ou DROITS, (Jurisprudence) signifie aussi fort souvent la faculté qui appartient à quelqu'un de faire quelque chose, ou de jouir de quelque chose de réel ou d'incorporel : tels sont par exemple les droits d'ainesse, d'amortissement, d'échange, de lods et vente, et autres semblables, que l'on expliquera chacun sous le terme qui leur est propre, comme AINESSE, AMORTISSEMENT, ECHANGE, LODS ET VENTES, etc. Nous ne parlerons ici que de ceux qui ont une épithète ou surnom, que l'on ne peut séparer du mot droit sans détruire l'idée que ces deux mots présentent conjointement : comme par exemple :

DROITS ABUSIFS, sont ceux qui ont quelque chose de contraire à la raison, à l'équité, et à la bienséance : tels, par exemple, que certains droits que quelques seigneurs s'étaient attribués sur leurs hommes, vassaux, et sujets : comme le droit que prétendait l'évêque d'Amiens, d'obliger les nouveaux mariés de lui donner une somme d'argent, pour avoir la permission de coucher ensemble la première nuit de leurs noces, dont il fut débouté par arrêt du parlement, du 19 Mai 1409 : tels étaient encore les droits de cullage ou cuilliage, et de cuisage, en vertu desquels certains seigneurs prétendaient avoir la première nuit des nouvelles mariées ; ce qui est depuis longtemps aboli. Il y a aussi des droits abusifs qui, sans être injustes ni contraires à l'honnêteté, sont ridicules ; comme l'hommage de la Tire-vesse dont il est parlé dans les plaidoyers célèbres de Bordeaux, dédiés à M. de Nesmond, pag. 157. On convertit ordinairement ces droits en quelque devoir plus sensé et plus utile, ainsi que cela fut fait dans le cas dont on vient de parler. (A)

DROIT ACQUIS, jus quaesitum, c'est-à-dire celui qui est déjà acquis à quelqu'un avant le fait ou acte qu'on lui oppose, pour l'empêcher de jouir de ce droit. C'est un principe certain que le droit une fois acquis à quelqu'un, ne peut lui être enlevé sans son fait, et que le fait d'un tiers n'y saurait nuire : ce qui est fondé sur la loi stipulation, au digeste de jure dotium. Ce principe est aussi établi par Arnoldus Reyger, in thesauro juris, verbo jus quaesitum ; Gregorius Tolos. in sintagm. juris univ. lib. XLI. p. 508. Rebuff. gloss. 16. reg. cancell. de non tollendo jus quaesitum. (A)

DROIT COLONAIRE, jus colonarium, c'est le nom que la novelle 7 donne à une espèce de bail à cens, qui était usité chez les Romains entre particuliers. Loiseau en son traité du déguerpiss. liv. I. chap. IVe n. 30, prétend que ce contrat revenait à peu-près à celui qu'on appelait contrat libellaire ou datio ad libellum, qui était un bail perpétuel de l'héritage. (A)

DROIT CURIAL, signifie quelquefois ce qui fait partie des fonctions du curé ; quelquefois on entend par-là ce qui lui est dû pour son honoraire dans certaines fonctions. Voyez CURIAL. (A)

DROITS ECCLESIASTIQUES, signifient tout ce qui appartient aux ecclésiastiques, comme leurs fonctions, les honneurs, préséances, privilèges, exemptions, et droits utiles qui peuvent y être attachés.

DROITS EPISCOPAUX, sont ceux qui appartiennent à l'évêque en cette qualité, comme de donner le sacrement de confirmation et celui de l'ordre, de benir les saintes huiles, de consacrer un autre évêque, de faire porter devant soi la croix levée en signe de juridiction dans son territoire. Voyez EPISCOPAL, EVECHE, EQUEEQUE. (A)

DROIT EXORBITANT, est celui qui est contraire au droit commun. (A)

DROITS HONORIFIQUES, en général signifient tous les honneurs, prééminences, et prérogatives qui sont attachés à quelque qualité, office, commission, ou place ; comme le titre de prince, de duc et pair, le droit de séance au parlement, le titre de président ou de conseiller du roi, le droit de porter la robe rouge, de prendre le titre de chevalier ou d'écuyer, de précéder toutes les personnes d'un ordre inférieur dans les assemblées et cérémonies publiques, et plusieurs autres droits semblables, qu'il serait trop long de détailler ; ils sont opposés aux droits utiles, qui n'ont pour objet que les profits et émoluments attachés à quelque place. (A)

DROITS HONORIFIQUES dans les églises, sont des distinctions et honneurs qui appartiennent à certaines personnes dans les églises auxquelles leur droit est attaché.

On distingue deux sortes de droits honorifiques ; savoir les grands droits honorifiques, et les moindres honneurs.

Les grands droits honorifiques, appelés par les auteurs honores majores, et qui sont les seuls droits honorifiques proprement dits, sont le droit de litre ou ceinture funèbre, les prières nominales, le banc dans le chœur, l'encens, et la sépulture au chœur.

Ces sortes de droits n'appartiennent régulièrement qu'à deux sortes de personnes, savoir le patron et le seigneur haut-justicier : ce dernier a droit de litre tant en-dedans qu'au-dehors de l'église ; le patron n'en peut avoir qu'au-dedans. Observez encore que le haut-justicier ne peut prétendre les droits honorifiques que dans les églises paroissiales, bâties dans sa haute-justice ; au lieu que le patron jouit de ces mêmes droits dans toutes les églises et chapelles dont il est patron ou fondateur.

