ou CISTERON, (Géographie moderne) ville de France, en Provence, avec évêché, bailliage, et sénéchaussée. L'itinéraire d'Antonin la nomme Senistro, qu'on a depuis changé en Segesterica, et par une nouvelle corruption en Sistarica.

Cette ville a appartenu longtemps aux comtes de Forcalquier, ensuite aux comtes de Provence, et enfin aux rois de France, qui représentent ces derniers comtes.

Sisteron est situé sur la Durance, qu'on y passe sur un pont, à 20 lieues d'Aix, à 15 d'Embrun, et à 146 de Paris. Elle est défendue par une citadelle, qu'on regarde comme le boulevard de la Province, du côté des Alpes. Elle a droit, comme chef d'un bailliage assez étendu, de députer aux états, et aux assemblées des communautés. Il y a un gouverneur, un lieutenant de roi, et un major.

Son évêché, établi dans le VIe siècle, est suffragant d'Aix ; il vaut quinze mille livres de rente. Son diocese contient 46 paroisses en Provence, 16 en Dauphiné et 2 dans le comtat Venaissin. Parmi ces paroisses, celle de Forcalquier se dit co-cathédrale, et a un chapitre. Long. de Sisteron, 23. 35. latit. 44. 12.

Albertet, poète provençal, qui florissait sur la fin du XIIIe siècle, était né à Sisteron. Il aimait les belles-lettres, était très-galant, et choisit pour l'objet de sa passion la marquise de Malespine, la dame la plus accomplie de Provence de ce temps-là. Il fit à sa louange plusieurs pièces de poésie, qui plurent tant à cette dame, qu'elle lui en marqua sa reconnaissance par des présents de chevaux, de bijoux et d'argent. Cependant, comme elle s'aperçut que les assiduités d'Albertet faisaient tort à sa réputation, elle le pria de se retirer. Ce poète obéit avec douleur, et se rendit à Tarascon ; mais il continua dans sa retraite à chanter sa belle marquise. Il lui envoya entr'autres vers un sonnet, en forme de dialogue entr'elle et lui, qui commence.

Deportas vous ami, d'aquest amour per aras.

Dans une autre stance, il dit :

Mais commo faray yeu (diz'yeu) mas amours caras

My poder desportar d'aquest'affection ?

Car certes yeu endury en esta passion,

Per vous ingratament, moutas doulours amaras.

Le Monge des îles d'Or, nous apprend qu'Albertet mourut d'amour et de chagrin à Tarascon, et qu'en mourant, il remit son livre de poésies, intitulé lou Petrach de Venus, à Pierre de Valerme, son intime ami, pour en faire présent à sa cruelle et trop aimée Laure. Ce perfide ami, au lieu de remplir les intentions du mort, vendit l'ouvrage à le Fèvre, poète d'Usez, qui eut l'effronterie de le publier sous son nom ; mais la fourberie fut découverte, et le coupable subit la peine du fouet, établie anciennement par les lois des empereurs, contre les plagiaires de son ordre. (D.J.)