S. m. (Jurisprudence) est un ecclésiastique qui fait la fonction de partie publique dans une officialité ou dans quelqu'autre tribunal ecclésiastique, tels que sont les chambres souveraines et diocésaines du clergé, et à Paris la juridiction de m. le chantre.

On appelle aussi quoiqu'improprement, promoteur celui qui dans les assemblées du clergé est chargé de faire les requisitoires.

Les archidiacres étaient autrefois comme les promoteurs de toutes les églises, omnium negotiorum ecclesiarum promotores, dit le canon 57 du synode de Laodicée.

Mais le terme promotores ne doit pas être pris en cet endroit pour ce que nous entendons aujourd'hui par la fonction de promoteur, cette fonction différant de celle d'archidiacre, comme celle de procureur d'office diffère de l'état de juge.

Un promoteur, dans le sens qu'on l'entend aujourd'hui, est donc proprement le procureur d'office d'une officialité ou autre tribunal ecclésiastique ; et en effet dans plusieurs endroits on qualifiait autrefois de promoteurs tous ceux qui exerçaient le ministère public, même dans les tribunaux séculiers, comme dans la coutume de Senlis, où les procureurs fiscaux sont encore nommés promoteurs d'office.

Les promoteurs des tribunaux ecclésiastiques ont donc été établis à l'instar des promoteurs ou procureurs d'office des tribunaux séculiers.

Il y a aussi dans quelques officialités un vice-promoteur pour suppléer en cas d'absence, ou autre empêchement du promoteur.

L'établissement de ces officiers est fort ancien : ils ont été institués pour faire informer d'office contre les ecclésiastiques délinquans, et pour maintenir les droits, libertés et immunités de l'Eglise.

Comme quelques-uns d'entr'eux emportés par un zèle indiscret attiraient toutes les causes au tribunal des officiaux, et par ce moyen fatiguaient les sujets du roi, Nicolas de Clamengit, archidiacre de Bayeux, en fit ses plaintes sous le règne de Charles VI. et même avec trop d'aigreur, dici non potest, s'écriait-il, quantùm mala faciant scelerati isti exploratores criminum quos promotores vocant, &c.

Pour arrêter ces entreprises des promoteurs, on créa des procureurs du roi en cour d'église, pour veiller à ce que l'on n'entreprit rien sur la justice royale, de sorte qu'il y avait proprement alors deux promoteurs dans les officialités et autres tribunaux ecclésiastiques : l'un royal, qu'on appelait procureur du roi en cour d'église ; l'autre ecclésiastique, qui est celui que l'on appelle encore présentement promoteur.

Français I. par un règlement de l'an 1535 fait pour le pays de Provence, ordonna, art. 27, que le procureur du Roi en cour d'église pourrait visiter, une fois la semaine, les papiers et registres des procureurs et greffiers des cours ecclésiastiques ; et le même prince, par un autre règlement de l'an 1540 fait pour la Normandie, ordonna expressément à ses procureurs ès cours ecclésiastiques d'obvier aux usurpations et entreprises des promoteurs.

Ce qui est à remarquer, c'est que comme les procureurs du roi en cour d'église avaient séance aux audiences des officialités, et droit de visiter les registres des promoteurs et greffiers de ces tribunaux pour voir si l'on n'avait rien entrepris sur la juridiction royale, de même aussi les promoteurs de cour d'église avaient la liberté d'assister aux audiences des bailliages et sieges présidiaux, pour y revendiquer les sujets et justiciables des officialités, et requérir le renvoi des causes qui appartenaient à leur juridiction. Nicolas Frerot, avocat au parlement de Paris, sur la conférence des ordonnances, dit qu'en qualité de promoteur de l'évêque de Chartres, il a toujours eu séance aux audiences du bailliage et siege présidial de Chartres.

Mais cette assistance du promoteur aux audiences des tribunaux séculiers n'a plus lieu depuis que, par édit de 1573, il a été créé un office de conseiller-clerc dans chaque présidial, afin qu'en qualité d'ecclésiastique, il tienne la main à ce que l'on n'entreprenne point sur la juridiction ecclésiastique ; mais le promoteur a toujours conservé le droit de revendiquer les causes criminelles qui concernent les personnes ecclésiastiques toutes les fois qu'il en a connaissance. Cette révendication se forme par une requête que le promoteur présente à un juge royal, lequel est tenu d'y faire droit en tout état de cause, quand même il serait déjà intervenu un jugement, pourvu que la révendication soit formée avant l'exécution.

