance nécessaires pour maintenir sa prérogative au point où il l'avait élevée. Enfin, exposé sans cesse aux assauts d'une multitude de factions furieuses, implacables, fanatiques, ses méprises et ses fautes eurent les plus fatales conséquences. Trop rigoureuse situation, même pour le plus haut degré de la capacité humaine !

Les partis qui divisaient le royaume étaient des convulsions générales de tous les esprits, une ardeur violente et réfléchie de changer la constitution de l'état, un dessein mal conçu dans les royalistes d'établir le pouvoir despotique, fureur de la liberté dans la chambre des communes, le désir dans les évêques d'écarter le parti calviniste des Puritains, le projet formé chez les Puritains d'humilier les évêques, et enfin le plan suivi et caché des indépendants, qui consistait à se servir des défauts de tous les autres, pour devenir leurs maîtres.

Au milieu de cette anarchie, les catholiques d'Irlande massacrent quarante mille protestants de leur ile, et Charles I. écouta le fatal conseil de soutenir sa puissance par un coup d'autorité. Il quitte Londres, se rend à Yorck, rassemble ses forces, et s'arrêtant près de Nottingham, il y élève l'étendart royal, signe ouvert de la guerre civîle dans toute la nation.

On donne batailles sur batailles, d'abord favorables au prince, enfin malheureuses et désastreuses. Après avoir reçu dans son armée ces odieux irlandais teints du sang de leurs compatriotes, et taillés en pièces par le lord Fairfax à la bataille de Naseby qui suivit la victoire de Marston, il ne resta plus au monarque que la douleur d'avoir donné à ses sujets le prétexte de l'accuser d'être complice de l'horrible massacre commis par les mêmes irlandais le 22 Octobre 1641.

Charles marcha d'infortunes en infortunes ; il crut trouver sa sûreté dans l'armée écossaise, et se jeta entre ses mains ; mais les Ecossais le vendirent, et le livrèrent aux commissaires anglais ; il s'échappa de leur garde, et se sauva dans l'île de Wight, où il fut enlevé et transféré au château de Hulst. Sa mort étant résolue, Cromwel, Ireton et Harrison établirent une cour de justice, dont ils furent les principaux acteurs, avec quelques membres de la chambre-basse et quelques bourgeois de Londres. On traduisit trois fois le monarque devant cette cour illégale, et il refusa autant de fois d'en reconnaître la juridiction. Enfin le 10 Février 1649, sa tête fut tranchée d'un seul coup dans la place de Wittehall. Un homme masqué fit l'office d'exécuteur, et le corps fut déposé dans la chapelle de Windsor.

La mort tragique de ce monarque a fait mettre en question, s'il se trouve des cas où le peuple ait droit de punir son souverain. Il est du-moins certain que ceux qui donnent le plus de carrière à leurs idées, pourraient douter, si dans un monarque la nature humaine est capable d'un assez haut degré de dépravation, pour justifier dans des sujets révoltés, ce dernier acte de juridiction. L'illusion, si c'en est une, qui nous inspire un respect sacré pour la personne des princes, est si salutaire, que la détruire par le procès d'un souverain, ce serait causer plus de mal au peuple qu'on ne peut espérer d'effet sur les princes, d'un exemple de justice qu'on croirait capable de les arrêter dans la carrière de la tyrannie.

Je sai qu'on cite dans l'histoire de l'ancienne Rome l'exemple de Néron, que les Romains condamnèrent comme l'ennemi public, sans aucune forme de procès, au châtiment le plus sévère et le plus ignominieux. Mais les crimes de cet odieux tyran étaient portés à un degré d'énormité, qui renverse toutes sortes de règles. Quand on passe ensuite de l'exemple de Néron à celui de Charles I. et que l'on considère la contrariété qui se trouve dans leurs caractères, l'on ne plaint point l'un, et l'on est confondu que l'autre put éprouver une si fatale catastrophe.

L'histoire, cette grande source de sagesse, fournit des exemples de tous les genres ; et tous les préceptes de la prudence, comme ceux de la morale, peuvent être autorisés par cette variété d'événements, que son vaste miroir est capable de nous présenter.

De ces mémorables révolutions qui se sont passées dans un siècle si voisin du nôtre, les Anglais peuvent tirer naturellement la même leçon que Charles, dans ses dernières années, en tira lui-même ; qu'il est très-dangereux pour leurs princes de s'attribuer plus d'autorité qu'il ne leur en est accordé par les lois. Mais les mêmes scènes fournissent à l'Angleterre une autre instruction, qui n'est pas moins naturelle, ni moins utile, sur la folie du peuple, les fureurs du fanatisme, et le danger des armées mercénaires. Je dis les fureurs du fanatisme, car il n'est pas impossible que le meurtre de Charles I. la plus atroce des actions de Cromwel, n'ait été déguisée à ses yeux sous une épaisse nuée d'illusions fanatiques, et qu'il n'ait regardé son crime sous l'aspect d'une action méritoire. (D.J.)