GLORIEUX, GLORIEUSEMENT, GLORIFIER, (Grammaire) La gloire est la réputation jointe à l'estime ; elle est au comble, quand l'admiration s'y joint. Elle suppose toujours des choses éclatantes, en actions, en vertus, en talents, et toujours de grandes difficultés surmontées. César, Alexandre ont eu de la gloire. On ne peut guère dire que Socrate en ait eu ; il attire l'estime, la vénération, la pitié, l'indignation contre ses ennemis ; mais le terme de gloire serait impropre à son égard. Sa mémoire est respectable, plutôt que glorieuse. Attila eut beaucoup d'éclat ; mais il n'a point de gloire, parce que l'histoire, qui peut-être se trompe, ne lui donne point de vertus. Charles XII. a encore de la gloire, parce que sa valeur, son désintéressement, sa libéralité, ont été extrêmes. Les succès suffisent pour la réputation, mais non pas pour la gloire. Celle de Henri IV. augmente tous les jours, parce que le temps a fait connaître toutes ses vertus, qui étaient incomparablement plus grandes que ses défauts.

La gloire est aussi le partage des inventeurs dans les beaux Arts ; les imitateurs n'ont que des applaudissements. Elle est encore accordée aux grands talents, mais dans les arts sublimes. On dira bien la gloire de Virgile, de Cicéron, mais non de Martial et d'Aulugelle.

On a osé dire la gloire de Dieu ; il travaille pour la gloire de Dieu, Dieu a créé le monde pour sa gloire : ce n'est pas que l'Etre suprême puisse avoir de la gloire ; mais les hommes n'ayant point d'expressions qui lui conviennent, emploient pour lui celles dont ils sont les plus flattés.

La vaine gloire est cette petite ambition qui se contente des apparences, qui s'étale dans le grand faste, et qui ne s'élève jamais aux grandes choses. On a Ve des souverains qui ayant une gloire réelle, ont encore aimé la vaine gloire, en recherchant trop les louanges, en aimant trop l'appareil de la représentation.

La fausse gloire tient souvent à la vaine, mais souvent elle se porte à des excès ; et la vaine se renferme plus dans les petitesses. Un prince qui mettra son honneur à se vanger, cherchera une gloire fausse plutôt qu'une gloire vaine.

Faire gloire, faire vanité, se faire honneur, se prennent quelquefois dans le même sens, et ont aussi des sens différents. On dit également, il fait gloire, il fait vanité, il se fait honneur de son luxe, de ses excès : alors gloire signifie gloire. Il fait gloire de souffrir pour la bonne cause, et non pas il fait vanité. Il se fait honneur de son bien, et non pas il fait gloire ou vanité de son bien.

Rendre gloire signifie reconnaître, attester. Rendez gloire à la vérité, reconnaissez la vérité. Au Dieu que vous servez, princesse, rendez gloire (Athal.), attestez le Dieu que vous servez.

La gloire est prise pour le ciel ; il est au séjour de la gloire.

Où le conduisez-vous ?... à la mort.... à la gloire. Polieucte.

On ne se sert de ce mot pour désigner le ciel que dans notre religion. Il n'est pas permis de dire que Bacchus, Hercule, furent reçus dans la gloire, en parlant de leur apothéose.

Glorieux, quand il est l'épithète d'une chose inanimée, est toujours une louange ; bataille, paix, affaire glorieuse. Rang glorieux signifie rang élevé, et non pas rang qui donne de la gloire, mais dans lequel on peut en acquérir. Homme glorieux, esprit glorieux, est toujours une injure ; il signifie celui qui se donne à lui-même ce qu'il devrait mériter des autres : ainsi on dit un règne glorieux, et non pas un roi glorieux. Cependant ce ne serait pas une faute de dire au pluriel, les plus glorieux conquérants ne valent pas un prince bienfaisant ; mais on ne dira pas, les princes glorieux, pour dire les princes illustres.

Le glorieux n'est pas tout à fait le fier, ni l'avantageux, ni l'orgueilleux. Le fier tient de l'arrogant et du dédaigneux, et se communique peu. L'avantageux abuse de la moindre déférence qu'on a pour lui. L'orgueilleux étale l'excès de la bonne opinion qu'il a de lui-même. Le glorieux est plus rempli de vanité ; il cherche plus à s'établir dans l'opinion des hommes ; il veut réparer par les dehors ce qui lui manque en effet. L'orgueilleux se croit quelque chose ; le glorieux veut paraitre quelque chose. Les nouveaux parvenus sont d'ordinaire plus glorieux que les autres. On a appelé quelquefois les Saints et les Anges, les glorieux, comme habitants du séjour de la gloire.

Glorieusement est toujours pris en bonne part ; il règne glorieusement ; il se tira glorieusement d'un grand danger, d'une mauvaise affaire.

