ou PASCAGE, s. m. (Jurisprudence) du latin pascère ; est un pâturage humide dont on ne fauche point l'herbe, et qui sert pour la nourriture des bestiaux. Quand le pâturage est sec, on le nomme patis ou pâquis ; il faut néanmoins avouer que dans l'usage on confond souvent les termes de prés, prairies, pâturages, pâtures, patis ou pasquis, pascage ou pâcage, pasqueirage, herbages, communes.

Quelquefois le terme de pascage est pris pour le droit de faire paitre les bestiaux dans un certain lieu ; quelquefois on entend par-là l'exercice de ce droit ; quelquefois enfin c'est le terrain sur lequel ce droit s'exerce.

On distingue ordinairement les pâtures en vives ou grasses, et en vaines.

Les pâtures vives ou grasses sont les prés, les pascages ou communes, les bois, les droits de pâturage et de panage que plusieurs communautés d'habitants ont dans les forêts et autres bois dont ils sont voisins, et qui consistent à y mener paitre leurs chevaux et bêtes aumailles dans le temps de la paisson, et leurs cochons dans le temps de la glandée.

L'usage des pâtures grasses ou vives n'appartient qu'au propriétaire ou à celui qui est en ses droits, tel qu'un locataire ou fermier, parce que la pâture de ces fonds est un fruit domanial.

Quand ces pâtures vives ou grasses sont des communes, c'est-à-dire des pâturages appartenans à une communauté d'habitants, l'usage n'en appartient qu'aux habitants qui ont la propriété du fonds ; du reste chaque habitant a la liberté d'y mettre tel nombre de bestiaux qu'il veut, même un troupeau étranger, pourvu qu'il soit hébergé dans le lieu auquel ces communes sont attachées. Voyez COMMUNES et TRIAGE.

Les droits de pâturage et de pacage que les riverains ont dans les forêts voisines, dépendent des titres particuliers des usagers ; et pour en jouir, il faut se conformer aux règles établies par l'ordonnance des eaux et forêts, titre XVIII. et XIX.

Les vaines pâtures sont les chemins publics, places, carrefours, les terres à grain après la dépouille, les jachères, les guérets, les terres en friche, et généralement toutes les terres où il n'y a ni fruits ni semences.

Les prés sont aussi réputés vaines pâtures après la dépouille du foin, supposé que le pré ne soit pas clos et défendu d'ancienneté ; si l'on a coutume d'y faire du regain, ces prés ne sont réputés vaine pâture qu'après la dépouille de la seconde herbe. Voyez REGAIN.

Les landes ou patis sont aussi sujets à la vaine pâture, si ce n'est dans quelques coutumes qui les en exceptent pour le temps de l'herbe, c'est-à-dire depuis la mi-Mars jusqu'en Septembre.

Les bois taillis de trois, quatre ou cinq ans de recrue, plus ou moins, selon la qualité du bois et l'usage du pays, pour le temps pendant lequel les bois sont défensables, les accrues de bois au-delà de leurs bornes, et les bois de haute futaie, pour les herbes qui croissent dessous, sont aussi des endroits de vaine pâture pour les propriétaires et pour leurs fermiers, à la différence de la glandée ou autre récolte de fruits sauvages, qui est toujours réservée au propriétaire, sauf les droits de pâturage et de panage pour ceux qui en ont dans les bois d'autrui.

Le droit de mener les bestiaux dans les vaines pâtures, quoique le fond appartienne à autrui, est un reste de l'ancien droit naturel et primitif, suivant lequel toutes choses étaient communes entre les hommes ; c'est une espèce de droit commun que la plupart des coutumes ont conservé pour la commodité publique, et pour maintenir l'abondance des bestiaux.

Il est pourtant libre en tout temps à celui qui est propriétaire d'une vaine pâture, de la faire clorre pour en empêcher l'usage commun, à moins que la coutume ne contienne quelque disposition contraire.

En vaine pâture, il y a dans quelques coutumes droit de parcours entre les habitants des paroisses voisines, c'est-à-dire que les habitants d'un village peuvent mener leurs bestiaux de clocher à clocher, ou jusqu'au milieu du village voisin, ou du-moins jusqu'aux clos, selon l'usage des lieux.

A l'égard des bêtes blanches, il est d'usage dans les pays où le parcours a lieu, qu'on les peut mener si loin que l'on veut, pourvu qu'elles retournent de jour à leur gîte.

