S. m. (Grammaire et Jurisprudence) seu fides, et dans la basse latinité hommagium ou hominium, est une reconnaissance faite par le vassal en présence de son seigneur qu'il est son homme, c'est-à-dire son sujet, son vassal.

Hommage vient de homme ; faire hommage ou rendre hommage, c'est se reconnaître homme du seigneur : on voit aussi dans les anciennes chartes que baronie et hommage étaient synonymes.

On distinguait anciennement la foi et le serment de fidélité de l'hommage : la foi était dû. par les roturiers, voyez au mot FOI. Le serment de fidélité se prêtait debout après l'hommage, il se faisait entre les mains du bailli ou sénéchal du seigneur, quand le vassal ne pouvait pas venir devers son seigneur ; au lieu que l'hommage n'était dû qu'au seigneur même par ses vassaux.

On trouve des exemples d'hommage dès le temps que les fiefs commencèrent à se former ; c'est ainsi qu'en 734 Eudes, duc d'Aquittaine, étant mort, Charles-Martel accorda à son fils Hérald la jouissance du domaine qu'avait eu son père, à condition de lui en rendre hommage et à ses enfants.

De même en 778, Charlemagne étant allé en Espagne pour rétablir Ibinalarabi dans Sarragosse, reçut dans son passage les hommages de tous les princes qui commandaient entre les pyrenées et la rivière d'Ebre.

Mais il faut observer que dans ces temps reculés la plupart des hommages n'étaient souvent que des ligues et alliances entre des souverains ou autres seigneurs, avec un autre souverain ou seigneur plus puissant qu'eux ; c'est ainsi que le comte de Hainault, quoique souverain dans la plupart de ses terres, fit hommage à Philippe-Auguste en 1290.

Quelques-uns de ces hommages étaient acquis à prix d'argent ; c'est pourquoi ils se perdaient avec le temps comme les autres droits.

La forme de l'hommage était que le vassal fût nue tête, à genoux, les mains jointes entre celles de son seigneur, sans ceinture, épée ni éperons ; ce qui s'observe encore présentement ; et les termes de l'hommage étaient : Je deviens votre homme, et vous promets féauté doresnavant comme à mon seigneur envers tous hommes (qui puissent vivre ni mourir) en telle redevance comme le fief la porte, etc. cela fait, le vassal baisait son seigneur en la joue, et le seigneur le baisait ensuite en la bouche : ce baiser, appelé osculum fidei, ne se donnait point aux roturiers qui faisaient la foi, mais seulement aux nobles. En Espagne, le vassal baise la main de son seigneur.

Quand c'était une femme qui faisait l'hommage à son seigneur, elle ne lui disait pas, je deviens votre femme, cela eut été contre la bienséance ; mais elle lui disait, je vous fais l'hommage pour tel fief.

Anciennement quand le roi faisait quelque acquisition dans la mouvance d'un seigneur particulier, ses officiers faisaient l'hommage pour lui. Cela fut ainsi pratiqué, lorsqu'Arpin eut vendu sa vicomté de la ville de Bourges au roi Philippe I. lequel en fit rendre hommage en son nom au comte de Santerre pour la portion des terres qui relevaient de ce comte : mais cet usage fut sagement aboli en 1302 par Philippe le bel, lequel déclara que l'hommage serait converti en indemnité.

Les règles que l'on observe pour la forme de l'hommage sont expliquées au mot FOI.

Nous ajouterons seulement ici quelques réflexions, qui nous ont été communiquées par M. de la Feuillie, prevôt du chapitre de S. Pierre de Douay, et conseiller-clerc au parlement de la même ville.

Ce savant ecclésiastique et magistrat observe en parlant de l'hommage lige, qu'un pareil hommage ne pouvait se rendre d'ecclésiastiques à ecclésiastiques ; il ajoute néanmoins qu'il entend par-là qu'un ecclésiastique ne pouvait donner sans simonie des biens d'Eglise à un autre ecclésiastique à charge d'hommage, ou de servitude profane, mais qu'il ne prétend pas faire un crime des hommages qui se rendaient anciennement dans l'ordre hiérarchique, hommages cependant contre lesquels les saints papes se sont recriés.

