CLAMEUR, (Synonyme, Grammaire) le dernier de ces mots ajoute à l'autre une idée de ridicule par son objet ou par son excès. Le sage respecte le cri public, et méprise les clameurs des sots. (O)

CRI D'ARMES ou CRI DE GUERRE, (Histoire moderne et Art militaire) On appelait ainsi certaines paroles en usage chez nos premiers François et chez les autres peuples de l'Europe pour animer les soldats au combat, ou pour se faire connaître dans les batailles et dans les tournois.

On trouve dans l'antiquité des traces de cette coutume, et surtout bien expressément dans l'Ecriture au livre des Juges, chap. VIIe où Gédeon donna pour mot ou pour cri de guerre, aux soldats qu'il menait contre les Madianites ces paroles, Domino et Gedeoni, au Seigneur et à Gédeon.

Parmi les modernes, le cri de guerre était une suite de la bannière, c'est-à-dire que nul n'était reconnu pour gentilhomme de nom, d'armes, et de cri, s'il n'avait droit de lever bannière, l'un et l'autre servant à mener des troupes à la guerre et à les rallier. Dans les batailles, les bannerets faisaient le cri, de sorte que dans une armée il y avait autant de cris qu'il y avait de bannières ou enseignes. Mais outre ces cris particuliers, il y en avait un général pour toute l'armée, et c'était celui du général ou du roi, quand il s'y trouvait en personne. Quelquefois il y avait deux cris généraux dans une même armée, lorsqu'elle était composée de deux différentes nations. Ainsi dans la bataille donnée entre Henri de Transtamare et Pierre le Cruel, en 1369, les Espagnols du parti de Henri crièrent Castille au roi Henri, et les François auxiliaires, commandés par Bertrand du Guesclin, prirent pour cri, Notre-Dame, Guesclin. Le cri général se faisait unanimement par tous les soldats en même temps à l'instant de la mêlée, tant pour implorer l'assistance du ciel, que pour s'animer au combat les uns les autres ; et les cris particuliers servaient aux soldats à s'entre-connaître, et aux chefs à démêler leurs soldats, à les tenir serrés autour de leur bannière, ou à les rallier en cas de besoin. Dans les tournois, c'étaient les hérauts d'armes qui faisaient le cri lorsque les chevaliers étaient prêts d'entrer en lice. Le cri de la famille appartenait toujours à l'ainé ; et les puinés ne prenaient le cri de leur maison, qu'en y ajoutant le nom de leur seigneurie.

Mais le roi Charles VII. ayant établi des compagnies d'ordonnance vers l'an 1450, et dispensé les bannerets d'aller à la guerre accompagnés de leurs vassaux, l'usage du cri d'armes a été aboli ; il ne s'est conservé que dans les armoiries, auxquelles on joint souvent le cri de la maison. Le cri le plus ordinaire des princes, des chevaliers, et des bannerets, était leur nom ; quelques-uns ont pris le nom des maisons dont ils étaient sortis ; d'autres celui de certaines villes, parce qu'ils en portaient la bannière ; ainsi le comte de Vendome criait Chartres : des princes et seigneurs très-considérables ont crié leurs noms ou ceux de leurs villes principales avec une espèce d'éloge, ainsi le comte de Hainaut avait pour cri, Hainaut au noble comte ; et le duc de Brabant, Louvain au riche duc. La seconde manière de cri, était celui d'invocation ; les seigneurs de Montmorenci criaient Dieu aide, et ensuite Dieu aide au premier chrétien ; parce qu'un seigneur de cette maison reçut, dit-on, le premier le bâteme après le roi Clovis. La maison de Bauffremont, en Lorraine et en Bourgogne, avait pour cri ces mots, Bauffremont, au premier chrétien, probablement pour une pareille raison. Les ducs de Normandie criaient, Diez aye, Dam Diez aye, c'est-à-dire, Dieu nous aide, le Seigneur Dieu nous aide ; car dans la seconde de ces formules, dam est pris pour dom, dominus, et non pour Notre-Dame, ainsi que l'a pensé la Colombière. Le duc de Bourbon criait Notre-Dame, Bourbon ; et le duc d'Anjou, S. Maurice. La troisième espèce était un cri de résolution, comme celui que prirent les croisés pour la conquête de la Terre-sainte sous Godefroi de Bouillon, Diez le volt, c'est-à-dire Dieu le veut. La quatrième sorte de cri est celui d'exhortation, tel que celui du seigneur de Montaison de la maison de Clermont en Dauphiné, à qui le roi Charles VIII. cria à la recousse Montaison, ou celui des seigneurs de Tournon, au plus druz, c'est-à-dire au plus épais et au plus fort de la mêlée. La cinquième espèce est celui de défi ; comme le cri des seigneurs de Chauvigni, chevaliers pleuvent, c'est-à-dire viennent en foule. La sixième sorte de cri celui de terreur ou de courage, ainsi les seigneurs de Bar criaient au feu, au feu ; et ceux de Guise, place à la bannière. La septième espèce est des cris d'évenement, comme celui des seigneurs de Prie, cant l'oiseaux, parce qu'un seigneur de cette maison avait chargé l'ennemi dans un bois où chantaient des oiseaux. La dernière espèce était le cri de ralliement, comme celui de Mont-joye S. Denis, c'est-à-dire ralliez-vous sous la bannière de saint Denis. Ducange, Dissert. XIe sur l'hist. de S. Louis. Le P. Menestrier, origine des armoiries.

