S. m. (Grammaire et Jurisprudence) terme latin usité dans le langage français, pour exprimer certaines lettres d'attache que l'évêque accorde à un pourvu de cour de Rome, par lesquelles après avoir Ve les provisions, il atteste que ce pourvu est capable de posséder le bénéfice qui lui a été conféré.

L'origine du visa, tel qu'on le donne présentement, est assez obscur.

Il n'était pas question de visa, avant que les papes se fussent attribué le droit de conférer en plusieurs cas les bénéfices dépendants des collateurs ordinaires.

Les mandats de providendo n'étant d'abord que de simples recommandations adressées aux ordinaires, il n'y avait pas lieu au visa, puisque c'était le collateur ordinaire qui conférait.

Lors même que ces mandats furent changés en ordre, le collateur, quoiqu'il n'eut plus le choix du sujet, était toujours chargé d'expédier la provision ; ainsi il n'y avait point encore de visa dans le sens qu'on l'entend aujourd'hui.

L'usage du visa ne s'est introduit qu'à l'occasion des préventions de cour de Rome ; des provisions sur résignation, permutation et démission.

Dans l'origine le visa de l'ordinaire n'était autre chose que l'examen qu'il faisait de la signature, ou plutôt de la bulle de cour de Rome, pour s'assurer qu'elle était véritablement émanée de l'autorité du pape ; on examinait moins les mœurs et la capacité du pourvu que ses provisions.

Mais depuis le concîle de Trente, les évêques veillèrent plus particulièrement à ce que les bénéfices ne fussent remplis que par des sujets capables.

Le clergé de France, par l'article 12 de ses remontrances au roi Charles IX. en 1574, demanda que les pourvus en cour de Rome, in formâ dignum, ne pussent s'immiscer dans la possession et administration des bénéfices, que préalablement ils ne se fussent présentés à l'évêque, et qu'ils n'eussent subi l'examen par devant lui.

Les articles proposés dans ces remontrances, furent autorisés par des lettres-patentes ; mais étant demeuré sans exécution faute d'enregistrement, l'article dont on vient de parler fut inséré dans le 12e. de l'ordonnance de Blais ; qui porte que ceux qui auront impétré en cour de Rome provision de bénéfice en la forme qu'on appelle dignum, ne pourront prendre possession desdits bénéfices, ni s'immiscer en la jouissance d'iceux, sans s'être préalablement présentés à l'archevêque ou évêque diocésain, et en leur absence à leurs vicaires généraux, afin de subir l'examen, et obtenir leur visa, lequel ne pourra être baillé sans avoir Ve et examiné ceux qui seront pourvus, et dont ils seront tenus de faire mention expresse, pour l'expédition desquels visa, ne pourront les prélats ou leurs vicaires et secrétaires, prendre qu'un écu pour le plus, tant pour la lettre que pour le scel d'icelle.

L'édit de Melun, art. 14, et l'édit du mois d'Avril 1695, art. 2, ordonnent la même chose.

Le visa doit contenir une description sommaire de la signature de la cour de Rome, c'est-à-dire, expliquer quelle grâce y est accordée, de qui elle est signée, sa date et la forme de son expédition.

2°. Il doit aussi faire mention de l'expéditionnaire qui l'a obtenue en cour de Rome, et de la certification qui en est faite par deux autres.

3°. Le visa doit faire mention que l'impétrant a été examiné, et qu'il a été trouvé capable, tant du côté des vie et mœurs, que du côté de la science, etc.

4°. Il doit contenir la collation du bénéfice avec la clause salvo jure cujuslibet.

5°. Enfin la mise en possession.

Le visa est tellement nécessaire à celui qui est pourvu in forma dignum, que s'il prenait autrement possession du bénéfice, il se rendrait coupable d'intrusion. La signature et le visa ne doivent point en ce cas être séparés l'un de l'autre. Ces deux actes composent un tout qui forme le titre canonique du pourvu.

Cependant la provision donne à l'impétrant tellement droit au bénéfice, qu'avant d'avoir obtenu et même requis le visa, il peut résigner en faveur ou permuter.

Pour ce qui est des signatures en forme gracieuse, elles forment provisions irrévocables, en vertu desquelles le pourvu peut prendre possession sans aucun visa, excepté pour les bénéfices à charge d'ames, suivant la déclaration du 9 Juillet 1646, et l'article 1 de l'édit de 1695.

L'article 21 de l'ordonnance de 1629 veut que le visa soit donné par l'évêque du lieu où est situé le bénéfice.

Le pourvu qui a besoin de visa doit le demander avant de prendre possession, et pour cet effet se présenter en personne, subir l'examen nécessaire, et obtenir les lettres de visa de l'évêque du diocèse, ou de son grand-vicaire, lorsqu'il a un pouvoir spécial, à l'effet de donner les visa.

Le prélat qui est hors de son diocèse peut y renvoyer les pourvus qui lui demandent le visa.

Celui qui est pourvu de plusieurs bénéfices a besoin d'un visa pour chaque bénéfice.

L'examen qui précède le visa doit être proportionné à la qualité du bénéfice, au lieu et aux autres circonstances. On doit écrire toutes les questions et les réponses pour être en état de juger de la capacité ou incapacité du pourvu.

Dans cet examen l'évêque est le juge des mœurs et de la capacité du pourvu, mais non pas de la validité des provisions.

S'il refuse le visa, il doit exprimer les causes de son refus, à peine de nullité.

Le défaut de certificat de vie et de mœurs n'est pas une cause légitime de refus de visa ; l'exercice d'un emploi ecclésiastique dans un diocèse, sous les yeux des supérieurs, et sans aucune plainte de leur part, tient lieu de certificat.

Celui qui veut se plaindre du refus de visa, doit le faire constater par le procès-verbal de deux notaires, ou par un notaire, assisté de deux témoins.

Il peut se pourvoir contre ce refus, s'il est injuste, par la voie de l'appel simple par devant le supérieur ecclésiastique.

Il peut aussi se pourvoir au parlement par appel comme d'abus.

Les moyens sont 1°. si les causes du refus ne sont pas exprimées.

2°. Si l'évêque affecte de ne pas s'expliquer.

3°. S'il exprime une cause insuffisante.

4°. S'il en exprime une fausse, ou dont il n'y ait point de preuves, et qui tende à ternir la réputation du pourvu.

5°. Si l'évêque a pris connaissance de la validité des titres et capacité du pourvu et de l'état du bénéfice, dont il n'est point juge.

On contraignait autrefois les collateurs par saisie de leur temporel à donner des visa et provisions à ceux auxquels ils en avaient refusé sans cause : l'ordonnance de Blais abrogea cet usage, et sa disposition fut renouvellée par l'ordonnance de 1629.

Cependant la jurisprudence n'a été fixée sur ce point que par l'édit de 1695, qui enjoint de renvoyer par devant les supérieurs ecclésiastiques.

C'est au supérieur immédiat que l'on doit renvoyer, et en remontant de l'un à l'autre de degré en degré, suivant l'ordre de la hiérarchie. Voyez Fuet, la Combe, M. Piales, et le mot BENEFICE, COLLATION, INSTITUTION, PROVISION.

Visa est aussi un terme que le garde des sceaux met au bas des ordonnances et édits qu'il scelle. Il ne met pas son visa aux déclarations, elles sont seulement contresignées par un secrétaire d'état. (A)