Se glorifier est tantôt pris en bonne part, tantôt en mauvaise, selon l'objet dont il s'agit. Il se glorifie d'avoir exercé son emploi avec dureté. Il se glorifie d'une disgrace qui est le fruit de ses talents et l'effet de l'envie. On dit des martyrs qu'ils glorifiaient Dieu, c'est-à-dire que leur constance rendait respectable aux hommes le Dieu qu'ils annonçaient. Article de M. DE VOLTAIRE.

GLOIRE, s. f. (Philosoph. Morale) c'est l'éclat de la bonne renommée.

L'estime est un sentiment tranquille et personnel ; l'admiration, un mouvement rapide et quelquefois momentané ; la célébrité, une renommée étendue ; la gloire, une renommée éclatante, le concert unanime et soutenu d'une admiration universelle.

L'estime a pour base l'honnête ; l'admiration, le rare et le grand dans le bien moral ou physique ; la célébrité, l'extraordinaire, l'étonnant pour la multitude ; la gloire, le merveilleux.

Nous appelons merveilleux ce qui s'élève ou semble s'élever au-dessus des forces de la nature : ainsi la gloire humaine, la seule dont nous parlons ici, tient beaucoup de l'opinion ; elle est vraie ou fausse comme elle.

Il y a deux sortes de fausse gloire ; l'une est fondée sur un faux merveilleux ; l'autre sur un merveilleux réel, mais funeste. Il semble qu'il y ait aussi deux espèces de vraie gloire ; l'une fondée sur un merveilleux agréable ; l'autre sur un merveilleux utîle au monde : mais ces deux objets n'en font qu'un.

La gloire fondée sur un faux merveilleux, n'a que le règne de l'illusion, et s'évanouit avec elle : telle est la gloire de la prospérité. La prospérité n'a point de gloire qui lui appartienne ; elle usurpe celle des talents et des vertus, dont on suppose qu'elle est la compagne : elle en est bien-tôt dépouillée, si l'on s'aperçoit que ce n'est qu'un larcin ; et pour l'en convaincre, il suffit d'un revers, eripitur persona, manet res. On adorait la fortune dans son favori ; il est disgracié, on le méprise : mais ce retour n'est que pour le peuple ; aux yeux de celui qui voit les hommes en eux-mêmes, la prospérité ne prouve rien, l'adversité n'a rien à détruire.

Qu'avec un esprit souple et une âme rampante, un homme né pour l'oubli s'élève au sommet de la fortune ; qu'il parvienne au comble de la faveur, c'est un phénomène que le vulgaire n'ose contempler d'un oeil fixe ; il admire, il se prosterne ; mais le sage n'est point ébloui ; il découvre les taches de ce prétendu corps lumineux, et voit que ce qu'on appelle sa lumière, n'est rien qu'un éclat réfléchi, superficiel et passager.

La gloire fondée sur un merveilleux funeste, fait une impression plus durable ; et à la honte des hommes, il faut un siècle pour l'effacer : telle est la gloire des talents supérieurs, appliqués au malheur du monde.

Le genre de merveilleux le plus funeste, mais le plus frappant, fut toujours l'éclat des conquêtes. Il Ve nous servir d'exemple, pour faire voir aux hommes combien il est absurde d'attacher la gloire aux causes de leurs malheurs.

Vingt mille hommes dans l'espoir du butin, en ont suivi un seul au carnage. D'abord un seul homme à la tête de vingt mille hommes déterminés et dociles, intrépides et soumis, a étonné la multitude. Ces milliers d'hommes en ont égorgé, mis en fuite, ou subjugué un plus grand nombre. Leur chef a eu le front de dire, j'ai combattu, je suis vainqueur ; et l'Univers a répété, il a combattu, il est vainqueur : de-là le merveilleux et la gloire des conquêtes.

Savez-vous ce que vous faites, peut-on demander à ceux qui célebrent les conquérants ? Vous applaudissez à des gladiateurs qui, s'exerçant au milieu de vous, se disputent le prix que vous réservez à qui vous portera les coups les plus surs et les plus terribles. Redoublez d'acclamations et d'éloges. Aujourd'hui ce sont les corps sanglans de vos voisins qui tombent épars dans l'arene ; demain ce sera votre tour.

Telle est la force du merveilleux sur les esprits de la multitude. Les opérations productrices sont la plupart lentes et tranquilles ; elles ne nous étonnent point. Les opérations destructives sont rapides et bruyantes ; nous les plaçons au rang des prodiges. Il ne faut qu'un mois pour ravager une province ; il faut dix ans pour la rendre fertile. On admire celui qui l'a ravagée ; à peine daigne-t-on penser à celui qui la rend fertile. Faut-il s'étonner qu'il se fasse tant de grands maux et si peu de grands biens ?