Personne, dit-il, n'ignore que l'hommage n'est point dû pour tout ce qui fait partie de bénéfice ecclésiastique, et à plus forte raison pour cession de dixmes.

Saint Anselme, archevêque de Cantorbery en 1093, avait toujours devant les yeux les défenses faites par Gregoire VII. plus de dix ans auparavant, de rendre des vils hommages à aucuns mortels, voyez M. de Marca, de concord. l. VIII. c. xxj. n°. 4. Le saint archevêque a été aussi en grande relation avec Urbain, qui occupa le saint siège deux ans après Gregoire VII. et qui, comme lui, s'est beaucoup recrié contre les hommages que l'on exigeait des ecclésiastiques pour les biens qu'ils possédaient : les ouvrages de saint Anselme ne sont remplis que des horreurs qu'il avait de ces sortes d'hommages : Hoc autem scitote, s'écriait-il, quia voluntas mea est ut adjuvante Deo nullius mortalis homo fiam, nec per sacramentum alicui fidem promittam. Il prend Dieu à témoin de sa disposition, et il conseille de souffrir toutes sortes de tourments plutôt que de rendre hommage : nullae minae, nulla promissio, nulla astutia à religione vestrâ extorqueat aut homagium, aut jusjurandum, aut fidei allegationem. Anselm. l. III. c. xxxvj. lx. lxv. lxxvij. lxxxviij. xc. xcij.

Le pape Urbain II. dit le P. Thomassin, condamna en moins de mots, et encore plus clairement, le serment de fidélité et l'hommage dans le concîle de Clermont de l'an 1095, ne episcopus vel sacerdos regi vel alicui laïco in manibus ligiam fidelitatem faciat. Part. IV. l. II. ch. liij. p. 220. Lambert, évêque d'Arras, assista à ce concile, et en publia les canons dans un synode qu'il tint en 1097.

En 1114, les troubles qui avaient agité l'Angleterre étant calmés, il se tint un concîle auquel présidèrent les légats de Paschal II. et dans lequel tous les hommages furent prohibés sans distinction, les barons et autres seigneurs anglais furent assujettis à l'hommage ; mais les évêques et les abbés fide et sacramento professi sunt ; ils se bornèrent, comme il se pratique en France, au seul serment de fidélité.

Quelque temps auparavant, le même pape fut dans la nécessité d'écrire au clergé de Paris la lettre la plus violente contre l'usage qui s'était introduit d'exiger des hommages de ceux qui étaient dans un rang inférieur : illud quoque apud quosdam clericorum fieri audivimus, ut videlicet majores prebendarii à minoribus hominia suscipiant. " A toutes ces possessions, dit le P. Thomassin tome III. p. 215. ce n'était qu'une protestation de bouche ou par écrit d'un devoir, que tout le monde reconnaissait être indispensable de garder les canons d'obéir à ses supérieurs ecclésiastiques ". De-là le même P. Thomassin conclud que ce pape n'avait donc garde " d'exiger des archevêques l'hommage d'un vassal à son seigneur, ou un serment qui ressentit l'hommage ".

En 1137, Louis le Gros donne un édit général, par lequel il accorde aux évêques et abbés de l'Aquittaine, qui devait appartenir à Louis le jeune son fils, du chef de sa femme Eléonore, fille du duc de cette Province ; il accorde, dis-je, l'élection canonique sans charge d'hommage à son égard : canonicam omnino concedimus libertatem absque hominii, juramenti, seu fidei per manum datae obligatione.

En 1165, Adrien IV. reprochait à l'empereur Frédéric, quid dicam de fidelitate beato Petro et nobis à te promissâ et juratâ, quomodo eam observes cum ab iis qui dii sunt, et filii excelsi omnes episcopis videlicet homagium requires.

