S. f. pl. (Jurisprudence) sont les choses mobiliaires égarées ou perdues, dont on ignore le légitime propriétaire.

Quelques-uns tirent l'origine de ce terme du grec , qui signifie choses égarées et perdues.

Mais il parait que ce mot vient plutôt du latin expavescère, parce que les premières choses que l'on a considérées comme épaves, étaient des animaux effarouchés qui s'enfuyaient au loin, expavefacta animalia.

On a depuis compris sous le terme d'épaves, toutes les choses mobiliaires perdues, et dont on ne connait point le véritable propriétaire.

Il y a même des personnes qu'on appelle épaves, et épaves foncières et immobiliaires, comme on le dira dans les subdivisions suivantes ; mais communément le terme d'épaves ne s'entend que de choses mobiliaires, telles qu'animaux égarés, ou autres choses perdues.

En Normandie on les appelle choses gayves. Voyez GAYVES.

Les biens vacans sont différents des épaves, en ce que ces sortes de biens sont ordinairement des immeubles, ou une universalité de meubles, et que d'ailleurs on en connait l'origine, et le dernier propriétaire qui n'a point d'héritier connu ; au lieu que les épaves sont des choses dont on ignore le propriétaire.

Il y a aussi beaucoup de différence entre un trésor et une épave. Le trésor est vetus pecuniae depositio, cujus memoria non extat. L'épave est toute chose mobiliaire qui se trouve égarée et perdue : l'un et l'autre se règlent par des principes différents. Voyez TRESOR.

Les lois romaines veulent que ceux qui trouvent quelques bestiaux égarés, les fassent publier par affiches, afin de les rendre à ceux qui les reclameront justement.

Dans notre usage les épaves appartiennent au seigneur haut-justicier, et non au propriétaire du fonds où elles sont trouvées, ni même au seigneur féodal, ni au seigneur moyen-justicier.

Celui qui trouve une épave, est obligé d'en faire la déclaration au seigneur haut-justicier dans les vingt-quatre heures : la coutume de Nivernais l'ordonne ainsi.

Après la déclaration de celui qui a trouvé l'épave, le seigneur doit la faire publier par trois dimanches consécutifs, afin qu'elle puisse être reclamée. Ces publications se faisaient autrefois au prône ; mais depuis l'édit de 1695, toutes publications pour ces sortes d'affaires temporelles doivent être faites par un huissier à la porte de l'église.

La plupart des coutumes donnent au propriétaire de l'épave quarante jours pour la reclamer, à compter du jour de la première publication, en justifiant par lui de son droit, et en payant les frais de garde et autres.

Les publications faites et les quarante jours expirés, le seigneur haut-justicier ne devient pas encore de plein droit propriétaire de l'épave ; il faut qu'elle lui soit adjugée en justice, comme l'ordonne la coutume d'Orléans, article 156.

Après l'expiration des quarante jours, et l'adjudication faite en bonne forme au seigneur, le propriétaire de l'épave n'est plus recevable à la reclamer.

On n'exige pas tant de formalités ni de délais, quand l'épave est de peu de valeur, ou qu'il s'agit de quelqu'animal dont la nourriture absorberait le prix. La coutume de Sens, article 11, permet en ce cas de la faire vendre après la première quinzaine, et après deux criées ou proclamations, à la charge de garder l'argent pour le rendre au propriétaire.

On distingue plusieurs sortes d'épaves, dont il sera parlé dans les subdivisions suivantes.

Les coutumes qui contiennent quelques dispositions sur cette matière, sont Meaux, Melun, Sens, Montfort, Mantes, Senlis, Troie., Chaumont, Châlons, Chauny, Boulenais, Artais, les deux Bourgognes, Nivernais, Montargis, Orléans, Lodunais, Dunais, Amiens, Auxerre, Grand-Perche, Bourbonnais, Auvergne, la Marche, Poitou, Bordeaux, Montreuil, Beauquesne, Peronne, Berry, Cambray, S. Pol sous Artais, Bar, Lille, Hesdin, Lorraine.

