adj. (Grammaire et Jurisprudence) ou sénatus-consulte velleïen, est un decret du sénat, ainsi appelé parce qu'il fut rendu sous le consulat de M. Silanus et de Velleius Tutor, du temps de l'empereur Claude, par lequel on restitua les femmes contre toutes les obligations qu'elles auraient contractées pour autrui, et qu'on aurait extorquées d'elles par violence, par autorité et par surprise, pourvu qu'il n'y eut eu aucune fraude de leur part.

On entend aussi quelquefois par le terme de velleïen simplement, le bénéfice accordé par ce sénatusconsulte.

Les lois romaines n'avaient pas d'abord porté les précautions si loin que ce sénatus-consulte en faveur des femmes et filles.

La loi julia permettait au mari de vendre les biens dotaux de sa femme, pourvu qu'elle y donnât son consentement ; il lui était seulement défendu de les hypothéquer, du consentement même de sa femme, parce qu'on pensa qu'elle se prêterait plus volontiers à l'hypothèque de ses fonds qu'à la vente.

Cette loi n'avait porté ses vues que sur le fonds dotal, et non sur les meubles et choses mobiliaires même apportées en dot, elle ne concernait d'ailleurs que les fonds dotaux situés en Italie ; mais quelques-uns tiennent que la femme qui était sur le point de se marier, pouvait prendre certaines précautions par rapport à ses fonds dotaux qui étaient situés hors l'Italie.

Quoi qu'il en sait, elle avait toute liberté de disposer de ses paraphernaux, et conséquemment de s'obliger jusqu'à concurrence de ses biens, bien entendu que l'obligation fût contractée par la femme pour elle-même, et non pour autrui.

En effet, il fut d'abord défendu par des édits d'Auguste et de Claude, aux femmes de s'obliger pour leurs maris.

Cette défense ne fut faite qu'aux femmes mariées, parce que dans l'ancien droit que l'on observait encore en ces temps-là, toutes les personnes du sexe féminin étaient en tutele perpétuelle, dont elles ne sortaient que lorsqu'elles passaient sous l'autorité de leurs maris ; c'est pourquoi la prohibition de cautionner ne pouvait concerner que les femmes mariées.

Mais sous l'empereur Claudius, les filles et les veuves ayant été délivrées de la tutele perpétuelle, tout le sexe féminin eut besoin du même remède, la pratique s'en introduisit sous le consulat de M. Silanus et de Velleïus Tutor, et elle fut confirmée par l'autorité du sénat.

Le decret qu'il fit à cette occasion est ce que l'on appelle le sénatus-consulte velleïen.

Il fut ordonné par ce decret que l'on observerait ce qui avait été arrêté par les consuls Marcus Silanus et Velleïus Tutor, sur les obligations des femmes qui se seraient engagées pour autrui ; que dans les fidéjussions ou cautionnements et emprunts d'argent que les femmes auraient contractés pour autrui, l'on jugeait anciennement qu'il ne devait point y avoir d'action contre les femmes, étant incapables des offices virils, et de se lier par de telles obligations ; mais le sénat ordonna que les juges devant lesquels seraient portées les contestations au sujet de ces obligations, auraient attention que la volonté du sénat fût suivie dans le jugement de ces affaires.

Le jurisconsulte Ulpien, qui rapporte ce fragment du sénatus-consulte velleïen, applaudit à la sagesse de cette loi, et dit qu'elle est venue au secours des femmes à cause de la faiblesse de leur sexe, et qu'elles étaient exposées à être trompées de plus d'une manière ; mais qu'elles ne peuvent invoquer le bénéfice de cette loi s'il y a eu du dol de leur part, ainsi que l'avaient décidé les empereurs Antonin le pieux et Sévère.

Cette loi, comme l'observent les jurisconsultes, ne refuse pas toute action contre la femme qui s'est obligée pour autrui ; elle lui accorde seulement une exception pour se défendre de son obligation, exception dont le mérite et l'application dépendent des circonstances.

Le bénéfice ou exception du velleïen a lieu en faveur de toutes les personnes du sexe, soit filles, femmes ou veuves, contre toutes sortes d'obligations verbales ou par écrit ; mais il ne sert point au débiteur principal, ni à celui pour qui la femme s'est obligée.

Plusieurs jurisconsultes tirent des annotations sur le sénatus-consulte velleïen, ainsi qu'on le peut voir dans le titre du digeste ad S. C. velleianum.

L'empereur Justinien donna aussi deux lois en interprétation du velleïen.

La première est la loi 22. au cod. ad S. C. velleianum, par laquelle il ordonne que si dans les deux années du cautionnement fait par la femme, pour autre néanmoins que pour son mari, elle approuve et ratifie ce qu'elle a fait, telle ratification ne puisse rien opérer, comme étant une faute réitérée, qui n'est que la suite et la conséquence de la première.

Mais cette même loi veut que si la femme ratifie après deux ans, son engagement soit valable, ayant en ce cas à s'imputer de l'avoir ratifié après avoir eu un temps suffisant pour la réflexion.

Cette loi de Justinien ne regardait que les intercessions des femmes faites pour autres que pour leurs maris ; car par rapport aux obligations faites pour leurs maris, Justinien en confirma la nullité par sa novelle 134. chap. VIIIe dont a été formée l'authentique si quae mulier, insérée au code ad senatus-consult. velleianum.