Enfin cet empereur est convenu que les évêques d'Italie solum sacramentum fidelitatis sine hominio facère debere domino imperatori. Otton, qui était évêque de Verceil avant l'an 1000, fait entendre par ses lettres, que de son temps les évêques d'Italie ne prétaient que le serment de fidélité aux empereurs pour les fiefs attachés à leurs bénéfices.

En 1164, Henri II. roi d'Angleterre avait fait le règlement suivant : Electus homagium et fidelitatem qui sicut ligio domino salvo ordine suo faciat priusquam consecretur. Saint Thomas de Cantorbery ne voulut faire que le serment de fidélité, fidelitatem et juraverat ; ce que ce saint croyait devoir être suffisant. Cette première fermeté à soutenir les immunités ecclésiastiques fut le premier pas vers le martyre.

Le quatrième concîle général de Latran de 1215, appelé le grand, par le nombre prodigieux d'évêques qui s'y trouvèrent et auquel présida Innocent III. défend de nouveau aux ecclésiastiques la foi et hommage ; les mêmes défenses furent confirmées en 1250, tant la vanité se trouvait flattée de ces sortes d'assujettissements, ne aliqua saecularis persona contra statuta hujusmodi quidquam attentare, aut à vobis vel successoribus vestris, homagii vel fidelitatis exigère seu oblatum audeat recipere sacramentum.

Les abbés n'ayant point d'ecclésiastiques qui leur fussent assujettis, et voulant d'un autre côté imiter les souverains, exigèrent des curés des serments de fidélité, lorsqu'ils les instituaient dans les paroisses eu égard aux dixmes qu'ils avaient cédées, fidelitatis exigunt sacramentum et nec exactores sinimus impunitos cum simoniacam contineant pravitatem. Voyez le Concîle de Chicester de l'an 1289.

Il est donc évident que l'hommage dans un ecclésiastique, et surtout pour ce qui s'appelle bénéfice ou spirituel, est regardé par les canons comme le comble de l'horreur et de l'indignité, indignum est et à romanâ ecclesiâ alienum ut pro spiritualibus facère quis homagium compellatur. Cap. fin. de reg. jur. C'est une des règles du droit canon.

Que l'on jette les yeux sur le titre du chapitre ex diligenti, il annonce ce que porte le canon : Pro habendis spiritualibus homagium facère simoniacum est.

C'est sur tous ces principes que se sont appuyés les canonistes et les jurisconsultes, pour blâmer les hommages pour tout ce qui s'appelle matière bénéficiale.

En conséquence des hommages que rendaient autrefois les évêques aux souverains pour les duchés, comtés et seigneuries considérables qu'ils tenaient, ils étaient tenus de fournir des troupes, quelques-uns les conduisaient et faisaient à leur égard les fonctions d'aumôniers ; et lorsque quelqu'un d'entre eux se sont oubliés jusqu'à porter les armes, leur conduite a été blâmée par les conciles et les papes.

Le dernier hommage qui ait été fait en France par un ecclésiastique envers le souverain, est celui de Louis de Poitiers, évêque et comte de Valence et de Die en l'an 1456, au dauphin, depuis roi sous le nom de Louis XI.