Lorsque la révendication est adoptée, et que le procès est pendant devant un juge royal inférieur, l'accusé est transféré dans les prisons du juge d'église, et l'instruction recommence de nouveau par les deux juges conjointement ; mais dans le cas où l'affaire serait pendante à un tribunal souverain, l'accusé n'est point transféré dans les prisons du juge d'église, et l'évêque, pour user de son droit, n'a d'autre voie que de donner des lettres de grand-vicaire ad hoc à un conseiller-clerc du tribunal. Voyez ce qui a été dit à ce sujet au mot OFFICIAL.

En Espagne les promoteurs sont appelés fiscales curiae, procureurs fiscaux, fiscales rei ecclesiae procuratores, familia fisci.

Jean Cheme, en son commentaire sur le style de la cour ecclésiastique de Bourges, tit. 1, in verbo promotoribus, qualifie le promoteur procuratorem tribunalis et juridictionis episcopalis, qui procurator fiscalis etiam hodiè appelatur in curiis ecclesiasticis.

Aufrerius, sur les quest. 229 et 275 des décisions de la chapelle archiépiscopale de Toulouse, remarque qu'étant official de la cour archiépiscopale de Toulouse, le sénéchal de la ville lui défendit de donner à son promoteur la qualité de procureur fiscal, parce que l'église n'a point de fisc : il ajoute qu'il était d'avis contraire, et se fonde sur la glose du chapitre quia propter, de concessione praebendae, in verbo praeter ; mais il convient que nonobstant ses raisons le juge-mage de Toulouse défendit d'employer dans les actes de la cour épiscopale cette qualité de fiscal, qu'il y eut appel de cette sentence, et que cet appel était encore pendant et indécis au parlement de Toulouse au temps qu'il écrivait.

Fevret, en son traité de l'abus, dit qu'aujourd'hui on est plus curieux que jamais de conserver les droits royaux. On ne souffrirait pas qu'un promoteur de la cour d'église prit la qualité de fiscal, et que Messieurs les gens du Roi l'empêcheraient.

Le même auteur remarque qu'avant l'ordonnance de 1539, les promoteurs des officialités de Bourgogne se qualifiaient providus vir et procurator fiscalis, promotorquè causarum officii sedis episcopalis, mais que depuis ils cessèrent de prendre cette qualité de procurator fiscalis, et se qualifièrent promotor procuratorque causarum, ainsi qu'il est dit l'avoir vérifié par plusieurs anciens registres des officialités qu'il a été curieux de voir.

Les promoteurs des officialités ordinaires de chaque diocèse sont nommés par l'évêque. Dans les métropoles l'archevêque nomme deux promoteurs : un pour l'officialité ordinaire, un pour l'officialité métropolitaine ; et s'il est primat, comme l'archevêque de Lyon, il en nomme un troisième pour l'officialité primatiale ; mais ces différentes fonctions peuvent être réunies en un même sujet.

Ceux des chambres diocésaines sont nommés par l'évêque, et ceux des chambres souveraines du clergé sont nommés par le clergé de la province.

Les chapitres et archidiacres et autres dignitaires qui ont quelque portion de la juridiction ecclésiastique contentieuse, nomment un promoteur pour leur juridiction.

Le chapitre de Paris est dans l'usage de procéder tous les ans à la nomination d'un promoteur et des autres officiers de sa juridiction.

Les ordres réguliers ont aussi leur promoteur général de l'ordre, lequel peut être nommé par le général de l'ordre, de sa seule autorité, et sans le consentement du chapitre général.

On a quelquefois mis en doute si un laïc peut être promoteur. Le canon laïci, question 7, ne permet pas à un laïc d'accuser les gens d'église ; il y a seulement certains cas remarqués par Gigas en son traité de crim. les. majest. qu. 15. Plusieurs conciles particuliers de France et d'Espagne, savoir, de Tours, de Tolede et de Séville ont désiré que les promoteurs qu'ils appellent fiscales fussent prêtres ou qu'ils fussent promus à la prêtrise dans six mois. Bernard de Luco dit qu'il faut que le promoteur soit prêtre, ou du moins lié aux ordres sacrés ; aussi Fevret remarque-t-il que l'évêque de Châlons ayant en 1609 institué pour promoteur un procureur du bailliage de Châlons qui était une personne séculière, il y en fut interjeté appel comme d'abus.