Les peuples n'auront-ils jamais le courage ou le bon sens de se réunir contre celui qui les immole à son ambition effrénée, et de lui dire d'un côté comme les soldats de César :

Liceat discedere, Caesar,

A rabie scelerum. Quaeris terrâque marique

His ferrum jugulis. Animas effundere viles,

Quolibet hoste, paras. (Lucan.)

De l'autre côté, comme le Scythe à Alexandre : " Qu'avons-nous à démêler avec toi ? Jamais nous n'avons mis le pied dans ton pays. N'est-il pas permis à ceux qui vivent dans les bois d'ignorer qui tu es et d'où tu viens " ?

N'y aura-t-il pas du-moins une classe d'hommes assez au-dessus du vulgaire, assez sages, assez courageux, assez éloquents, pour soulever le monde contre ses oppresseurs, et lui rendre odieuse une gloire barbare ?

Les gens de Lettres déterminent l'opinion d'un siècle à l'autre ; c'est par eux qu'elle est fixée et transmise ; en quoi ils peuvent être les arbitres de la gloire, et par conséquent les plus utiles des hommes ou les plus pernicieux.

Vixere fortes ante Agamemnona

Multi ; sed omnes illacrymabiles

Urgentur, ignotique longâ

Nocte : carent quia vate sacro. (Horat.)

Abandonnée au peuple, la vérité s'altère et s'obscurcit par la tradition ; elle s'y perd dans un déluge de fables. L'héroïque devient absurde en passant de bouche en bouche : d'abord on l'admire comme un prodige ; bien-tôt on le méprise comme un conte suranné, et l'on finit par l'oublier. La saine postérité ne croit des siècles reculés, que ce qu'il a plu aux écrivains célèbres.

Louis XII. disait : " Les Grecs ont fait peu de choses, mais ils ont ennobli le peu qu'ils ont fait par la sublimité de leur éloquence. Les François ont fait de grandes choses et en grand nombre ; mais ils n'ont pas su les écrire. Les seuls Romains ont eu le double avantage de faire de grandes choses, et de les célébrer dignement ". C'est un roi qui reconnait que la gloire des nations est dans les mains des gens de Lettres.

Mais, il faut l'avouer, ceux-ci ont trop souvent oublié la dignité de leur état ; et leurs éloges prostitués aux crimes heureux, ont fait de grands maux à la terre.

Demandez à Virgile quel était le droit des Romains sur le reste des hommes, il vous répond hardiment,

Parcère subjectis, et debellare superbos.

Demandez à Solis ce qu'on doit penser de Cortès et de Montezuma, des Mexiquains et des Espagnols ; il vous répond que Cortès était un héros, et Montezuma un tyran ; que les Mexiquains étaient des barbares, et les Espagnols des gens de bien.

En écrivant on adopte un personnage, une patrie ; et il semble qu'il n'y ait plus rien au monde, ou que tout soit fait pour eux seuls. La patrie d'un sage est la terre, son héros est le genre humain.

Qu'un courtisan soit un flatteur, son état l'excuse en quelque sorte et le rend moins dangereux. On doit se défier de son témoignage ; il n'est pas libre : mais qui oblige l'homme de Lettres à se trahir lui-même et ses semblables, la nature et la vérité ?

Ce n'est pas tant la crainte, l'intérêt, la bassesse, que l'éblouissement, l'illusion, l'enthousiasme, qui ont porté les gens de Lettres à décerner la gloire aux forfaits éclatants. On est frappé d'une force d'esprit ou d'ame surprenante dans les grands crimes, comme dans les grandes vertus ; mais là, par les maux qu'elle cause ; ici, par les biens qu'elle fait : car cette force est dans le moral, ce que le feu est dans le physique, utîle ou funeste comme lui, suivant ses effets pernicieux ou salutaires. Les imaginations vives n'en ont Ve l'explosion que comme un développement prodigieux des ressorts de la nature, comme un tableau magnifique à peindre. En admirant la cause on a loué les effets : ainsi les fléaux de la terre en sont devenus les héros.

Les hommes nés pour la gloire, l'ont cherchée où l'opinion l'avait mise. Alexandre avait sans-cesse devant les yeux la fable d'Achille ; Charles XII. l'histoire d'Alexandre : de-là cette émulation funeste qui de deux rois pleins de valeur et de talents, fit deux guerriers impitoyables. Le roman de Quinte-Curce a peut-être fait le malheur de la Suède ; le poème d'Homère, les malheurs de l'Inde ; puisse l'histoire de Charles XII. ne perpétuer que ses vertus !

Le sage seul est bon poète, disaient les Stoïciens. Ils avaient raison : sans un esprit droit et une âme pure, l'imagination n'est qu'une Circé, et l'harmonie qu'une sirene.

Il en est de l'historien et de l'orateur comme du poète : éclairés et vertueux, ce sont les organes de la justice, les flambeaux de la vérité : passionnés et corrompus, ce ne sont plus que les courtisans de la prospérité, les vils adulateurs du crime.