" Depuis ce temps-là, dit le P. Thomassin en sa discipl. ecclés. part. IV. liv. II. ch. liij. p. 224. il ne parait plus d'hommages rendus, mais de simples serments de fidélité, dit le P. Thomassin ; ces serments de fidélité ont même quelque chose plus honnête et plus honorable pour la probité de ces derniers siècles envers les princes souverains. Quelques-uns ont cru que l'hommage s'était confondu avec le serment ; mais un arrêt du conseil privé en 1652 en faveur de l'évêque d'Autun, nous donne d'autres lumières. Cet évêque ayant prêté son serment de fidélité au roi, eut peine de le faire enregistrer dans la chambre des comptes, parce qu'elle exigeait encore de lui l'hommage et le dénombrement des fiefs et domaines qu'il tenait ; il présenta requête au roi conjointement avec les agens du clergé, et elle contenait que par les lettres-patentes de Charles IX. Henri III. Henri IV. et Louis XIII. enregistrées au parlement et en la chambre des comptes, les ecclésiastiques de ce royaume auraient été déclarés exempts de faire la foi et hommage, et donner, par aveu et dénombrement, leurs fiefs, terres et domaines, attendu les amortissements faits d'iceux en 1522 et 1547, par ies rois François I. et Henri II... le roi prononça en faveur de l'évêque ".

Pour ce qui regarde les hommages envers les seigneurs inférieurs, ils ont été très-rares en France, d'abord par rapport à la manière de les rendre, et qui consistait en ce que le vassal se mettait à genoux, tenait ses mains jointes dans celles du seigneur, et ensuite l'embrassait : ponere manus suas intra manus domini in signum summae subjectionis, reverentiae et fidei, et à domino admitti ad osculum pacis in signum specialis confidentiae et amoris.... quae forma et solennitas non servatur nec congruit in praestatione homagii inferioribus dominis. C'est Dumoulin qui s'explique de la sorte dans son traité des fiefs ; il ajoute au même endroit : Minus esset indecents et irreprehensibîle nisi in fidelitate ligiâ quae debetur soli principi.

Il n'est point surprenant que depuis le milieu du XIVe siècle il ne reste aucun vestige de ces sortes d'hommages qui, eu égard à l'assujettissement personnel qu'ils emportent avec eux, sont toujours odieux et peu conformes à nos mœurs et au christianisme, si l'on excepte le souverain, dont nous naissons les sujets avant d'être enfants de l'Eglise. Enfin, continue le même Dumoulin, les assujettissements personnels sont une sorte d'esclavage et des restes de cette ancienne servitude qui dégrade la nature humaine, sunt ergo servi respectu conditionis adscriptitiae.

Telles sont les réflexions dont M. de la Feuillie nous a fait part sur cette matière.

Nous observons néanmoins que dans la règle nous ne voyons rien qui puisse affranchir les ecclésiastiques de faire la foi et hommage.

Les religieux et les religieuses même n'en sont pas non plus exempts ; le chapitre unique §. verum de statu regularium, in 6°. permet à l'abbesse ou prieur de sortir de son couvent pour faire la foi ou hommage, mais on sait que le sexte n'est pas reçu en France.

A l'égard des corps, chapitres et communautés d'hommes séculiers et réguliers, la manière de faire la foi et hommage est réglée par les articles cx. cxj. et cxij. de la coutume d'Anjou, et par les articles cxxj. cxxij. et cxxiij. de celle du Maine ; et voici la distinction que font ces coutumes.

Si le corps ou chapitre a un chef, comme un doyen, un abbé, un prieur, ce chef doit faire la foi et hommage pour le corps ou chapitre ; et en cas de légitime empêchement, elle doit être faite par quelqu'autre personne députée à cet effet.

Pour les corps et communautés qui n'ont point de chef principal, comme les fabriques, les hôpitaux etc. la foi et hommage doit être faite par l'homme vivant et mourant, et pour les bénéfices particuliers par les titulaires.

Mais il est certain que le clergé a obtenu divers arrêts de surséance pour la foi et hommage des fiefs qu'il possède mouvants nuement du roi ; il y en a plusieurs indiqués dans Brillon au mot foi, n°. 8. et rapporté dans les mémoires du clergé : mais il ne parait pas que cela s'étende aux fiefs mouvants des seigneurs particuliers. On peut voir Auroux Despommiers, prêtre, docteur en théologie, et conseiller clerc en la sénéchaussée de Bourbonnais et siège présidial de Moulins, dans son Commentaire sur la coutume de Bourbonnais, art. ccclxxx. où il dit que la forme de la foi et hommage de la part des gens d'église n'est point différente, nonobstant la dignité de leur caractère, qui semblerait les exempter de cet abaissement envers un laïc ; parce qu'en ce qui concerne les choses temporelles, ils sont sujets au droit commun. (A)

