S. m. (Jurisprudence) signifie en général, l'action de racheter quelque chose. Il y a plusieurs sortes de rachats.

Rachat ou remeré, en cas de vente d'un héritage ou autre immeuble, est l'action par laquelle le vendeur rentre dans le bien qu'il avait vendu, en vertu de la faculté de rachat, qui était stipulée dans la vente.

Le domaine du roi, lorsqu'il est aliéné, est sujet à rachat ; cette faculté est toujours sousentendue, et est imprescriptible, de même que le domaine.

Dans les contrats de vente des biens des particuliers, la faculté de rachat n'a point lieu si elle est stipulée par cette clause ; le vendeur se réserve le droit de rentrer dans l'héritage vendu, en remboursant à l'acheteur le prix qu'il en a reçu.

La condition du rachat fait que l'acquéreur n'est point propriétaire incommutable tant que dure la faculté de rachat ; dans ce cas la vente n'est que conditionnelle ; c'est pourquoi l'acquéreur d'une maison ne peut expulser les locataires : il peut néanmoins dès le moment de son contrat, commencer à prescrire les hypothèques de son vendeur, et elle est entièrement résolue et comme non faite, lorsque le vendeur rentre dans la chose en payant le prix ; c'est pourquoi il la reprend libre et franche de toutes charges que l'acheteur aurait pu y imposer.

Quand le temps de faculté de rachat n'est pas déterminé par le contrat, elle se prescrit comme toute action personnelle par 30 ans.

Il en est de même lorsque la faculté de rachat est stipulée indéfiniment, elle ne dure toujours que 30 ans.

Lorsque le délai du rachat est fixé par le contrat, il faut se conformer à la convention, néanmoins lorsque ce délai est fixé au-dessous de 30 ans, si à l'expiration du terme l'acquéreur ne fait pas déchoir le vendeur de la faculté de rachat, elle se proroge jusqu'à 30 ans. Pour empêcher cette prorogation, et purger le rachat, il faut obtenir un jugement qui déclare le vendeur déchu de la faculté de rachat, c'est ce que l'on appelle un jugement de purification.

Cette prorogation de la faculté de rachat, n'a pas lieu néanmoins, quand la faculté est stipulée par contrat de mariage, en donnant en dot une maison ou autre immeuble.

Le temps du rachat ayant commencé contre le vendeur majeur, continue à courir contre le mineur, sans espérance de restitution, sauf son recours contre son tuteur.

En cas d'exercice de la faculté de rachat, le vendeur gagne les fruits du jour de la demande.

Lorsque le rachat ou remeré est exercé dans le temps porté par le contrat, la vente ne produit point de droits au profit du seigneur.

Voyez Dumoulin de contr. usur. quaest. 52, n. 372, Henrys, tome I. liv. IV, quest. 76. Bretonn. eod. Coquille, sur Nivernais, ch. iv, art. 23, et quest. 260. Recueil de la Combe, et les mots FACULTE, REMERE, VENTE.

Rachat, ou remboursement d'une rente ou pension, est l'acte par lequel on éteint cette rente ou pension en remboursant le sort principal de cette rente ou pension.

Le rachat n'a pas lieu ordinairement pour les rentes ou pensions viageres, à moins que cela ne soit réglé autrement par le titre, ou par convention entre les parties intéressées.

Mais on peut toujours racheter les rentes constituées à prix d'argent ; cette faculté de rachat ne se prescrit point.

A l'égard des rentes foncières, elles sont non-rachetables de leur nature, à moins que le contraire ne soit stipulé.

Mais la faculté qui est donnée par le contrat, de racheter des rentes de bail d'héritage, assises sur des maisons de la ville et fauxbourgs de Paris ou autres villes, est imprescriptible ; ce qui a été ainsi établi pour la décoration des villes, et afin que les maisons ne soyent pas abandonnées ; on excepte néanmoins de cette règle les rentes, qui sont les premières après le cens. Voyez Paris, art. 121 ; Orleans, 271, et les commentateurs. Voyez aussi les mots, OFFRES, PRINCIPAL, REMBOURSEMENT, RENTE.

Rachat ou relief, en matière féodale, pris dans son véritable sens, signifie l'action de racheter du seigneur un fief qui était éteint, mais dans l'usage présent, il signifie le droit que le nouveau vassal paye au Seigneur pour les mutations qui sont sujettes à ce droit.

Dans quelques coutumes singulières, telles que la rue d'Indre, art. 9, le droit de vente en héritage s'appelle aussi rachat, et est de 20 deniers pour livre ; mais communément quand on parle de rachat, ou relief, cela ne s'entend qu'en matière féodale.

