S. f. (Jurisprudence) signifie en général ce qui est donné à quelqu'un pour empêcher qu'il ne souffre quelque dommage.

Quelquefois par ce terme, on entend un écrit par lequel on promet de rendre quelqu'un indemne. Ce terme est surtout employé dans ce sens pour exprimer un écrit par lequel on promet d'acquitter quelqu'un de l'événement d'une obligation ou d'une contestation, soit en principal et intérêts, ou pour les frais et dépens.

Indemnité est quelquefois pris pour diminution ; un fermier qui n'a pas joui pleinement de l'effet de son bail, demande au propriétaire une indemnité, c'est-à-dire une diminution sur le prix de son bail.

Indemnité est aussi un terme propre pour exprimer la garantie dû. à la femme par son mari, et sur ses biens, pour les dettes auxquelles elle s'est obligée pour son mari, ou qui sont dettes de communauté, dont elle ne profite pas au cas qu'elle renonce à la communauté. L'hypothèque de la femme pour ces sortes d'indemnités est du jour du contrat de mariage en pays coutumier ; en pays de droit écrit, elle n'a lieu que du jour de l'obligation de la femme, à moins que l'indemnité ne soit stipulée par contrat de mariage.

Indemnité dû. au seigneur est un droit en argent que les gens de main-morte sont tenus de payer au seigneur de qui relèvent les héritages qu'ils acquièrent, à quelque titre que ce sait, pour le dédommager de ce que ces héritages sont pour ainsi dire hors du commerce, attendu que les gens de mainmorte cherchent rarement à aliéner, et qu'ils ne le peuvent faire que difficilement, à cause des formalités nécessaires pour de telles aliénations, au moyen de quoi, le seigneur est privé des droits qu'il recevrait à chaque mutation, et autres droits casuels qu'il pourrait avoir si les héritages n'étaient pas possédés par des gens de main-morte.

Le seigneur a néanmoins toujours un droit de relief à chaque mutation d'homme vivant et mourant.

Le droit d'amortissement que les gens de mainmorte paient au roi, n'empêche pas qu'ils ne doivent aussi un droit d'indemnité, soit au roi, si l'acquisition est dans sa mouvance, ou au seigneur particulier dans la mouvance duquel est l'héritage ; et s'il y a un autre seigneur qui ait la justice, le droit d'indemnité se partage entr'eux, de manière que celui qui a la justice prend la dixième partie du droit d'indemnité, pour le dédommager des droits de deshérence, confiscation, et autres droits que donne la justice ; le seigneur de fief prend le surplus du droit.

Quant à la fixation du droit d'indemnité, elle est différente selon les pays et les coutumes.

Au parlement de Paris on règle ce droit au cinquième du prix de l'héritage ; on observe la même chose dans toutes les coutumes qui n'ont point de disposition contraire.

La coutume de Sens règle ce droit à la valeur des fruits de trois années de l'héritage, ou au sixième du prix de l'acquisition, au choix et option des gens de main-morte.

En Normandie l'indemnité est du tiers pour les fiefs et du quart pour les rotures.

En Dauphiné on l'évalue à un droit de lods de vingt ans en vingt ans.

Mais ordinairement les gens de main-morte ont soin de prévenir le seigneur du dessein qu'ils ont d'acquérir et de composer avec lui.

Ce payement du droit d'indemnité ne peut être demandé aux gens de main-morte qu'après qu'ils ont obtenu des lettres d'amortissement, étant incertain jusques-là s'ils resteront possesseurs de l'héritage.

Quand un héritage est donné par testament à des gens de main-morte, c'est aux héritiers du testateur à payer le droit d'indemnité : on suppose que le testateur en leur donnant l'héritage, a eu intention que ses héritiers fissent tout ce qui serait nécessaire pour les mettre en état de le posséder ; suivant la régle, qui vult finem, vult et media ; mais quand l'héritage est donné entre-vifs, c'est aux gens de main-morte à payer le droit d'indemnité : on ne peut pas dans ce cas admettre la même présomption que dans le précédent, parce que si le donateur avait voulu payer le droit d'indemnité, il l'aurait fait lui-même de son vivant.

Le payement du droit d'indemnité est sujet à prescription par trente ans contre un seigneur temporel, et par quarante ans contre l'Eglise.

Les gens de main-morte qui ont payé le droit d'indemnité ne laissent pas d'être tenus d'acquitter les cens et rentes dû. sur l'héritage.

Il n'est point dû d'indemnité pour l'acquisition d'un héritage allodial.

Les gens de main-morte n'en doivent pas non-plus lorsqu'ils acquièrent de la main du seigneur ou de son consentement.

Voyez Dumoulin sur l'art. 51. de la nouv. cout. de Paris, gl. XIe n. 68 ; la déclaration du 21. Novembre 1724 ; l'arrêt du conseil du 9. Décembre 1727 ; Bacquet, des amortissements, ch. liij. et ljv. D'Olive, liv. II. ch. XIIe et suiv. Boniface, tome I. liv. II. tit. 31. ch. xxj. Salvaing, de l'usage des fiefs, ch. ljx. Hevin-sur-Frain, pag. 259 ; Du fait, liv. I. ch. ccxlj. et liv. III. ch. ccxlix.

Voyez aussi AMORTISSEMENT, HOMME VIVANT ET MOURANT, et MAIN-MORTE. (A)