S. m. (Grammaire, Jurisprudence) ou papier terrier, est le recueil de foi et hommages, aveux et dénombrements, déclarations et reconnaissances passées à une seigneurie par les vassaux censitaires, emphitéotes et justiciables.

On énonce aussi ordinairement dans le préambule des terriers tous les droits de la terte et les fiefs qui en dépendent. Ces préambules ne sont pas obligatoires, à moins que les redevables n'y aient parlé. Mais lorsque les terriers sont anciens, ils font une preuve de possession.

Pour la confection d'un terrier, on obtient ordinairement en grande ou petite chancellerie des lettres, qu'on appelle lettres de terrier, à l'effet de contraindre tous les vassaux et sujets à représenter leurs titres et passer nouvelle reconnaissance.

Les seigneurs qui agissent en vertu d'un acte d'inféodation, bail à cens ou autre contrat, n'ont pas besoin de lettres de terrier pour se faire passer reconnaissance : les lettres ne sont nécessaires que pour contraindre leurs vassaux et sujets à représenter leurs titres, et à passer reconnaissance devant le notaire qui est commis.

L'ordonnance de Blais et l'édit de Melun dispensent les ecclésiastiques d'obtenir des lettres de terrier pour ce qui relève de leurs bénéfices.

Lorsqu'un seigneur a plusieurs terres en différentes juridictions, et qu'il ne veut faire qu'un seul terrier, il faut qu'il obtienne des lettres en grande chancellerie, portant que le notaire qui sera commis recevra les reconnaissances même hors de son ressort.

Les lettres de terrier doivent être enregistrées par le juge royal, auquel elles sont adressées ; cependant quand les terres ne relèvent pas en première instance d'un juge royal, on autorise quelquefois pour les lettres le juge royal à déleguer le juge des lieux pour régler les contestations.

Les lettres de terrier enregistrées, on fait ensuite des publications au marché, s'il y en a un dans le lieu, ou à l'issue des messes de paraisse, et l'on met ensuite des affiches qui en font mention.

Ces publications tiennent lieu d'interpellation générale à tous les vassaux et sujets pour passer reconnaissance dans le délai qui est indiqué, et faute d'y satisfaire, ils peuvent être contraints par amende.

On inserait autrefois dans les lettres de terrier un relief de prescription en faveur du seigneur ; mais l'usage de cette clause a été abrogé par une déclaration du 19 Aout 1681.

Le terrier doit régulièrement être fait dans l'an de l'obtention des lettres.

Lorsqu'il est parachevé, il faut le faire clorre par le juge.

Un terrier pour tenir lieu de titre doit avoir cent ans, et en rappeler un autre ; il y a néanmoins des cas où une seule reconnaissance suffit. Voyez AVEU, DECLARATION, RECONNOISSANCE, PRESTATION. Voyez Henris, liv. III. ch. IIIe qu. 19. Basset, liv. III. tit. 7. le traité des terriers de Belami, la pratique des terriers de Freminville. (A)

TERRIER D'ANGLETERRE, grand, (Jurisprudence) liber judicialis vel censualis Angliae, le livre judiciaire, ou le registre de tous les biens en fonds de terre du royaume d'Angleterre est un registre très-ancien, fait du temps de Guillaume le Conquérant, pour connaître les différentes comtés ou provinces, les cantons, divisions de cantons, etc. dont l'Angleterre était composée.

Le dessein que l'on se proposa dans la composition de ce livre, fut que l'on eut toujours un registre, par lequel on put juger des tenements des biens : il sert encore aujourd'hui à décider cette fameuse question, si les terres sont un ancien domaine ou non. Les vers suivants contiennent un sommaire de ce qui est renfermé dans ce registre.

Quid debent fisco, quae, qualia, quanta tributa

Nomine, quid census, quae vectigalia, quantum

Quisque teneretur feodali solvère jure ;

Qua sunt exempti, vel quos angaria damnet,

Qui sunt vel glebae servi, vel conditionis,

Quove manumissus patrono jure ligatur.

On conserve encore ce livre dans l'Echiquier, il est très-net et très-lisible ; il consiste en deux volumes, un grand et un petit : le plus grand contient toutes les provinces d'Angleterre, excepté le Northumberland, le Cumberland, le Westmoreland, le Durham et une partie du comté de Lancashire, qui n'ont jamais été arpentées, et encore les comtés d'Essex, de Suffolk et de Norfolk, qui sont renfermés dans le plus petit volume, terminé par ces mots : anno millesimo octogesimo sexto ab incarnatione Domini, vigesimo vero regis Wilhelmi, facta est ista descriptio, non solum per hos tres comitatus, sed etiam alios.

Il est appelé liber judicialis, à cause qu'il contient une description juste et exacte de tout le royaume, avec la valeur des différents héritages, etc.

Il fut commencé par cinq juges, que l'on nomma à cet effet dans chaque comté en 1081, et il fut achevé en 1086. Cambden l'appelle Gulielmi librum censualem, le livre des taxes du roi Guillaume.

Les anciens Anglais avaient plusieurs de ces papiers ou de ces registres terriers. Ingulfus nous apprend que le roi Alfred fit un registre semblable à celui de Guillaume le Conquérant. Il fut commencé à l'occasion de la division que fit ce prince du royaume en cantons, et autres subdivisions ; quand on eut fait le dénombrement des différents districts, on les rangea dans un registre appelé domboc, c'est-à-dire, livre de jugement, qui fut déposé dans l'église de Winchester, c'est ce qui fait qu'on l'appelle aussi le livre de Winchester, et Rotulus Wintoniensis, et c'est sur le modèle de ce domboc que l'on fit le grand terrier de Guillaume le Conquérant.

Celui du roi Alfred renvoyait au temps du roi Ethelred, et celui de Guillaume le Conquérant au temps d'Edward le Confesseur : les enregistrements étaient conçus de la manière suivante ; C. tenet rex Gulielmus in dominico, et valet ibi ducatae, etc. T. R. E. valebat, c'est-à-dire, valait autant sous le règne du roi Edward, tempore regis Eduardi.

Il y a un troisième domboc, ou registre terrier in-4 °. qui diffère de l'autre in-folio beaucoup plus par la forme que par la matière. Il fut fait par l'ordre du même conquérant, et parait être le plus ancien des deux.

Il y a un quatrième livre dans l'Echiquier, que l'on appelle domes-day, qui n'est qu'un abrégé des deux autres, quoique ce soit un fort gros volume. On voit au commencement un grand nombre de portraits et de lettres d'or, qui renvoyent au temps d'Edward le Confesseur.