S. f. (Grammaire) ce mot vient du Latin caesura, qui dans le sens propre signifie incision, coupure, entaille, R. caedere, couper, tailler ; au supin caesum, d'où vient césure. Ce mot n'est en usage parmi nous que par allusion et par figure, quand on parle de la mécanique du vers.

La césure est un repos que l'on prend dans la prononciation d'un vers après un certain nombre de syllabes. Ce repos soulage la respiration, et produit une cadence agréable à l'oreille : ce sont ces deux motifs qui ont introduit la césure dans les vers, facilité pour la prononciation, cadence ou harmonie pour l'oreille.

La césure sépare le vers en deux parties, dont chacune est appelée hémistiche, c'est-à-dire demi-vers, moitié de vers : ce mot est Grec. Voyez HEMISTICHE et ALEXANDRIN.

En Latin on donne aussi le nom de césure à la syllabe après laquelle est le repos, et cette syllabe est la première du pied suivant :

Arma vaerumque cano.. Trojae qui primus ab oris.

La syllabe no est la césure, et commence le troisième pied.

En François la césure ou repos est mal placée entre certains mots qui doivent être dits tout de suite, et qui font ensemble un sens inséparable, selon la manière ordinaire de parler et de lire ; tels sont la préposition et son complément : ainsi le vers suivant est défectueux.

Adieu, je m'en vais à.... Paris pour mes affaires.

Il en est de même du verbe est qui joint l'attribut et le sujet, comme dans ces vers.

On sait que la chair est... fragîle quelquefois

Par la même raison, on ne doit jamais disposer le substantif et l'adjectif de façon que l'un finisse le premier hémistiche, et que l'autre commence le second, comme dans ce vers.

Iris dont la beauté... charmante nous attire.

Cependant si le substantif faisait le repos du premier hémistiche, et qu'il fût suivi de deux adjectifs qui achevassent le sens, le vers serait bon, comme :

Il est une ignorance... et sainte et salutaire. Sacy.

Ce qui fait voir qu'en toutes ces occasions la grande règle, c'est de consulter l'oreille, et de s'en rapporter à son jugement.

Dans les grands vers, c'est-à-dire dans ceux de douze syllabes, la césure doit être après la sixième syllabe.

Jeune et vaillant héros... dont la haute sagesse.

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Observez que cette sixième syllabe doit être une syllabe pleine ; qu'ainsi le repos ne peut se faire sur une syllabe qui finirait par un e muet : il faut alors que cet e muet se trouve à la septième syllabe, et s'élide avec le mot qui le suit.

Et qui seul sans ministre... à l'exemple des dieux

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Soutiens tout par toi-même... et vois tout par tes yeux.

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Dans les vers de dix syllabes, la césure doit être après la quatrième syllabe.

Ce monde-ci... n'est qu'une œuvre comique

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Où chacun fait... ses rôles différents. Rousseau.

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Il n'y a point de césure prescrite pour les vers de huit syllabes, ni pour ceux de sept ; cependant on peut observer que ces sortes de vers sont bien plus harmonieux quand il y a une césure après la troisième ou la quatrième syllabe dans les vers de huit syllabes, et après la troisième dans ceux de sept.

Au sortir... de ta main puissante,

Grand Dieu que l'homme était heureux !

La vérité toujours présente

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Te livrait à ses premiers vœux.

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Voici des exemples de vers de sept syllabes.

Qu'on doit plaindre une bergère

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Si facîle à s'alarmer :

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Pourquoi du plaisir d'aimer

Faut-il se faire une affaire ?

Quels bergers... en font autant

Dans l'ingrat... siècle où nous sommes ?

Achante qu'elle aime tant

Est peut-être un inconstant

Comme tous les autres hommes. Deshoulières.

C'est ce que l'on pourra encore observer dans la première fable de M. de la Fontaine.

La cigale... ayant chanté

Tout l'été,

Se trouva fort dépourvue.