Les Philosophes ont usé de leurs droits, et parlé de la gloire en maîtres.

" Savez-vous, dit Pline à Trajan, où réside la gloire véritable, la gloire immortelle d'un souverain ? Les arcs de triomphe, les statues, les temples même et les autels, sont démolis par le temps ; l'oubli les efface de la terre : mais la gloire d'un héros, qui supérieur à sa puissance illimitée, sait la dompter et y mettre un frein, cette gloire inaltérable fleurira même en vieillissant.

En quoi ressemblait à Hercule ce jeune insensé qui prétendait suivre ses traces, dit Seneque en parlant d'Alexandre, lui qui cherchait la gloire sans en connaître ni la nature ni les limites, et qui n'avait pour vertu qu'une heureuse témérité ? Hercule ne vainquit jamais pour lui-même ; il traversa le monde pour le vanger, et non pour l'envahir. Qu'avait-il besoin de conquêtes, ce héros, l'ennemi des mécans, le vangeur des bons, le pacificateur de la terre et des mers ? Mais Alexandre, enclin dès l'enfance à la rapine, fut le desolateur des nations, le fléau de ses amis et de ses ennemis. Il faisait consister le souverain bien à se rendre redoutable à tous les hommes ; il oubliait que cet avantage lui était commun non-seulement avec les plus féroces, mais encore avec les plus lâches et les plus vils des animaux qui se font craindre par leur venin ".

C'est ainsi que les hommes nés pour instruire et pour juger les autres hommes, devraient leur présenter sans-cesse en opposition la valeur protectrice et la valeur destructive, pour leur apprendre à distinguer le culte de l'amour de celui de la crainte, qu'ils confondent le plus souvent.

Il suffit, direz-vous, à l'ambitieux d'être craint ; la crainte lui tient lieu d'amour : il domine, ses vœux sont remplis. Mais l'ambitieux livré à lui-même, n'est plus qu'un homme faible et timide. Persuadez à ceux qui le servent qu'ils se perdent en le servant ; que ses ennemis sont leurs frères, et qu'il est leur bourreau commun. Rendez-le odieux à ceux-mêmes qui le rendent redoutable, que devient alors cet homme prodigieux devant qui tout devait trembler ? Tamerlan, l'effroi de l'Asie, n'en sera plus que la fable ; quatre hommes suffisent pour l'enchainer comme un furieux, pour le châtier comme un enfant. C'est à quoi serait réduite la force et la gloire des conquérants, si l'on arrachait au peuple le bandeau de l'illusion et les entraves de la crainte.

Quelques-uns se sont crus fort sages en mettant dans la balance, pour apprécier la gloire d'un vainqueur, ce qu'il devait au hasard et à ses troupes, avec ce qu'il ne devait qu'à lui seul. Il s'agit bien là de partager la gloire ! C'est la honte qu'il faut répandre, c'est l'horreur qu'il faut inspirer. Celui qui épouvante la terre, est pour elle un dieu infernal ou céleste ; on l'adorera si on ne l'abhorre : la superstition ne connait point de milieu.

Ce n'est pas lui qui a vaincu, direz-vous d'un conquérant : non, mais c'est lui qui a fait vaincre. N'est-ce rien que d'inspirer à une multitude d'hommes la résolution de combattre, de vaincre ou de mourir sous ses drapeaux ? Cet ascendant sur les esprits suffirait lui seul à sa gloire. Ne cherchez donc pas à détruire le merveilleux des conquêtes, mais rendez ce merveilleux aussi détestable qu'il est funeste : c'est par-là qu'il faut l'avilir.

Que la force et l'élévation d'une âme bienfaisante et généreuse, que l'activité d'un esprit supérieur, appliquée au bonheur du monde, soient les objets de vos hommages ; et de la même main qui élevera des autels au désintéressement, à la bonté, à l'humanité, à la clémence, que l'orgueil, l'ambition, la vengeance, la cupidité, la fureur, soient trainés au tribunal redoutable de l'incorruptible postérité : c'est alors que vous serez les Némésis de votre siècle, les Rhadamantes des vivants.

Si les vivants vous intimident, qu'avez-vous à craindre des morts ? vous ne leur devez que l'éloge du bien ; le blâme du mal, vous le devez à la terre : l'opprobre attaché à leur nom réjaillira sur leurs imitateurs. Ceux-ci trembleront de subir à leur tour l'arrêt qui flétrit leurs modèles ; ils se verront dans l'avenir ; ils frémiront de leur mémoire.

Mais à l'égard des vivants mêmes, quel parti doit prendre l'homme de Lettres, à la vue des succès injustes et des crimes heureux ? S'élever contre, s'il en a la liberté et le courage ; se taire, s'il ne peut ou s'il n'ose rien de plus.