L'origine et l'étymologie du mot rachat, vient de ce que les fiefs dans leur première institution, n'étaient point héréditaires, mais seulement pour la vie de celui qui en avait été investi ; de manière qu'à la mort du vassal, le fief servant était éteint à son égard, et retournait au seigneur dominant, à moins qu'il n'en fit une nouvelle inféodation en faveur de quelqu'un des héritiers.

Le fief ainsi éteint, était censé tombé en la main du seigneur ; et c'est pourquoi, lorsque le seigneur dominant le rétablissait en faveur d'un nouveau vassal, cela s'appelait relever le fief, et l'acte, par lequel on le rétablissait ainsi, s'appelait le relief, ou comme qui dirait le relévement du fief qui était tombé ou devenu caduc : le terme de relief est employé en ce sens dans plusieurs coutumes, telles que Péronne, Auxerre, Hesdin, etc.

Pour obtenir du seigneur ce relief ou relevement du fief, on composait avec lui à une certaine somme pour laquelle on rachetait de lui le fief, et cette composition s'appelait le rachat, ou droit de rachat, c'est-à-dire, ce que l'on payait pour le rachat. De sorte qu'anciennement le rachat était différent du relief. On entendait par relief, le rétablissement du fief ; et par le terme de rachat, l'on entendait la finance qui se payait pour ce rétablissement.

Mais bien-tôt on confondit le rachat avec le relief, de manière que ces deux termes furent reputés synonymes, quoiqu'ils ne le soyent pas en effet ; car le relief du fief est constamment différent du rachat, ou droit qui se paye pour le relief, ou pour relever le fief. Néanmoins dans l'usage on confond tous ces termes, relief, droit de relief, rachat, droit de rachat ; et l'on se sert indifféremment, des termes relief et rachat, tant pour exprimer l'investiture accordée au nouveau vassal, que pour désigner la finance qui se paye en ce cas au seigneur pour le relief du fief, c'est-à-dire pour en obtenir la prorogation.

Les fiefs étant devenus héréditaires, ce qui n'était d'abord qu'une grâce de la part du seigneur, passa en coutume, et devint un droit. Il ne dépendit plus des seigneurs d'accorder ou refuser le relief du fief ; ils conservèrent seulement le droit d'exiger le rachat pour ce relief dans les mutations sujettes au rachat.

Le droit de rachat ou relief est inconnu dans la plupart des pays de droit écrit. Les fiefs y sont simplement d'honneur ; mais il y a des lods et mi-lods, qui sont une espèce de rachat ou relief pour les rotures.

En Lorraine, ce droit se nomme reprise du fief ; en Dauphiné, placitum vel placimentum ; en Poitou, rachat ou plect, qui est un droit moins fort que le rachat, mais qui a lieu à toute mutation de vassal. En d'autres pays on l'appelle mutagium ; en Languedoc on l'appelle à capto, arriere-capte ; et en Bourbonnais, mariage, une espèce de rachat, qui se paye pour les rotures ; celle d'Orleans appelle ce rachat des rotures, relevaisons à plaisir ; et celle de Rheims, essoignes.

On ne connait point le rachat ou relief en Bourgogne.

Quelques coutumes ne l'admettent que de convention ; telles sont les coutumes de Nevers, la Rochelle, Aunis et Auvergne.

Le droit de relief ou rachat n'a pas toujours été fixé ; les seigneurs l'exigeaient, suivant leur autorité ou leurs besoins, ainsi que l'observe Galand, en son traité du franc-aleu, chap. VIe Presque toutes les coutumes n'étaient encore que des usages non écrits et fort incertains ; mais Charles VII. ayant ordonné en 1453, qu'elles seraient mises par écrit, la rédaction des coutumes mit un frein aux exactions des seigneurs, en fixant ce qu'ils pourraient prétendre pour les profits de fief.

La plupart des coutumes fixent le relief ou rachat au revenu d'un an, les unes donnent le revenu de la première année qui suit la foi et hommage ; d'autres une année prise dans les trois précédentes ; d'autres, comme Paris, article 47, donnent au seigneur le choix de trois choses ; savoir le revenu d'un an, ou une somme offerte par le vassal, ou le dire de prudhommes ; d'autres coutumes ont fixé le rachat, suivant la qualité du fief ; d'autres enfin, suivant le nombre des mesures de terre qu'il contient ; mais le droit le plus général pour le rachat ou relief, est le revenu d'un an ; c'est pourquoi anciennement on l'appelait aussi annate, ainsi que l'observe Galand, du franc-aleu, p. 170.