Le patron jouit de ces droits, en considération de ce qu'il a doté ou bâti l'église, ou donné le fonds pour la bâtir ; le seigneur haut-justicier en jouit, en considération de ce qu'il a permis de bâtir l'église paroissiale dans son territoire, et comme ayant la puissance publique en vertu de laquelle il tient l'église sous sa protection.

En Bretagne et en Normandie, le patron a seul les droits honorifiques, à l'exclusion du haut-justicier ; mais ailleurs le haut-justicier y participe aussi.

En concurrence du patron et du seigneur haut-justicier, le patron est préféré dans l'église paroissiale au haut-justicier ; ainsi la litre du patron y est placée au-dessus de celle du haut-justicier : il est nommé le premier aux prières ; il doit avoir la place la plus honorable pour son banc et pour sa sépulture, et reçoit l'encens le premier à l'offrande ou à la procession qui se fait dans l'église ; il passe devant le haut-justicier, mais hors de l'église, le haut-justicier est préféré au patron : c'est pourquoi il a seul droit de litre au-dehors de l'église ; et quand la procession sort de l'église, il a droit d'y prendre le pas sur le patron.

Les seigneurs qui n'ont la haute-justice que par engagement, ne jouissent pas des droits honorifiques proprement dits, mais seulement des moindres honneurs et simples, à moins que le roi n'ait engagé nommément les droits honorifiques : car l'engagiste n'est regardé que comme un seigneur temporaire, qui peut être dépossédé d'un moment à l'autre par la voie du rachat.

Il ne suffit pas non plus pour jouir des droits honorifiques d'avoir une haute-justice dans la paraisse, il faut être seigneur haut-justicier du terrain sur lequel l'église est bâtie.

La femme du patron et celle du haut-justicier, participent aux droits honorifiques dont jouïssent leurs maris.

Les patrons et les seigneurs hauts-justiciers jouissent encore de quelques distinctions dans les églises ; comme d'y avoir les premiers et avec distinction l'eau-bénite, d'aller les premiers à l'offrande recevoir le baiser de paix et le pain beni, de marcher les premiers à la procession : mais tous ces honneurs ne font pas partie des grands droits honorifiques, qui sont les seuls honneurs majeurs, droits honorifiques proprement dits ; ces distinctions ne sont que de simples préséances ou préférences, que les auteurs appellent les moindres honneurs de l'église, honneurs que les patrons et les hauts-justiciers reçoivent à la vérité les premiers, mais dont ils ne jouissent pas seuls ; attendu que les personnes constituées en dignité, ou qui peuvent mériter quelque considération, telles que les seigneurs moyens et bas-justiciers, les seigneurs de fiefs, et gentilshommes, les officiers royaux, les commensaux de la maison du roi, et autres personnes qualifiées, participent aussi à ces mêmes honneurs après les patrons et les hauts-justiciers, chacun selon leur dignité ou rang, titres et possession : au lieu que les vrais droits honorifiques, tels que le droit de litre, les prières nominales, l'encens, le droit de banc et de sépulture dans le chœur, n'appartiennent qu'au patron et au seigneur haut-justicier, et ne s'étendent à aucune autre personne, quelque qualifiée qu'elle puisse être.

On peut voir ce qui concerne chacun des droits honorifiques en particulier, aux mots EAU-BENITE, BANC, ENCENS, LITRE, CEINTURE FUNEBRE, PAIN-BENI, PATRON, PATRONAGE, PRIERES NOMINALES, PROCESSION, SEPULTURE.

Voyez aussi sur cette matière, le tr. des droits honorifiques, par Maréchal ; les observations sur le droit des patrons et des seigneurs, par M. Guyot ; Loyseau, tr. des seigneuries, ch. XIe Bacquet, des dr. de justice, ch. xx. Charondas, liv. IV. rép. 99. Tournet, lettre P. arr. 5 ; la bibliotheq. de Jovet ; Coquille, tome I. pag. 251. Leprestre, cent. 2. ch. xxxvj. Chenu, en son tr. des off. tit. 40. Basnage, sur la cout. de Norm. art. 69. et 140. le recueil d'arrêts de Mr. Froland, les définit. canon. et la biblioth. canon. les lois ecclésiast. d'Héricourt ; les mat. bénéf. de Fuet ; les mémoires du clergé, I. édit. tom. II. part. II. chap. Ve le recueil de Borjon des bénéfices ; les arrêtés de M. le premier président de Lamoignon, tit. des dr. honorifiq. les résolutions de plusieurs cas de conscience, et des plus importantes questions du barreau, etc. par la Paluelle, part. II. On peut voir aussi les traités du droit de patronage, ou qui ont rapport à cette matière, comme celui de Chassaneus, catalogus gloriae mundi ; le tr. des dr. honorif. et utiles des patrons et curés primitifs, par M. Duperray ; et les tr. du droit de patronage de de Roye, et autres auteurs, et ceux de Simon et de Ferrière. (A)

DROITS IMMOBILIERS, sont ceux qui sont réputés immeubles par fiction en vertu de la loi ; comme les offices, les rentes, dans les coutumes où elles sont réputées immeubles.