HOMMAGE DE BOUCHE et DE MAINS, est la même chose que l'hommage simple, auquel il n'est point dû de serment de fidélité ; il est ainsi nommé dans l'ancienne coutume d'Amiens, art. 24. Voyez HOMMAGE SIMPLE. (A)

HOMMAGE DE DEVOTION était une déclaration et reconnaissance que quelques seigneurs souverains, ou qui ne relevaient de personne pour leurs fiefs et seigneurie, faisaient de les tenir d'une telle église.

Ces hommages vinrent d'un mouvement de dévotion qui porta quelques seigneurs à rendre à Dieu hommage de leurs terres, comme d'autres le rendaient à leurs seigneurs dominans ; c'était une espèce de vœu accompagné de quelques aumônes et de l'obligation à laquelle se soumettait le seigneur de prendre les armes pour la défense de l'église où il rendait cet hommage.

Ces pratiques de dévotion ne devaient pas naturellement tirer à conséquence, ni autoriser les églises à prétendre une supériorité temporelle sur les seigneuries dont on leur avait fait hommage, d'autant que cet hommage était volontaire, et que les seigneurs le rendaient pour le même fief, tantôt à une église, et tantôt à une autre, selon que leur dévotion se tournait pour l'une ou l'autre de ces églises. C'est ainsi que les sires de Thoire firent autrefois l'hommage de leurs états, tantôt à l'église de Lislebarbe, tantôt à celle de Lyon, quelquefois à l'église de Nantua, d'autrefois à l'abbaye de Cluny, et à plusieurs autres, jusqu'à ce qu'enfin leurs successeurs refusèrent de rendre cet hommage, auquel ils n'étaient point en effet obligés.

Cependant quoique ces sortes d'hommages ne fussent dû. qu'à Dieu, auquel on les rendait entre les mains de son église, les ecclésiastiques prirent insensiblement pour eux cette reconnaissance, et voulurent la faire passer pour une marque de supériorité temporelle qu'ils avaient sur ceux qui rendaient hommage à leur église.

La coutume de Poitou, art. 108, dit que quiconque a hommage pour raison d'aucune chose, est fondé sur icelle d'avoir juridiction, si ce n'était hommage de dévotion, comme celui qui est donné en franche aumône à l'église ; lequel hommage de dévotion n'emporte fief, juridiction, ni autre devoir.

Barrand, sur le tit. des fiefs de cette coutume, ch. Xe n. 2. dit que le fief de dévotion donné en franche aumône à l'église, ne doit pas être proprement appelé hommage, parce qu'il n'emporte fief ni juridiction, et ne doit devoir à personne.

Boucheul, sur l'art. 108. que l'on a cité, dit que l'hommage de dévotion est de deux sortes, ou dû à l'église ou par l'église ; que celui qui est dû à l'église n'est pas en signe d'obéissance, mais par une espèce de dévotion. Brodeau, sur l'art. 63. de la coutume de Paris, n. 23. rapporte divers exemples de ces fiefs ou hommages de piété et de dévotion, qui ne consistent qu'en la simple charge de l'hommage et autres redevances d'honneur, comme cire, cierges, et autres semblables, sans aucun devoir pécuniaire. L'hommage de dévotion dû par l'église est pour les choses qui lui ont été données en aumône, c'est-à-dire libres, franches, et déchargées de toutes sortes de devoirs et redevances, ad obsequium precum. Ni l'un ni l'autre de ces deux hommages n'emporte de soi fief ni juridiction.