Le rachat ou relief féodal, n'a lieu en général que dans les mutations qui arrivent autrement que par vente ou autre acte équipollent à vente.

Quelques coutumes dans lesquelles il n'est jamais dû de quint, donnent le relief ou rachat à toutes mutations ; tel est l'usage pour les fiefs qui se gouvernent suivant la coutume du Vexin français.

Le droit de relief ou rachat n'est pas acquis du moment que le fief est ouvert ; il faut qu'il y ait mutation de propriétaire, c'est-à-dire, un nouveau vassal.

Le droit est dû aux mutations de vassal, mais toute mutation de vassal ne donne pas ouverture au rachat ou relief. En effet, suivant le droit commun, les mutations en directe en sont exemptes.

La mutation par la succession collatérale, est le cas le plus ordinaire du rachat ou relief. Il est pareillement dû pour démission de biens et donation en collatérale, ou à un étranger : le curateur créé à une succession vacante par la renonciation de l'héritier, doit aussi le relief. Il en est dû pareillement en cas de substitution, lorsque celui qui est appelé est simplement collatéral du dernier possesseur.

Le mari ni la femme ne doivent rien, pour ce qui leur demeure de la communauté, soit jusqu'à concurrence de leur moitié, ou même au-delà, à cause du droit indivis que chacun d'eux a en la totalité.

Le don en usufruit ne produit point de rachat, ni le don mutuel en propriété, lorsque les biens compris dans ce don sont de la communauté.

Quoique le relief ne soit dû communément que pour la mutation de propriétaire, néanmoins lorsqu'une fille, propriétaire d'un fief, vient à se marier, son mari doit la foi et le rachat ou relief, qu'on appelle relief de mariage, le mari est considéré en ce cas comme un nouveau vassal ; mais la coutume de Paris et plusieurs autres, exemptent de ce droit le premier mariage des filles, et cette jurisprudence a été étendue aux autres coutumes qui ne distinguent point.

La mort du bénéficier donne aussi ouverture au rachat ; et pour les chapitres, collèges ou communautés, c'est la mort de l'homme vivant et mourant, mais cela n'a lieu qu'au profit des seigneurs particuliers, nos rois ayant affranchi de ces droits les bénéficiers qui ont des fiefs dans leur mouvance.

On appelle rachat abonné ou ameté, celui par lequel le seigneur est convenu à perpétuité à une certaine somme.

Enfin on appelle rachat rencontré, lorsque deux causes de rachat concourent en même temps, ou que pen dant le cours du premier il y a ouverture à un second.

Le seigneur qui a le choix d'une des trois choses dont on a parlé pour le relief ou rachat, doit consommer son option dans les 40 jours, après les offres du vassal.

Lorsque le seigneur opte le revenu d'une année, il doit jouir en bon père de famille, et comme aurait fait le vassal ; il a tous les fruits naturels, civils et industriaux, même les profits casuels du fief ; il ne peut pas déloger le vassal, sa femme, ni ses enfants : il doit se contenter des lieux nécessaires pour serrer les fruits.

Le seigneur qui jouit du fief de son vassal pour le rachat, doit pendant cette année acquitter les charges du fief qui sont inféodées.

Quand le fief du vassal se trouve affermi sans fraude, le seigneur doit se contenter de la redevance portée par le bail.

Si le fief ne consiste qu'en une maison occupée par le vassal, celui-ci doit en payer le loyer, à dire d'experts.

Sur le rachat, ou relief, voyez les coutumes au titre des fiefs, et leurs commentateurs, les traités des fiefs, notamment celui de Guyot, titre du relief. Voyez aussi les mots FIEF, MUTATION, PROFITS DE FIEF, RELIEF. (A)

RACHAT DES AUTELS, (Histoire ecclésiastique) droit que s'arrogèrent les moines, dans le neuf, dix et onzième siècles, de faire le service divin, en succédant aux vicaires des églises. Les évêques à la mort des vicaires, avaient le droit incontestable de pourvoir aux autels ; mais dans ces temps malheureux, les moines avides, souffrant avec peine d'être privés de l'administration des autels, usèrent de leur crédit pour retirer le culte divin des mains des évêques, moyennant une certaine somme que l'on appela pour lors le rachat des autels, redemptio altarium ; ce fut-là la principale plainte d'Yves de Chartres dans la lettre qu'il écrivit au pape Urbain, qui tint en 1094 le concîle de Clermont, où par le septième canon, les évêques furent rétablis dans leur ancien droit, mais le rachat des autels ne laissa pas que de subsister encore longtemps. (D.J.)