Les auteurs qui traitent des épaves, sont Bouthillier, en sa somme rurale ; Conan, en ses commentaires de droit civil, lib. III. cap. de thesauris et rebus adespotis ; Bacquet, des droits de justice, ch. xxxiij. le gloss. de M. de Laurière ; et les commentateurs des coutumes dont on a parlé. (A)

EPAVES D'ABEILLES ou AVETTES, sont des essaims de mouches à miel qui viennent se poser dans le fonds de quelqu'un, et ne sont poursuivies par personne. Ces épaves appartiennent au seigneur haut-justicier du fonds où les mouches sont venues se poser, et non pas au premier occupant, ni même au propriétaire du fonds. Voyez la coutume de Tours, art. 17 et 54. la coutume locale de Preully, ressort de Tours ; celle de Lodunais, ch. j. art. 13. et ch. IIIe art. 3. Anjou, art. 12. Maine, art. 13. Ce dernier article porte que les épaves des avettes, nonobstant qu'elles soient mouvantes, tenant et étant en aucun arbre, ou autrement assises au fief d'aucun, appartiennent pour le tout au seigneur du fonds où elles sont assises, si ledit seigneur du fonds y a justice foncière en nuesse ; et s'il n'a justice en son fonds, elles lui appartiennent pour la moitié, et au justicier en nuesse pour l'autre moitié. Mais si lesdites avettes sont poursuivies avant qu'elles soient encore logées et pris leur nourrissement aud. lieu où elles sont assises, celui à qui elles appartiennent les peut poursuivre, et les doit avoir comme siennes. (A)

EPAVES D'AUBAINS. En quelques coutumes, comme Vermandais et autres, on appelle épaves les hommes et femmes nés hors le royaume en pays si lointain, que l'on ne peut avoir connaissance du lieu de leur naissance ; à la différence de ceux dont le lieu de la naissance est connu, que l'on appelle simplement aubains ou étrangers. Voyez Bacquet, du droit d'aubaine, première partie, ch. IVe n°. 20. (A)

EPAVES D'AVETTES ou ABEILLES, voyez ci-dev. EPAVES D'ABEILLES.

EPAVE DU DESTRIER, qu'on devrait écrire dextrier ; est le droit qui appartient au seigneur baron, d'avoir à titre d'épave le destrier ou grand cheval de guerre, appelé aussi coursier ou cheval de lance, qui se trouve égaré sur sa terre, sans être reclamé par celui auquel il appartenait : les coutumes d'Anjou, art. 47. et Maine, art. 55. lui attribuent ce droit. Voyez la note de Bodreau sur les articles de la coutume du Maine. (A)

EPAVE DU FAUCON, est le droit qui appartient au seigneur baron dans les coutumes d'Anjou et du Maine, de prendre à titre d'épave tout faucon ou autre oiseau de leurre ou de proie qui se trouve égaré dans sa terre, sans être reclamé par celui auquel il appartenait. Voyez la coutume d'Anjou, art. 47. et celle du Maine, art. 55. et Bodreau sur cet article. (A)

EPAVES FONCIERES, sont les immeubles qui échéent au seigneur à titre d'épave, pour droit de bâtardise ou de deshérence. Quelques coutumes y comprennent aussi les immeubles délaissés par les aubains ; mais dans l'usage ces sortes d'épaves aubaniales appartiennent au roi, et non au seigneur, quoi qu'en disent au contraire la coutume d'Anjou, art. 10. et celle du Maine, art. 11. (A)

EPAVES MARINES ou MARITIMES, sont tous les effets que la mer pousse et jette à terre, qui se trouvent sur les bords, et ne sont réclamés par aucun légitime propriétaire.

On les nommait en vieux langage herpes marines, du gaulois harpir, qui signifiait prendre. Ce nom leur fut donné, parce que ces sortes d'épaves appartiennent au roi ou aux seigneurs des lieux, selon les différentes coutumes ; et que les officiers des justices royales ou seigneuriales les peuvent faire prendre et enlever.

Les poissons qui viennent échouer, ou qui sont poussés par la violence des flots sur les bords de la mer, sont du nombre des épaves maritimes ; personne ne peut les reclamer, si ce n'est le roi ou le seigneur, selon la coutume du lieu. Le droit naturel qui donne au premier occupant les poissons qui sont pêchés et pris dans les eaux, cesse à l'égard de ceux-ci, attendu que ce n'est point par l'effet d'aucune industrie que le premier occupant les peut avoir en sa possession.