La disposition de ces lois a été longtemps suivie dans tout le royaume.

Le parlement de Paris rendit le 29 Juillet 1595, un arrêt en forme de règlement, par lequel il fut enjoint aux notaires de faire entendre aux femmes qu'elles ne peuvent s'obliger valablement pour autrui, surtout pour leurs maris, sans renoncer expressément au bénéfice du velleïen, et de l'authentique si quae mulier, et d'en faire mention dans leurs minutes, à-peine d'en répondre en leur nom, et d'être condamnés aux dommages et intérêts des parties.

Mais comme la plupart des notaires ne savaient pas eux mêmes la teneur de ces lois, ou ne les savaient pas expliquer, que d'ailleurs ces sortes de renonciations n'étaient plus qu'un style de notaire, le roi Henri IV. par un édit du mois d'Aout 1606, fait par le chancelier de Sillery, abrogea la disposition du sénatus-consulte velleïen, de l'authentique si quae mulier, fit défenses aux notaires d'en faire mention dans les contrats des femmes, et déclare leurs obligations bonnes et valables, quoique la rénonciation au velleïen et à l'authentique n'y fussent point insérées.

Cet édit, quoique général pour tout le royaume, ne fut enregistré qu'au parlement de Paris. Il est observé dans le ressort de ce parlement, tant pour le pays de droit écrit, que pour les pays coutumiers.

Il y a cependant quelques coutumes dans ce parlement, où les femmes ne peuvent s'obliger pour leurs maris ; telles sont celles d'Auvergne, de la Marche et du Poitou, dont les dispositions sont demeurées en vigueur, l'édit de 1606 n'ayant dérogé qu'à la disposition du droit, et non à celle des coutumes.

La déclaration du mois d'Avril 1664 déclare, qu'à la vérité les obligations passées sans force ni violence par les femmes mariées à Lyon et dans les pays de Lyonnais, Mâconnais, Forès et Beaujolais, seront bonnes et valables, et que les femmes pourront obliger tous leurs biens dotaux ou paraphernaux mobiliers et immobiliers, sans avoir égard à la loi julia, que cette déclaration abroge à cet égard.

On tient que cette déclaration fut rendue à la sollicitation du sieur Perrachon, pour-lors fermier général de la généralité de Lyon, qui la demanda pour avoir une plus grande sûreté sur les biens des sousfermiers, en donnant à leurs femmes la liberté d'engager leurs biens dotaux, et en les faisant entrer dans les baux.

Cette déclaration n'ayant été faite que pour les pays du Lyonnais, Forès, Beaujolais et Mâconnais, elle n'a pas lieu dans l'Auvergne, quoique cette province soit du parlement de Paris, la coutume d'Auvergne ayant une disposition qui défend l'aliénation des biens dotaux.

L'édit de 1606 qui valide les obligations des femmes, quoiqu'elles n'aient point rénoncé au velleïen et à l'authentique si quae mulier, est observé au parlement de Dijon depuis 1609, qu'il y fut enregistré.

Les renonciations au velleïen et à l'authentique ont aussi été abrogées en Bretagne par une déclaration de 1683, et en Franche-Comté par un édit de 1703.

Le sénatus-consulte velleien est encore en usage dans tous les parlements de droit écrit ; mais il s'y pratique différemment.

Au parlement de Grenoble la femme n'a pas besoin d'avoir recours au bénéfice de restitution pour être relevée de son obligation.

Dans les parlements de Toulouse et de Bordeaux, elle a besoin du bénéfice de restitution, mais le temps pour l'obtenir est différent.

Au parlement de Toulouse elle doit obtenir des lettres de rescision dans les dix ans, on y juge même qu'elle ne peut renoncer au sénatus-consulte velleïen, ce qui est contraire à la disposition du droit.

Au parlement de Bordeaux, le temps de la restitution ne court que du jour de la dissolution du mariage ; néanmoins si l'obligation ne regardait que les paraphernaux, que le mari n'y fût pas intéressé, les dix ans couraient du jour du contrat.

En Normandie, le sénatus-consulte velleïen n'a lieu qu'en vertu d'un ancien usage emprunté du droit romain, et qui s'y est conservé ; car l'édit de 1606 n'a point été régistré au parlement de Rouen ; le sénatus-consulte velleïen y est même observé plus rigoureusement que dans le droit romain ; en effet, la rénonciation de la femme au bénéfice de cette loi, n'y est point admise, et quelque ratification qu'elle puisse faire de son obligation, même après les dix années, elle est absolument nulle, et on la déclare telle, quoiqu'elle n'ait point pris de lettres de rescision.

Le sénatus-consulte velleïen est considéré comme un statut personnel, d'où il suit qu'une fille, femme, ou veuve domiciliée dans un pays où cette loi est observée, ne peut s'obliger elle ni ses biens pour autrui, en quelque pays que l'obligation soit passée, et que les biens soient situés. Voyez au digeste et au code, les tit. ad senatus-consultum velleïanum, la novelle 134. cap. VIIIe Pausus, IIe 11. Lucius, Fillau, Duperrier, le Brun, Stockmants, Coquille, Lapeyrere, Hevin, Bretonnier, Froland, Boulenais, et les mots FEMME, OBLIGATION, DOT, LOI JULIA. (A)