DROITS INCORPORELS, sont ceux quae in jure tantùm consistunt ; ils sont opposés aux choses corporelles, que l'on peut toucher manuellement. Les droits incorporels sont de deux sortes : les uns mobiliers, comme les obligations et les actions, les deniers stipulés propres ; les autres qui sont réputés immobiliers, tels que les offices, les servitudes, les cens, rentes, champarts, et autres droits seigneuriaux, soit casuels, ou dont la prestation est annuelle, etc. (A)

DROITS LITIGIEUX, sont ceux sur lesquels il y a actuellement quelque contestation pendante et indécise, ou qui sont par eux-mêmes douteux et embarrassés, de manière qu'il y a lieu de s'attendre à essuyer quelque contestation avant d'en pouvoir jouir : tels sont par exemple, des créances mal établies, ou dont la liquidation dépend de comptes de société ou communautés fort compliqués ; tels sont aussi les droits successifs, lorsque la liquidation de ces droits dépend de plusieurs questions douteuses.

Les cessionnaires de droits litigieux sont regardés d'un oeil défavorable, parce qu'ils acquièrent ordinairement à vils prix des droits embarrassés ; et que pour en tirer du profit, ils vexent les débiteurs à force de poursuite. Ces sortes de cessions sont surtout odieuses, lorsque l'acquéreur est un officier de justice que l'on présume se prévaloir de la connaissance que sa qualité lui donne, pour traiter plus avantageusement de tels droits, et pour mieux parvenir au recouvrement : on ne permet pas non plus qu'un étranger vienne au moyen d'une cession de droits successifs, prendre connaissance du secret des familles.

C'est sur ces différentes considérations que sont fondées les lois per diversas et ab anastasio, au code mandati ; lois qui sont fameuses dans cette matière : c'est pourquoi nous en ferons ici l'analyse.

La première de ces lois dit : que des plaideurs de profession prennent des cessions d'actions ; que si c'étaient des droits incontestables, ceux auxquels ils appartiennent les poursuivraient eux-mêmes. L'empereur Anastase, de qui est cette loi, défend qu'à l'avenir on fasse de tels transports, et ordonne que ceux qui en auront pris, ne seront remboursés que du véritable prix qu'ils auront remboursé, quand même le transport ferait mention d'une plus grande somme.

Cette loi excepte néanmoins quatre cas différents.

1°. Elle permet à un co-héritier de céder à l'autre sa part des dettes actives de la succession.

2°. Elle permet aussi à tout créancier ou autre, qui possède la chose d'autrui, de prendre un transport de plus grands droits en payement de son dû. ou pour la sûreté de la dette.

3°. Elle autorise aussi les co-légataires et fidéi-commissaires à se faire entr'eux des cessions de leur part des dettes actives qui leur ont été laissées en commun.

4°. Cette loi exceptait aussi purement et simplement, le cas de la donation d'une dette litigieuse.

La loi ab anastasio qui suit immédiatement, et qui est de l'empereur Justinien ; après avoir d'abord rappelé la teneur de la loi précédente, dit que les plaideurs trouvaient moyen d'éluder cette loi, en prenant une partie de la dette à titre de vente, et l'autre partie par forme de donation simulée. Justinien suppléant ce qui manquait à la constitution d'Anastase, défend que l'on use à l'avenir de pareils détours ; il permet les donations pures et simples de droits et actions, pourvu que la donation ne soit point une vente ou cession, déguisée sous le titre de donation : autrement le donataire ou cessionnaire ne sera remboursé que de ce qu'il aura réellement payé pour le prix de l'acte, et il ne pourra tirer aucun avantage du surplus.

La disposition des lois per diversas et ab anastasio, était autrefois suivie purement et simplement au parlement de Paris. Présentement, quand le transport n'est pas nul, on n'est pas recevable à exclure le cessionnaire, en lui remboursant seulement le véritable prix du transport. Il y a cependant plusieurs cas où l'on ne rend que le véritable prix, et d'autres même où le transport est déclaré nul. Par exemple, quand un étranger acquiert des droits successifs qui sont communs et indivis avec les autres héritiers, ceux-ci peuvent l'exclure en lui remboursant le véritable prix du transport. Il en est de même à l'égard du tuteur qui acquiert des droits contre son mineur ; la novelle 72, ch. IIe prive même le tuteur de la somme au profit du mineur.

Il y a encore des personnes auxquelles il est défendu d'acquérir des droits litigieux ; ce qui s'observe dans tous les parlements.

De ce nombre sont les juges : suivant la loi 46, ff. de contrah. empt. et la loi unique C de contr. omn. judic. leur défendait de faire aucune acquisition dans leur ressort, pendant le temps de leur commission. Cela s'observait aussi en France, suivant l'ordonnance de S. Louis de 1254 : mais depuis que les charges de judicature sont devenues perpétuelles, on permet aux juges d'acquérir dans leur ressort : ce qui reçoit néanmoins deux exceptions.

La première, pour les droits litigieux, dont les droits sont pendants en leur siège ; que les ordonnances de 1356, de 1535, l'ordonnance d'Orléans, article 54, et celle de 1629, art. 94, leur défendent d'acquérir.

L'ordonnance d'Orléans étend cette prohibition aux avocats, procureurs, et solliciteurs pour les affaires dont ils ont été chargés par les parties.

La seconde exception est pour les biens qui s'adjugent par décret ; le parlement de Paris, par un règlement du 10 Juillet 1665, art. 13, a fait défenses à tous juges de son ressort de se rendre adjudicataires des biens qui se decretent dans leur siège.