Voyez Galland, traité contre le franc-aleu, ch. VIIe pag. 95. et 96. Caseneuve, traité contre le franc aleu, liv. II. ch. IIe n. 5. p. 171. dernière édition, et FIEF DE DEVOTION. (A)

HOMMAGE LIGE OU PLEIN est celui où le vassal promet de servir son seigneur envers et contre tous.

On l'appelle lige, parce qu'il est dû pour un fief lige, ainsi appelé à ligando, parce qu'il lie plus étroitement que les autres. Il y en avait autrefois de deux sortes, l'un par lequel le vassal s'obligeait de servir son seigneur envers et contre tous, même contre le souverain, comme l'a remarqué Cujas, lib. II. feud. tit. 5. lib. IV. tit. 31. 90. et 99. et comme il parait par l'art. 50. des établissements de France ; le second, par lequel le vassal s'obligeait de servir son seigneur contre tous, à l'exception des autres seigneurs dont le vassal était déjà homme lige. Il y a plusieurs de ces hommages rapportés dans les preuves des histoires des maisons illustres. Voyez aussi Chantereau, des fiefs, pag. 15. et 17.

Les guerres privées que se faisaient autrefois les seigneurs, furent la principale occasion de ces hommages liges.

Plusieurs ont cru que l'hommage lige n'avait commencé d'être pratiqué que dans le XIIe siècle ; nous avions même incliné pour cette opinion en parlant ci-devant des fiefs liges ; mais depuis l'impression de cet article, M. Gouliart de la Feuillie, conseiller-clerc au parlement de Douay, dont j'ai déjà parlé sur le mot hommage en général, m'a fait observer que les fiefs liges étaient connus en France longtemps avant le XIIe siècle, qu'en 1095 se tint le concîle de Clermont en Auvergne, auquel assistèrent Urbain II. et un grand nombre d'évêques, et entre autres Lambert, évêque d'Arras, qui en 1097 tint un synode connu sous le nom de code lambertin, dans lequel il rappelle une partie des canons du concile, quos canones è claro montano concilio attulerat ; et que l'article 17. de ce code est conçu en ces termes, nec episcopus vel sacerdos regi vel alicui laico in manibus ligiam fidelitatem faciat ; d'où il est aisé de s'apercevoir que l'on abusait dès-lors des fiefs liges, ce qui donne lieu de conclure qu'ils étaient connus depuis quelque temps dans toute la France et l'Italie, non seulement quant à l'hommage, mais même par rapport au nom de liges. S. Antonin et le Jésuite Maurus paraissent avoir été instruits de cette décision, lorsqu'ils ont expliqué le mot liga par obsequium, et par les mots legitimam ei facientes fidelitatem. Tous les deux ont voulu faire entendre par ces expressions, que l'Abbé de S. Jean d'Angely n'a point fait d'hommage lige à Louis VIII. mais qu'il avait uniquement promis la fidélité.

M. de la Feuillie observe aussi, que lorsque le concîle a défendu aux évêques et aux prêtres de rendre aucun hommage lige, soit au roi, soit aux laïcs, il n'a pas prétendu approuver qu'un pareil hommage put se rendre d'ecclésiastique à ecclésiastique ; ce qui ne se pourrait faire sans abus, puisque le roi est le seigneur dominant de tous les vassaux de son royaume, et qu'il n'est point possible d'imaginer un devoir de vassalité qui ne puisse et ne doive être rendu au roi au moins dans le cas d'ouverture du fief.

Néanmoins les évêques exigeaient aussi l'hommage lige des ecclésiastiques qui étaient leurs inférieurs et leurs vassaux. On en voit des preuves dans la nouvelle diplomatique, pag. 276.

Enfin M. de la Feuillie a encore observé que le mot ligium était rendu en Italie dans les XIe et XIIe siècles par le mot hominium, comme on le voit d'un ancien concordat entre le pape Adrien et Fréderic I. episcopi Italiae solum sacramentum fidelitatis sine hominio facère debent domino imperatori. De-là vient qu'en France les évêques ne font point hommage au roi ; mais prêtent seulement le serment de fidélité : et l'auteur des nouvelles notes sur la dernière édition de Ferret, s'est trompé en avançant que l'on trouvait le mot hommage dans quelqu'une des formules du serment de fidélité rapportées dans le livre des libertés de l'Eglise Gallicane.

