(Géographie ancienne et moderne) ou Nicarie ; île de l'Archipel, entre l'île de Samos et celle de Tine.

Cette île a environ 60 milles de circonférence, suivant M. de Tournefort, d'après lequel nous en pouvons parler savamment. Elle est fort étroite, et traversée dans sa longueur par une chaîne de montagnes qui lui a fait donner autrefois le nom d'île longue et étroite, doliche et macrès.

Ces montagnes sont couvertes de bois et fournissent des sources à tout le pays. Les habitants ne vivent que du commerce de ce bois, et sont si misérables qu'ils demandent l'aumône dès qu'ils sont hors de leur ile. Ils recueillent peu de froment, assez d'orge, de figues, de miel, de cire ; mais après tout ce sont de sottes gens, grossiers et à demi sauvages. Ils font leur pain à mesure qu'ils veulent diner ou souper. Ce pain n'est autre chose que des fouaces sans levain, qu'on fait cuire à demi sur une pierre plate bien chaude : si la maîtresse de la maison est grosse, elle tire deux portions de fouaces, une pour elle et l'autre pour son enfant : on fait la même honnêteté aux étrangers.

Cette île n'a jamais été bien peuplée. Strabon en parle comme d'un pays inculte, dont les pâturages étaient d'une grande utilité aux Samiens. On ne croit pas qu'il y ait présentement plus de 1000 ames.

Nicaria n'a pas changé de nom, elle s'appelle Icaria, tout comme autrefois ; mais les Francs qui ne savent pas le grec, corrompent la plupart des noms. Tout le monde sait qu'on attribue ce nom à Icare fils de Dédale, qui se noya aux environs de la mer, qui pour la même raison fut nommée Icarienne. Strabon enferme dans cette mer les îles de Leros et de Cos. Pline ne lui donne de l'étendue que depuis Samos jusqu'à Mycone. M. Bochart est le seul qui dérive le nom d'Icarie d'un mot phénicien icaure, qui signifie poissonneux ; ce qui pourtant convient assez à un nom grec que les anciens ont donné à la même ile.

Tous les habitants de Nicarie sont du rite grec, et leur langue tient plus du grec littéral, à ce qu'on dit, que celle des autres îles où le commerce a fait établir plusieurs étrangers, qui ont introduit une infinité de mots et de terminaisons de leur pays. On ne s'est jamais embarrassé de conquérir cette île : il y a beaucoup d'apparence qu'elle a suivi le destin de celle de Samos sa voisine et sa maîtresse.

L'île manque de port. L'une des principales calanques est à Fanar, où était l'ancienne ville Dracanon.

Strabon, liv. xiv. pag. 639. assure qu'il y avait dans Nicaria un temple de Diane, appelé Tauropolium ; et Callimaque n'a pas fait difficulté de dire que de toutes les îles il n'y en avait pas une de plus agréable à Diane que celle-ci. Goltzius a donné le type d'une médaille représentant d'un côté une Diane chasseresse, et de l'autre une personne assise sur un taureau, avec cette légende . On pourrait prendre cette personne pour Europe ; mais selon la conjecture de Nonius, c'est plutôt la même Diane, le taureau marquant l'abondance des pâturages de l'ile, et la protection de cette déesse.

Le fanar ou fanari de Nicaria (, lanterne, fanal) est une vieille tour, qui servait de fanal pour éclairer le passage des vaisseaux, entre cette île et celle de Samos ; car ce canal est dangereux quand la mer est grosse, quoiqu'il y ait 18 milles de large.

Les Nicariens n'ont ni cadi, ni turcs chez eux. Deux administrateurs annuels font toutes les affaires du pays. Ils paient environ cinq cent écus de capitation, outre une centaine pour la taille, et pour avoir la liberté de vendre leur bois hors de l'ile. Long. 43. 55-44. 12. lat. 37. 28-46. (D.J.)