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Catégorie : Grammaire
S. m. (Grammaire) ce qui réduit un mot à son sens précis, une pensée à son sens vrai, une action à l'équité ou à l'honnêteté, une substance à un effet plus modéré ; d'où l'on voit que tout a son correctif. On ôte de la force aux mots par d'autres qu'on leur associe ; et ceux-ci sont ou des prépositions ou des adverbes, ou des épithetes qui modifient et tempèrent l'acception : on ramène à la vérité scrupuleuse les pensées ou les propositions, le plus souvent en en restreignant l'étendue ; on rend une action juste ou décente, par quelque compensation ; on ôte à une substance sa violence, en la mêlant avec une substance d'une nature opposée. Celui donc qui ignore entièrement l'art des correctifs, est exposé en une infinité d'occasions à pécher contre la langue, la Logique, la Morale, et la Physique.

CORRECTIFS, adj. et CORRECTION, sub. (Pharmacie) On appelle correctifs, certains ingrédiens des medicaments composés, soit officinaux, soit magistraux, qui sont destinés à détruire les qualités nuisibles ou desagréables des autres ingrédiens de la même composition, sans diminuer leurs vertus ou qualités utiles.

On peut distinguer très-naturellement ces correctifs en deux classes ; en correctifs d'activité, et en correctifs des qualités desagréables.

Les anciens employaient beaucoup les premiers ; ils n'ordonnaient jamais leurs émétiques, leurs purgatifs forts, et leurs narcotiques, sans les mêler avec des prétendus correctifs. C'était une certaine acrimonie, ou une qualité plus occulte encore, capable d'affoiblir l'estomac et les intestins, et d'y engendrer des vents, qu'ils redoutaient dans les purgatifs, et une qualité vénéneuse froide dans les narcotiques.

C'est dans la vue de prévenir ces inconvéniens, qu'ils mêlaient toujours aux purgatifs différents aromatiques, comme le santal, le stoechas, la canelle, etc. et surtout les semences carminatives, comme l'anis, le fenouil, la coriandre, etc. et même quelques toniques plus actifs, le gingembre, la pyretre, etc. La nécessité de ces correctifs passait même pour si incontestable parmi eux, que leurs purgatifs ordinaires avaient chacun un correctif approprié. C'est ainsi qu'ils ordonnaient le sené avec l'anis ou la coriandre, la rhubarbe avec le santal, l'agaric et le jalap avec le gingembre, etc. C'est sur cette opinion qu'est fondée la dispensation des compositions officinales purgatives qui nous viennent des anciens ; compositions qui contiennent toujours une quantité considérable de différents aromates.

Ce sont presque les mêmes drogues ; c'est-à-dire les aromatiques vifs, qu'ils ont employés dans les compositions opiatiques.

Cette classe de correctifs est absolument proscrite de la Pharmacie moderne : nous n'avons plus aujourd'hui la moindre confiance en leur efficacité ; nous ne connaissons d'autres ressources pour prévenir les inconvénients des purgatifs forts, que de les bien choisir et les préparer exactement, de les donner à propos et en une dose convenable.

Quant à la qualité froide des narcotiques, nous avons appris à ne pas la craindre dans ceux que nous retirons des pavots, qui sont les seuls que nous mettions aujourd'hui en usage. L'expérience nous a appris qu'une décoction d'une tête de pavot, ou l'opium sans préparation, étaient tout aussi efficaces et aussi peu dangereux, que les opiatiques corrigés des anciens, et même que le fameux laudanum liquide de Sydenham, qui parait être fait d'après les mêmes principes, ou plutôt d'après les mêmes préjugés.