On peut ajouter à cette remarque de M. de la Feuillie, que le roi Louis le Gros et Louis VII. son fils, alors duc d'Aquittaine et comte de Poitou, par des lettres de l'an 1137, ordonnèrent que les élections, soit à l'archevêché de Bordeaux, aux évêchés suffragans et aux abbayes de cette province, seraient faites librement suivant les canons, et que ceux qui seraient élus ne feraient point hommage pour leurs bénéfices, ni n'en demanderaient pas l'investiture.

Pour ce qui est du temps où l'hommage lige commença à être en usage ; les remarques de M. de la Feuillie nous ayant engagé à faire de notre côté de nouvelles recherches, nous avons trouvé que l'hommage lige était déjà usité en France dès le ix. siècle. On voit en effet, dans un diplome de Charles le Chauve de l'an 845, rapporté par dom Bouquet dans son hist. de Languedoc, tom. VIII. p. 470, que le comte Vandrille y est qualifié homme lige, homo ligius ; il possédait des bénéfices civils et des aleux ; on ne fait pas mention de fiefs, l'usage n'en était pas encore établi ; ainsi l'hommage lige a commencé longtemps avant les inféodations, et était dû pour les bénéfices civils qui avaient été concédés à cette condition, ou pour les aleux qui étaient convertis en bénéfices par le moyen des recommandations usitées sous les deux premières races, et dont l'effet était que le possesseur d'un aleu se mettait sous la protection de quelque seigneur puissant, et se rendait son homme.

On voit dans un ancien hommage rendu à un seigneur de Beaujeu, qu'en signe de fief lige, le vassal toucha de sa main dans celle du procureur général du seigneur.

Les femmes faisaient aussi l'hommage lige. On voit, par exemple, dans un terrier de 1351, qu'à Chalamont et Dombes, une femme se reconnut femme lige, quoique son mari fût homme de noble homme Philippe le Mesle.

Depuis l'abolition des guerres privées, l'hommage lige n'est proprement dû qu'au roi ; quand il est rendu au roi et autres grands seigneurs, il faut excepter le roi.

L'hommage lige doit être rendu en personne, de quelque condition que soit le vassal. (A)

HOMMAGE DE FOI et DE SERVICE est lorsque le vassal s'oblige de rendre quelque service de son propre corps à son seigneur, comme autrefois lorsqu'il s'obligeait de lui servir de champion, ou de combattre pour lui en cas de gage de bataille. Voyez l'ancienne coutume de Normandie latine et française, ch. xxix. Bouteillier dans sa somme rurale, pag. 479. (A)

HOMMAGE DE PAIX, suivant l'ancienne coutume de Normandie, ch. xxix. c'est quand quelqu'un poursuit un autre pour un crime, et que la paix est rétablie entr'eux de manière que celui qui était poursuivi fait hommage à l'autre de lui garder la paix. Voyez Bouteillier dans sa somme, p. 419, et la glose sur le ch. xxix. de l'ancienne coutume de Normandie. (A)

HOMMAGE PLANE ou PLEIN est la même chose qu'hommage lige, comme on le voit dans les coutumes de la Rochelle, art. 4. Ponthieu, 77. Amiens, art. 7. 25. 186. et 189. Voyez Brusselle, usage des fiefs. Voyez HOMMAGE LIGE. (A)

HOMMAGE SIMPLE est celui où il n'y a pas de prestation de foi, mais seulement l'hommage qui se rend au seigneur nue tête, les mains jointes avec le baiser. On l'appelle simple par opposition à la foi et à l'hommage que le vassal doit faire les mains jointes sur les évangiles avec les serments requis. Voyez HOMMAGE LIGE. (A)