Tous ces différents cris de guerre étaient bons dans les batailles avant l'invention de la poudre à canon et l'introduction des armes à feu. Malgré le cliquetis des armes et le bruit des combattants, on pouvait encore quelquefois entendre ces différents signaux.

On avait même autrefois recours aux cris, parce que le visage des chefs se trouvant caché par le heaume qui le couvrait entièrement, il fallait un cri ou signal pour reconnaître son chef, et se rallier à sa troupe.

Aujourd'hui les troupes ne se reconnaissent dans une action que par leurs enseignes, leur uniforme et d'autres marques visibles ; ce qui n'empêche pas qu'il n'arrive quelquefois des méprises et du désordre. Au reste ces cris de guerre n'ont pas été tellement propres aux Européens, qu'on n'en ait trouvé de semblables parmi les peuples d'Amérique, si l'on en croit d'Acosta. Les Orientaux, tels que les Persans, les Tartares, et les Turcs, ont coutume d'attaquer leurs ennemis en poussant des cris et des hurlements ; ces derniers surtout crient allah, allah Mahomet. Si dans une bataille contre les chrétiens ils voient que ceux-ci, après les avoir enfoncés, négligent de les poursuivre, ils crient giaur camar, c'est-à-dire l'infidèle a peur, et c'est un signal de ralliement pour revenir à la charge. Si au contraire ils se voient enfoncés et pressés l'épée dans les reins, alors ils crient giaur gildy, c'est-à-dire les infidèles sont à nos talons, ce qui est une marque de leur fuite et de leur déroute entière. (G)

CRI ou CRY DE LA FETE, (Jurisprudence et Histoire) est un droit qui se paye en certains endroits au seigneur, pour l'annonce de la fête du lieu. Dans l'origine c'était la rétribution que l'on payait à celui qui allait de porte en porte pour annoncer la fête ; ensuite on se contenta de l'annoncer seulement dans la place publique, et par succession de temps les seigneurs ont appliqué à leur profit la rétribution qui se payait à leur préposé, et l'ont convertie en un droit seigneurial : il en est parlé dans l'histoire de Verdun. (A)

CRI PUBLIC, (Jurisprudence) se prend quelquefois pour clameur publique. Un homme pris en flagrant délit, peut être arrêté à la clameur publique, sans decret ni ordonnance de justice préalable.

Cri public signifie aussi la proclamation, ban, publication qui se fait, après avoir amassé le peuple à son de trompe ou de tambour, dans les places publiques et carrefours d'une ville, bourg et autres lieux, à l'effet de rendre une chose publique.

Cet usage est fort ancien dans la plupart des villes. Il est dit dans des lettres du roi Jean, du 7 Aout 1351, que les consuls de Fleurence en la sénéchaussée de Toulouse, ont droit d'y faire des cris publics dans les affaires qui regardent leur juridiction.

Les règlements de police se publient encore par cri public ; il n'y avait point d'autre manière de les rendre vraiment publics jusqu'en 1461, que commença l'usage des affiches au coin des rues ; et encore présentement on ne laisse pas de publier à son de trompe certains règlements qui concernent jusqu'au menu peuple, afin que ceux qui ne savent pas lire, ne puissent prétendre cause d'ignorance des affiches. Ces sortes de publications ne peuvent être faites que par le juré-crieur de la justice, accompagné des jurés-trompettes ou tambours commis à cet effet.

En matière criminelle, en cas d'absence de l'accusé, après qu'il a été assigné à la quinzaine par affiche à la porte de l'auditoire, il est assigné à la huitaine par un seul cri public. Cette assignation et ce cri public se font dans la place publique, et dans la place qui est au-devant de la juridiction où le procès s'instruit, et encore au-devant du domicîle ou résidence de l'accusé. L'huissier qui donne cette assignation à cri public, se fait accompagner de plusieurs jurés-trompettes ; et après que ceux-ci ont assemblé le peuple par leurs chamades, l'huissier fait à haute voix la lecture de l'assignation. Voyez ci-dev. CONTUMACE, et ci-après CRIEUR PUBLIC. (A)