S. m. (Grammaire) c'est la troisième lettre de l'alphabet des Orientaux et des Grecs, et la septième de l'alphabet latin que nous avons adopté.

Dans les langues orientales et dans la langue grecque, elle représentait uniquement l'articulation gue, telle que nous la faisons entendre à la fin de nos mots français, digue, figue ; et c'est le nom qu'on aurait dû lui donner dans toutes ces langues : mais les anciens ont eu leurs irrégularités et leurs écarts comme les modernes. Cependant les divers noms que ce caractère a reçus dans les différentes langues anciennes, conservaient du-moins l'articulation dont il était le type : les Grecs l'appelaient gamma, les Hébreux et les Phéniciens gimel, prononcé comme guimauve ; les Syriens gomal, et les Arabes gum, prononcé de la même manière.

On peut voir (article C et méth. de P. R.) l'origine du caractère g dans la langue latine ; et la preuve que les Latins ne lui donnaient que cette valeur, se tire du témoignage de Quintilien, qui dit que le g n'est qu'une diminution du c : or il est prouvé que le c se prononçait en latin comme le kappa des Grecs, c'est-à-dire qu'il exprimait l'articulation que, et conséquemment le g n'exprimait que l'articulation gue. Ainsi les Latins prononçaient cette lettre dans la première syllabe de gygas comme dans la seconde ; et si nous prononçons autrement, c'est que nous avons transporté mal-à-propos aux mots latins les usages de la prononciation française.

Avant l'introduction de cette lettre dans l'alphabet romain, le c représentait les deux articulations, la forte et la faible, que et gue, et l'usage faisait connaître à laquelle de ces deux valeurs il fallait s'en tenir : c'est à-peu-près ainsi que notre s exprime tantôt l'articulation forte, comme dans la première syllabe de Sion, et tantôt la faible, comme dans la seconde de vision. Sous ce point de vue, la lettre qui désignait l'articulation gue, était la troisième de l'alphabet latin, comme de celui des Grecs et des Orientaux. Mais les doutes que cette équivoque pouvait jeter sur l'exacte prononciation, fit donner à chaque articulation un caractère particulier ; et comme ces deux articulations ont beaucoup d'affinité, on prit pour exprimer la faible le signe même de la forte C, en ajoutant seulement sur sa pointe inférieure une petite ligne verticale G, pour avertir le lecteur d'en affoiblir l'expression.

Le rapport d'affinité qui est entre les deux articulations que et gue, est le principe de leur commutabilité, et de celle des deux lettres qui les représentent, du c et du g ; observation importante dans l'art étymologique, pour reconnaître les racines génératrices naturelles ou étrangères de quantité de mots dérivés : ainsi notre mot français Cadix vient du latin Gades, par le changement de l'articulation faible en forte ; et par le changement contraire de l'articulation forte en faible, nous avons tiré gras du latin crassus ; les Romains écrivaient et prononçaient indistinctement l'une ou l'autre articulation dans certains mots, vicesimus ou vigesimus, Cneius ou Gneius. Dans quelques mots de notre langue, nous retenons le caractère de l'articulation forte, pour conserver la trace de leur étymologie ; et nous prononçons la faible, pour obéir à notre usage, qui peut-être a quelque conformité avec celui de la latine ; ainsi nous écrivons Claude, cicogne, second, et nous prononçons Glaude, cigogne, segond. Quelquefois au contraire nous employons le caractère de l'articulation faible, et nous prononçons la forte ; ce qui arrive surtout quand un mot finit par le caractère g, et qu'il est suivi d'un autre mot qui commence par une voyelle ou par un h non aspiré : nous écrivons sang épais, long hiver, et nous prononçons san-k-épais, lon-k-hiver.

Assez communément, la raison de ces irrégularités apparentes, de ces permutations, se tire de la conformation de l'organe ; on l'a Ve au mot FREQUENTATIF, où nous avons montré comment ago et lego ont produit d'abord les supins agitum, legitum, et ensuite, à l'occasion de la syncope, actum, lectum.

L'euphonie, qui ne s'occupe que de la satisfaction de l'oreille, en combinant avec facilité les sons et les articulations, décide souverainement de la prononciation, et souvent de l'orthographe, qui en est ou doit en être l'image ; elle change non-seulement g en c, ou c en g ; elle Ve jusqu'à mettre g à la place de toute autre consonne dans la composition des mots ; c'est ainsi que l'on dit en latin aggredi pour adgredi, suggerere pour sub-gerere, ignoscère pour in-noscère ; et les Grecs écrivaient , quoiqu'ils prononçassent comme les Latins ont prononcé les mots angelus, ancora, Anchises, qu'ils en avaient tirés, et dans lesquels ils avaient d'abord conservé l'orthographe grecque, aggelus, agcora, Agchises : ils avaient même porté cette pratique, au rapport de Varron, jusque dans des mots purement latins, et ils écrivaient aggulus, agceps, iggero, avant que d'écrire angelus, anceps, ingero : ceci donne lieu de soupçonner que le g chez les Grecs et chez les Latins dans le commencement, était le signe de la nasalité, et que ceux-ci y substituèrent la lettre n, ou pour faciliter les liaisons de l'écriture, ou parce qu'ils jugèrent que l'articulation qu'elle exprime était effectivement plus nasale. Il semble qu'ils aient aussi fait quelque attention à cette nasalité dans la composition des mots quadringenti, quingenti, où ils ont employé le signe g de l'articulation faible gue, tandis qu'ils ont conservé la lettre c, signe de l'articulation forte que, dans les mots ducenti, sexcenti, où la syllabe précédente n'est point nasale.

