S. f. (Jurisprudence) est l'acte par lequel un étranger est naturalisé, c'est-à-dire qu'au moyen de cet acte, il est réputé et considéré de même que s'il était naturel du pays, et qu'il jouit de tous les mêmes privilèges ; ce droit s'acquiert par des lettres de naturalité. Voyez ci-après NATURALITE.

NATURALISATION, (Histoire d'Angleterre) acte du parlement qui donne à un étranger, après un certain séjour en Angleterre, les privilèges et les droits des naturels du pays.

Comme cet acte coute une somme considérable que plusieurs étrangers ne seraient pas en état de payer, on agite depuis longtemps dans la Grande-Bretagne la question importante, s'il serait avantageux ou désavantageux à la nation, de passer un acte en parlement qui naturalisât généralement tous les étrangers, c'est-à-dire qui exemptât des formalités et de la dépense d'un bil particulier, ou de lettres-patentes de naturalisation, tout étranger qui viendrait s'établir dans le pays, et les protestants par préférence.

Les personnes qui sont pour la négative craignent que cette naturalisation générale n'attirât d'un côté en Angleterre un grand nombre d'étrangers, qui par leur commerce ou leur industrie, ôteraient les moyens de subsister aux propres citoyens, et de l'autre côté quantité de pauvres familles qui seraient à charge à l'état, au-lieu de lui être utiles.

Les personnes qui tiennent pour l'affirmative (& ce sont les gens les plus éclairés de la nation) répondent, 1°. que de nouveaux sujets industrieux acquis à l'Angleterre, loin de lui être à charge, augmenteraient ses richesses, en lui apportant de nouvelles connaissances, de manufacture ou de commerce, et en ajoutant leur industrie à celle de la nation. 2°. Qu'il est vraisemblable que parmi les étrangers ceux-là principalement viendraient profiter du bienfait de la loi, qui auraient déjà dans leur fortune ou dans leur industrie des moyens de subsister. 3°. Que quand même dix ou vingt mille autres étrangers pauvres, qu'on naturaliserait, ne retireraient de leur travail que la dépense de leur consommation sans aucun profit, l'état en serait toujours plus fort de douze ou vingt mille hommes. 4°. Que le produit des taxes sur la consommation en augmenterait, en diminution des autres charges de l'état, qui n'augmenteraient aucunement par ces nouveaux habitants. 5°. Que l'Angleterre peut aisément nourrir une moitié en sus de sa population actuelle, si l'on en juge par ses exportations de blé, et l'étendue de ses terres incultes ; que ce royaume est un des plus propres de l'Europe à une grande population par sa fertilité, et par la facilité des communications entre ses différentes provinces, au moyen des trajets de terre ou de mer assez courts qui les produisent. 6°. Que les avantages immenses de la population justifient la nécessité d'inviter les étrangers à venir l'augmenter.

Enfin, on cite aux Anglais jaloux, ou trop réservés sur la naturalisation des étrangers, ce beau passage de Tacite, liv. XII. de ses Annales : " Nous repentons-nous d'avoir été chercher les familles des Balbes en Espagne, et d'autres non moins illustres dans la Gaule narbonnaise ? leur postérité fleurit encore parmi nous, et ne nous cede en rien dans leur amour pour la patrie. Qu'est-ce qui a causé la ruine de Sparte et d'Athènes qui étaient si florissantes, que d'avoir fermé l'entrée de leur république aux peuples qu'ils avaient vaincus ? Romulus notre fondateur fut bien plus sage, de faire de ses ennemis autant de citoyens dans un même jour ". Le chancelier Bacon ajouterait : " On ne doit pas tant exiger de nous, mais on peut nous dire : naturalisez vos amis, puisque les avantages en sont palpables ". (D.J.)