ou HERTHE, s. f. (Antiquité) divinité que d'anciens peuples de Germanie, comme les Semnons, les Neudinges ou Thuringes, les Avions, les Angles, les Varins, les Eudons, les Suardons, et les Nuitons adoraient.

Tacite est le seul qui nous en instruise, et il pourrait bien lui-même avoir été mal informé ; cependant ce qu'il en rapporte est trop singulier, pour le passer sous silence. Il dit dans son livre des mœurs des Germains, chap. xl. qu'il y avait dans l'Océan (c'est apparemment la mer Baltique qu'il nomme ainsi), une île (on soupçonne que c'est l'île de Rugen) où se trouvait une forêt appelée Castum, au milieu de laquelle était un char consacré à la déesse Hertus.

Il n'était permis qu'au seul prêtre de toucher à ce char, parce qu'il savait le temps que la déesse qu'on y adorait venait dans ce lieu ; quand il sentait la présence de cette divinité, il attelait des bufles à ce char, et le suivait avec grande vénération ; tout le temps que durait cette cérémonie, c'était des jours de fête, et par-tout où le char allait, on le recevait avec beaucoup de solennités ; toute guerre cessait, toutes les armes se renfermaient, on ne respirait que la paix et le repos, jusques à ce que le prêtre eut reconduit dans son temple la déesse rassasiée de la conversation des hommes. Alors on lavait le char dans un lieu secret, et les étoffes qui le couvraient, et la déesse elle-même ; on se servait pour cela d'esclaves, qui étaient aussi-tôt après jetés et engloutis dans un lac voisin.

Vossius conjecture que cette déesse Hertus doit être Cybèle ; mais il est plus vraisemblable que c'est la Terre ; le nom y répond dumoins parfaitement ; les Allemands emploient encore le mot herth, pour signifier la terre, et les Anglais ont toujours dit earth dans le même sens ; comme la plupart des peuples se sont imaginés n'avoir point d'autre origine que la terre, les Germains pourraient bien l'avoir adorée, et plusieurs raisons concourent à se le persuader.

Il y a dans la plaine du comté de Salisbury en Angleterre, des amas de pierres circulaires, que plusieurs savants croient avait été un temple de la déesse Herte ; on nomme ces pierres stone-henges, c'est-à-dire pierres suspendues, parce qu'elles sont mises les unes sur les autres, de manière qu'elles paraissent être en l'air, telles qu'on suppose qu'était le temple de Herte. Mais cette supposition n'est au fond qu'un fruit de l'imagination, qu'on ne peut appuyer d'aucune preuve.

On ignore parfaitement quel était l'usage de cette espèce de monument, que les anciens appelaient en latin chorea gigantum. On dispute même de la nature de ces pierres ; car les uns prétendent qu'elles sont naturelles, tandis que d'autres les regardent comme artificielles, composées de sable, de chaux, de vitriol, et d'autres matières bitumineuses. Ce dernier sentiment parait le moins vraisemblable : quoi qu'il en sait, les curieux qui n'ont pas Ve les stone-henges de Salisbury, peuvent consulter sur leur nature et leur ancienne destination apparente, les Antiq. britann. de Cambden, et même ils en trouveront le dessein dans cet auteur. Je pense que les Transactions philosophiques en parlent aussi, mais cet article ne devait pas être oublié dans le supplément de Chambers. (D.J.)