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Catégorie parente: Logique
Catégorie : Grammaire
adj. (Grammaire) ce mot vient du Latin auxiliaris, et signifie qui vient au secours. En terme de Grammaire, on appelle verbes auxiliaires le verbe être et le verbe avoir, parce qu'ils aident à conjuguer certains temps des autres verbes, et ces temps sont appelés temps composés.

Il y a dans les verbes des temps qu'on appelle simples ; c'est lorsque la valeur du verbe est énoncée en un seul mot ; j'aime, j'aimais, j'aimerai, &c.

Il y a encore les temps composés, j'ai aimé, j'avais aimé, j'aurais aimé, etc. ces termes sont énoncés en deux mots.

Il y a même des temps doublement composés, qu'on appelle sur-composés ; c'est lorsque le verbe est énoncé par trois mots ; quand il a eu diné, j'aurais été aimé, &c.

Plusieurs de ces temps qui sont composés ou sur-composés en Français, sont simples en Latin, surtout à l'actif amavi, j'ai aimé, etc. Le François n'a point de temps simples au passif ; il en est de même en Espagnol, en Italien, en Allemand, et dans plusieurs autres langues vulgaires. Ainsi quoiqu'on dise en Latin en un seul mot, amor, amaris, amatur, on dit en Français, je suis aimé, etc. en Espagnol, soy amado, je suis aimé ; eres amado, tu es aimé ; es amado, il est aimé, etc. en Italien, sono amato, sei amato, è amato.

Les verbes passifs des Latins ne sont composés qu'aux prétérits, et aux autres temps qui se forment du participe passé, amatus sum vel fui, j'ai été aimé ; amatus ero vel fuero, j'aurai été aimé ; on dit aussi à l'actif, amatum ire, qu'il aimera ou qu'il doit aimer ; et au passif, amatum iri, qu'il sera ou qu'il doit être aimé ; amatum est alors un nom indéclinable, ire ou iri ad amatum. Voyez SUPIN.

Cependant on ne s'est point avisé en Latin de donner en ces occasions le nom d'auxiliaire au verbe sum, ni à habeo, ni à ire, quoiqu'on dise habeo persuasum, et que César ait dit, misit copias quas habebat paratas, habere grates, fidem, mentionem, odium, &c.

Notre verbe devoir ne sert-il pas aussi d'auxiliaire aux autres verbes par métaphore ou par extension, pour signifier ce qui arrivera ? je dois aller demain à Versailles ; je dois recevoir, etc. il doit partir, il doit arriver, &c.

Le verbe faire a souvent aussi le même usage ; faire voir, faire part, faire des compliments, faire honte, faire peur, faire pitié, &c.

Je crois qu'on a donné le nom d'auxiliaire à être et à avoir, que parce que ces verbes étant suivis d'un nom verbal, deviennent équivalents à un verbe simple des Latins, veni, je suis venu ; c'est ainsi que parce que propter est une préposition en Latin, on a mis aussi notre à cause au rang des prépositions Françaises, et ainsi de quelques autres.

Pour moi je suis persuadé qu'il ne faut juger de la nature des mots que relativement au service qu'ils rendent dans la langue où ils sont en usage, et non par rapport à quelqu'autre langue dont ils sont l'équivalent ; ainsi ce n'est que par périphrase ou circonlocution que je suis venu est le prétérit de venir. Je est le sujet ; c'est un pronom personnel : suis est seul le verbe à la première personne du temps présent je suis actuellement : venu est un participe ou adjectif verbal, qui signifie une action passée, et qui la signifie adjectivement comme arrivée ; au lieu que avenement la signifie substantivement et dans un sens abstrait : ainsi il est venu, c'est-à-dire, il est actuellement celui qui est venu, comme les Latins disent venturus est, il est actuellement celui qui doit venir. J'ai aimé, le verbe n'est que ai, habeo ; j'ai est dit alors par figure, par métaphore, par similitude. Quand nous disons, j'ai un livre, etc. j'ai est au propre, et nous tenons le même langage par comparaison, lorsque nous nous servons de termes abstraits ; ainsi nous disons, j'ai aimé, comme nous disons, j'ai honte, j'ai peur, j'ai envie, j'ai soif, j'ai faim, j'ai chaud, j'ai froid ; je regarde donc alors aimé comme un véritable nom substantif abstrait et métaphysique, qui répond à amatum, amatu des Latins, quand ils disent amatum ire, aller au sentiment d'aimer, ou amatum iri, l'action d'aller au sentiment d'aimer, être faite, le chemin d'aller au sentiment d'aimer, être pris, viam iri ad amatum : or comme en Latin amatum, amatu, n'est pas le même mot qu'amatus, a, um, de même aimé dans j'ai aimé, n'est pas le même mot que dans je suis aimé, ou aimée ; le premier est actif, j'ai aimé, au lieu que l'autre est passif, je suis aimé : ainsi quand un officier dit, j'ai habillé mon régiment, mes troupes ; habillé est un nom abstrait pris dans un sens actif ; au lieu que quand il dit, les troupes que j'ai habillées ; habillées est un pur adjectif participe qui est dit dans le même sens que paratas, dans la phrase ci-dessus, copias quas habebat paratas. César.

Ainsi il me semble que nos Grammaires pourraient bien se passer du mot d'auxiliaire, et qu'il suffirait de remarquer en ces occasions le mot qui est verbe, le mot qui est nom, et la périphrase qui équivaut au mot simple des Latins. Si cette précision parait trop recherchée à certaines personnes, du moins elles n'y trouveront rien qui les empêche de s'en tenir au train commun, ou plutôt à ce qu'elles savent déjà.

Ceux qui ne savent rien ont bien plus de facilité à apprendre bien, que ceux qui déjà savent mal.

Nos Grammairiens, en voulant donner à nos verbes des temps qui répondissent comme en un seul mot aux temps simples des Latins, ont inventé le mot de verbe auxiliaire : c'est ainsi qu'en voulant assujettir les langues modernes à la méthode Latine, ils les ont embarrassées d'un grand nombre de préceptes inutiles, de cas, de déclinaisons, et autres termes qui ne conviennent point à ces langues, et qui n'y auraient jamais été reçus si les Grammairiens n'avaient pas commencé par l'étude de la langue Latine. Ils ont assujetti de simples équivalents à des règles étrangères : mais on ne doit pas régler la Grammaire d'une langue par les formules de la Grammaire d'une autre langue.

Les règles d'une langue ne doivent se tirer que de cette langue même. Les langues ont précédé les Grammaires ; et celles-ci ne doivent être formées que d'observations justes tirées du bon usage de la langue particulière dont elles traitent. (F)




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