Il ne parait pas que dans la langue italienne, dans l'espagnole, et dans la française, on ait beaucoup raisonné pour nommer ni pour employer la lettre G et sa correspondante C ; et ce défaut pourrait bien, malgré toutes les conjectures contraires, leur venir de la langue latine, qui est leur source commune. Dans les trois langues modernes, on emploie ces lettres pour représenter différentes articulations ; et cela à-peu-près dans les mêmes circonstances : c'est un premier vice. Par un autre écart aussi peu raisonnable, on a donné à l'une et à l'autre une dénomination prise d'ailleurs, que de leur destination naturelle et primitive. On peut consulter les Grammaires italienne et espagnole : nous ne sortirons point ici des usages de notre langue.

Les deux lettres C et G y suivent jusqu'à certain point le même système, malgré les irrégularités de l'usage.

1°. Elles y conservent leur valeur naturelle devant les voyelles a, o, u, et devant les consonnes l, r : on dit, galon, gosier, Gustave, gloire, grâce, comme on dit, cabane, colombe, cuvette, clameur, crédit.

2°. Elles perdent l'une et l'autre leur valeur originelle devant les voyelles e, i ; celle qu'elles y prennent leur est étrangère, et a d'ailleurs son caractère propre : C représente alors l'articulation se, dont le caractère propre est s ; et l'on prononce cité, céleste, comme si l'on écrivait sité, séleste : de même G représente dans ce cas l'articulation je, dont le caractère propre est j ; et l'on prononce génie, gibier, comme s'il y avait jénie, jibier.

3°. On a inséré un e absolument muet et aiseux après les consonnes C et G, quand on a voulu les dépouiller de leur valeur naturelle devant a, o, u, et leur donner celles qu'elles ont devant e, i. Ainsi on a écrit commencea perceons, conceu, pour faire prononcer comme s'il y avait commensa, persons, consu ; et de même on a écrit mangea, forgeons, et l'on prononce manja, forjons. Cette pratique cependant n'est plus d'usage aujourd'hui pour la lettre c ; on a substitué la cédille à l'e muet, et l'on écrit commença, perçons, conçu.

4°. Pour donner au contraire leur valeur naturelle aux deux lettres C et G devant e, i, et leur ôter celle que l'usage y a attachée dans ces circonstances, on met après ces consonnes un u muet : comme dans cueuillir, guérir, guider, où l'on n'entend aucunement la voyelle u.

5°. La lettre double Xe si elle se prononce fortement, réunit la valeur naturelle de c et l'articulation forte s, comme dans axiome, Alexandre, que l'on prononce acsiome, Alecsandre ; si la lettre x se prononce faiblement, elle réunit la valeur naturelle de G et l'articulation de ze, faible de se, comme dans exil, exemple, que l'on prononce egzil, egzemple.

6°. Les deux lettres C et G deviennent auxiliaires pour exprimer des articulations auxquelles l'usage à refusé des caractères propres. C suivi de la lettre h est le type de l'articulation forte, dont la faible est exprimée naturellement par j : ainsi les deux mots Japon, chapon, ne diffèrent que parce que l'articulation initiale est plus forte dans le second que dans le premier. G suivi de la lettre n est le symbole de l'articulation que l'on appelle communément n mouillé, et que l'on entend à la fin des mots cocagne, règne, signe.

Pour finir ce qui concerne la lettre G, nous ajouterons une observation. On l'appelle aujourd'hui gé, parce qu'en effet elle exprime souvent l'articulation jé : celle-ci aura été substituée dans la prononciation à l'articulation gue sans aucun changement dans l'orthographe ; on peut le conjecturer par les mots jambe, jardin, etc. que l'on ne prononce encore gambe, gardin dans quelques provinces septentrionales de la France, que parce que c'était la manière universelle de prononcer ; gambade même et gambader n'ont point de racine plus raisonnable que gambe ; de-là l'abus de l'épellation et de l'emploi de cette consonne.

G dans les inscriptions romaines avait diverses significations. Seule, cette lettre signifiait ou gratis, ou gens ou gaudium, ou tel autre mot que le sens du reste de l'inscription pouvait indiquer : accompagnée, elle était sujette aux mêmes variations.

G. V. genio urbis, G. P. R. gloria populi romani ; Voyez les antiquaires, et particulièrement le traité d'Aldus Manucius de veter. not. explanatione.

G chez les anciens a signifié quatre cent suivant ce vers.

G. Quadringentos demonstrativa tenebit.

& même quarante mille, mais alors elle était chargée d'un tiret

G dans le comput ecclésiastique, est la septième et la dernière lettre dominicale.

Dans les poids elle signifie un gros ; dans la Musique elle marque une des clés G-ré-sol ; et sur nos monnaies elle indique la ville de Poitiers. (E. R. M.)