AUTEUR, synon. (Grammaire) Ces deux mots s'appliquent aux gens de lettres, qui donnent au public des ouvrages de leur composition. Le premier ne se dit que de ceux qui ont donné des ouvrages de belles lettres, ou du moins il ne se dit que par rapport au style : le second s'applique à tout genre d'écrire indifféremment ; il a plus de rapport au fond de l'ouvrage qu'à la forme ; de plus, il peut se joindre par la particule de aux noms des ouvrages. Racine, M. de Voltaire, sont d'excellents écrivains, Corneille est un excellent auteur ; Descartes et Newton sont des auteurs célébres ; l'auteur de la Recherche de la vérité, est un écrivain du premier ordre.

Je ne puis m'empêcher de remarquer à cette occasion un abus de notre langue. Le mot écrire ne s'emploie presque plus dans un grand nombre d'occasions, que pour désigner le style ; le sens propre de ce mot est alors proscrit.

On dit qu'une lettre est bien écrite, pour dire qu'elle est d'un très-bon style ; si on veut dire que le caractère de l'écriture est net et agréable à la vue, on dit qu'elle est bien peinte. Cet usage parait ridicule, mais il a prévalu. Cependant il faut avouer, que du moins dans le cas dont nous venons de parler, on a un mot (très-impropre à la vérité) pour exprimer le sens propre. Mais il est d'autres cas où il n'y a plus de mot pour exprimer le sens propre, et où le sens figuré seul est employé ; par exemple dans les mots bassesse, aveuglement, etc. J'avertis de cet abus, afin que les gens de lettres tâchent d'y remédier, ou du moins afin qu'il ne se multiplie pas. (O)

ECRIVAIN, s. m. (Arts) espèce de peintre, qui avec la plume et l'encre, peut tracer sur le papier toutes sortes de beaux traits et de caractères.

Comme l'Encyclopédie doit tout aux talents, et que l'histoire parle de gens singulièrement habiles dans l'art d'écrire, il est juste de ne pas supprimer les noms de quelques-uns de ceux qui se sont distingués dans cet art admirable, et qui sont parvenus à notre connaissance.

On rapporte que Rocco (Girolamo) vénitien, qui vivait au commencement du XVIIe siècle, était un homme supérieur en ce genre ; il dédia un livre manuscrit, gravé sur l'airain, au duc de Savoie l'an 1603, orné d'un si grand nombre de caractères, et tirades de sa main si excellemment faites, dit Jean Marcel, que le prince admirant l'industrie de cet homme, lui mit sur le champ au col une chaîne d'or du prix de 125 écus. Nous avons eu, ajoute le même auteur, beaucoup de braves écrivains qui ont fait à la plume des livres étonnans de toutes sortes de caractères, comme en France le Gagneur, Lucas, Josserand ; en Italie D. Augustin de Sienne, M. Martin de Romagne, Camille Buonadio de Plaisance, Créci Milanais, le Curion Romain, le Palatin, le Verune, le sieur M. Antoine Génois. Il y avait un peintre Anglais nommé Oeillard, lequel faisait avec un pinceau de pareils ouvrages que les autres à la plume, et même pour les caractères extrêmement fins et déliés, ce qui est encore plus difficile, car le pinceau ne se soutient pas comme une plume à écrire. Mais Sinibaldo Seorza, né à Gènes en 1591, et mort à l'âge de 41 ans, mérite un éloge particulier pour l'adresse de sa main ; entr'autres preuves de ses talents, il copiait à la plume les estampes d'Albert Durer, d'une manière à tromper les connaisseurs d'Italie, qui les croyaient gravées, ou qui les prenaient pour les originaux même.

Enfin, il est certain que quelque belle que soit l'impression, les traits d'une main exercée sont encore au-dessus. Nous avons des manuscrits qu'on ne se lasse point de considérer par cette raison. La fonderie ne peut rien exécuter de plus menu que le caractère qu'on nomme la Perle, mais l'adresse de la main surpasse la fonderie. Il y a dans tous les pays des personnes qui savent peindre des caractères encore plus fins, aussi nets, aussi égaux, et aussi bien formés. Dans le XVIe siècle, un religieux Italien, surnommé Frere Alumno, renferma tout le symbole des apôtres avec le commencement de l'Evangîle de S. Jean que l'on appelle l'In principio, dans un espace grand comme un denier ; cet ouvrage fut Ve de l'empereur Charles V. et du pape Clément VII. qui ne purent s'empêcher de l'admirer. Spannuchio, gentilhomme Siennais qui vivait sur la fin du XVIIe siècle, tenta la même entreprise, et l'exécuta, dit-on, tout aussi parfaitement. J'ai d'autant plus lieu de le croire, qu'un gendarme (le sieur Vincent), qui me fait l'amitié de transcrire quelquefois des articles pour cet ouvrage, met le Pater en français, sur un papier de la forme et de la grandeur de l'ongle, et cette écriture vue à la loupe, presente une netteté charmante de lettres égales, distinctes, bien liées, avec les intervalles entre chaque mot, les accens, les points et les virgules. En un mot l'art d'écrire à la plume produit de temps en temps, comme l'art de faire des caractères d'Imprimerie, ses Colinés, ses Garamond, ses Granjean, ses de Bé, ses Sanlecque, ses Luz, et ses Fournier ; mais ceux qui possèdent ces talents, sont ignorés, et se gâtent même promptement la main par l'inutilité qu'il y aurait pour eux de la perfectionner. Article de M(D.J.)

ECRIVAIN, est aussi celui qui écrit pour le public, qui dresse des mémoires, fait les copies et doubles des comptes, et autres semblables écritures pour les marchands, négociants et banquiers qui n'ont pas de commis, ou dont les commis sont trop occupés pour pouvoir copier et mettre au net les comptes ou mémoires qu'ils ont dressés.

Il y a à Paris quantité de ces écrivains, dont les plus considérables travaillent en chambre et les autres dans de petites boutiques, répandues en plusieurs quartiers, principalement dans la cour du palais et sous les charniers du cimetière des SS. Innocens. Diction. de Comm. de Trev. et Chambers. (G)