S. f. (Jurisprudence) du latin contumacia, qui signifie desobéissance ; en terme de Pratique est le refus que quelqu'un fait de comparaitre en justice. Se laisser contumacer, c'est laisser faire contre soi plusieurs poursuites, et laisser obtenir des jugements par défaut.

Chez les Romains on appelait contumax celui qui avait refusé de comparaitre nonobstant trois citations consécutives, ou une seule citation péremptoire. Il n'était pas d'usage de faire le procès au contumax dans la première année ; on annotait seulement ses biens, et s'il mourait dans l'année, il mourait integri status : si c'était après l'année, il était réputé coupable. Lorsqu'il se représentait pour se défendre, il devait refonder les dépens avant d'être écouté ; on l'obligeait même aussi de donner caution qu'il poursuivrait le jugement du procès. Il ne pouvait point appeler, ou s'il appelait, le juge d'appel connaissait de la contumace. Il pouvait être contraint par trois voies différentes, par emprisonnement, par saisie de ses biens, et par une condamnation définitive ; le juge pouvait même ordonner la démolition de sa maison. Il était réputé infame de fait en matière criminelle, mais non pas en matière civile. Son absence était regardée comme un aveu du fait dont était question ; mais il n'était pas pour cela condamné de plein droit, il fallait que la contumace fût jugée, et quoiqu'absent on ne devait le condamner définitivement que quand il avait tort. Il ne pouvait recouvrer la possession de ses biens, même en se représentant, à moins que les choses ne fussent encore entières, et qu'il ne fit la refusion des frais de contumace. La contumace était excusée lorsque l'absent était malade, ou qu'il était occupé ailleurs à une cause plus importante, ou à un tribunal supérieur. On ne condamnait même jamais l'absent, quand il s'agissait de peine capitale. L. absentem, ff. de poenis.

En France les principes sur la contumace sont différents. On appelle parmi nous frais de contumace en matière civile, ceux qui ont été faits pour faire juger un défaut faute de comparoir, ou faute de défendre. On est reçu opposant en tout temps à ces sortes de jugements par défaut, en refondant, c'est-à-dire remboursant les frais de contumace.

En matière criminelle, on appelle contumace tout ce qui s'appelle défaut en matière civile.

Lorsque l'accusé est decreté et ne se représente point, il est contumax, et l'on instruit contre lui la contumace.

La forme de procéder contre les absens ou contumax en matière criminelle, est prescrite par l'ordonnance de 1670, tit. 10 et 17, et par une déclaration du mois de Décembre 1688. L'instruction qui se fait contre un accusé présent, et celle qui se fait par contumace, sont à peu-près semblables en général, si ce n'est que dans la première, en parlant de l'accusé, on ajoute ces mots, ci-présent ; c'est pourquoi Menage disait en badinant que ce qui déplaisait le plus à l'accusé de tout un procès criminel, étaient ces deux mots, ci-présent.

Le decret d'assigné pour être oui est converti en ajournement personnel, et l'ajournement personnel est converti en decret de prise de corps, lorsque l'accusé ne comparait pas dans le délai réglé par le decret, suivant la distance des lieux.

Lorsque le decret de prise de corps ne peut être exécuté contre l'accusé, on fait perquisition de sa personne, et ses biens sont saisis et annotés, sans qu'il soit besoin d'aucun jugement.

La perquisition se fait au domicîle ordinaire de l'accusé ; ou si l'on est encore dans les trois mois que le crime a été commis, elle peut être faite au lieu de sa résidence, s'il en a une dans le lieu où s'instruit le procès, et on lui laisse au même endroit copie du procès-verbal de perquisition.

Si l'accusé n'a ni domicîle connu, ni résidence dans le lieu du procès, on affiche la copie du decret à la porte de l'auditoire.

La saisie et annotation des biens se fait en la même forme que les saisies et exécutions en matière civile.

On saisit aussi les fruits des immeubles du contumax, et on y établit un commissaire, qui ne doit être parent ni domestique des receveurs du domaine, ou des seigneurs auxquels appartient la confiscation.

Après la saisie et annotation, l'accusé est assigné à quinzaine à son domicile. Si l'on est encore dans les trois mois que le crime a été commis, on peut l'assigner dans la maison où il résidait en l'étendue de la juridiction ; hors ce cas, et s'il n'a point de domicîle connu, on affiche l'explait à la porte de l'auditoire.

Faute de comparoir dans la quinzaine, on l'assigne par un seul cri public à la huitaine franche.

Ce cri se fait à son de trompe en place publique, et à la porte du tribunal et devant le domicîle ou résidence de l'accusé.

Après l'échéance des assignations, la procédure est communiquée au ministère public, qui donne des conclusions préparatoires.

Si la procédure se trouve valable, le juge ordonne que les témoins seront recollés, et que le recolement vaudra confrontation.

Après le recolement, le ministère public donne ses conclusions définitives.

Enfin intervient le jugement définitif, qui déclare la contumace bien instruite, en adjuge le profit, et prononce la condamnation ou absolution de l'accusé.

S'il y a lieu de prononcer contre lui quelque peine capitale, c'est-à-dire qui doive emporter mort naturelle ou civile, on la prononce contre lui, quoiqu'absent, à la différence de ce qui se pratiquait chez les Romains. Cet usage est fort ancien parmi nous, comme on en peut juger par un passage de Matthieu Paris dans la vie de Jean Sans-terre, page 196. où il dit que " si l'accusé ne se représente pas, et n'a point d'excuse légitime, il est tenu pour convaincu, et est condamné à mort " (dans le cas de meurtre dont il parle).