Les lois per diversas et ab anastasio ne sont pas observées d'une manière uniforme dans les autres parlements.

Ceux de Bordeaux et de Provence jugent que la cession de droits et actions doit avoir son effet, quand la dette est claire et liquide.

DROITS LUCTITIEUX seu luctuosi, en style de la chambre des comptes, sont des droits tristes : tels que les confiscations contre ceux qui quittent le service du roi, ou pour cause d'homicide ; ce qui a quelque rapport à ce que les lois romaines appelaient successio luctuosa, qui était lorsque le père succédait à son enfant. (A)

DROIT MOBILIER, est celui qui ne consiste qu'en quelque chose de mobilier, ou qui tend à recouvrer une chose mobiliaire, comme une créance d'une somme à une fois payer.

DROITS, NOMS, RAISONS, et ACTIONS, ce qu'en Droit on appelle nomina et actiones ; ce sont les droits, obligations actives, et les actions qui en résultent ; soit en vertu de la loi, ou de quelque convention expresse ou tacite ; les titres et qualités, en vertu desquels on peut être fondé, et toutes les prétentions que l'on peut avoir. Celui qui cede une chose, cede ordinairement tous les droits, noms, raisons et actions qu'il peut y avoir. (A)

DROIT PERSONNEL, est celui qui est attaché à la personne, comme la liberté, les droits de cité, la majorité, etc. à la différence des droits réels qui sont attachés à un fonds, comme les droits seigneuriaux, les droits de servitude, etc. (A)

DROIT REEL, voyez ci-devant DROIT PERSONNEL.

DROITS REGALIENS, sont tous ceux qui appartiennent au roi comme souverain ; tels que la distribution de la justice, le pouvoir législatif, le droit de faire la guerre et la paix, le droit de battre monnaie, de mettre des impositions, de créer des offices, etc. (A)

DROITS DU ROI : on comprend quelquefois sous ce terme tous les droits que le roi peut avoir, tels que les droits régaliens dont on vient de parler ; ou les droits qu'il a par rapport à son domaine et à ceux qui en dépendent : tels que les droits d'aubaine, de confiscation, etc. On entend aussi quelquefois par les termes de droits du roi, ce que chacun est obligé de payer à ses fermiers, receveurs, et autres préposés, à cause des impositions ordinaires ou extraordinaires. Voyez plus bas DROITS DU ROI, Finance. (A)

DROITS ROYAUX, sont la même chose que les droits régaliens ou droits du roi. Voyez ci-dev. DROITS REGALIENS, et DROITS DU ROI.

DROITS SEIGNEURIAUX, sont tous ceux qui appartiennent à un seigneur à cause de sa seigneurie, comme de se qualifier seigneur d'un tel endroit, le droit de chasse sur les terres de son fief. On entend aussi par droits seigneuriaux, les profits tant ordinaires que casuels des fiefs ; tels que les cens et rentes seigneuriales, les droits de champart, les droits de lods et ventes, relief, quint et requint, amende de cens ou de ventes non payées, etc. Voyez FIEF, CENS, CHAMPART, LODS ET VENTES, RELIEF, QUINT, etc. (A)

DROIT D'UN TIERS, est celui qui appartient à quelqu'un ; autres que ceux qui stipulent ou qui contractent les conventions que deux personnes font ensemble, ne peuvent préjudicier à un tiers. (A)

DROIT UTILE, est celui qui produit quelque profit ou émolument. Le terme de droit utîle est opposé à droit honorifique. Les offices et les seigneuries ont des droits honorifiques et des droits utiles. Voyez ci-devant DROITS HONORIFIQUES. (A)

DROITS DU ROI, (Finance) sont cet impôt que le Roi exige de ses peuples, et qui fait la principale partie des revenus de l'état ; ils furent établis pour subvenir aux frais que le roi était obligé de faire dans les temps de guerre, ou même en temps de paix, pour soutenir la majesté du trône, entretenir sa maison, les places fortes et les garnisons, payer les gages des officiers, et tous ceux qui ont des salaires publics, les ambassades, la construction et réparation des ponts et navigations, des rivières, des grands chemins, etc. lorsque les revenus du domaine ne se trouvent pas suffisans pour faire face à ces dépenses, qui peuvent être plus ou moins grandes suivant les temps.

Quand nos rois n'avaient de finance que leur domaine, ils avaient un contrôleur général appelé contrôleur du trésor.

Pepin père de Charlemagne et Louis le Débonnaire n'avaient qu'un trésorier. Philippe Auguste commit la recette de ses finances à sept bourgeois de Paris ; Philippe le Bel la confia à Enguérand de Marigny.

Charles VII. et Louis XI. n'en avaient qu'un, et il était suffisant aux opérations d'alors, les baillis ou prevôts levant dans les provinces les revenus du roi, qu'ils apportaient à Paris dans les trois termes de la S. Remy, la Chandeleur, et l'Ascension.

Sous François premier les finances furent autrement administrées. Il créa en 1523 les intendants des finances à la suite de la cour, et deux receveurs, l'un des parties casuelles et l'autre de l'épargne ; il ordonna que les trésoriers feraient leur résidence dans les provinces et généralités.

Les différentes perceptions étant augmentées, il serait trop long d'en parler ici ; voyez chacun à son article et les mots RECEVEURS et THRESORIERS.

