v. n. (Grammaire) terme relatif au mouvement d'un lieu dans un autre, sans aucun égard ni à celui d'où le mouvement se fait, ni à celui où il est dirigé, mais seulement à l'endroit où il se fait, ou bien à celui qui le voit et en juge. Le verbe passer a une infinité d'acceptions qui se reconnaissent par les phrases où il est employé ; exemples. Le cerf a passé par cet endroit. Ils ont passé debout ou sans s'arrêter. Passer du papier sur le feu pour le sécher. Ce malade ne passera pas l'hiver. Ce manteau m'a passé deux années. Il passe mal son temps. Les plaisirs passent vite. La vie se passe. La beauté et la jeunesse se passent. Cette étoffe se passera. Ces sortes de couleurs passent. Rien ne passe comme les modes. Ces fruits, ce vin, ce fromage, ces mets sont passés. Des raisins passés. Les raisins passent, on n'en voit plus guère. Il vous passe de toute la tête. Il était homme de bien, je ne sais comment il a commis cette action, cela me passe. Le madrigal ne passe guère dix à douze vers. Elle a passé tant de fois sa chemise pardessus sa tête. Il y a des physiciens qui ont prétendu que la poussière dont l'air est rempli passait à-travers le verre. La vertu ne passe pas toujours des pères aux enfants. Le nom de quelques hommes de ce siècle passera à la postérité. Ses succès ont passé mes espérances. Quelques opinions des anciens qu'on regardait comme des erreurs, passent maintenant pour des vérités constantes. Il y a des vieillards qui ont de la peine à se passer de femmes. Je me passe de peu. Il faut bien en passer par-là. Il y a des considérations au-dessus desquelles je ne saurais passer, elles m'arrêtent tout court. Passez le préambule, allez à la chose. Vous me trouverez intraitable, je ne vous passerai rien. Racontez toujours les choses comme elles se sont passées ; tous ces traits d'imagination qui embellissent un récit sont autant de petits mensonges. Cette monnaie ne passera pas. Je vous passerai cette pièce pour deux pistoles. On dit encore passer par les mains, passer par les armes, passer sur le ventre à quelqu'un, passer tout d'une voix, passer un acte, passer d'un objet à un autre ; passer au feu, à la calandre, à la filière, à la claye, en blanc, en carton, au tamis, à la chausse, au filtre, au chamois, à l'alembic ; passer maître, passer licentié, la plume par le bec, l'éponge, passer le but, etc. Voyez les articles suivants.

PASSER, (commerce) terme qui dans le commerce et chez les artisans a diverses significations déterminées par les mots auxquels il est joint.

Passer maître, se dit de la réception d'un apprentif à quelque maitrise après les examens qu'il faut subir, ou les chefs-d'œuvre qu'il faut faire pour entrer dans les six corps marchands et dans les communautés des arts et métiers ; on dit en ce sens, il Ve se faire passer ou il est passé marchand orfèvre, épicier, drapier, etc. maître tapissier, serrurier, etc.

Passer son ordre, terme de banque et de commerce de change, c'est mettre son ordre au dos d'une lettre ou billet de change en faveur de quelqu'un, c'est-à-dire déclarer qu'on les cede à celui dont le nom est exprimé dans l'ordre, et qu'elles lui doivent être payées. Voyez ORDRE et ENDOSSEMENT.

Passer debout, en terme de commerce, c'est transporter des marchandises à-travers d'un état, d'une province, d'une ville, ou par quelque bureau sans les y arrêter, décharger ni déballer pour y être visitées ou pour en payer les droits ; pour cela les marchands doivent prendre des acquits. Voyez ACQUIT et PASSE-DEBOUT.

Passer des marchandises en fraude, c'est les faire entrer ou sortir par d'autres endroits que par ceux où les bureaux sont établis pour le payement des droits, afin de les frauder et de ne les pas payer.

Passer en haut, c'est la même chose que passer en fraude, mais ce terme n'est d'usage ordinaire qu'en Espagne, et particulièrement à Cadix, où il se dit des marchandises que les nations qui ont part au commerce de l'Amérique avec les Espagnols ont coutume de faire entrer sans en payer les droits, qui se montant à vingt-trois pour cent, engagent les étrangers à les frauder, d'autant plus que le garde que les officiers de la douanne envoyent sur les vaisseaux pour visiter les marchandises est complice de la fraude, et que lorsqu'elle est découverte on en est quitte pour payer les droits ordinaires.

