S. m. (Jurisprudence) est celui qui est tenu de payer quelque chose en argent, grain, liqueur, ou autre espèce, soit en vertu d'un jugement ou d'un contrat écrit ou non, d'un quasi-contrat, délit ou quasi-délit.

Le débiteur est appelé dans les lois romaines debitor ou reus debendi, reus promittendi, et quelquefois reus simplement ; mais il faut prendre garde que ce mot reus quand il est seul, signifie quelquefois le coupable ou l'accusé. L'Ecriture défend au créancier de vexer son débiteur, et de l'opprimer par des usures. Exode xxij. Ve 25.

Ce précepte a cependant été bien mal pratiqué chez plusieurs nations ; chez les Juifs, par exemple, le créancier pouvait, faute de payement, faire emprisonner son débiteur, même le faire vendre, lui, sa femme, et ses enfants : le débiteur devenait en ce cas l'esclave de son créancier.

La loi des douze tables était encore plus sevère, car elle permettait de déchirer en pièces le débiteur, et d'en distribuer les membres aux créanciers, par forme de contribution au sol la livre. Cette loi leur donnait aussi l'option d'envoyer vendre leur débiteur comme esclaves hors du pays, et d'en partager le prix ; s'il n'y avait qu'un créancier, il ne pouvait ôter la vie à son débiteur, ni même la liberté qui lui était plus chère que la vie. On ne trouve même pas d'exemple que des créanciers aient été assez inhumains pour mettre en pièces leur débiteur, il se trouvait toujours quelqu'un des créanciers qui aimait mieux que le débiteur fût vendu que tué, pour en tirer de l'argent ; de sorte qu'il arrivait ordinairement que les créanciers se faisaient adjuger leurs débiteurs comme esclaves. Cet usage continua jusqu'à ce que le tribun Petilius fit réformer cette loi rigoureuse, et ordonner que le débiteur ne pourrait être adjugé comme esclave au créancier, ce qui fut renouvellé et amplifié 700 ans après par l'empereur Dioclétian, lequel prohiba totalement cette manière de servitude temporelle appelée nexus, dont il est parlé dans la loi ob oes alienum, codice de obligat. les créanciers avaient seulement toujours le pouvoir de retenir leurs débiteurs dans une prison publique jusqu'à ce qu'ils eussent payé. Enfin Jules César touché de commisération pour les débiteurs malheureux, leur accorda le bénéfice de cession, afin qu'ils pussent se tirer de captivité en abandonnant tous leurs biens ; et afin qu'ils ne perdissent pas toute espérance de se rétablir à l'avenir, il ordonna que les biens qu'ils acquéreraient depuis la cession, ne pourraient leur être ôtés, qu'au cas qu'ils eussent au-delà de leur nécessaire.

Ainsi la peine de mort et la servitude étant abolies, il ne resta plus contre le débiteur que la contrainte par corps, dans les cas où l'on pouvait en user ; et le débiteur eut la triste ressource de faire cession, qui était toujours accompagnée d'une sorte d'ignominie, et suivie de la proclamation générale des biens du débiteur.

La contrainte par corps avait lieu chez les Romains contre le débiteur, lorsqu'il s'y était soumis ou qu'il y était condamné pour cause de stellionat : mais les lois veulent que le créancier ne soit point trop dur pour son débiteur ; qu'il ne poursuive point un homme moribond ; qu'il n'affecte rien pour faire outrage à son débiteur : elles veulent aussi que le débiteur ne soit pas trop délicat sur les poursuites que l'on fait contre lui ; elles regardent comme une injure faite à quelqu'un de l'avoir traité de débiteur lorsqu'il ne l'était pas ; ce qui ne doit néanmoins avoir lieu que quand la demande parait avoir été formée à dessein de faire injure, et qu'elle peut avoir fait tort au défendeur, par exemple, si c'est une personne constituée en dignité, ou un marchand auquel on ait voulu faire perdre son crédit.

Chez les Gaulois, les gens du peuple qui ne pouvaient pas payer leurs dettes, se donnaient en servitude aux nobles qui étaient leurs créanciers, lesquels acquéraient par-là sur eux les mêmes droits que les maîtres avaient sur leurs esclaves ; c'est ce que les Latins appelaient addicti homines.

En France nous ne suivons pas sur cette matière tous les principes du Droit romain.

Le débiteur ne peut pas s'obliger ni être condamné par corps, que dans les cas où cela est autorisé par les ordonnances. Voyez CONTRAINTE PAR CORPS.

Il fallait chez les Romains discuter les meubles du débiteur avant d'en venir à ses immeubles, et ensuite à ses dettes actives, au lieu que parmi nous la discussion préalable des meubles et effets mobiliers n'est nécessaire qu'à l'égard des mineurs ; du reste on peut cumuler contre le débiteur toutes sortes de poursuites, saisie et arrêt, saisie et exécution, et la saisie réelle pourvu qu'il s'agisse au moins de 200 livres, et la contrainte par corps, si c'est un cas où elle ait lieu.

Le principal débiteur doit être discuté avant ses cautions, à moins qu'ils ne soient tous solidaires. Voyez DISCUSSION.

Le débiteur peut se libérer en plusieurs manières ; savoir par un payement effectif, ou par des offres réelles suivies de consignation ; ce qui peut se faire en tout temps, à moins qu'il n'y ait clause au contraire : pour ce qui est de l'imputation des payements, voyez au mot IMPUTATION : il peut aussi se libérer par compensation, laquelle équivaut à un payement ; par la perte de la chose qui était dû. si c'est un corps certain et qu'il n'y ait point eu de la faute du débiteur ; par la prescription et par la cession de biens, etc.

Celui qui est en état d'opposer quelque exception peremptoire, telle que la compensation ou la prescription, n'est pas véritablement débiteur. Voyez COMPENSATION, OBLIGATION NATURELLE, ESCRIPTIONTION.

Quand le créancier n'a point de titre, on défère ordinairement l'affirmation au débiteur ; cela souffre néanmoins quelques exceptions. Voyez au mot SERMENT.

La cession de biens ne libère pas absolument le débiteur ; car il peut être poursuivi sur les biens qui lui sont advenus depuis la cession.

Le débiteur qui se trouve hors d'état de payer pouvait, chez les Romains, obtenir terme et délai de deux ans, même jusqu'à cinq années. En France, suivant l'ordonnance de 1669, les juges, même souverains, ne peuvent donner répi ni délai de payer, si ce n'est en vertu de lettres du grand sceau appelées lettres de répi ; mais ces sortes de lettres ne sont plus guère usitées : les juges accordent quelquefois un délai de trois mois ou six mois et plus, pour payer en deux ou trois termes ; il n'y a point de règle certaine là-dessus, cela dépend de la prudence du juge et des circonstances.

Il n'est pas permis au débiteur de renoncer en fraude de ses créanciers, aux droits qui lui sont acquis ; il lui était cependant libre, chez les Romains, de renoncer à une succession déjà ouverte, afin qu'il ne fût pas exposé malgré lui aux dettes ; mais cela n'est pas observé parmi nous ; les créanciers peuvent à leurs risques exercer tous les droits acquis à leur débiteur ; il lui est seulement libre de ne pas user des droits qui ne consistent qu'en une simple faculté, comme d'intenter un retrait.

La réunion des qualités de créancier et débiteur dans une même personne, opère une confusion d'actions. Voyez ci-devant CONFUSION. Voyez les textes de droit indiqués par Brederode au mot Débiteur, et ci-après au mot DETTES. (A)