Le promoteur ne peut être en même temps grand pénitencier : ces deux fonctions sont incompatibles, parce que celle de promoteur est de poursuivre la punition des crimes : celle de pénitencier au contraire est de les absoudre.

Mais on peut nommer pour promoteur un ecclésiastique pourvu d'un bénéfice, curé ou autre requérant résidence, il en est même dispensé tant qu'il exerce la charge de promoteur.

La fonction de promoteur consiste à requérir dans le tribunal ecclésiastique tout ce qui parait nécessaire et convenable pour la manutention de la discipline ecclésiastique.

Il est aussi de leur devoir, comme on l'a dit, de poursuivre la punition des crimes commis par les ecclésiastiques. L'ordonnance de 1629, art. 28, dit que les promoteurs des sieges ecclésiastiques, tant inférieurs que supérieurs, prendront en main les causes criminelles qui se présenteront en leurs sieges, et les poursuivront jusqu'au jugement d'icelles, encore qu'il n'y ait point de partie civîle ou instigante, à ce que les crimes ne demeurent pas impunis.

Le promoteur ne peut pas absoudre ni excommunier ; car ce serait faire office de juge avec celui d'accusateur.

Ils peuvent d'office requérir qu'il soit informé des délits publics et manifestes des clercs ; mais pour les crimes cachés, il faut qu'ils en aient des indices ou conjectures si légitimes, qu'ils soient pour ainsi dire, obligés de se rendre partie ; et pour former leur accusation de ces sortes de crimes cachés, il faut qu'ils aient des délateurs et dénonciateurs qui puissent répondre des dommages et intérêts de celui qui aura été renvoyé absous, autrement ils y seraient eux-mêmes condamnés au cas que l'accusation se trouvât mal-fondée.

Ils doivent nommer le dénonciateur, s'ils en sont requis ; et si le juge d'église les en déchargeait, il y aurait abus ; mais on ne peut les obliger de le faire qu'après le jugement du procès.

Le promoteur ne doit pas être présent aux interrogatoires des accusés, ni au récolement et à la confrontation des témoins, autrement la procédure serait nulle et abusive.

Lorsque le promoteur est seul partie, l'évêque doit fournir les frais du procès-criminel qui s'instruit d'office, sauf à l'évêque à recouvrer ces frais contre le condamné après le jugement, s'il a de quoi répondre.

En cas d'appel, l'accusé doit être conduit au juge supérieur, aux frais de l'évêque dont le promoteur a intenté le procès ; et si l'official, à la requête ou promoteur, décernait un exécutoire contre l'accusé pour les frais de sa conduite en cas d'appel, il y aurait abus.

Le promoteur qui succombe dans ses demandes et poursuites, ne peut être condamné en l'amende ni aux dépens, sinon en cas que l'accusation se trouvât calomnieuse, et qu'elle fût du fait du promoteur. L'édit de 1695 concernant la juridiction ecclésiastique, art. 43, porte qu'à l'égard des ordonnances et jugements que les prélats ou leurs officiaux auront rendus, et que les promoteurs auront requis dans la juridiction contentieuse, ils ne pourront être pris à partie, ni intimés en leurs propres et privés noms, si ce n'est en cas de calomnie apparente, et lorsqu'il n'y aura aucune partie capable de répondre des dépens, dommages et intérêts, qui ait requis, ou qui soutienne leurs ordonnances et jugements, et qu'ils ne seront tenus de défendre à l'intimation qu'après que les cours l'auront ainsi ordonné en connaissance de cause.

On tenait autrefois que l'accusé pouvait être condamné envers le promoteur aux frais de justice et de la visite du procès, ainsi qu'il fut jugé par un arrêt du 7 Septembre 1644, remarqué par Fevret ; mais suivant la dernière jurisprudence la partie publique ne peut obtenir aucune condamnation de dépens, de même qu'on n'en peut pas non plus obtenir contre elle, sinon en cas de calomnie et vexation marquée : ce qui doit s'appliquer aux promoteurs, de même qu'aux autres parties publiques. Voyez Chopin de sacr. polit. lib. II. tit. IIe Charondas, rep. liv. I. ch. xiv. Papon, liv. XXVIII, tit. 2. arrêt 28, les mém. du clergé, et ci-devant les mots OFFICIAL, OFFICIALITE, PROCUREUR DU ROI EN COUR D'EGLISE. (A)