S. m. (Jurisprudence) signifie sûreté et gage. On donne en nantissement des effets mobiliers, des titres et papiers, etc. et celui auquel on a donné des effets en nantissement n'est point obligé de les rendre qu'en lui payant ce qui lui est dû. Voyez GAGE.

Nantissement signifie aussi une espèce de tradition feinte et simulée que l'on pratique dans certains pays, à l'effet d'acquérir droit de propriété ou d'hypothèque sur un héritage ; c'est pourquoi ces pays sont appelés coutumes ou pays de nantissement, telles sont les provinces de Picardie et Champagne.

Le nantissement se fait de trois manières :

La première est par dessaisine et saisine, autrement par vest et devest ; pour cet effet le vendeur ou le débiteur se dépouille de la propriété de l'héritage ès mains du seigneur, et l'acquéreur ou créancier hypothécaire s'en fait ensaisiner par le seigneur du lieu où est situé l'héritage, lequel lui donne un bâton en signe de tradition et de mise en possession. Cette forme de nantissement se pratique plutôt dans les ventes que dans les engagements et obligations des héritages.

La seconde espèce de nantissement se fait par main assise, c'est-à-dire que le créancier auquel un héritage est obligé, y fait mettre et asseoir la main du roi ou de justice, et fait ordonner par le juge, le débiteur et le seigneur appelés, que la main mise tiendra jusqu'à-ce qu'il soit payé de son dû.

La troisième se fait par prise de possession de l'héritage obligé, lorsque le créancier, en vertu de commission du juge, se fait mettre de fait en possession réelle et actuelle de l'héritage qui lui est hypothéqué, ayant ajourné pour cet effet le débiteur et le seigneur direct. L'acte de cette sorte de prise de possession porte : " Nous avons nanti, réalisé et hypothéqué un tel sur tels et tels héritages, et pour une telle somme ".

Le nantissement produit deux effets.

L'un est que le créancier acquiert un droit réel sur la chose, tellement que l'héritage sur lequel il s'est fait nantir ne peut plus être engagé ni aliéné au préjudice de son dû. et qu'il est préféré à tous autres créanciers hypothécaires qui ne seraient point inscrits sur les registres du nantissement, ou qui ne le seraient qu'après lui.

L'autre effet du nantissement est que par son moyen le commerce est plus assuré, en ce qu'étant public, celui qui veut prêter avec sûreté peut, par le moyen du nantissement, connaître l'état des affaires de celui avec lequel il traite, ou du-moins savoir s'il y a quelque créancier nanti avec lui.

De quelque manière que le nantissement se fasse, il est toujours public ; car si c'est par vest ou devest entre les mains du seigneur, celui-ci doit avoir un registre pour ces sortes d'actes, dont il doit donner communication à tous ceux qui y ont recours.

Les nantissements qui se font par main assise ou par mise en possession, sont pareillement publics, car il faut que le créancier se transporte sur les héritages avec un huissier, qui dresse un procès-verbal de la main assise ou de la mise en possession, en conséquence de quoi le créancier obtient une sentence du juge, qui lui en donne acte, le débiteur et le seigneur dû.ment appelés. On peut par conséquent consulter les registres où sont ces sortes de sentences.

On a tenté plusieurs fois d'établir dans tout le royaume la formalité du nantissement, sous prétexte de rendre les hypothèques notoires, et de prévenir les stellionats ; mais cela n'a point eu lieu.

Dans les provinces de Vermandais, Picardie et Artais, on pratique une quatrième espèce de nantissement par un simple acte, en la forme qui suit : l'acquéreur d'un héritage ou un créancier fait nantir son titre d'acquisition ou de créance, expédié en forme authentique sur les héritages énoncés dans sa requisition, à l'effet d'avoir hypothèque dessus, et qu'il ne soit reçu aucun autre nantissement, si ce n'est à la charge de son dû ou vente, et de la priorité de son droit. L'acte de nantissement doit être délivré et endossé en ses lettres d'acquisition ou de créance, et doit aussi être enregistré au greffe des lieux où sont assis les héritages.

Dans les coutumes de nantissements les contrats quoique passés devant notaire, n'emportent point hypothèque contre des tierces personnes, s'ils ne sont nantis et réalisés par les officiers des lieux où sont assis les héritages ; sans cette formalité ils sont réputés purs personnels et mobiliers.

Les hypothèques notoires et publiques, telles que les hypothèques légales du mineur sur les biens de son tuteur, de la femme sur les biens de son mari et sur ceux de son père qui a promis de la doter, n'ont pas besoin de nantissement, non plus que les dettes privilégiées, les soutes de partage, ni les sentences.

Il faut néanmoins excepter l'Artais, où les sentences n'emportent pas hypothèque, parce que l'ordonnance de Moulins n'y a pas été enregistrée : on n'y connait pas non plus les hypothèques tacites. Voyez Maillart sur Artais, art. 1. n. 39. art. 72. n. 269. art. 74. n. 265.

Sur le nantissement en général, voyez Louet, lettre H, somm. 26. et lettre L. somm. 25 ; l'ordonnance de 1539, art. 82, et M. Bourdin, sur l'art. 92 ; M. le Maitre, traité des criées, chap. xxxj. n. 4 ; de Heu, sur Amiens, art. 139, et Dumolin, ibid. (A)