Les contributions pour les dépenses de l'état ne peuvent être prises que sur les personnes qui le composent ; la manière qui sera la plus juste et la plus naturelle, c'est-à-dire celle qui affectera toutes sortes de biens et assujettira toutes sortes de personnes indistinctement, doit être préférée, et est sans contredit la meilleure. Ce ne sont pas seulement les facultés générales du peuple qu'on doit considérer en imposant des droits sur les sujets ; il est de l'avantage de l'état et des particuliers, qu'on les lève sur le plus grand nombre d'objets divers qu'il est possible, sans gêner le commerce, que l'on doit toujours favoriser.

Le bien commun rend la levée des droits juste, et la nécessité de l'état la rend nécessaire. De cette justice et de cette nécessité, il s'ensuit l'obligation de les acquitter.

La fraude aux contributions était appelée un crime dans le droit romain ; et c'est d'autant plus un mal, qu'indépendamment du tort qu'en souffrent le public ou ceux qui en ont traité, on est obligé pour la prévenir à faire plus de frais, ce qui occasionne des dépenses qui seraient beaucoup moindres si chacun était fidèle au devoir de payer le tribut.

Il serait impossible de rapporter tous les cas où il est dû des droits ; parce que chaque action de la vie civîle opérant un ou plusieurs droits, et toutes les espèces de denrées y étant sujettes, il serait immense d'entrer dans un trop grand détail.

Les droits du Roi, suivant l'extension que nous leur donnons, sont ceux qui se lèvent sur les choses mobiliaires, dont la perception se fait sans rapport aux personnes à qui elles peuvent appartenir, sauf quelques privilèges qui dépendent des règlements qui y ont pourvu.

Ces droits sont de différentes natures ; il y en a de purs et de simples, dont le motif a été de fournir de l'argent au roi, comme les aides, les entrées, etc.

D'autres ont eu pour motif un certain avantage pour le public, mais dont le but était cependant d'augmenter les finances, comme les revenus imposés sur différentes denrées attribués à divers officiers, à qui on les aliénait à charge de rachat ; ces officiers furent supprimés par diverses opérations de finances, mais les droits établis pour payer leurs gages le furent rarement.

Il ne peut être imposé aucun droit, de quelqu'espèce qu'il sait, que par la volonté du Roi, qui doit être enregistrée en cour souveraine. C'est un chaos impénétrable que de rechercher l'origine des différents droits qui ont été établis, et les changements qu'ils ont éprouvés. Le laps de temps et les différentes circonstances qui s'étaient succédées rapidement, avaient mis une telle confusion, que Louis XIV. jugea à-propos de rétablir le bon ordre ; ce fut sous le ministère de M. Colbert, et le succès rendit à jamais cette époque mémorable pour la gloire du ministre.

Les différentes ordonnances auxquelles cette réforme donna lieu, ont fait comme différentes classes des droits qui ont cours dans le royaume, nous nous y conformons.

En 1664 parut le fameux tarif pour les droits d'entrées et de sorties sur toutes sortes de marchandises ; ce tarif réunit une vingtaine d'impositions différentes, créées successivement depuis plus de quatre siècles, réduit même plusieurs articles à des prix médiocres pour favoriser différentes branches du commerce, lequel en général en retire un grand avantage dans les provinces où ce tarif a lieu, qui sont la Normandie, la Picardie, la Champagne, la Bourgogne, la Bresse, le Poitou, l'Aunis, le Berry, le Bourbonnais, l'Anjou, le Maine, le duché de Thouars, la châtellenie de Chantonceaux, et les lieux en dépendants : les autres provinces sont réputées étrangères par opposition à celles-ci, qui sont appelées provinces des cinq grosses fermes ; et les marchandises qui vont de ces dernières provinces dans celles réputées étrangères, sont sujettes aux droits de sortie du tarif ; et les marchandises au contraire qui viennent des provinces réputées étrangères dans celles des cinq grosses fermes, sont également sujettes aux droits d'entrée du tarif comme si elles étaient sous dominations différentes.

En différents temps ce tarif fut rectifié sur les mêmes principes avec quelques augmentations, cependant en 1687, il fut rendu l'ordonnance sur le fait des cinq grosses fermes, en sorte que cette partie était dans le meilleur ordre ; le grand nombre d'arrêts, de décisions, et règlements qui sont intervenus depuis, ont changé les premières dispositions en ajoutant de nouveaux droits, en supprimant quelques-uns des anciens, en ajoutant ou diminuant aux fixations : il serait à désirer qu'une nouvelle ordonnance fit cesser les difficultés, qui ne sont pas moins préjudiciables au commerce qu'aux intérêts du Roi. Voyez TRAITES, CINQ GROSSES FERMES au mot FERMES DU ROI.

Au mois de Mai 1680, le meilleur ordre fut établi sur ce qui concernait les gabelles ; par l'ordonnance qui parut à cette fin elle a pourvu à tout, et elle s'observe encore presqu'en entier, y ayant eu peu de changement depuis qu'elle a été rendue. Voyez GABELLES.

Dans la même année, au mois de Juin, parut la nouvelle ordonnance des aides, qui était aussi nécessaire pour rétablir le bon ordre que celle de 1687 le fut pour les traites ; si elle ne procure pas un aussi grand avantage au commerce, ne portant que sur des droits qui touchent plus à la vie privée et à l'intérieur du royaume, elle n'est pas moins utîle au public, en lui procurant la tranquillité à laquelle s'opposait une infinité de règlements dispersés, la plupart contraires les uns aux autres, et presque toujours à charge au public ; cette ordonnance fixe la quotité et l'ordre qui sera observé dans la levée de ces droits connus sous le nom d'aides, à laquelle furent joints plusieurs autres droits. Voyez FERME DES AIDES au mot FERMES DU ROI.

