S. m. (Grammaire) c'est la seconde lettre de l'alphabet dans la plupart des langues, et la première des consonnes.

Dans l'alphabet de l'ancien Irlandais, le b est la première lettre, et l'a en est la dix-septième.

Les Ethiopiens ont un plus grand nombre de lettres que nous, et n'observent pas le même ordre dans leur alphabet.

Aujourd'hui les maîtres des petites écoles, en apprenant à lire, font prononcer be, comme on le prononce dans la dernière syllabe de tom-be, il tombe : ils font dire aussi, avec un e muet, de, fe, me, pe ; ce qui donne bien plus de facilité pour assembler ces lettres avec celles qui les suivent. C'est une pratique que l'auteur de la Grammaire générale du P. R. avait conseillée il y a cent ans, et dont il parle comme de la voie la plus naturelle pour montrer à lire facilement en toutes sortes de langues ; parce qu'on ne s'arrête point au nom particulier que l'on a donné à la lettre dans l'alphabet, mais on n'a égard qu'au son naturel de la lettre, lorsqu'elle entre en composition avec quelqu'autre.

Le b étant une consonne, il n'a de son qu'avec une voyelle ; ainsi quand le b termine un mot, tels que Achab, Joab, Moab, Oreb, Job, Jacob, après avoir formé le b par l'approche des deux lèvres l'une contre l'autre, on ouvre la bouche et on pousse autant d'air qu'il en faut pour faire entendre un e muet, et ce n'est qu'alors qu'on entend le b. Cet e muet est beaucoup plus faible que celui qu'on entend dans syllabe, Arabe, Eusebe, globe, robbe. Voyez CONSONNE.

Les Grecs modernes, au lieu de dire alpha, beta, disent alpha, vita : mais il parait que la prononciation qui était autrefois la plus autorisée et la plus générale, était de prononcer beta.

Il est peut-être arrivé en Grèce à l'égard de cette lettre, ce qui arrive parmi nous au b : la prononciation autorisée est de dire be ; cependant nous avons des provinces où l'on dit ve. Voici les principales raisons qui font voir qu'on doit prononcer beta.

Eusebe, au livre X. de la préparation évangélique, ch. VIe dit que l'alpha des Grecs vient de l'aleph des Hébreux, et que beta vient de beth : or il est évident qu'on ne pourrait pas dire que vita vient de beth, surtout étant certain que les Hébreux ont toujours prononcé beth.

Eustathe dit que , est un son semblable au bêlement des moutons, et des agneaux, et cite ce vers d'un ancien :

Is fatuus perinde ac ovis be, be dicens incedit.

Saint Augustin, au liv. II. de Doct. christ. dit que ce mot et ce son beta est le nom d'une lettre parmi les Grecs, et que parmi les Latins beta est le nom d'une herbe ; et nous l'appelons encore aujourd'hui bete ou bette-rave.

Juvenal a aussi donné le même nom à cette lettre :

Hoc discunt omnes ante alpha et beta puellae.

Belus, père de Ninus, roi des Assyriens, qui fut adoré comme un dieu par les Babyloniens, est appelé , l'on dit encore la statue de Beel.

Enfin le mot alphabetum dont l'usage s'est conservé jusqu'à nous, fait bien voir que beta est la véritable prononciation de la lettre dont nous parlons.

On divise les lettres en certaines classes, selon les parties des organes de la parole qui servent le plus à les exprimer ; ainsi le b est une des cinq lettres qu'on appelle labiales, parce que les lèvres sont principalement employées dans la prononciation de ces cinq lettres, qui sont b, p, m, f, Ve

Le b est la faible du p : en serrant un peu plus les lèvres, on fait p de b, et fe de Ve ; ainsi il n'y a pas lieu de s'étonner si l'on trouve ces lettres l'une pour l'autre. Quintilien dit que quoique l'on écrive obtinuit, les oreilles n'entendent qu'un p dans la prononciation, optinuit : c'est ainsi que de scribo on fait scripsi.

Dans les anciennes inscriptions on trouve apsens pour absens, pleps pour plebs, poplicus pour publicus, &c.

Cujas fait venir aubaine ou aubene d'advena, étranger, par le changement de v en b : d'autres disent aubains quasi alibi nati. On trouve berna au lieu de verna.

Le changement de ces deux lettres labiales Ve b, a donné lieu à quelques jeux de mots, entr'autres à ce mot d'Aurélien, au sujet de Bonose qui passait sa vie à boire : Natus est non ut vivat, sed ut bibat. Ce Bonose était un capitaine originaire d'Espagne ; il se fit proclamer empereur dans les Gaules sur la fin du IIIe siècle. L'empereur Probus le fit pendre, et l'on disait, c'est une bouteille de vin qui est pendue.

Outre le changement de b en p ou en Ve on trouve aussi le b changé en f ou en , parce que ce sont des lettres labiales ; ainsi de est venu fremo ; et au lieu de sibilare, on a dit sifilare : d'où est venu notre mot siffler. C'est par ce changement réciproque que du grec les Latins ont fait ambo.

Plutarque remarque que les Lacédémoniens changeaient le en b ; qu'ainsi ils prononçaient Bilippe au lieu de Philippe.

On pourrait rapporter un grand nombre d'exemples pareils de ces permutations de lettres ; ce que nous venons d'en dire nous parait suffisant pour faire voir que les réflexions que l'on fait sur l'étymologie, ont pour la plupart un fondement plus solide qu'on ne le croit communément.

Parmi nous les villes où l'on bat monnaie, sont distinguées les unes des autres par une lettre qui est marquée au bas de l'écu de France. Le B fait connaître que la pièce de monnaie a été frappée à Rouen.

On dit d'un ignorant, d'un homme sans lettres, qu'il ne sait ni a ni b. Nous pouvons rapporter ici à cette occasion, l'épitaphe que M. Menage fit d'un certain abbé :

Ci-dessous git monsieur l'abbé

Qui ne savait ni a ni b ;

Dieu nous en doint bientôt un autre

Qui sache au moins sa patenôtre. (F)