Ce silence universel des gens de Lettres serait lui-même un jugement terrible, si l'on était accoutumé à les voir se réunir pour rendre un témoignage éclatant aux actions vraiment glorieuses. Que l'on suppose ce concert unanime, tel qu'il devrait être ; tous les Poètes, tous les Historiens, tous les Orateurs se répondant des extrémités du monde, et prêtant à la renommée d'un bon roi, d'un héros bienfaisant, d'un vainqueur pacifique, des voix éloquentes et sublimes pour répandre son nom et sa gloire dans l'univers ; que tout homme qui par ses talents et ses vertus aura bien mérité de sa patrie et de l'humanité, soit porté comme en triomphe dans les écrits de ses contemporains ; qu'il paraisse alors un homme injuste, violent, ambitieux, quelque puissant, quelqu'heureux qu'il sait, les organes de la gloire seront muets ; la terre entendra ce silence ; le tyran l'entendra lui-même, et il en sera confondu. Je suis condamné, dira-t-il, et pour graver ma honte en airain on n'attend plus que ma ruine.

Quel respect n'imprimeraient pas le pinceau de la Poésie, le burin de l'Histoire, la foudre de l'Eloquence, dans des mains équitables et pures ? Le crayon faible, mais hardi, de l'Arétin, faisait trembler les empereurs.

La fausse gloire des conquérants n'est pas la seule qu'il faudrait convertir en opprobre ; mais les principes qui la condamnent s'appliquent naturellement à tout ce qui lui ressemble, et les bornes qui nous sont prescrites ne nous permettent que de donner à réfléchir sur les objets que nous parcourons.

La vraie gloire a pour objets l'utile, l'honnête et le juste ; et c'est la seule qui soutienne les regards de la vérité : ce qu'elle a de merveilleux, consiste dans des efforts de talent ou de vertu dirigés au bonheur des hommes.

Nous avons observé qu'il semblait y avoir une sorte de gloire accordée au merveilleux agréable ; mais ce n'est qu'une participation à la gloire attachée au merveilleux utîle : telle est la gloire des beaux Arts.

Les beaux Arts ont leur merveilleux : ce merveilleux a fait leur gloire. Le pouvoir de l'éloquence, le prestige de la Poésie, le charme de la Musique, l'illusion de la Peinture, etc. ont dû paraitre des prodiges, dans les temps surtout où l'éloquence changeait la face des états, où la Musique et la Poésie civilisaient les hommes, où la Sculpture et la Peinture imprimaient à la terre le respect et l'adoration.

Ces effets merveilleux des Arts ont été mis au rang de ce que les hommes avaient produit de plus étonnant et de plus utîle ; et l'éclatante célébrité qu'ils ont eue, a formé l'une des espèces comprises sous le nom générique de gloire, soit que les hommes aient compté leurs plaisirs au nombre des plus grands biens, et les Arts qui les causaient, au nombre des dons les plus précieux que le Ciel eut faits à la terre ; soit qu'ils n'aient jamais cru pouvoir trop honorer ce qui avait contribué à les rendre moins barbares ; et que les Arts considérés comme compagnons des vertus, aient été jugés dignes d'en partager le triomphe, après en avoir secondé les travaux.

Ce n'est même qu'à ce titre que les talents en général nous semblent avoir droit d'entrer en société de gloire avec les vertus, et la société devient plus intime à mesure qu'ils concourent plus directement à la même fin. Cette fin est le bonheur du monde ; ainsi les talents qui contribuent le plus à rendre les hommes heureux, devraient naturellement avoir le plus de part à la gloire. Mais ce prix attaché aux talents doit être encore en raison de leur rareté et de leur utilité combinées. Ce qui n'est que difficile, ne mérite aucune attention ; ce qui est aisé, quoique utile, pour exercer un talent commun, n'attend qu'un salaire modique. Il suffit au laboureur de se nourrir de ses moissons. Ce qui est en même temps d'une grande importance et d'une extrême difficulté, demande des encouragements proportionnés aux talents qu'on y emploie. Le mérite du succès est en raison de l'utilité de l'entreprise, et de la rareté des moyens.

Suivant cette règle, les talents appliqués aux beaux Arts, quoique peut-être les plus étonnans, ne sont pas les premiers admis au partage de la gloire. Avec moins de génie que Tacite et que Corneille, un ministre, un législateur seront placés au-dessus d'eux.

Suivant cette règle encore, les mêmes talents ne sont pas toujours également recommandables ; et leurs protecteurs, pour encourager les plus utiles, doivent consulter la disposition des esprits et la constitution des choses ; favoriser, par exemple, la Poésie dans des temps de barbarie et de férocité, l'Eloquence dans des temps d'abattement et de désolation, la Philosophie dans des temps de superstition et de fanatisme. La première adoucira les mœurs, et rendra les âmes flexibles ; la seconde relevera le courage des peuples, et leur inspirera ces résolutions vigoureuses qui triomphent des revers : la dernière dissipera les fantômes de l'erreur et de la crainte, et montrera aux hommes le précipice où ils se laissent conduire les mains liées et les yeux bandés.