Ceux de marque sur le fer, acier, mines de fer, qui sont une ferme à part. Voyez FERME DE LA MARQUE DES FERS, au mot FERMES DU ROI.

Ceux sur le papier et parchemin timbré. Voyez FORMULE.

L'année suivante parut une nouvelle ordonnance, qui devait servir comme pour mettre la dernière main à la réforme, à laquelle on avait travaillé avec tant de soin : il fut statué dans cette ordonnance sur différents droits particuliers : on regla le commerce du tabac (voyez TABAC et FERME DU ROI) : on fixa la perception et les droits de la marque sur l'or et l'argent ; voyez FERME DE LA MARQUE SUR L'OR et L'ARGENT.

Les octrais furent le sujet d'un des titres de cette ordonnance. Voyez OCTROIS.

On fit quelques changements ou augmentations par cette même ordonnance sur des droits sur lesquels on avait déjà statué.

Il fut réglé la manière dont on ferait l'adjudication et les enchères pour parvenir à faire le bail des fermes ; et le dernier titre fut destiné pour décider sur les points qui sont communs à toutes les fermes.

Une autre classe des droits du Roi, fort considérable pour le revenu, et qui fait une des principales parties des fermes du Roi, sont les domaines et droits y joints. Voyez DOMAINES DU ROI et FERMES DES DOMAINES au mot FERMES DU ROI.

Nous nous sommes bornés à donner un précis des droits du Roi, pris dans le sens le plus littéral : en observant cette distinction qui dans le fait est assez juste, les droits sont les revenus du Roi qui sont affermés.

Les impositions sont certaines et déterminées, et régies par des officiers en charge ou par commission. Voyez IMPOSITION et IMPOTS.

Le clergé et les pays d'états étant sujets à peu ou point de droits, paient en équivalent des dons gratuits, des décimes, etc. dont ce n'est pas le cas de parler ici. Voyez DECIME, DON GRATUIT, etc. Cet article est de M. DUFOUR.

DROIT DE COPIE, terme de Librairie ; c'est le droit de propriété que le libraire a sur un ouvrage littéraire, manuscrit ou imprimé, soit qu'il le tienne de l'auteur même, soit qu'il ait engagé un ou plusieurs hommes de lettres à l'exécuter ; soit enfin que l'ouvrage ayant pris naissance et qu'ayant été originairement imprimé dans le pays étranger, le libraire ait pensé le premier à l'imprimer dans son pays. Il est appelé droit de copie, parce que l'auteur garde ou est censé garder l'original de son ouvrage, et n'en livrer au libraire que la copie sur laquelle il doit imprimer. L'auteur cede ses droits sur son ouvrage ; le libraire ne reçoit que la copie de cet ouvrage ; de-là est venu l'usage de dire droit de copie, ce qui signifie proprement droit de propriété sur l'ouvrage. Ce terme a été établi pour le premier cas ; il a été adopté pour le second, parce qu'il lui convient également : quant au troisième, c'est par extension qu'on a appelé droit de copie, la propriété que le libraire acquiert sur un ouvrage déjà imprimé dans le pays étranger, et qu'il pense le premier à imprimer dans son pays ; mais cette extension a été jusqu'à présent autorisée par l'usage. Ce droit a de tous les temps été regardé comme incontestable par les Libraires de toutes les nations : il a cependant été quelquefois contesté. Pour expliquer avec clarté et faire entendre ce que c'est que ce droit, et en quoi il consiste, on parlera séparément des différentes manières dont un libraire devient ou peut devenir propriétaire d'un ouvrage littéraire. On parlera aussi des privilèges que les souverains accordent pour l'impression des livres, parce que c'est sur la durée limitée de ces privilèges, que se sont quelquefois fondés ceux qui, dans différentes circonstances, ont disputé aux Libraires ce droit de copie ou de propriété.

Le droit de propriété du libraire sur un ouvrage littéraire qu'il tient de l'auteur, est le droit même de l'auteur sur son propre ouvrage, qui ne parait pas pouvoir être contesté. Si en effet il y a sur la terre un état libre, c'est assurément celui des gens de lettres : s'il y a dans la nature un effet dont la propriété ne puisse pas être disputée à celui qui le possede, ce doivent être les productions de l'esprit. Pendant environ cent ans après l'invention de l'imprimerie, tous les auteurs ou leurs cessionnaires ont eu en France la liberté d'imprimer, sans être assujettis à en obtenir aucune permission : il en a résulté des abus ; et nos rais, pour y remédier, ont sagement établi des lois sur le fait de l'imprimerie, dont l'objet a été de conserver dans le royaume la pureté de la religion, les mœurs et la tranquillité publique. Elles exigent que tout ouvrage que l'on veut faire imprimer, soit revêtu d'une approbation, et d'une permission ou privilège du roi, voyez APPROBATION, CENSEUR, PERMISSION, PRIVILEGE. L'approbation est un acte de pure police, et le privilège un acte de justice et de protection, par lequel le souverain permet authentiquement au propriétaire l'impression et le débit de l'ouvrage qui lui appartient, et le défend à tous autres dans ses états. Cette exclusion est sans doute une grâce du prince, mais qui, pour être accordée et reçue, ne change rien à la nature de la propriété : elle est fondée au contraire sur la justice qu'il y a à mettre le propriétaire en état de retirer seul les fruits de son travail ou de sa dépense.