Les condamnations à mort par contumace s'exécutent par effigie ; et celles des galeres, amende honorable, bannissement perpétuel, flétrissure et du fouet, sont écrites dans un tableau exposé en place publique, mais sans effigie. Les autres condamnations par contumace sont seulement signifiées avec copie au domicîle ou résidence du condamné, sinon affichées à la porte de l'auditoire.

Autrefois les condamnations par contumace s'exécutaient réellement contre le condamné, dès qu'il était pris. Dans la suite on distingua s'il se représentait volontairement ou forcément ; dans le dernier cas on l'exécutait sans autre forme de procès, mais non pas dans le premier cas.

Présentement, soit que le contumax se représente volontairement, ou qu'il soit arrêté prisonnier après le jugement, même après les cinq années, soit dans les prisons du juge qui l'a condamné, ou autres prisons, la contumace est mise au néant en vertu de l'ordonnance, sans qu'il soit besoin pour cet effet de jugement, ni d'interjeter appel de la sentence de contumace.

Les frais de la contumace doivent être payés par l'accusé ; cependant on ne doit pas, faute de payement, surseoir à l'instruction ou jugement du procès.

On procede ensuite à l'interrogatoire de l'accusé, et à la confrontation des témoins.

La déposition de ceux qui sont décédés avant le recolement, ne doit point être lue lors de la visite du procès, si ce n'est que ces dépositions aillent à la décharge de l'accusé.

Si le témoin qui a été recollé, est décédé ou mort civilement pendant la contumace, ou qu'il soit absent pour cause de condamnation aux galeres, bannissement à temps ou autrement, sa déposition subsiste, et on en fait confrontation littérale à l'accusé, et en ce cas les juges n'ont point d'égard aux reproches, s'ils ne sont justifiés par titres.

Lorsque l'accusé s'évade des prisons depuis son interrogatoire, on ne le fait point ajourner ni proclamer à cri public ; le juge ordonne que les témoins seront ouis et recollés, et que le recolement vaudra confrontation.

On fait aussi le procès à l'accusé pour le crime de bris de prison, par défaut et contumace.

Quand le condamné se représente ou est constitué prisonnier dans l'année de l'exécution du jugement de contumace, on lui accorde main-levée de ses meubles et immeubles ; et le prix provenant de la vente de ses meubles lui est rendu, à la déduction des frais de justice, et en consignant l'amende à laquelle il a été condamné.

L'état du condamné est en suspens pendant les cinq années qui lui sont accordées pour purger la contumace ; de sorte que s'il décede pendant ce temps, les dispositions qu'il a faites sont valables ; il recueille et transmet à ses héritiers les biens qui lui sont échus.

Si ceux qui sont condamnés ne se représentent pas, ou ne sont pas constitués prisonniers dans les cinq ans de l'exécution de la sentence de contumace, les condamnations pécuniaires, les amendes et confiscations sont réputées contradictoires, et ont le même effet que si elles étaient ordonnées par arrêt ; ils peuvent cependant être reçus à ester à droit, en obtenant à cet effet en chancellerie des lettres pour purger la contumace ; et si le jugement qui intervient ensuite, porte absolution, ou n'emporte pas de confiscation, les meubles et immeubles qui avaient été confisqués sur les accusés, leur sont rendus en l'état qu'ils se trouvent, sans pouvoir prétendre aucune restitution des amendes, intérêts civils, ni des fruits des immeubles.

Ceux qui ont été condamnés par contumace à mort, aux galeres perpétuelles, ou au bannissement perpétuel hors du royaume, et qui décedent après les cinq ans, sans s'être représentés ou avoir été constitués prisonniers, ne sont réputés morts civilement que du jour de l'exécution de la sentence de contumace ; de sorte que si la condamnation est à mort, il faut que la sentence soit exécutée par effigie ; si c'est aux galeres perpétuelles ou au bannissement perpétuel, il faut que la condamnation ait été affichée dans un tableau en place publique : une simple signification de ces sortes de condamnations n'est pas regardée comme une exécution du jugement, et ne suffit pas pour faire déchoir le condamné de son état.

Quand la condamnation par contumace a été exécutée, le crime, c'est-à-dire la peine prononcée par le jugement, ne se prescrit que par trente ans ; au lieu que si la condamnation n'a pas été exécutée, le crime ne se prescrit que par vingt ans.

Mais cette prescription ne remet au condamné que la peine corporelle, et ne le réhabilite pas dans les effets civils, lorsqu'il les a perdus par l'exécution de la sentence.

Les receveurs du domaine, les seigneurs, ou autres auxquels la confiscation appartient, peuvent pendant les cinq ans percevoir les fruits et revenus des biens des condamnés, des mains des fermiers, redevables et commissaires ; mais ils ne peuvent s'en mettre en possession ni en jouir par leurs mains, à peine du quadruple, et des dépens, dommages et intérêts des parties.

Le Roi ni les seigneurs haut-justiciers ne peuvent faire aucun don des confiscations qui leur appartiennent, pendant les cinq années de la contumace, sinon pour les fruits des immeubles seulement.

Après les cinq années expirées, les receveurs du domaine, les donataires et les seigneurs auxquels la confiscation appartient, doivent se pourvoir en justice pour avoir permission de s'en mettre en possession ; et avant d'y entrer ils doivent faire dresser procès-verbal de la qualité et valeur des meubles et effets mobiliers, à peine contre les donataires et seigneurs d'être déchus de leur droit, et contre les receveurs du domaine, de 10000 livres d'amende. Voyez au code, liv. VII. tit. xliij. et ff. et cod. ubique passim, le stîle criminel ; la conférence de Bornier, le traité des matières criminelles de la Combe, et ci-apr. CONTUMAX (A)