Mais l'usage le plus commun et en même temps le plus naturel et le plus équitable, est que chaque paraisse a son territoire distinct et séparé de celui des paroisses voisines pour le pâturage ; il y a même des endroits où chaque village, chaque hameau, chaque cense a son triage ou canton séparé.

Il y a pourtant une exception à l'égard du propriétaire et de son fermier, lesquels peuvent faire pâturer leurs bestiaux sur toutes les terres qui leur appartiennent, quoiqu'elles soient situées en différentes paroisses ou cantons.

Dans quelques coutumes la vaine pâture suit la haute justice ; et moyennant une redevance que les justiciables paient au seigneur pour son droit de blairie ou permission de vaine pâture, ils y ont seuls droit : les étrangers sont sujets à l'amende et à la prise de leurs bestiaux.

Dans les communes tout habitant a droit de faire paitre ses bestiaux, quand même il n'aurait pas dans la paraisse des terres en propriété ou à ferme ; il n'en est pas de même des terres sujettes à la vaine pâture, le droit de pacage dans ces sortes de pâtures est réel et non personnel ; et comme on n'y a droit que par une société qui se contracte tacitement pour cet objet, chacun n'a droit dans cette sorte de pâturage qu'à proportion de la quantité de terres qu'il posséde lui-même dans le lieu. Chaque propriétaire ou fermier n'a la vaine pâture sur les autres que parce que les autres l'ont sur lui : de sorte que ceux qui n'ont point de terres n'ont pas le droit de mener ni envoyer leurs bestiaux en vaine pâture, tellement qu'il est passé en maxime que qui n'a labourage n'a pascage.

Suivant les arrêts du parlement de Paris, dont la jurisprudence parait avoir été adoptée en ce point par les autres cours, on ne peut envoyer dans les vaines pâtures des moutons qu'à raison d'un par chaque arpent de terre labourable que l'on possède dans la paraisse.

Pour les chevaux et bêtes à cornes, il est de règle, suivant quelques coutumes, qu'on ne peut mettre dans les pâturages publics que les bestiaux de son cru ou ceux qui sont nécessaires à son usage, et en même quantité que l'on en a nourri pendant l'hiver précédent du produit de sa récolte.

Les règles que l'on observe pour le nombre de bestiaux que chacun peut envoyer dans les vaines pâtures, sont pour les nobles comme pour les roturiers, et pour le seigneur même du lieu, sauf son triage dans les communes.

On permet par humanité le pâturage d'une vache ou de deux chèvres aux pauvres gens qui n'ont que l'habitation.

Pour jouir de la vaine pâture sur les terres d'autrui, il faut laisser le tiers de ses terres en jachères, étant juste que chacun contribue au pâturage qui est au commun.

Les vignes, garennes et jardins clos ou non clos, sont toujours en défends, et conséquemment ne sont point sujets à la vaine pâture.

Les terres labourables sont de même en défends tant qu'il y a des grains dessus, soit en semailles, sur pied, en javelles ou en gerbes.

Pour les prés et les bois, il faut observer ce qui a été dit ci-devant.

Il est défendu de mettre dans les pâturages, soit publics ou particuliers, des bêtes attaquées de maladies contagieuses, comme gale, claveau, morve, etc.

Il en est de même des bêtes malfaisantes, telles que les bœufs sujets à frapper de la corne, les chevaux qui ruent ou qui mordent.

Il est aussi défendu de mener dans les prés ni dans les bois, les chèvres, les porcs, les brebis et moutons, et les oies dans les prés ; on excepte seulement pour les porcs le temps de la glandée, pendant lequel on peut les mener dans les bois.

Dans les pâturages qui sont près de la mer, il est permis d'y envoyer les bêtes à laine, mais on observe à cet égard quelques arrangements qui dépendent de l'usage de chaque lieu.

Le propriétaire ou fermier qui trouve des bestiaux en délit sur ses héritages, peut les saisir lui-même sans ministère d'huissier, et les mettre en fourrière, soit dans le parc du seigneur ou dans quelqu'autre lieu public ; il ne doit pas le tuer ni se les approprier ; il doit intenter son action en dommages et intérêts dans le temps prescrit par la coutume, lequel en quelques endroits est de 20 ou 30 jours, en d'autres un an. Voyez l'ordonnance des eaux et forêts, titres XVIII. XIX. XX. XXIII. XXIV. XXV. XXVI. XXVII. et les mots COMMUNAUX et COMMUNES. (A)