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Catégorie : Géographie & histoire moderne
GIAGAS ou GIAGUES, s. m. (Histoire moderne et Géographie) peuple féroce, guerrier, et antropophage, qui habite la partie intérieure de l'Afrique méridionale, et qui s'est rendu redoutable à tous ses voisins par ses excursions et par la désolation qu'il a souvent portée dans les royaumes de Congo, d'Angola, c'est-à-dire sur les côtes occidentales et orientales de l'Afrique.

Si l'on en croit le témoignage unanime de plusieurs voyageurs et missionnaires qui ont fréquenté les Jagas, nulle nation n'a porté si loin la cruauté et la superstition : en effet, ils nous présentent le phénomène étrange de l'inhumanité la plus atroce, autorisée et même ordonnée par la religion et par la législation. Ces peuples sont noirs comme tous les habitants de cette partie de l'Afrique ; ils n'ont point de demeure fixe, mais ils forment des camps volans, appelès kilombos, à-peu-près comme les Arabes du désert ou Bédouins ; ils ne cultivent point la terre, la guerre est leur unique occupation ; non seulement ils brulent et détruisent tous les pays par où ils passent, mais encore ils attaquent leurs voisins, pour faire sur eux des prisonniers dont ils mangent la chair, et dont ils boivent le sang ; nourriture que leurs préjugés et leur éducation leur fait préférer à toutes les autres. Ces guerriers impitoyables ont eu plusieurs chefs fameux dans les annales africaines, sous la conduite desquels ils ont porté au loin le ravage et la désolation : ils conservent la mémoire de quelques héroïnes qui les ont gouvernés, et sous les ordres de qui ils ont marché à la victoire. La plus célèbre de ces furies s'appelait Ten-ban-dumba ; après avoir mérité par le meurtre de sa mère, par sa valeur et par ses talents militaires de commander aux Jagas, elle leur donna les lois les plus propres qu'elle put imaginer pour étouffer tous les sentiments de la nature et de l'humanité, et pour exciter une valeur féroce, et des inclinations cruelles qui font frémir la raison ; ces lais, qui s'appellent Quixillos, méritent d'être rapportées comme des chefs-d'œuvre de la barbarie, de la dépravation, et du délire des hommes. Persuadée que la superstition seule était capable de faire taire la nature, Ten-ban-dumba l'appela à son secours ; elle parvint à en imposer à ses soldats par un crime si abominable, que leur raison fut reduite au silence ; elle leur fit une harangue, dans laquelle elle leur dit qu'elle voulait les initier dans les mystères des Jagas, leurs ancêtres, dont elle allait leur apprendre les rites et les cérémonies, promettant par-là de les rendre riches, puissants, et invincibles. Après les avoir préparés par ce discours, elle voulut leur donner l'exemple de la barbarie la plus horrible ; elle fit apporter son fils unique, encore enfant, qu'elle mit dans un mortier, où elle le pila tout vif, de ses propres mains ; aux yeux de son armée ; après l'avoir réduit en une espèce de bouillie, elle y joignit des herbes et des racines, et en fit un onguent, dont elle se fit frotter tout le corps en présence de ses soldats ; ceux-ci, sans balancer, suivirent son exemple, et massacrèrent leurs enfants pour les employer aux mêmes usages. Cette pratique abominable devint pour les Jagas une loi qu'il ne fut plus permis d'enfreindre ; à chaque expédition, ils eurent recours à cet onguent détestable. Pour remédier à la destruction des mâles, causée par ces pratiques exécrables, les armées des Jagas étaient recrutées par les enfants captifs qu'on enlevait à la guerre, et qui devenus grands et élevés dans le carnage et l'horreur, ne connaissaient d'autre patrie que leur camp, et d'autres lois que celles de leur férocité. La vue politique de cette odieuse reine, était, sans-doute, de rendre ses guerriers plus terribles, en détruisant en eux les liens de la nature et du sang. Une autre loi ordonnait de préférer la chair humaine à toute autre nourriture, mais défendait celle des femmes ; cependant on remarque que cette défense ne fit qu'exciter l'appétit exécrable des Jagas les plus distingués, pour une chair qu'ils trouvaient plus délicate que celle des hommes ; quelques-uns de ces chefs faisaient, dit-on, tuer tous les jours une femme pour leur table. Quant aux autres, on assure qu'en conséquence de leurs lais, ils mangent de la chair humaine qui se vend publiquement dans leurs boucheries. Une autre loi ordonnait de réserver les femmes stériles, pour être tuées aux obseques des grands ; on permettait à leurs maris de les tuer pour les manger. Après avoir ainsi rompu tous les liens les plus sacrés de la nature parmi les Jagas, leur législatrice voulut encore éteindre en eux toute pudeur ; pour cet effet elle fit une loi, qui ordonnait aux officiers qui partaient pour une expédition, de remplir le devoir conjugal avec leurs femmes en présence de l'armée. A l'égard des lois relatives à la religion, elles consistaient à ordonner de porter dans des boètes ou châsses les os de ses parents, et de leur offrir de temps en temps des victimes humaines, et de les arroser de leur sang, lorsqu'on voulait les consulter. De plus, on sacrifiait des hécatombes entières de victimes humaines aux funérailles des chefs et des rois ; on enterrait tout vifs plusieurs de ses esclaves et officiers pour lui tenir compagnie dans l'autre monde, et l'on ensevelissait avec lui deux de ses femmes, à qui on cassait préalablement les bras. Le reste des cérémonies religieuses était abandonné à la discrétion des singhillos, ou prêtres de cette nation abominable, qui multiplient les rites et les cérémonies d'un culte exécrable, dont eux seuls savent tirer parti. Quelques Jagas ont, dit-on, embrassé le christianisme, mais on a eu beaucoup de peine à les déshabituer de leurs rites infernaux, et surtout de leur goût pour la chair humaine. Voyez the modern. part. of an universal history, vol. XVI.




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