Les jugements d'Oleron, qui font partie des anciennes coutumes de la mer, ne comprennent au nombre des épaves maritimes que les poissons à lard, tels que les baleines, veaux marins, etc. Il est dit que le seigneur en doit avoir sa part, suivant la coutume du pays, et non en autre poisson ; que si un navire trouve en plaine mer un poisson à lard, il sera totalement à ceux qui l'ont trouvé, s'il n'y a poursuite ; et que nul seigneur n'y doit prendre part, encore qu'on l'apporte à sa terre : qu'en toutes choses trouvées à la côte de la mer, lesquelles autrefois ont été possédées, comme vin, huîle et autres marchandises, quoiqu'elles aient été jetées et délaissées des marchands, et qu'elles doivent être au premier occupant, toutefois la coutume du pays doit être gardée, comme des poissons ; que s'il y a présomption qu'ils soient d'un navire qui ait péri, en ce cas le seigneur ou l'inventeur ne doivent rien prendre pour les retenir, mais en doivent faire du bien aux pauvres nécessiteux ; qu'autrement ils encourent le jugement de Dieu. Voyez Clairac sur les jugements d'Oleron, ch. xxxvj.

La coutume de Normandie, chap. xxiij. appelle varech ce que l'on appelle ailleurs épaves maritimes. Voyez VARECH.

L'ordonnance de la Marine du mois d'Aout 1681, ch. VIIe déclare les dauphins, esturgeons, saumons et truites être poissons royaux, et en cette qualité appartenir au roi, quand ils sont trouvés échoués sur le bord de la mer, en payant les salaires de ceux qui les auront rencontrés et mis en lieu de sûreté.

Les baleines, marsouins, veaux de mer, thons, souffleurs, et autres poissons à lard, échoués et trouvés sur les greves de la mer, doivent, suivant la même ordonnance, être partagés comme épaves, de même que les effets échoués.

Mais lorsque les poissons royaux et à lard ont été pris en plaine mer, ils appartiennent à ceux qui les ont pêchés ; sans que les receveurs du roi, ni les seigneurs particuliers, et leurs fermiers, y puissent prétendre aucun droit, sous quelque prétexte que ce sait. (A)

EPAVE MOBILIAIRE, est celle qui consiste dans quelque effet mobiliaire, comme un animal, un poisson, etc. Ces sortes d'épaves sont surnommées mobiliaires, pour les distinguer des épaves foncières, qui consistent en immeubles. Il en est parlé dans la coutume de Tours, art. 47 et 52 ; et en la coutume locale de Maizières, ressort de Tours ; Lodunais, ch. IIe art. 9. ch. IIIe art. 1. Anjou, art. 40, 41, 150. le Maine, art. 47, 48, 183. Blais, art. 26 et 32. (A)

EPAVE DE PERSONNE, est la même chose qu'épave d'aubains ; ce qui ne s'entend que de ceux dont le lieu de la naissance n'est point connu. Voyez ci-devant EPAVE D'AUBAIN. Voyez aussi ci-devant ENFANS EXPOSES. (A)

EPAVE DE RIVIERE : on appelle ainsi tout ce qui est trouvé abandonné sur les rivières, soit par naufrage, débordement, inondation, chute de pont, ou autres accidents, et qui n'est point reclamé par le légitime propriétaire.

L'ordonnance des eaux et forêts, tit. xxxj. de la pêche, art. 16, veut que toutes les épaves qui seront pêchées sur les fleuves et rivières navigables, soient garrées sur terre, et que les pêcheurs en donnent avis aux sergens et gardes-pêche, qui seront tenus d'en donner procès-verbal, et de les donner en garde à des personnes solvables, qui s'en chargeront, dont le procureur du roi prendra communication au greffe, aussi-tôt qu'il y aura été porté par le sergent ou garde-pêche, et qu'il en soit fait lecture à la première audience : surquoi le maître particulier, ou son lieutenant, doit ordonner que si dans un mois les épaves ne sont demandées et réclamées, elles seront vendues au profit du roi, au plus offrant et dernier enchérisseur, et les deniers en provenans mis ès mains des receveurs de S. M. sauf à les délivrer à celui qui les réclamera, un mois après la vente, s'il est ainsi ordonné en connaissance de cause.

L'article suivant défend de prendre et enlever les épaves sans la permission des officiers des maitrises, après la reconnaissance qui en aura été faite, et qu'elles auront été adjugées à celui qui les aura réclamées. (A)