Les souverains, avant l'origine des privilèges, ne prétendaient point avoir de droits sur les ouvrages littéraires encore dans le silence du cabinet ; ils n'ont rien dit depuis qui tendit à dépouiller les Auteurs de leur droit de propriété et de paternité, soit que leurs ouvrages fussent encore manuscrits et entre leurs mains, soit qu'ils fussent rendus publics par la voie de l'impression : les gens de lettres sont donc restés, comme ils l'étaient avant l'origine des privilèges, incontestablement propriétaires de leurs productions manuscrites ou imprimées, tant qu'ils ne les ont ni cedées ni vendues : l'auteur a donc dans cet état le droit d'en disposer comme d'un effet qui lui est propre, et il en use en le transportant à un libraire, ou par une cession gratuite, ou par une vente. Sait qu'il le donne gratuitement ou qu'il le vende, s'il transmet pour toujours ses droits de propriété, s'il s'en dépouille à perpétuité en faveur du libraire, celui-ci devient aussi incontestablement propriétaire et avec la même étendue, que l'était l'auteur lui-même. La propriété de l'ouvrage littéraire, c'est-à-dire le droit de le réimprimer quand il manque, est alors un effet commerçable, comme une terre, une rente et une maison ; elle passe des pères aux enfants, et de Libraires à Libraires, par héritage, vente, cession ou échange ; et les droits du dernier propriétaire sont aussi incontestables que ceux du premier. Il y a cependant eu des gens de lettres qui les ont contestés, et qui ont prétendu rentrer dans la propriété de leurs ouvrages après les avoir vendus pour toujours, mais ç'à été jusqu'à présent sans succès : ils se fondaient singulièrement sur ce que les souverains mettent un terme à la durée des privilèges qu'ils accordent, et disaient que c'est pour se réserver le droit, après que ces privilèges sont expirés, d'en gratifier qui bon leur semble ; mais ils se trompaient, les souverains ne peuvent gratifier personne d'une propriété qu'ils n'ont pas, et le terme fixé à la durée des privilèges, a d'autres motifs : les princes, en la fixant, veulent se réserver le droit de ne pas renouveller la permission d'imprimer un ouvrage, si par des raisons d'état il leur convient de ne pas autoriser dans un temps des principes ou des propositions qu'ils avaient bien voulu autoriser dans une autre. La permission ou le refus de laisser imprimer ou réimprimer un livre, est une affaire de pure police dans l'état, et il est infiniment sage qu'elle dépende de la seule volonté du prince : mais sa justice ne lui permettrait pas à l'expiration d'un privilège qui serait susceptible de renouvellement, de le refuser au propriétaire pour l'accorder à un autre. Les princes veulent encore, en fixant un terme à la durée de l'exclusion, qui fait partie du privilège et qui est une grâce, forcer le propriétaire à remplir les conditions auxquelles elle est accordée ; et ces conditions sont la correction de l'impression, et les autres perfections convenables de l'art. Il s'ensuit de-là que ce n'est pas le privilège qui fait le droit du Libraire, comme quelques personnes ont paru le croire, mais que c'est le transport des droits de l'auteur.

Au reste, quelque solidement que soit établi par ces principes le droit du libraire sur un ouvrage littéraire qu'il tient de l'auteur, il est cependant vrai que quoique celui-ci n'ait plus de propriété, il conserve néanmoins, tant qu'il vit, une sorte de droit d'inspection et de paternité sur son ouvrage ; qu'il doit pour sa gloire avoir la liberté, lorsqu'on le réimprime, d'y faire les corrections ou augmentations qu'il juge nécessaires à sa perfection. Cela est juste et raisonnable, et le libraire ne doit pas s'y refuser. Il pourrait arriver que les augmentations de l'auteur fussent si considérables, qu'elles deviendraient en quelque sorte un nouvel ouvrage : c'est alors à l'honnêteté des procédés à régler les nouvelles conventions à faire entre l'auteur et le libraire, si celui-là en exige ; mais s'il arrivait qu'ils ne s'accordassent pas, l'auteur, s'il n'y avait pas de conventions contraires, resterait propriétaire de ses augmentations, et le libraire de ce qui lui aurait été précédemment cedé.

Il y aurait peut-être un moyen de prévenir les contestations qui pourraient s'élever encore dans la suite, entre les auteurs et les libraires pour raison des ouvrages littéraires que les uns vendent et que les autres achetent : ce serait que l'auteur, quand c'est son intention, mit dans l'acte de cession qu'il fait au libraire, qu'il vend et cede pour toujours son ouvrage et son droit de propriété, auquel il renonce sans aucune restriction ; si au contraire son intention est de ne vendre ou ceder que pour un temps, il faudrait spécifier le temps, comme la durée d'un privilège ou le cours d'une ou de plusieurs éditions, etc. Il conviendrait aussi de statuer sur le cas où l'auteur pourrait donner par la suite des augmentations, et alors il ne resterait point d'obscurité qui put donner lieu à des contestations ; car on ne présume pas que celles qui se sont quelquefois élévées, aient jamais eu d'autre cause.