Mais comme ces effets ne sont pas exclusifs ; que les talents qui les opèrent se communiquent et se confondent ; que la Philosophie éclaire la Poésie qui l'embellit ; que l'éloquence anime l'une et l'autre, et s'enrichit de leurs trésors, le parti le plus avantageux serait de les nourrir, de les exercer ensemble, pour les faire agir à-propos, tour-à-tour ou de concert, suivant les hommes, les lieux et les temps. Ce sont des moyens bien puissants et bien négligés, de conduire et de gouverner les peuples. La sagesse des anciennes républiques brilla surtout dans l'emploi des talents capables de persuader et d'émouvoir.

Au contraire rien n'annonce plus la corruption et l'ivresse où les esprits sont plongés, que les honneurs extravagans accordés à des arts frivoles. Rome n'est plus qu'un objet de pitié, lorsqu'elle se divise en factions pour des pantomimes, lorsque l'exil de ces hommes perdus est une calamité, et leur retour un triomphe.

La gloire, comme nous l'avons dit, doit être réservée aux coopérateurs du bien public ; et non-seulement les talents, mais les vertus elles-mêmes n'ont droit d'y aspirer qu'à ce titre.

L'action de Virginius immolant sa fille, est aussi forte et plus pure que celle de Brutus condamnant son fils ; cependant la dernière est glorieuse, la première ne l'est pas. Pourquoi ? Virginius ne sauvait que l'honneur des siens, Brutus sauvait l'honneur des lois et de la patrie. Il y avait peut-être bien de l'orgueil dans l'action de Brutus, peut-être n'y avait-il que de l'orgueil : il n'y avait dans celle de Virginius que de l'honnêteté et du courage ; mais celui-ci faisait tout pour sa famille, celui-là faisait tout, ou semblait faire tout pour Rome ; et Rome, qui n'a regardé l'action de Virginius que comme celle d'un honnête homme et d'un bon père, a consacré l'action de Brutus comme celle d'un héros. Rien n'est plus juste que ce retour.

Les grands sacrifices de l'intérêt personnel au bien public, demandent un effort qui élève l'homme au-dessus de lui-même, et la gloire est le seul prix qui soit digne d'y être attaché. Qu'offrir à celui qui immole sa vie, comme Décius ; son honneur, comme Fabius ; son ressentiment, comme Camille ; ses enfants, comme Brutus et Manlius ? La vertu qui se suffit, est une vertu plus qu'humaine : il n'est donc ni prudent ni juste d'exiger que la vertu se suffise. Sa récompense doit être proportionnée au bien qu'elle opere, au sacrifice qu'il lui en coute, aux talents personnels qui la secondent ; ou si les talents personnels lui manquent, au choix des talents étrangers qu'elle appelle à son secours : car ce choix dans un homme public renferme en lui tous les talents.

L'homme public qui ferait tout par lui-même, ferait peu de choses. L'éloge que donne Horace à Auguste, Cùm tot sustineas, et tanta negotia solus, signifie seulement que tout se faisait en son nom, que tout se passait sous ses yeux. Le don de régner avec gloire n'exige qu'un talent et qu'une vertu ; ils tiennent lieu de tout, et rien n'y supplée. Cette vertu, c'est d'aimer les hommes ; ce talent, c'est de les placer. Qu'un roi veuille courageusement le bien, qu'il y emploie à propos les talents et les vertus analogues ; ce qu'il fait par inspiration n'en est pas moins à lui, et la gloire qui lui en revient ne fait que remonter à sa source.

Il ne faut pas croire que les talents et les vertus sublimes se donnent rendez-vous pour se trouver ensemble dans tel siècle et dans tel pays ; on doit supposer un aimant qui les attire, un souffle qui les développe, un esprit qui les anime, un centre d'activité qui les enchaine autour de lui. C'est donc à juste titre qu'on attribue à un roi qui a su régner, toute la gloire de son règne ; ce qu'il a inspiré, il l'a fait, et l'hommage lui en est dû.

Voyez un roi qui par les liens de la confiance et de l'amour unit toutes les parties de son état, en fait un corps dont il est l'âme, encourage la population et l'industrie, fait fleurir l'Agriculture et le Commerce ; excite, aiguillonne les Arts, rend les talents actifs et les vertus fécondes : ce roi, sans couter une larme à ses sujets, une goutte de sang à la terre, accumule au sein du repos un trésor immense de gloire, et la moisson en appartient à la main qui l'a semée.

