(Géographie moderne) ville de France, capitale du Poitou, sur une colline, à la rive gauche de la petite rivière de Clain, à 20 lieues au sud-ouest de Tours, 45 sud-ouest d'Orléans, 48 nord-est de Bordeaux, 74 sud-ouest de Paris. Long. suivant Cassini, 17. 46. 30. lat. 46. 34.

On compte dans Poitiers outre la cathédrale, 4 chapitres, 22 paroisses, 9 couvents d'hommes, 12 de filles, 2 séminaires.

L'évêque établi vers l'an 260, est suffragant de Bordeaux ; cet évêché vaut plus de 40000 livres de revenu. L'université de Poitiers fut fondée en 1431 par Charles VII ; elle a les quatre facultés, dont aucune n'est brillante. Il y a outre cela, intendance, bureau des finances, présidial, élection, maréchaussée, hôtel des monnaies ; mais il n'y a presque aucun commerce, et cette ville malgré son enceinte considérable est une des plus désertes et des plus ruinées du royaume.

Les restes de murailles, les souterrains qu'on trouve au vieux Poitiers, sont une preuve qu'il y a existé anciennement un château fortifié ; la situation entre les rivières de Vienne et du Clain, et près de leur confluent, était fort avantageuse pour une place de défense ; mais ses ruines et la dénomination du lieu, ne prouvent point que ce soit l'emplacement de l'ancienne capitale des peuples Pictavi.

La ville de Poitiers a été décorée par des ouvrages des Romains, d'un amphithéâtre, et d'un magnifique aqueduc, dont on voit encore des vestiges ; on ne découvre au vieux Poitiers aucun monument de la grandeur romaine.

La ville de Poitiers était au quatrième siècle, le siège de l'évêque, la capitale du peuple, et une des plus célèbres de l'Aquittaine ; enfin, il est démontré qu'elle est l'ancienne Limonum ou Limonum Pictavorum, ville considérable au second siècle du temps de Ptolomée, et place importante lors de la conquête des Gaules. Il est donc constant que Poitiers n'est point une ville nouvelle, et que depuis le siècle de Jules-César, elle a toujours existé dans la situation, je ne dis pas dans le triste état, où elle est présentement.

L'histoire moderne a rendu son nom célèbre, par la bataille qui fut donnée dans son territoire le lundi 19 Septembre 1356, entre le roi Jean et Edouard, prince de Galles, que le gain de la bataille de Crecy avait déjà rendu fameux. Ce prince surpris à deux lieues de Poitiers dans des vignes, dont il ne pouvait se sauver, demanda la paix au roi Jean, offrant de rendre tout ce qu'il avait pris en France, et une trève de sept ans. Le roi Jean refusa toutes ces conditions, attaqua huit mille hommes avec quatrevingt mille ; fut vaincu, fait prisonnier, conduit à Bordeaux, et l'année suivante en Angleterre.

Poitiers a produit quelques hommes de lettres, que je me hâte de nommer, et je souhaite que ce ne soient pas les derniers. S. Hilaire y est né dans le quatrième siècle ; mais j'ai parlé de ce célèbre docteur de l'Eglise à l'article PERES DE L'EGLISE.

Aubert (Guillaume) naquit dans cette ville vers l'an 1534. Il parait par ses ouvrages, qu'il avait cultivé les belles-lettres et la poésie, conjointement avec le droit, vous trouverez son article dans les Mém. du P. Niceron, tom. XXXV.

Berenger (Pierre) disciple d'Abailard, fit l'apologie de son maître, contre saint Bernard. Elle se trouve dans les œuvres d'Abailard, et ne demande pas ici de plus grands détails.

Billettes (Gilles Filleau des) né en 1634, possédait le détail des Arts, et fut agrégé par cette raison à l'académie des Sciences, il mourut en 1720, âgé de quatre-vingt-six ans.

Bois (Philippe Goibaut du) de l'académie Française, naquit l'an 1626, devint gouverneur du duc de Guise, et mourut en 1694. Il a traduit plusieurs ouvrages de S. Augustin, et quelques-uns de Ciceron. La monotonie du style et l'empreinte du travail sont visibles dans ses écrits ; peut-être que la belle élocution de Ciceron l'ayant souvent désespéré, et celle de S. Augustin l'ayant dégouté plus souvent encore, il s'est cru permis de leur prêter à l'un et à l'autre son style personnel qui est toujours uniforme, quoique le langage de l'orateur de Rome et du rhéteur de Tagaste, soient si différents l'un de l'autre.

Bouchel (Jean) s'est fait honneur par ses annales d'Aquittaine, qui subsistent encore, au lieu que tous ses ouvrages en vers sont tombés dans l'oubli.

Nadal (Augustin) était de l'académie des inscriptions et belles lettres, où il a donné quelques mémoires assez intéressants ; celui des vestales a été imprimé à part. Il a aussi composé des tragédies, mais qui n'ont point eu de succès ; il entra dans l'état ecclésiastique, et mourut dans son pays natal en 1740 à soixante-six ans.

Quintinie (Jean de la) né en 1626, a la gloire d'avoir créé en France l'art de la culture des jardins, perfectionné depuis en Angleterre et en Hollande. J'ai fait ailleurs l'éloge de cet habîle homme dans son art ; j'ajouterai seulement ici que ses talents furent récompensés magnifiquement par Louis XIV.

Aux hommes de lettres dont on vient de lire les noms, je joins deux muses de Poitiers, célèbres dans leur patrie au seizième siècle ; je veux parler de Catherine des Roches et de sa fille, qui l'une et l'autre composèrent divers ouvrages en prose et en vers. Leur maison, dit Scevole de Sainte-Marthe, était une académie d'honneur, où tous ceux qui faisaient profession des sciences et des lettres, étaient accueillis ; ces deux dames vécurent ensemble dans la plus étroite union, jusqu'au moment où la peste qui ravagea Poitiers en 1587, termina leur vie dans un même jour. (D.J.)