S. m. (Jurisprudence) est un contrat par lequel on donne une chose à garder gratuitement, à condition qu'elle sera rendue en nature dès le moment que celui qui a fait le dépôt la redemandera, ou qu'elle sera rendue aux personnes et dans le temps qu'il aura indiqué.

Le dépôt se prend aussi quelquefois pour la chose même qui est déposée.

Ce contrat est du droit des gens, et par conséquent fort ancien, et la foi du depôt a toujours été sacrée chez toutes les nations : aussi les Romains le mettaient-ils dans la classe des contrats de bonne foi, et étaient si jaloux de la fidélité du dépôt, qu'ils voulaient qu'on le rendit à celui qui l'avait fait, sans aucun examen, quand même on reconnaitrait que c'était une chose volée.

Le dépositaire ne pouvait pas non plus retenir la chose déposée, sous prétexte des saisies faites en ses mains ; mais comme beaucoup de débiteurs abusaient de ce privilège pour frustrer leurs créanciers, et déposaient leurs effets pour les mettre à couvert des saisies, on a obligé avec raison parmi nous les dépositaires de garder le dépôt, jusqu'à ce que le débiteur ait obtenu main-levée des saisies.

Le dépôt doit être purement gratuit ; car si celui qui fait le dépôt en retirait quelqu'émolument, ce serait plutôt un louage qu'un véritable dépôt ; et si le dépositaire se faisait payer des salaires pour la garde du dépôt, en ce cas ce ne serait plus un simple dépositaire, mais un préposé à gages, dont les engagements se règlent différemment.

Il n'est pas permis au dépositaire de se servir de la chose déposée, pour son usage, et encore moins de la prêter, louer, engager ou aliéner ; car il n'a que la garde du dépôt, en quoi ce contrat diffère des deux sortes de prêts appelés chez les Romains mutuum et commodatum. Ce serait donc une infidélité de la part du dépositaire, de se servir du dépôt ou de s'en désaisir : il doit être toujours en état de rendre la même chose qui lui a été donnée, les mêmes deniers, le même grain ou vin ; il ne peut pas substituer une autre chose à la place, quand ce serait de la même espèce.

Le dépositaire n'est pas responsable des cas fortuits qui arrivent à la chose déposée : il n'est même pas responsable d'une légère négligence ; mais il est tenu de tout ce qui arrive par son dol, ou par une négligence si grossière, qu'elle approche du dol.

Les conditions sous lesquelles la chose a été déposée, sont ce que l'on appelle la loi du dépôt ; loi que le dépositaire doit suivre exactement : mais s'il n'y en a point de preuve par écrit, il en est cru à son serment.

Le dépôt produit deux actions ; l'une que les Romains appelaient directe, qui appartient à celui qui a fait le dépôt, pour obliger le dépositaire de le rendre ; l'autre qu'ils appelaient contraire, en vertu de laquelle le dépositaire peut agir contre celui qui a fait le dépôt, pour l'obliger de lui rendre les dépenses qu'il a été obligé de faire pour la conservation de la chose déposée.

La condamnation qui intervient contre le dépositaire, pour l'obliger de rendre le dépôt, lorsqu'il n'y a point d'empêchement entre ses mains, emporte une espèce d'infamie, y ayant en ce cas de la mauvaise foi de la part du dépositaire.

Le dépôt volontaire excédant 100 livres, ne peut être prouvé par témoins, à moins qu'il n'y en eut un commencement de preuve par écrit, suivant l'ordonnance de Moulins, art. 54. et celle de 1667, tit. xx. art. 2.

Mais si l'acte de dépôt était perdu, la preuve testimoniale de ce fait serait admissible, à quelque somme que le dépôt monte.

On peut aussi, quand le dépositaire nie le dépôt, prendre la voie de l'information, parce qu'en ce cas la conduite du dépositaire est une espèce de vol et de perfidie.

Les dépôts nécessaires peuvent être prouvés par témoins, même par la voie civile. Ordonn. de 1567. tit. xx. art. 3.

Pour ce qui est du dépôt fait dans une hôtellerie, il dépend de la prudence du juge d'en admettre ou refuser la preuve testimoniale, selon les circonstances. Ibid. art. 4.

Le privilège du dépôt est si grand, que l'on ne peut point y opposer certaines exceptions, telles que le bénéfice de cession et les lettres de répi.

