S. m. (Grammaire) c'est une des situations d'un corps relativement à un autre, auquel il est uni et contigu ; et le terme emboitement designe assez par lui-même quelle est l'espèce d'union ou de contiguité dont il s'agit. Elle est telle que le corps qui emboite semble embrasser le corps emboité, comme une boite contient ce qu'on y renferme. Voyez BOITE.

EMBOITEMENT, terme nouvellement introduit dans l'Art militaire, pour exprimer l'espèce d'entrelacement que font les soldats d'un bataillon lorsqu'on veut le faire tirer, pour que les fusils des soldats du quatrième rang dépassent un peu le premier.

Par le moyen de cet entrelacement, les soldats n'occupent guère qu'un pied dans la fîle ; et comme les fusils ont environ cinq pieds de longueur, ceux du quatrième rang peuvent alors dépasser de quelque chose le premier.

Ainsi l'objet de l'emboitement est de faire en sorte que le feu des soldats du dernier rang ne puisse causer aucun accident à ceux du premier.

Dans cet état, les soldats sont dans une attitude fort gênante. Les deux premiers rangs ont un genou à terre, et les jambes entrelacées les unes dans les autres : le troisième et le quatrième rang sont droits, mais fort serrés aussi sur les premiers, de manière que les soldats du troisième ont les jambes placées dans celles du second, et que ceux du quatrième les ont dans celles du troisième.

Les soldats du premier rang ont l'avantage de pouvoir se servir aisément de leurs armes ; il n'en est pas de même de ceux du second, parce que l'incommodité de leur situation ne leur permet guère d'ajuster leur fusil pour tirer sur l'ennemi. Le troisième rang tire aussi facilement que le premier ; mais pour le quatrième, quelqu'emboitement que l'on fasse son feu est toujours fort dangereux pour la tête du bataillon. L'expérience le fait voir dans l'exercice ; car ce n'est qu'avec un très-grand soin qu'on parvient à faire dépasser les fusils du quatrième rang du premier : encore arrive-t-il souvent, lorsqu'on fait tirer les soldats, que quelqu'officier reçoit des coups de feu dans ses habits, et que les soldats des premiers rangs ont les cheveux brulés. Il est vrai que ce dernier accident peut s'attribuer aux amorces ; mais le premier prouve suffisamment le danger auquel les officiers sont exposés par le feu du quatrième rang. Pour remédier à cet inconvénient, il ne faudrait dans l'action faire tirer que les trois premiers rangs ; ou lorsqu'il ne s'agit que de tirer sans se joindre, mettre le bataillon sur trois rangs, conformément à l'instruction du 14. Mai 1754, qui porte que toutes les fois que l'infanterie prendra les armes en quelque occasion que ce sait, elle soit formée sur trois rangs. Voyez EVOLUTIONS.

Quoiqu'il paraisse difficîle aujourd'hui de faire tirer quatre rangs à la fois sans inconvénient, et qu'on ait imaginé l'emboitement pour y parvenir, on en a pourtant fait tirer jusqu'à cinq autrefois, suivant la Fontaine. " Pour faire tirer cinq rangs à la fais, dit cet auteur dans sa doctrine militaire, imprimée à Paris en 1667, on fera mettre les deux premiers rangs à genoux, le troisième fort courbé, le quatrième un peu moins courbé, et le cinquième passe le bout de son mousquet par-dessus l'épaule du quatrième rang ; et ils tirent ainsi sans s'offenser l'un ni l'autre, comme nous avons expérimenté souvent ". Doctrine militaire, pag. 449. (Q)