S. m. (Jurisprudence) est une libéralité faite par un testateur par testament ou codicille, et qui doit être délivrée après sa mort au légataire par l'héritier ab intestat, ou par l'héritier institué, s'il y en a un, ou par le légataire universel, lorsqu'il y en a un.

L'usage de faire des legs est probablement aussi ancien que celui des testaments. Dès que les hommes eurent inventé une manière de régler leurs biens après leur mort, ils pratiquèrent aussi l'usage des legs particuliers en faveur de leurs parents, amis, ou autres personnes auxquelles ils voulaient faire quelque libéralité, sans néanmoins leur donner la totalité de leurs biens.

Dans la Genèse, liv. I. ch. xxv. Ve 5. et 6, il est fait mention de legs particuliers fait par Abraham à ses enfants naturels : deditque Abraham cuncta quae possiderat Isaac, filiis autem concubinarum largitus est munera.

On trouve encore quelque chose de plus précis pour l'usage des legs dans le prophète Ezéchiel, ch. xlvj. Ve 17. et 18. où en parlant du pouvoir que le prince avait de disposer de ses biens, il prévait le cas où il aurait fait un legs à un de ses serviteurs : si autem dederit legatum de hereditate suâ uni servorum suorum, erit illius usque ad annum remissionis, et revertetur ad principem ; hereditas autem ejus filius ejus erit, &c.

Ce même texte nous fait connaître que chez les Hébreux, il était permis de faire des legs à des étrangers, mais que les biens légués ne pouvaient être possédés par les légataires étrangers ou par leurs héritiers, que jusqu'à l'année du jubilé ; après quoi les biens devaient revenir aux héritiers des enfants du testateur. La liberté de disposer de ses biens par testament n'était pas non plus indéfinie ; ceux qui avaient des enfants ne pouvaient disposer de leurs immeubles à titre perpétuel, qu'en faveur de leurs enfants.

Ces usages furent transmis par les Hébreux aux Egyptiens, et de ceux-ci aux Grecs, dont les Romains empruntèrent comme on sait une partie de leurs lais.

La fameuse loi des 12 tables qui fut dressée sur les mémoires que les députés des Romains avaient rapportés d'Athènes, parle de testament et de legs : pater-familias, uti legas, sit super familiâ pecuniâque suâ, ita jus esto.

L'usage des testaments et des legs s'introduisit aussi dans les Gaules ; et depuis que les Romains en eurent fait la conquête, il fut réglé en partie par les lois romaines, et en partie par les coutumes de chaque pays.

Il y avait anciennement chez les Romains quatre sortes de legs, savoir per vindicationem, damnationem, sinendi modum et per praeceptionem : chacune de ces différentes espèces de legs différait des autres par la matière, par la forme, et par l'effet.

Léguer per vindicationem, c'était quand le testateur donnait directement au légataire, et en termes qui l'autorisaient à prendre lui-même la chose léguée, par exemple, do illi solidos centum, ou do, lego, capito, sumito, habeto : on appelait ce legs per vindicationem, parce que le légataire était en droit de vendiquer la chose léguée contre toutes sortes de personnes, dès que l'héritier avait accepté la succession.

Le legs per damnationem, se faisait en ces termes, damno te heres illi dare solidos centum, ou heres meus damnas esto dare, dato, facito, heredem meum dare jubeo. Ce legs produisait contre l'héritier en faveur du légataire, une action in personam ex testamento.

On léguait sinendi modo en disant, damno te heres ut illi permittas illam rem accipere, ou bien heres meus damnas esto sinere Lucium Titium sumère illam rem, sibique habere. Cette espèce de legs produisait aussi une action in personam ex testamento.

Le legs per praeceptionem, ne se pouvait faire qu'aux héritiers qui étaient institués pour partie. C'était une espèce de libation ou prélegs ; il se faisait en ces termes : praecipuam ille ex parte heres rem illam accipito ; ou bien Lucius Titius illam rem praecipito : ce qui était légué à ce titre, ne pouvait être recouvré que par l'action appelée familiae erciscundae.

Dans la suite les empereurs Constantin, Constantius, et Constants, supprimèrent toutes ces différentes formes de legs, et Justinien acheva de perfectionner cette jurisprudence, en ordonnant que tous les legs seraient de même nature, et qu'en quelques termes qu'ils fussent conçus, le légataire pourrait agir, soit par action personnelle ou réelle, soit par action hypothécaire.

On peut léguer en général toutes les choses dont on peut disposer par testament suivant la loi du lieu où elles sont situées, soit meubles meublans ou autres effets mobiliers, immeubles réels ou fictifs, droits et actions, servitutes, etc. pourvu que ce soient des choses dans le commerce.