Passer, se dit aussi du cours des monnaies dans le commerce ; les pistoles d'Espagne passent sur le pied des louis de France, c'est-à-dire sont reçues pour la même valeur.

Passer, se dit encore des étoffes, des modes, des marchandises : cette étoffe est passée, c'est-à-dire qu'elle a perdu son lustre. Cette mode est passée, elle n'est plus en vogue. Ces vins sont passés, ils ont perdu leur force pour avoir été trop gardés. Dictionnaire de commerce.

PASSER PAR LES BAGUETTES, (Art militaire) est un supplice infamant pour les soldats. Celui qui le mérite passe les épaules nues, entre deux rangs de soldats, armés de baguettes, qui le frappent en passant. Voyez CHATIMENS MILITAIRES. (Q)

PASSER SOUS LE BEAUPRE (Marine) Ce navire a passé sous notre beaupré, c'est une manière de parler qui veut dire qu'un vaisseau a passé fort près de l'avant d'un autre. On regarde en mer comme une civilité de ne passer pas sous le beaupré d'un autre quand on peut y passer. On dit passer au vent d'un vaisseau, lorsqu'on lui gagne le vent. (Z)

PASSER, terme de Dessinateur, qui dessine à l'encre de la Chine ; on dit passer un dessein à l'encre, c'est-à-dire en tracer les lignes avec de l'encre de la Chine ou carmin sur le trait au crayon.

PASSER, terme d'Apoticaire, c'est épurer quelques liqueurs ou matières liquides en les coulant à-travers d'une chausse d'apoticaire et de chimiste, ou d'un sas ou tamis, ou enfin en les filtrant à-travers du papier brouillard ; le vif-argent se passe à-travers la peau de chamois. (D.J.)

PASSER, (Corroyeur) est un terme qu'on emploie pour signifier plusieurs apprêts et façons qu'on donne à plusieurs sortes de marchandises.

On passe les cuirs en suif, en huile, en alun, en sumac, en mégie, etc.

Passer les cuirs en suif de chair et de fleur, c'est les imbiber de suif bouillant par les deux côtés ; c'est ainsi que les Corroyeurs apprêtent les vaches et les veaux à chair grasse.

Passer les cuirs en suif de fleur, et en huîle de chair, c'est la manière de passer les vaches et les veaux à chair blanche ; les moutons passés en noir ne se passent ainsi qu'à chair blanche.

Passer des cuirs en suif du côté de la fleur seulement, et ne mettre ni suif ni huîle du côté de la chair, c'est la manière de passer ce que les Corroyeurs appellent la vache dure.

Passer en huîle du côté de chair, et en alun du côté de fleur ; c'est l'apprêt que les Corroyeurs donnent aux vaches, veaux et moutons qu'ils veulent corroyer en rouge, jaune et verd.

Passer en sumac, c'est se servir du sumac pour donner aux veaux noirs des Corroyeurs une couleur orangée du côté de la chair. Voyez pour tous ces mots l'article CORROYER.

Passer en mégie, c'est donner à un cuir tous les apprêts qui sont de la profession des Mégissiers. Voyez MEGIE.

PASSER PAR LA FILIERE, terme d'épinglier et d'Aiguillier, qui signifie réduire en fil de différents échantillons le leton et l'acier dont ces ouvriers se servent pour faire des épingles et des aiguilles, en les faisant passer successivement par tous les trous d'une filière, à commencer par les plus grands et finissant par les plus petits.

PASSER PAR LA FARINE, (Cuisine) ce terme signifie parmi les Cuisiniers l'action d'enduire une pièce de farine en la plongeant dans un vase où il y en a.

Passer par la poêle, c'est mettre une pièce dans du beurre, du saindoux, ou du lard, fondus dans une poêle sur le feu.

PASSER A LA CLAIE, (Jardinage) c'est séparer par le moyen d'une claie les pierres de la bonne terre. On a donc pour cet effet une claie qu'on soutient par-derrière avec quelques échalas ; cependant le jardinier prenant sa terre avec sa pelle, la jette à force contre cette claie, si bien que la bonne terre passe au-travers, et les pierres tombent en bas du côté du jardinier ; ensuite on les ôte de-là pour continuer à passer ainsi toute la terre dont on a besoin. Dictionnaire oeconom. (D.J.)

