syn. (Grammaire) s'emploient l'un et l'autre pour désigner une certaine portion de substance animale ; mais le mot viande, dit M. l'abbé Girard, porte avec lui l'idée d'aliment, et le mot chair désigne un rapport à la composition physique d'une partie de l'animal. Nous ajouterons que chair ne se dit que des parties molles (voyez CHAIR, article d'Anatomie) ; et que viande au contraire se dit d'une portion de substance animale mêlée de parties solides et de parties dures, comme il parait par le proverbe, il n'y a point de viande sans os. Viande se prend encore d'une façon plus générale et plus abstraite que chair ; car on dit de la chair de poulet, de perdrix, de lièvre, etc. et de toutes ces chairs, que ce sont des viandes : mais on ne dit pas de la viande de poulet, de perdrix, etc. ce qui vient peut-être de ce qu'anciennement viande et aliment étaient synonymes. En effet, toute viande se mange, et il y a des chairs qui ne se mangent pas. On dit viande de boucherie, et non chair de boucherie. Voyez VIANDE, voyez BOUCHER. Et quand on dit, voilà de belles chairs, et voilà de belles viandes, on entend encore deux choses fort différentes : la première de ces expressions peut être l'éloge d'une jolie femme ; et l'autre est celle d'un bon morceau de bœuf ou de veau non cuit.

CHAIR, s. f. en Anatomie, est la partie du corps animal, uniforme, fibreuse, molle, et pleine de sang ; celle qu'on peut regarder comme la composition et la liaison de la plupart des autres parties du corps.

Par le mot chair, on entend proprement les parties du corps où les vaisseaux sanguins sont si petits, qu'ils ne retiennent que la quantité de sang nécessaire pour conserver leur couleur rouge.

Les anciens distinguaient cinq différentes sortes de chair : la première, musculeuse, fibreuse, ou fistulaire, telle qu'est la substance du cœur, et celle des autres muscles. Voyez MUSCLE, FIBRE, etc. La seconde, parenchymateuse, comme la chair des poumons, du foie, et de la rate. Voyez PARENCHYME, RATE, etc. La troisième, la chair des viscères, comme celle de l'estomac et des intestins. Voyez INTESTINS. La quatrième, glanduleuse, comme celle des mammelles, du pancréas, etc. Voyez MAMMELLES, PANCREAS, etc. Et la cinquième, spongieuse, comme la chair des gencives, du gland, des lèvres, etc. Voyez SPONGIEUX, GLAND, etc.

Les modernes n'admettent qu'une sorte de chair, celle qui forme les muscles, et qui est composée de petits tuyaux ou vaisseaux qui contiennent du sang : ainsi les parties charnues et les parties musculeuses du corps sont la même chose, selon eux. Voyez MUSCLE.

Quelquefois cependant ils donnent le nom de chair aux glandes : en ce cas, pour la distinguer, ils l'appellent chair glanduleuse. Voyez GLANDE.

A l'égard des parenchymes, on a trouvé qu'ils sont toute autre chose que ce que les anciens pensaient. Les poumons ne sont qu'un assemblage de vésicules membraneuses, que l'air dilate et gonfle. Voyez POUMONS. Le cœur est un véritable muscle composé des mêmes parties que les autres. Voyez COEUR. Le foie est un assemblage de glandes où la bîle se sépare. Voyez FOIE. La rate est un amas de vésicules remplies de sang ; et les reins sont comme le foie un assemblage de glandes qui servent à la secrétion de l'urine. Voyez RATE et REIN. (L)

* La chair peut être de l'objet du chimiste et du médecin : mais alors elle est moins considérée comme une partie animale, que comme un aliment de l'homme ; comme chair, que comme viande. Voyez VIANDE.

CHAIR musculeuse carrée, caro musculosa quadrata, en Anatomie, est le nom que Fallope et Spigelius donnent à un muscle qu'on appelle plus communément le court palmaire. Voyez PALMAIRE. (L)

* CHAIR, (Histoire ancienne et moderne) les Pythagoriciens n'en mangeaient point : le seul doute qu'il y ait sur ce fait, ne concerne que le plus ou le moins de généralité de cette défense. Il y en a qui prétendent qu'elle n'était que pour les parfaits ; ceux qui s'étant élevés au plus sublime degré de la théorie, étaient comptés au nombre des disciples ésotériques. D'autres ajoutent qu'il était même permis en sûreté de conscience à ces derniers de toucher quelquefois à la chair des animaux sacrifiés. Voici la raison qu'on lit dans Séneque, du scrupule des Pythagoriciens. Omnium inter omnia cognationem esse, et aliorum commercium in alias atque alias formas transeuntium ; nullam animam interire, nec cessare quidem, nisi tempore exiguo, dum in aliud corpus transfunditur. Interim sceleris hominibus et parricidii metum fecisse, cum possint in parentis animam inscii incurrere, et ferro morsuve violare in quo cognatus aliquis spiritus hospitaretur. C'est-à-dire, à-peu-près, que les âmes circulant sans-cesse d'un corps dans un autre, ces philosophes craignaient que l'âme de quelques-uns de leurs parents ne leur tombât sous la dent, s'ils se hasardaient à manger de la chair des animaux. Voyez l'article ABSTINENCE.

Les Hébreux s'abstenaient de la chair de certains animaux, parce qu'ils la croyaient impure. S. Paul dit que plusieurs fidèles se faisaient un crime de manger de la chair des animaux consacrés aux idoles ; mais il ajoute que tout est pur pour ceux qui sont purs.