Mais la gloire, comme la lumière, se communique sans s'affoiblir : celle du souverain se répand sur la nation ; et chacun des grands hommes dont les travaux y contribuent, brille en particulier du rayon qui émane de lui. On a dit le grand Condé, le grand Colbert, le grand Corneille, comme on a dit Louis-le-Grand. Celui des sujets qui contribue et participe le plus à la gloire d'un règne heureux, c'est un ministre éclairé, laborieux, accessible, également dévoué à l'état et au prince, qui s'oublie lui-même, et qui ne voit que le bien ; mais la gloire même de cet homme étonnant remonte au roi qui se l'attache. En effet, si l'utîle et le merveilleux font la gloire, quoi de plus glorieux pour un prince, que la découverte et le choix d'un si digne ami ?

Dans la balance de la gloire doivent entrer avec le bien qu'on a fait, les difficultés qu'on a surmontées ; c'est l'avantage des fondateurs, tels que Lycurgue et le czar Pierre. Mais on doit aussi distraire du mérite du succès, tout ce qu'a fait la violence. Il est beau de prévoir, comme Lycurgue, qu'on humanisera un peuple féroce avec de la musique ; il n'y a aucun mérite à imaginer, comme le czar, de se faire obéir à coups de sabre. La seule domination glorieuse est celle que les hommes préfèrent ou par raison ou par amour : imperatoriam majestatem armis decoratam, legibus oportet esse armatam, dit l'empereur Justinien.

De tous ceux qui ont désolé la terre, il n'en est aucun qui, à l'en croire, n'en voulut assurer le bonheur. Défiez-vous de quiconque prétend rendre les hommes plus heureux qu'ils ne veulent l'être ; c'est la chimère des usurpateurs, et le prétexte des tyrants. Celui qui fonde un empire pour lui-même, taille dans un peuple comme dans le marbre, sans en regretter les débris ; celui qui fonde un empire pour le peuple qui le compose, commence par rendre ce peuple flexible, et le modifie sans le briser. En général, la personnalité dans la cause publique, est un crime de lese humanité. L'homme qui se sacrifie à lui seul le repos, le bonheur des hommes, est de tous les animaux le plus cruel et le plus vorace : tout doit s'unir pour l'accabler.

Sur ce principe nous nous sommes élevés contre les auteurs de toute guerre injuste. Nous avons invité les dispensateurs de la gloire à couvrir d'opprobre les succès même des conquérants ambitieux ; mais nous sommes bien éloignés de disputer à la profession des armes la part qu'elle doit avoir à la gloire de l'état dont elle est le bouclier, et du trône dont elle est la barrière.

Que celui qui sert son prince ou sa patrie soit armé pour la bonne ou pour la mauvaise cause, qu'il reçoive l'épée des mains de la justice ou des mains de l'ambition, il n'est ni juge ni garant des projets qu'il exécute ; sa gloire personnelle est sans tache, elle doit être proportionnée aux efforts qu'elle lui coute. L'austérité de la discipline à laquelle il se soumet, la rigueur des travaux qu'il s'impose, les dangers affreux qu'il Ve courir ; en un mot, les sacrifices multipliés de sa liberté, de son repos et de sa vie, ne peuvent être dignement payés que par la gloire. A cette gloire qui accompagne sa valeur généreuse et pure, se joint encore la gloire des talents qui dans un grand capitaine éclairent, secondent et couronnent la valeur.

Sous ce point de vue, il n'est point de gloire comparable à celle des guerriers ; car celle même des législateurs exige peut-être plus de talents, mais beaucoup moins de sacrifices : leurs travaux sont à la vérité sans relâche, mais ils ne sont pas dangereux. En supposant donc le fléau de la guerre inévitable pour l'humanité, la profession des armes doit être la plus honorable, comme elle est la plus périlleuse. Il serait dangereux surtout de lui donner une rivale dans des états exposés par leur situation à la jalousie et aux insultes de leurs voisins. C'est peu d'y honorer le mérite qui commande, il faut y honorer encore la valeur qui obéit. Il doit y avoir une masse de gloire pour le corps qui se distingue ; car si la gloire n'est pas l'objet de chaque soldat en particulier, elle est l'objet de la multitude réunie. Un légionnaire pense en homme, une légion pense en héros ; et ce qu'on appelle l'esprit du corps, ne peut avoir d'autre aliment, d'autre mobîle que la gloire.

On se plaint que notre histoire est froide et seche en comparaison de celle des Grecs et des Romains. La raison est bien sensible. L'histoire ancienne est celle des hommes, l'histoire moderne est celle de deux ou trois hommes : un roi, un ministre, un général.

Dans le régiment de Champagne, un officier demande, pour un coup-de main, douze hommes de bonne volonté : tout le corps reste immobile, et personne ne répond. Trais fois la même demande, et trois fois le même silence. Hé quoi, dit l'officier, l'on ne m'entend point ! L'on vous entend, s'écrie une voix ; mais qu'appelez-vous douze hommes de bonne volonté ; nous le sommes tous, vous n'avez qu'à choisir.