La contribution qui se fait entre plusieurs créanciers saisissants et opposans, n'a pas lieu sur le dépôt, lorsqu'il se trouve en nature. Coutume de Paris, art. 182.

La compensation ne peut pas être opposée par le dépositaire, même de liquide à liquide, à cause de la bonne foi qu'exige le dépôt.

La prescription n'a pas lieu non plus pour le dépôt public ; mais le dépôt particulier peut être prescrit par trente ans, à moins que l'on ne retrouve encore le dépôt en nature, avec la preuve du dépôt.

Si le dépositaire est en demeure de rendre la chose déposée, sans qu'il y ait aucun empêchement légitime, on peut le faire condamner aux intérêts du jour de la demande ; il est même tenu des cas fortuits qui arrivent depuis son refus.

Le dépositaire nécessaire peut même être condamné par corps à rendre le dépôt.

Lorsque le dépôt est fait sous le sceau du secret de la confession ou autrement, les héritiers, créanciers ou autres parties intéressées, ne peuvent obliger le dépositaire à déclarer l'usage qu'il en a fait ; il lui suffit de déclarer qu'il s'est acquitté ou qu'il s'acquittera du dépôt qui lui a été confié, suivant les intentions de celui qui le lui a remis.

DEPOT FORCE ou NECESSAIRE, est celui qui est fait dans un cas où l'on n'a pas le temps de délibérer ni de choisir un dépositaire, comme en cas d'incendie, de ruine, de naufrage, etc.

DEPOT DE JUSTICE, est celui qui est ordonné par justice. (A).

DEPOT NECESSAIRE, est la même chose que dépôt forcé. Voyez ci-devant DEPOT FORCE. (A)

DEPOT PUBLIC, est un lieu destiné à mettre les dépôts ordonnés par justice. Les dépositaires publics sont ceux qui ont la garde de ces dépôts, comme les commissaires aux saisies réelles, les receveurs des consignations, etc.

On appelle aussi dépôt public, tout lieu destiné à conserver les actes publics, comme les greffes, les bureaux du contrôle, des insinuations, et l'étude des notaires. (A)

DEPOT VOLONTAIRE, est opposé au dépôt forcé ; celui que l'on fait librement ; et entre les mains de telle personne que l'on juge à propos.

Sur les règles du dépôt, voyez au digeste depositi, vel contra ; au code l. IV. tit. xxxjv. inst. lib. III. tit. XVe §. 3. nov. 73 et 88. Domat, liv. I. tit. VIIe et tom. II. liv. III. tit. j. sect. 5. n. 26. Bouchel, biblioth. du droit français, au mot dépôt ; Despeisses, tom. I. p. 205. Dumolin, cons. 27. cout. de Paris, art. clxxxij. et les commentateurs sur cet article Argon, tit. du dépôt ; l'auteur des maximes journalières, au mot dépôt. (A)

DEPOT a encore plusieurs autres significations.

DEPOT CIVIL, est le greffe civil, où l'on porte les productions des parties dans les affaires civiles, où le rapporteur Ve s'en charger, et où les procureurs des parties viennent les retirer quand le procès est fini. (A)

DEPOT CRIMINEL, est le greffe criminel, où l'on met en dépôt les procédures criminelles, et autres pièces servant aux procès des accusés. (A)

DEPOTS, (greffe des) est le greffe où l'on garde les productions et pièces des procès. Voyez ci-devant DEPOT CIVIL, DEPOT CRIMINEL. (A)

DEPOTS DES SELS, sont les chambres où le sel est mis en dépôt, dans les pays où il est marchand. La chambre des dépôts est aussi une juridiction établie pour connaître des contestations qui peuvent s'élever par rapport à la vente et distribution du sel. Le premier juge de cette chambre s'appelle le président des dépôts. (A).

DEPOT ; terme de chirurgie, amas d'humeurs qui se jettent sur quelque partie, et y forment des tumeurs, des abcès. Voyez TUMEUR, ABCES, APOSTEME.

Par la signification propre du terme dépôt, on doit entendre des tumeurs que le pus ou des matières sanieuses formées dans la masse du sang par une fièvre, produisent sur le champ ; à la différence de l'abcès proprement dit, dont le pus ou les matières sanieuses sont formées dans la partie même, et précisément dans la tumeur où elles se trouvent. Ces abcès sont l'effet d'une inflammation terminée par suppuration. Voyez ABCES et SUPPURATION.

Les dépôts sont souvent la suite de la resorbtion du pus. Voyez DELITESCENCE. (Y)