On raconte de certains peuples sauvages, qu'ils n'ont aucune répugnance pour la chair humaine ; qu'ils mangent leurs ennemis ; qu'ils mangent leurs amis même tués à la guerre ; qu'ils se nourrissent des criminels condamnés à la mort ; et qu'ils croient, en mangeant leurs pères quand ils sont vieux, les respecter beaucoup mieux, qu'en les laissant mourir et qu'en les inhumant : ces barbares s'imaginent que leur corps est un tombeau beaucoup plus honorable pour eux, que le sein de la terre ; et qu'il vaut mieux que la chair des pères serve d'aliment aux enfants, que d'être la pâture des vers.

* CHAIR, se dit, dans l'Ecriture-sainte, de l'homme vivant, ou même de tous les animaux vivants ; la fin de toute chair est arrivée en ma présence : des parties destinées à la génération ; que l'homme sage sépare de ses chairs la femme libertine : du péché pour lequel Dieu fit pleuvoir le feu du ciel ; ils ont suivi une chair étrangère.

CHAIR s'emploie aussi, en Théologie, en parlant des mystères de l'incarnation et de l'eucharistie.

Le Verbe s'est fait chair, Verbum caro factum est. Voyez INCARNATION.

L'Eglise catholique croit que dans le sacrement de l'eucharistie, le pain est réellement changé en la chair de Jesus-Christ, et que c'est la même chair ou le même corps qui est né de la Vierge Marie, qui a souffert sur la croix. Voyez TRANSUBSTANTIATION.

La résurrection de la chair est un article de foi. Voyez RESURRECTION.

CHAIR, dans un sens moral, se dit de la concupiscence qui se soulève et se révolte contre la raison : caro concupiscit adversus spiritum : en ce sens elle est opposée à l'esprit ou à la grâce ; et ces deux mots, esprit et chair, sont très-usités dans les épitres des apôtres, pour signifier la grâce et la concupiscence.

CHAIR désigne encore, en Théologie morale, le péché de luxure : on dit l'œuvre de chair, pour les péchés opposés à la chasteté. (G)

CHAIR, couleur de chair, (en Peinture) est une teinte faite avec du blanc et du rouge. Il se prend aussi pour carnation. L'on dit : voilà de belles chairs, le peintre fait de la chair, les chairs sont maltraitées dans le tableau : toutes ces façons de parler s'entendent des carnations, qui ne sont en effet que l'expression de la chair. (R)

CHAIR, en Fauconnerie ; être bien à la chair, est synonyme à chasser avec ardeur. Ainsi on dit de l'oiseau, qu'il est bien à la chair, pour faire entendre qu'il chasse bien.

CHAIR, (Maréchallerie), bouillon de chair, voyez BOUILLON. Se charger de chair, voyez Se CHARGER.

* CHAIR, (Jardinage) se dit de la partie du fruit qui est couverte de la peau, qui forme sa substance et qui se mange : cette partie reçoit différents noms selon ses qualités ; celle de la poire d'Angleterre est fondante ; celle de la pomme de rainette est cassante, etc. celle du melon est rouge, etc.

* CHAIR, (Art mécanique) Les Tanneurs, Corroyeurs, Chamoiseurs, Mégissiers entendent par la chair, le côté de la peau qui touchait à la chair de l'animal, quand il était vivant ; l'autre côté s'appelle la fleur : comme dans la préparation des peaux par ces ouvriers, elles se travaillent des deux côtés, ils disent, au lieu de travailler la peau du côté de la chair, donner une façon de chair ; au lieu de travailler la peau du côté du poil, donner une façon de fleur : la chair ne s'unit jamais aussi parfaitement que la fleur, et par conséquent elle forme l'envers de la peau. Il semble donc que la fleur devrait toujours être à l'extérieur des ouvrages en peau ; cependant on y met quelquefois la chair : mais c'est une bizarrerie. Voyez CHAMOISEUR, TANNEUR, CORROYEUR, MEGISSIER, etc. Les Corroyeurs appellent vaches, veaux à chair grasse, les peaux auxquelles ils ont donné le suif, tant de fleur que de chair ; et vaches et veaux à chair douce, les peaux auxquelles ils ont donné du suif de fleur, et de l'huîle de chair. Voyez CORROYEUR. Les Chamoiseurs disent tenir de chair, pour désigner l'opération par laquelle avec le couteau ils enlèvent, sur le chevalet, du côté de la chair, tout ce qui peut en être détaché, afin de rendre les peaux plus douces et plus maniables ; ils tiennent de chair, après avoir effleuré et immédiatement avant que de faire boire. Voyez l'article CHAMOISEUR.

CHAIR fossile, (Histoire naturelle, Minéralogie) Voyez l'article CARO FOSSILIS. On la nomme aussi en latin caro montana. C'est une espèce d'amiante très-compacte, très-pesante, et qui devient si dure dans le feu, qu'elle donne des étincelles lorsqu'on la frappe avec l'acier. Cette pierre est composée de feuillets épais et solides, qui sont formés par un assemblage de fibres ou filets très-durs. Wallerius, dans sa Minéralogie, en distingue deux espèces : la première est composée de feuilles posées parallélement les unes sur les autres ; la seconde est un assemblage de feuilles recourbées. (-)