La tranchée de Philisbourg était inondée, le soldat y marchait dans l'eau plus qu'à demi-corps. Un très-jeune officier, à qui son jeune âge ne permettait pas d'y marcher de même, s'y faisait porter de main en main. Un grenadier le présentait à son camarade, afin qu'il le prit dans ses bras : mets le sur mon dos, dit celui-ci ; du-moins s'il y a un coup de fusil à recevoir, je le lui épargnerai.

Le militaire français a mille traits de cette beauté, que Plutarque et Tacite auraient eu grand soin de recueillir. Nous les réléguons dans des mémoires particuliers, comme peu dignes de la majesté de l'histoire. Il faut espérer qu'un historien philosophe s'affranchira de ce préjugé.

Toutes les conditions qui exigent des âmes résolues aux grands sacrifices de l'intérêt personnel au bien public, doivent avoir pour encouragement la perspective, du moins éloignée, de la gloire personnelle. On sait bien que les Philosophes, pour rendre la vertu inébranlable, l'ont préparée à se passer de tout : non vis esse justus sine gloriâ ; at, me herculè, saepè justus esse debebis cum infamiâ. Mais la vertu même ne se roidit que contre une honte passagère, et dans l'espoir d'une gloire à venir. Fabius se laisse insulter dans le camp d'Annibal et déshonorer dans Rome pendant le cours d'une campagne ; aurait-il pu se résoudre à mourir déshonoré, à l'être à jamais dans la mémoire des hommes ? N'attendons pas ces efforts de la faiblesse de notre nature ; la religion seule en est capable, et ses sacrifices même ne sont rien moins que désintéressés. Les plus humbles des hommes ne renoncent à une gloire périssable, qu'en échange d'une gloire immortelle. Ce fut l'espoir de cette immortalité qui soutint Socrate et Caton. Un philosophe ancien disait : comment veux-tu que je sois sensible au blâme, si tu ne veux pas que je sois sensible à l'éloge ?

A l'exemple de la Théologie, la Morale doit prémunir la vertu contre l'ingratitude et le mépris des hommes, en lui montrant dans le lointain des temps plus heureux et un monde plus juste.

" La gloire accompagne la vertu, comme son ombre, dit Seneque ; mais comme l'ombre d'un corps tantôt le précède, et tantôt le suit, de même la gloire tantôt devance la vertu et se présente la première, tantôt ne vient qu'à sa suite, lorsque l'envie s'est retirée ; et alors elle est d'autant plus grande qu'elle se montre plus tard ".

C'est donc une philosophie aussi dangereuse que vaine, de combattre dans l'homme le pressentiment de la postérité et le désir de se survivre. Celui qui borne sa gloire au court espace de sa vie, est esclave de l'opinion et des égards : rebuté, si son siècle est injuste ; découragé, s'il est ingrat : impatient surtout de jouir, il veut recueillir ce qu'il seme ; il préfère une gloire précoce et passagère, à une gloire tardive et durable : il n'entreprendra rien de grand.

Celui qui se transporte dans l'avenir et qui jouit de sa mémoire, travaillera pour tous les siècles, comme s'il était immortel : que ses contemporains lui refusent la gloire qu'il a méritée, leurs neveux l'en dédommagent ; car son imagination le rend présent à la postérité.

C'est un beau songe, dira-t-on. Hé jouit-on jamais de sa gloire autrement qu'en songe ? Ce n'est pas le petit nombre de spectateurs qui vous environnent, qui forment le cri de la renommée. Votre réputation n'est glorieuse qu'autant qu'elle vous multiplie où vous n'êtes pas, où vous ne serez jamais. Pourquoi donc serait-il plus insensé d'étendre en idée son existence aux siècles à venir, qu'aux climats éloignés ? L'espace réel n'est pour vous qu'un point, comme la durée réelle. Si vous vous renfermez dans l'un ou l'autre, votre âme y Ve languir abattue, comme dans une étroite prison. Le désir d'éterniser sa gloire est un enthousiasme qui nous agrandit, qui nous élève au-dessus de nous-mêmes et de notre siècle ; et quiconque le raisonne n'est pas digne de le sentir. " Mépriser la gloire, dit Tacite c'est mépriser les vertus qui y mènent " : contemptâ famâ, virtutes contemnuntur. Article de M. MARMONTEL.

GLOIRE, en Peinture, c'est la représentation d'un ciel ouvert et lumineux, avec des anges, des saints, etc. Mignard a peint au Val-de-Grace une gloire.

GLOIRE ; les Artificiers donnent ce nom à un soleil fixe d'une grandeur extraordinaire, de quarante jusqu'à soixante pieds de diamètre.