Il est une autre espèce de correctifs d'activité, aussi réels que ceux dont nous venons de parler paraissent imaginaires : ce sont les différents corps doux ou muqueux, tels que les pulpes de pruneaux, de tamarin, de casse ; les décoctions de fruits doux, le sucre, le miel, la manne, etc. que l'on mêle avec les purgatifs les plus forts dans certains électuaires dont l'usage est encore assez ordinaire, surtout dans les hôpitaux. Ces correctifs masquent la violence de ces purgatifs au point que les électuaires dont nous parlons sont des purgatifs assez doux, à une dose qui contient une quantité de ces purgatifs, fort capable de produire les effets les plus violents, s'ils étaient donnés sans mélange. C'est ainsi que dans le diaprun solutif, p. ex. l'activité de la scammonée est assez tempérée par la pulpe des pruneaux et par le sucre, pour qu'une once de cet électuaire qui contient un scrupule de scammonée, ne soit pas un purgatif si dangereux à beaucoup près, que le serait la même dose de scammonée donnée sans mélange. Le sucre qui donne la consistance aux syrops purgatifs, tempere aussi jusqu'à un certain point l'activité des remèdes qui en font la vertu. La décoction des fruits doux et de certaines autres substances végétales, comme les racines de réglisse, de polipode, la scolopendre, et les autres capillaires, diminuent un peu l'énergie de certains purgatifs, comme du sené ; en sorte qu'une infusion de ses feuilles ou de ses follicules mêlée à une décoction de fruits pectoraux, tels que les raisins, les dattes, et les figues, fournit un purgatif des plus benins. C'est comme un correctif de cette espèce qu'on donne la manne avec le tartre émétique, dont elle affoiblit considérablement l'action dans la plupart des cas, et dans le plus grand nombre des sujets.

Il ne serait pas assez exact de regarder le sucre et le jaune d'œuf comme de simples correctifs des résines purgatives, parce que c'est par une véritable combinaison qu'ils châtrent l'activité de ces corps, qu'ils les dénaturent, qu'ils en font un être nouveau, dans lequel on ne doit plus considérer ces principes de composition, de même qu'on ne s'avise pas d'avoir égard aux qualités particulières de l'acide nitreux et de l'alkali fixe, lorsqu'il s'agit des vertus du nitre, etc. Voyez RESINE et PURGATIF.

Les qualités desagréables que nous cherchons à corriger dans les medicaments, sont la mauvaise odeur et le mauvais gout. La première correction est connue sous le nom d'aromatisation : elle consiste à ajouter au medicament quelqu'eau, quelqu'esprit, ou quelque poudre aromatique, pour couvrir autant qu'il est possible, sa mauvaise odeur : sur quoi il faut se souvenir qu'il est certains malades à qui les odeurs douces peuvent être funestes, et qu'en général toutes les odeurs ne sont pas également agréables à tout le monde ; que l'ambre affecte bien diversement les différents sujets, etc.

La seconde de ces corrections s'effectue 1°. par l'édulcoration (Voyez ÉDULCORATION) ; 2°. en enveloppant les remèdes solides, comme boles, pilules, opiates, etc. dans différentes matières qui les empêchent de faire aucune impression sur l'organe du goût ; ces enveloppes les plus ordinaires sont le pain-à-chanter, les feuilles d'or ou d'argent, la poudre de réglisse, de sucre etc. 3°. on corrige ou plutôt on prévient le mauvais goût de certains remèdes, par certaines circonstances de leur préparation ; c'est ainsi que la manne fondue à froid, ou à une très-légère chaleur, est bien moins desagréable que celle qu'on a fait fondre dans l'eau bouillante.

Une autre espèce de correction pharmaceutique qui a été longtemps en usage, et que nous avons enfin abandonnée, était celle qui consistait à faire macérer dans différentes liqueurs, et principalement dans le vinaigre, certaines drogues prétendues dangereuses, comme l'azarum, l'ésule, l'ellébore ; à en exposer d'autres, comme la scammonée, à la vapeur du soufre, etc. cette correction remplissait fort mal sans doute la vue qu'on se proposait ; car elle affoiblissait ou châtrait la vertu médicamenteuse, au lieu de l'épargner, comme on le prétendait, en ne détruisant qu'une vertu vénéneuse supposée dans la drogue. Or comme cet affoiblissement est toujours inexact ou impossible à évaluer avec quelque justesse, il est plus sur d'avoir recours à des remèdes qui possèdent la même vertu en un degré moins actif, ou d'employer les premiers non-corrigés en moindre dose, que d'avoir recours à ces remèdes ainsi corrigés, qui sont toujours infidèles.

La lotion de l'aloès que l'on faisait aussi en vue de le corriger, est une opération plus mal-entendue encore ; car par ce moyen on rejetait les parties résineuses de l'aloès, pour ne conserver que ses parties extractives : or quand même la séparation de ces deux parties pourrait être regardée comme avantageuse, en ce qu'elle fournirait deux différents remèdes chacun très-utile, on ne pourrait jamais regarder cette séparation comme une correction. Mais il conste d'ailleurs par l'observation, que l'aloès entier fournit un fort bon remède à la Médecine ; au lieu que son extrait seul ne possède qu'en un degré très-inférieur les vertus de l'aloès entier, tandis que sa résine est absolument inusitée. (b)




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