CHAMBELLENAGE, ou CHAMBRELAGE, s. m. (Jurisprudence) terme usité dans plusieurs coutumes. C'est un droit ou profit de fief dû au seigneur dominant, pour chaque mutation de vassal.

Le terme de chambellage vient de ce qu'autrefois le chambellan, dont l'office est de veiller sur ce qui se passe dans la chambre du roi, assistait à la cérémonie de la foi et hommage des vassaux du roi, et recevait d'eux à cette occasion quelque libéralité ; ce qui fut depuis converti en un droit ; tellement que par arrêt de l'année 1262, il fut ordonné que les chambellans auraient droit de prendre de tous vassaux qui relevaient du roi, vingt sous pour un fief de cinquante livres de rente et au-dessous ; cinquante sous pour un fief de cent livres de revenu ; et cinq livres, le tout parisis, pour un fief de cinq cent livres de revenu et au-dessus ; ce que l'on trouve rapporté dans le registre de S. Just. Voyez aussi Pasquier, en ses Recherches, liv. IV. ch. xxxiij.

Les seigneurs particuliers avaient aussi autrefois la plupart leurs chambellans, lesquels, à l'imitation du chambellan du roi, exigeaient un droit des vassaux du seigneur, pour les introduire dans sa chambre lorsqu'ils venaient faire la foi et hommage ; droit que les seigneurs ont appliqué à leur profit, depuis qu'ils ont cessé d'avoir des chambellans en titre.

Les coutumes de Hainaut et de Cambrai appellent ce droit chambrelage ; et celle de Bretagne chambellenage.

Le chambellage n'est pas de droit commun : il n'a pas lieu dans la coutume de Paris, ni dans la plupart des coutumes : celles où il est usité sont, Meaux, Mantes, Senlis, Clermont, Châlons, Saint-Omer, Chauni, Saint-Quentin, Ribemont, Doulenais, Artais, Amiens, Montreuil, Beauquesne, Saint-Riquier, Péronne, Saint-Paul, Poitou, Valais, Noyon, Laon, Ponthieu, Cambrai, Aire, Hesdin, Hainaut, Tournai, Bretagne, et quelques autres villes.

Le droit de chambellage est réglé différemment par les coutumes, tant pour la quotité du droit, que pour la qualité de ceux qui le doivent et les cas où il est dû.

Dans la coutume de Mantes il est d'un écu-sol, qui est dû au seigneur par le fils ou autre ascendant en ligne directe, auquel le fief est avenu par succession, quand il vaut cinquante livres de revenu et plus.

Dans la coutume de Poitou il est de dix sous pour chaque hommage lige, et de cinq sous pour des hommages pleins.

Celles de Senlis, Valais, le fixent à vingt sous.

La coutume de Noyon donne le choix de payer vingt sous ou une pièce d'or, à la volonté du vassal. Celle de Saint-Quentin veut que cette pièce d'or vaille un demi-écu ou au-dessus, à la discrétion du vassal, pourvu que le fief soit de vingt livres de rente ; car s'il vaut moins, il n'est dû que cinq sous.

Dans la coutume de Montdidier, Roye, et Péronne, l'origine de ce droit est de douze livres dix sous, si le fief vaut cent livres par an et au-dessus : s'il vaut moins, il n'est dû que vingt-cinq sous.

Il y a encore plusieurs autres différences entre les coutumes par rapport à ce droit, mais qu'il serait trop long de rapporter. Voyez le Glossaire de M. de Laurière, au mot Chambellage, et les commentateurs des coutumes où ce droit est usité. (A)

CHAMBELLAGE était aussi un droit que les évêques, archevêques, abbés, et autres prélats du royaume, payaient au roi en lui prêtant serment de fidélité. Ce droit dû à cause des offices de grand-maître, de grand-sénéchal de France, que le roi tenait en ses mains, dénote qu'il était dû anciennement à ceux qui possédaient ces offices. Philippe IV. dit le Bel, ordonna au mois de Mars 1309 que tout l'argent qui proviendrait du droit de chambellage payé par les évêques, abbés, abbesses, et autres prélats, serait mis entre les mains du grand-aumônier, pour être employé à marier de pauvres filles nobles. Ce droit était alors de la somme de dix livres. Présentement les évêques et archevêques, avant de prêter leur serment de fidélité, sont obligés de payer la somme de trente-trois livres entre les mains du trésorier des aumônes et bonnes œuvres du roi. (A)

CHAMBELLAGE, s. m. (Jurisprudence) est encore un droit que la chambre des comptes taxe à la réception d'un vassal en foi et hommage. Il tire son origine des libéralités que l'on faisait anciennement au grand chambellan pour être introduit dans la chambre du roi, lorsqu'il recevait lui-même la foi et hommage de ses vassaux. Ces libéralités passèrent tellement en coutume, qu'elles devinrent un droit autorisé par le prince. En effet, au registre de S. Just, fol. 15. verso, il y a une ordonnance de Philippe-le-Hardi, de 1272, que quiconque fera hommage, payera au chambellan, savoir, le plus pauvre homme, vingt sous parisis ; ceux de cent livres de terre, cinquante sous parisis ; ceux de six cent livres de terre, cent sous parisis ; les barons, évêques ou archevêques, dix livres parisis. Le roi s'étant déchargé sur la chambre des comptes du soin de recevoir la foi et hommage de ses vassaux, le premier huissier qui les introduit en la chambre, et qui représente en cette partie le chambellan, jouit du même droit, qui est d'un ou plusieurs écus d'or, selon le revenu du fief. Voyez les recherches de Pasquier, l. IV. c. xxxiij. le glossaire de Laurière, au mot Chambellage ; et ce qui est dit du chambellage en l'article précédent pour les évêques. (A)