On peut même léguer la chose de l'héritier, parce que l'héritier en acceptant la succession, semble confondre son patrimoine avec celui du défunt, et se soumettre aux charges qui lui sont imposées.

Si le testateur legue sciemment la chose d'autrui, l'héritier est tenu de l'acheter pour la livrer au légataire, ou s'il ne peut pas l'avoir, de lui en payer la valeur ; mais s'il a légué la chose d'autrui croyant qu'elle lui appartenait, le legs est caduc.

En général un legs peut être caduc par le défaut de capacité du testateur, par la qualité de la chose qui n'est pas disponible, ou par l'incapacité du légataire qui ne peut recevoir de libéralité.

Un legs peut être universel ou particulier, pur et simple ou conditionnel, ou fait pour avoir lieu dans un certain temps seulement.

Le legs fait sub modo, est celui qui est fait en vue de quelque chose ; par exemple, je legue à Titius une somme pour se marier ou pour se mettre en charge.

Le legs fait pour cause est, par exemple, lorsque le testateur dit, je legue à un tel parce qu'il a bien geré mes affaires. Si la cause se trouve fausse, elle ne vicie pas le legs : il en est de même d'une fausse démonstration, soit du légataire, soit de la chose léguée, pourvu que la volonté du testateur soit constante.

Le droit d'accroissement n'a point lieu entre collégataires, s'ils ne sont conjoints que par les termes de la disposition, mais seulement s'ils sont conjoints par la chose et par les paroles, ou du-moins par la chose, c'est-à-dire lorsqu'une même chose est léguée à plusieurs.

Le legs était réputé fait par forme de fidei-commis, lorsque le testateur priait ou chargeait son héritier de remettre telle chose au légataire ; ce qui revenait à la formule des legs per damnationem ; mais Justinien rendit tous les legs semblables aux fideicommis particuliers.

Plusieurs personnes sont incapables de recevoir des legs, telles que ceux qui ont perdu les effets civils, les corps et communautés non approuvées par le prince ; et même l'Eglise et les communautés approuvées, ne peuvent plus rien recevoir que conformément à l'édit du mois d'Aout 1749.

Les bâtards adultérins et incestueux sont incapables de legs, excepté de simples aliments.

On ne pouvait autrefois léguer à un posthume ; mais par le nouveau droit cela est permis, de même qu'on peut léguer en général à des enfants à naître.

Les legs peuvent être ôtés de plusieurs manières ; savoir par la volonté expresse ou tacite du testateur, s'il révoque le legs ; s'il aliene sans nécessité la chose léguée, s'il la donne de son vivant à une autre personne, s'il survient des inimitiés capitales entre le testateur et le légataire.

Le fait du légataire peut aussi donner lieu d'annuller le legs, comme s'il s'en rend indigne, s'il cache le testament du défunt, s'il refuse la tutele dont le testateur l'a chargé par son testament, s'il accuse le testament d'être faux ou inofficieux.

En pays de droit écrit, l'héritier est en droit de retenir la quarte falcidie sur les legs, et la quarte trébellianique sur les fidei-commis.

En pays coutumier, il n'est permis de léguer qu'une certaine quotité de ses biens ; à Paris il est permis de léguer tous ses meubles et acquêts, et le quint de ses propres ; ailleurs cela est réglé différemment.

Dans la plupart des coutumes, les qualités d'héritier et de légataire sont incompatibles ; ce qui s'entend sur les biens d'une même coutume ; mais on peut être héritier dans une coutume, et légataire dans une autre où l'on n'est pas habîle à succéder.

Tous les legs sont sujets à délivrance, et les intérêts ne courent que du jour de la demande, à-moins que ce ne fût un legs fait à un enfant par ses père et mère, pour lui tenir lieu de sa portion héréditaire ; auquel cas, les intérêts seraient dû. depuis le décès du testateur.

On peut imposer une peine à l'héritier pour l'obliger d'accomplir les legs ; d'ailleurs les légataires ont une action contre lui en vertu du testament.

Ils ont aussi une hypothèque sur tous les biens du défunt ; mais cette hypothèque n'a lieu que jusqu'à concurrence de la part et portion dont chaque héritier est chargé des legs.

Le légataire qui survit au testateur transmet à son héritier le droit de demander son legs, encore qu'il ne fût pas exigible, pourvu qu'il n'y ait pas lui-même renoncé, et que le legs ne soit pas absolument personnel au légataire.

Voyez au digeste, au code et aux institutes, les titres de legatis et fidei-commissis, l'auteur des lois civiles, et autres qui traitent des successions et testaments, dans lesquels il est aussi parlé des legs. (A)