Les Libraires acquièrent encore ce droit de propriété sur un ouvrage, lorsqu'ils en ont proposé l'exécution à un ou plusieurs hommes de lettres, qui se sont chargés gratuitement ou sous des conditions convenues, de le composer. Le libraire ne tient alors ce droit que de lui-même et de ses avances. On n'a pas connaissance que la propriété du libraire ait jamais été contestée dans ce cas-là ; mais s'il arrivait un jour que des gens de lettres qui auraient contribué à un pareil ouvrage, prétendissent après l'entière exécution avoir quelque droit à la propriété, leurs prétentions seraient aussi peu justes et aussi peu légitimes, que le seraient celles d'un architecte sur un bâtiment qu'il a construit. Il y a plusieurs ouvrages littéraires dans ce cas. Le plus considérable en ce genre est celui-ci. Par les soins qu'on a pris et les dépenses qu'on a faites, afin que cette Encyclopédie devint un ouvrage nouveau, sinon pour le plan, du moins pour l'exécution ; il est certain qu'elle appartient à la France à plus juste titre que le Chambers n'appartient à l'Angleterre, puisque celui-ci n'est que la compilation de tous nos dictionnaires.

Il y a enfin une troisième manière dont un libraire peut acquérir ce droit de propriété sur un ouvrage littéraire, c'est en pensant le premier à l'imprimer dans son pays, quand il a pris naissance dans le pays étranger, et qu'il y a déjà été imprimé ; le libraire tient, comme dans le cas précédent, ce droit de son intelligence et de son industrie. En se procurant les avantages d'une entreprise utile, s'il réussit dans son choix, il sert l'état et ses compatriotes, en ce que d'une part il contribue à faire valoir les fabriques de son pays, et à empêcher l'argent que l'on mettrait à ce livre de passer chez l'étranger ; d'autre part en ce qu'il procure aux gens de lettres de sa nation, avec facilité et moins de frais, un ouvrage souvent utîle et quelquefois nécessaire. Au reste, quoique ce droit soit légitime à certains égards, parce que les Libraires des différentes nations sont dans l'usage de se faire respectivement cette espèce de tort, on doit cependant convenir qu'il est contre le droit des gens, puisqu'il nuit nécessairement au premier entrepreneur. Il serait à souhaiter que tous les libraires de l'Europe voulussent être assez équitables pour se respecter mutuellement dans leurs entreprises ; le public n'y perdrait rien, les livres passeraient d'un pays dans un autre par la voie des échanges. Mais il y a des pays où les productions littéraires ne sont pas assez abondantes et assez du goût des autres nations, pour procurer par échanges aux libraires qui les habitent, tous les livres qu'ils peuvent débiter. Ils trouvent plus d'avantage à imprimer quelques-uns de ces livres qu'à les acheter ; c'est ce qui s'est opposé jusqu'à présent, et ce qui s'opposera vraisemblablement toujours à l'accord équitable qui serait à désirer entre les Libraires des différents pays. Dans l'état où sont les choses, ce droit de propriété fondé sur celui de premier occupant, est aussi solide que celui des deux autres cas, et mérite de la part du souverain la même protection ; avec cette différence cependant que l'on interdit avec raison l'entrée et le débit des éditions étrangères d'un livre dans le pays où il a pris naissance, et que l'on devrait autoriser l'introduction d'une édition étrangère d'un livre, quand il vient du pays où il a été originairement imprimé, quelque privilège qui ait été accordé pour l'impression du même livre dans le pays où il arrive. C'est un usage établi en Hollande, et peut-être ailleurs : les Etats généraux ne refusent point de privilège pour l'impression d'un livre originaire de France, mais ils n'interdisent point chez eux l'entrée et le débit des éditions du même livre faites en France. Cela devrait être réciproque et serait juste ; ce serait un moyen de diminuer le tort que l'on fait au premier entrepreneur, qui a seul couru tous les risques des événements. Cet article est de M. DAVID, un des Libraires associés pour l'Encyclopédie.

DROIT, adj. est synonyme à perpendiculaire, dans l'Architecture et la Coupe des pierres, et en ce sens il est opposé à incliné. On dit un arc droit, quoique cet arc soit courbe, pour dire un arc dont le plan est perpendiculaire à la direction du berceau. (D)

DROIT, terme de Manège : on dit qu'un cheval est droit, pour dire qu'il ne boite point ; qu'on le garantit droit chaud et froid, c'est-à-dire lorsqu'il est échauffé ou refroidi, pour dire qu'il ne boite point, ni quand on le monte et après qu'il est échauffé, ni après qu'il a été monté et qu'il s'est refroidi. Un cheval droit sur ses boulets, c'est la même chose qu'un cheval bouleté (voyez BOULETE), excepté que le pied n'est pas si reculé en-arrière. Droit sur ses jambes, signifie que les jambes de devant du cheval tombent bien à plomb lorsqu'il est arrêté ; c'est la meilleure situation des jambes de devant : il y a des chevaux qui se postent de façon que leurs jambes de devant vont trop en-dessous, c'est-à-dire s'approchent trop de celles de derrière. Aller droit à la muraille, c'est changer de main, en terme de Manège, sans mener son cheval de côté. Aller par le droit, c'est mener son cheval par le milieu du manège sans s'approcher des murailles. Promener un cheval par le droit. Voyez PROMENER. Dictionnaire de Garsault.