PASSER EN BLANC, terme de Monnoyeur, c'est passer les lames de métal dont on doit fabriquer les espèces entre les rouleaux du laminoir, avant de les avoir fait recuire ; il n'y a que les lames d'argent et de cuivre qui se passent en blanc ; les lames d'or ne se passent point sans être recuites. (D.J.)

PASSER LE POIL, en terme de Plumassier, c'est arranger les plumes et les mêler ensemble, en sorte qu'il y ait peu ou point d'intervalle entr'elles, et qu'elles semblent n'en faire qu'une.

PASSER EN CARTON, (Reliure) les Relieurs passent en carton, lorsque le livre étant cousu, ils prennent les bouts des ficelles auxquelles les feuilles sont cousues, et les passent dans les trois trous qu'ils ont faits aux cartons vis-à-vis chaque ficelle : les bouts des ficelles sont arrêtés en-dedans en croix ; cela fait on coupe l'excédent des bouts de ficelle.

Passer en parchemin. Les relieurs mettent plusieurs bandes de parchemin sur le dos des livres, ces bandes sont de la largeur des entre-nerfs, et on en passe la moitié entre le carton et le livre ; l'autre moitié reste sur le dos pour y être collée. On appelle ces parchemins des gardes, et on en met des deux côtés du carton, surtout à la tête et à la queue, mais quelquefois entre tous les nerfs. Voyez GARDE.

Passer en mord. Après que les Relieurs ont défouetté les livres, ils passent le plioir du côté du coupant, tout le long de l'endroit où la couverture joint le carton au dos ; et en même temps ils soulèvent le carton pour voir si le carton n'est pas gêné, cela fait, on met le livre secher jusqu'à ce que la couverture n'ait plus d'humidité, ce qui s'appelle secher les plats.

PASSER PAR LA CALANDRE, (Manufacture) se dit des étoffes de soie et de laine, et des toiles de diverses couleurs et fabriques, qu'on met sous les plaques de la machine qu'on appelle une calandre, pour lui faire prendre des ondes.

PASSER LA CLAIREE, en terme de raffineur, c'est l'action de nettoyer entièrement la matière, et de la délivrer de toutes les saletés qui n'ont pu être enlevées avec les écumes. Quand ces écumes sont parfaitement blanches, on verse le syrop de la chaudière dans un bassin à clairée, voyez BASSIN A CLAIREE. Ce bassin a en bas un commencement de tuyau dans lequel on enfonce une dale qui conduit la matière dans un panier couvert du blanchet, voyez BLANCHET, d'où elle tombe dans la chaudière à clairée. Voyez CHAUDIERE A CLAIREE.

PASSER, Ve act. (Teinture) c'est teindre les étoffes toutes faites, ou les matières dont elles doivent être tissues et fabriquées, comme de la soie, de la laine, du fil, etc.

PASSER PAR LA FILIERE, (Tireur d'or et autres ouvriers) on passe par la filière, de l'or, de l'argent, du cuivre, du léton, de l'étain, du fer ; c'est réduire en fil de différents échantillons et grosseurs, tous ces métaux, en les tirant successivement à-travers des trous, plus grands d'abord, et ensuite plus petits d'une filière d'acier. (D.J.)

PASSER AU JEU, c'est n'être pas du jeu pour ce coup ; n'en pas courir les hasards. Il y a des jeux où l'on ne revient plus quand on a passé. Il y en a d'autres où l'on peut revenir. Au breland, par exemple, le premier peut être du jeu, ou passer ; s'il a passé, il ne peut rentrer qu'un autre ne soit du jeu. Si tous les autres joueurs passent après le premier, le premier a passé sans retour ; l'avantage que le premier a de passer, c'est d'imposer la loi à ceux qui jouent après lui, et qui lui donneront lieu de revenir ; son désavantage, c'est de perdre la passe, quand il avait jeu de jouer, et qu'il a passé.

PASSER LE, terme de relation, c'est-à-dire marché ou bazar. Le passer de Bender-Abazzi, ville de Perse d'un grand négoce, est une grande place toute voutée avec des boutiques autour, et une allée ou corridor au milieu pour la commodité du commerce. C'est là que l'on étale les marchandises les plus précieuses, et que les Baniants, les plus habiles négociants de l'Asie, tiennent leur banque, et font leur négoce.